Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
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{T 0/2}
4A_477/2013
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Arrêt du 28 janvier 2014
Ire Cour de droit civil
Composition
Mmes et M. la Juge fédérale Klett, Présidente, Niquille et Ch. Geiser, Juge suppléant.
Greffier: M. Piaget.
Participants à la procédure
X.________ SA, représentée par Me Skander Agrebi,
recourante,
contre
Z.________, représentée par
Me Brigitte Lembwadio Kanyama,
intimée.
Objet
contrat de travail, salaire,
recours contre l'arrêt de la Cour civile du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel du 22 août 2013.
Faits:
A.
Par contrat de travail conclu le 13 décembre 2006, Z.________ a été engagée, en qualité de veilleuse dès le 20 novembre 2006 (pour six veilles par mois), par X.________ SA.
Son salaire horaire de base a été fixé à 17 fr.72, avec en sus 4.78% pour les jours fériés, 8.33% pour les vacances, ainsi que 8.33% pour le 13e salaire. Une indemnité de 10 fr. pour chaque veille avait en outre été prévue.
Le contrat de travail de l'employée est complété par les " Conditions générales de travail pour le personnel et Directives d'application (ci-après: les conditions générales). L'art. 5.1.2 des conditions générales prévoit que " le salaire de base minimum est fixé par la Convention d'Etat (CCT21) " (applicable dès le 1er janvier 2007).
Selon la CCT21, le salaire de base minimum pour la classe 2 échelon 1 (correspondant à la fonction de l'employée) était de 20 fr.70 de l'heure pour 2007, 20 fr.80 pour 2008, 21 fr.40 pour 2009 et 21 fr.25 pour 2010.
L'employée a donné son congé pour le 31 août 2010.
B.
Après l'échec de la conciliation, l'employée a saisi le Tribunal civil du Littoral et du Val-de-Travers, le 14 juin 2012, d'une demande dirigée contre son ex-employeuse concluant au paiement de 20'668 fr.50 (pour la période du 1er janvier 2007 au 31 août 2010), prétention réduite à 19'598 fr.70 lors de l'audience du 13 décembre 2012.
Elle a soutenu que la défenderesse lui doit 12'156 fr.65 de différence sur le salaire de base (l'employeuse n'ayant pas adapté son salaire, le 1er janvier 2007, aux conditions fixées par la CCT21), 1'823 fr.80 pour les indemnités de nuit, 1'969 fr.20 correspondant au temps de repos selon l'art. 17b al. 2 LTr, 813 fr.54 pour les indemnités pour jours fériés, 1'417 fr.73 pour les indemnités vacances et 1'417 fr.73 pour le 13e salaire.
La défenderesse a conclu à l'incompétence du tribunal saisi et, subsidiairement, au rejet de la demande.
Après avoir admis sa compétence, par décision incidente du 28 septembre 2012, le Tribunal civil, par jugement du 5 février 2013, a donné raison à l'employée, condamnant la défenderesse à payer à celle-ci la somme de 19'231 fr.69, avec intérêts à 5% l'an dès le 30 septembre 2010.
La Cour d'appel civile du Tribunal cantonal neuchâtelois, par arrêt du 22 août 2013, a admis très partiellement l'appel de la défenderesse et, statuant à nouveau, condamné celle-ci à verser à la demanderesse la somme de 18'900 fr.90 brut.
L'autorité cantonale n'est pas parvenue à établir la volonté réelle et commune des parties s'agissant du salaire minimal depuis janvier 2007. Procédant à l'interprétation selon le principe de la confiance, elle a retenu que les parties entendaient, par le renvoi contenu à l'art. 5.1.2 des conditions générales, appliquer la CCT21 prévoyant une rémunération minimale supérieure depuis 2007. Elle a également jugé que l'employée avait droit à un supplément salarial pour le temps de repos compensatoire qui aurait dû lui être accordé en vertu de l'art. 17b al. 2 LTr.
C.
L'employeuse exerce un recours en matière civile au Tribunal fédéral contre l'arrêt cantonal neuchâtelois. Elle conclut, avec suite de frais et dépens, à l'annulation des décisions cantonales et à ce que la demande de l'employée soit déclarée mal fondée, subsidiairement à ce que la cause soit renvoyée au premier juge pour nouvelle décision. La recourante invoque une violation du droit fédéral ( art. 6, 18 CO et art. 17b al. 2 LTr), ainsi qu'un établissement inexact des faits (art. 97 al. 1 LTF).
L'intimée conclut au rejet du recours, avec suite de frais et dépens.
L'effet suspensif sollicité par la recourante a été octroyé par ordonnance présidentielle du 24 octobre 2013.
Considérant en droit:
1.
1.1. Interjeté par la partie qui a succombé dans ses conclusions libératoires (art. 76 al. 1 LTF) et dirigé contre un arrêt final (art. 90 LTF) rendu en matière civile (art. 72 al. 1 LTF) par un tribunal supérieur statuant sur recours en dernière instance cantonale (art. 75 LTF) dans une affaire pécuniaire en matière de droit du travail dont la valeur litigieuse atteint le seuil de 15'000 fr. (art. 74 al. 1 let. a LTF), le recours est en principe recevable puisqu'il a été déposé dans le délai ( art. 48 al. 1 et 100 LTF ) et la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi.
1.2. Le recours en matière civile peut être interjeté pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF . Il peut donc également être formé pour violation d'un droit constitutionnel (ATF 136 I 241 consid. 2.1 p. 247; 136 II 304 consid. 2.4 p. 313).
1.3. Par exception à la règle selon laquelle il applique le droit d'office, le Tribunal fédéral ne peut entrer en matière sur la violation d'un droit constitutionnel ou sur une question relevant du droit cantonal ou intercantonal que si le grief a été invoqué et motivé de manière précise par la partie recourante (art. 106 al. 2 LTF).
1.4. Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte - ce qui correspond à la notion d'arbitraire (ATF 136 II 304 consid. 2.4 p. 314; 135 III 127 consid. 1.5 p. 130) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF).
Il incombe à la partie recourante, qui entend s'écarter des constatations de l'autorité précédente, d'expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions d'une exception prévue par l'art. 105 al. 2 LTF seraient réalisées, faute de quoi il n'est pas possible de tenir compte d'un état de fait qui diverge de celui contenu dans la décision attaquée (ATF 133 IV 286 consid. 1.4 p. 287 s. et consid. 6.2 p. 288). Une rectification de l'état de fait ne peut être demandée que si elle est de nature à influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF).
2.
2.1. La recourante invoque une constatation inexacte des faits, soit un établissement arbitraire (art. 9 Cst.).
Dans ses diverses observations, la recourante ne conteste pas le point de fait pertinent en l'espèce, soit la constatation selon laquelle l'art. 5.1.2 des conditions générales dispose expressément que " le salaire de base minimum est fixé par la Convention d'Etat (CCT21) ". Les arguments qu'elle présente, dans une autre perspective, en lien avec l'arrêt 2C_728/2011 et le point 2.1 des conditions générales ne sont pas propres à influer sur le sort de la cause (cf. supra consid. 1.4).
La seule critique soulevée, sous le couvert de l'établissement arbitraire des faits, en rapport avec l'art. 5.1.2 des conditions générales vise en réalité l'interprétation qu'en a effectuée la cour cantonale (cf. infra consid. 2.3).
Enfin, affirmer qu'une constatation cantonale ne " se fonde sur aucun élément au dossier " ou qu'une cause parallèle (mentionnée par la cour précédente) " n'est pas identique à celle qui occupe la présente procédure " n'équivaut pas à une démonstration respectant les exigences tirées des art. 105 al. 2 et 106 al. 2 LTF.
2.2. Revenant sur l'interprétation du contrat, la recourante laisse entendre que c'est en violant le droit fédéral que la cour cantonale est arrivée à la conclusion que la volonté réelle des parties ne pouvait pas être établie.
Déterminer la commune et réelle intention des parties (interprétation subjective) est une question de fait (ATF 135 III 410 consid. 3.2 p. 412 s.). La recourante ne prétend toutefois pas que c'est en écartant certains faits de manière arbitraire (art. 9 Cst.) que l'autorité précédente n'a pas pu établir la volonté réelle des parties. La critique soulevée dans ce contexte est donc irrecevable (cf. supra consid. 1.4).
2.3. Revenant à la charge sous l'angle de l'application du principe de la confiance (interprétation objective), la recourante reproche à la cour cantonale d'avoir ignoré le comportement de l'intimée depuis le moment de la conclusion du contrat jusqu'à celui de la résiliation des rapports de travail.
S'il est possible de prendre en compte les circonstances postérieures à la conclusion du contrat d'assurance pour établir la volonté subjective des parties (ATF 118 II 365 consid. 1 p. 366 et les références), les circonstances déterminantes, sur la base desquelles le juge doit rechercher la volonté objective des parties, sont celles qui ont précédé ou accompagné la manifestation de volonté (ATF 131 III 377 consid. 4.2. p. 382 et l'arrêt cité), à l'exclusion des événements postérieurs (arrêt 4C.321/2005 du 27 février 2006 consid. 3.1). La critique présentée par la recourante est dès lors sans consistance.
S'agissant de l'argument fondé sur une acceptation tacite de l'employée (cf. art. 6 CO), il est dénué de toute pertinence. L'acceptation à laquelle il est fait référence dans cette disposition présuppose l'existence d'une offre reconnaissable émanant de l'autre partie, soit en l'espèce de l'employeuse (arrêt 4A_443/2010 du 26 novembre 2010 consid. 10.1.4 et les références). Tel n'est pas le cas en l'espèce. Dans le contrat daté de décembre 2006, les parties sont convenues de se référer, dès le 1er janvier 2007, aux grilles salariales de la CCT21. L'employeuse s'est écartée du salaire minimal prévu par la convention et a continué à appliquer le tarif initial (versé en 2006) sans donner la moindre information à l'employée.
Le simple fait que l'employée ait reçu pendant presque quatre ans un salaire inférieur à celui convenu entre les parties n'implique en soi, contrairement à ce que pense la recourante, aucune acceptation tacite du tarif réduit. En effet, il n'est pas rare qu'un employé, durant le rapport de travail, répugne à faire valoir l'intégralité de ses prétentions par crainte de perdre son poste. Il a été jugé que le simple écoulement du temps pendant le délai de prescription ne peut être interprété ni comme une renonciation à la prétention, ni comme son exercice abusif (ATF 110 II 273 consid. 2 p. 274 s.). Qu'un travailleur ne fasse pas valoir sa prétention durant le rapport de travail ne permet pas de déduire, pour les mêmes raisons, que cette prétention n'existe pas (arrêt 4A_452/2012 du 3 décembre 2012 consid. 2.3).
Quant à la critique émise par la recourante en rapport avec l'art. 5.1.2 des conditions générales qui, selon elle, ne concerne que le personnel soignant rémunéré mensuellement (l'employée n'étant donc pas concernée par cette disposition), elle ne convainc pas. Comme l'a démontré la cour cantonale (cf. arrêt entrepris consid. 6 p. 8 s.), il résulte de la construction de l'art. 5.1 des conditions générales que l'art. 5.1.2 vise " tout employé de la société quelle que soit sa fonction dans l'entreprise ", le personnel rémunéré mensuellement n'étant visé spécialement qu'à partir de l'art. 5.1.4. Pour défendre sa thèse, la recourante fournit une interprétation qui ne trouve appui qu'en partie sur les constatations cantonales relatives à la formulation et au contenu de l'art. 5.1.2, ce qui n'est pas admissible (cf. ATF 135 III 410 consid. 3.2 p. 413).
Cela étant, l'interprétation du contrat entreprise par la cour cantonale ne prête pas le flanc à la critique. Il n'importe ici de connaître la volonté intime de l'employeuse, le principe de la confiance permettant précisément d'imputer à celle-ci le sens objectif de sa déclaration (cf. ATF 135 III 410 consid. 3.2 p. 413). Il est en l'espèce établi que les conditions générales contiennent un renvoi à la CCT21 et que l'employeuse n'a pas apporté de modification à ses conditions générales au 1er janvier 2007. Même à admettre qu'un doute subsisterait quant au résultat de l'interprétation objective du contrat, la conclusion ne serait pas différente, l'interprétation des conditions générales devant alors se faire en défaveur de leur rédactrice (ATF 124 III 155 consid. 1b p. 158).
Le moyen tiré de la transgression des art. 6 et 18 CO est infondé.
2.4. La recourante estime que c'est en violant le droit fédéral que la cour cantonale a considéré qu'il convenait d'ajouter au salaire convenu entre les parties un supplément destiné à compenser les désavantages entraînés par le travail de nuit (cf. art. 17b al. 2 Ltr).
Dans son raisonnement juridique, la recourante se fonde sur divers points de fait qu'elle ajoute à l'état de fait dressé par la cour cantonale. Elle n'indique toutefois pas en quoi celui-ci serait arbitraire et il n'y a pas lieu de s'écarter des constatations contenues dans l'arrêt entrepris (cf. supra consid. 1.4).
Selon les constatations cantonales, le salaire minimum fixé par la CCT21 ne tient pas compte des désavantages liés à une activité régulière de nuit. En effet, le salaire minimum prévu par la grille salariale de cette convention s'applique au travail " habituel ", c'est-à-dire à l'activité de jour (arrêt entrepris consid. 4 p. 7 s.).
Cela étant, on ne saurait considérer que le salaire convenu entre les parties, dès le 1er janvier 2007, est présumé déjà tenir compte des désavantages entraînés par le travail de nuit (cf.
a contrario arrêt 4A_268/2012 du 11 septembre 2012 consid. 8.1 publié in JdT 2013 II 2000).
C'est donc à bon droit que la cour cantonale, partant du tarif fixé dans la CCT21, a accordé à l'intimée, de janvier 2007 à août 2010, une somme supplémentaire pour le travail de nuit. L'autorité précédente a déduit de ce montant, pour la même période, l'indemnité de 10 fr. initialement prévue par les parties (cf. let. A), de sorte que son raisonnement est exempt de toute contradiction.
Le grief doit être déclaré mal fondé.
2.5. S'agissant enfin du calcul du montant revenant à l'employée, la recourante reproche à l'autorité cantonale d'avoir établi les faits de façon inexacte.
Elle présente ses propres calculs en laissant entendre que les magistrats précédents ont commis de nombreuses erreurs. Elle ne fournit toutefois aucune motivation circonstanciée permettant de comprendre en quoi l'autorité cantonale aurait sombré dans l'arbitraire (sur l'exigence cf. supra consid. 1.3 et 1.4). Il n'y a donc pas lieu d'entrer en matière sur cette critique.
3.
Il résulte des considérants qui précèdent que le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable.
Les frais judiciaires et les dépens sont mis à la charge de la recourante, qui succombe (art. 66 al. 1 et 68 al. 1 LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 600 fr., sont mis à la charge de la recourante.
3.
La recourante versera à l'intimée une indemnité de 2'500 fr. à titre de dépens.
4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour civile du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel.
Lausanne, le 28 janvier 2014
Au nom de la Ire Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
La Présidente: Klett
Le Greffier: Piaget