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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
{T 0/2} 
 
4A_499/2014  
   
   
 
 
 
Arrêt du 28 janvier 2015  
 
Ire Cour de droit civil  
 
Composition 
Mmes et M. les Juges fédéraux Kiss, Présidente, Kolly et Hohl. 
Greffier : M. Piaget. 
 
Participants à la procédure 
A.________, représenté par Me Gilles-Antoine Hofstetter, 
recourant, 
 
contre  
 
B.________ SA, représentée 
par Me Jean-Michel Duc, 
intimée. 
 
Objet 
responsabilité du détenteur de véhicule automobile, prescription, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour d'appel civile, du 2 mai 2014. 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. Le 18 octobre 1991, A.________ (ci-après: le lésé ou l'assuré), peintre de profession, a été victime d'un accident de la circulation. C.________, au volant d'un véhicule de la Société D.________ à Vouvry assuré auprès de B.________ SA (ci-après: l'assureur), est responsable de l'accident, ce qui n'est pas contesté.  
 
A.b. Le lésé a subi diverses lésions et plusieurs spécialistes de différentes disciplines sont intervenus; un grand nombre d'interventions ont été entreprises pour identifier les atteintes dont il souffrait.  
 
 Le 12 octobre 1991, le Dr E.________ a établi un " rapport médical initial LAA " qui fait mention d'une " plaie suturée au-dessus de l'arcade sourcilière gauche. Forte tuméfaction du genou gauche avec boiterie importante à la marche. Douleur du sinus maxillaire gauche faisant suspecter un hémato-sinus ". 
 
 Le 15 novembre 1991, le lésé a été examiné par le Dr F.________, ophtalmologue à Lausanne, qui a établi un rapport daté du 3 décembre 1991. A titre de traitement, le spécialiste propose le port de lunettes pour une myopie à l'oeil droit. Il relève que l'accident " a dû entraîner une incapacité de travail d'environ 2 semaines ". 
 
 Le 20 novembre 1991, le lésé a été entendu dans les locaux de la CNA. 
 
 La feuille d'accident LAA indique que le traitement médical a pris fin le 28 octobre 1991, que le lésé a eu une incapacité de travail jusqu'au 24 novembre 1991 et qu'il a repris le travail à 100% le 25 novembre 1991. 
 
 Les 28 janvier et 3 février 1992, le Dr G.________, spécialiste FMH en neurologie, a procédé à des évaluations. Il indique qu'hormis " une discrète hypoesthésie et hypalgésie relative dans la région frontale gauche, [il n'observe] aucune autre anomalie systématisée ". 
 
 Dans son rapport du 7 juillet 1992, le Dr H.________ a noté avoir vu son patient pour la dernière fois le 23 mars 1992, date à laquelle celui-ci lui avait signalé que ses céphalées avaient bien diminué et qu'il ressentait encore quelques douleurs lorsqu'il secouait la tête. 
 
 Dans son rapport du 29 octobre 1992, le Dr G.________ a indiqué qu'un problème à l'épaule gauche lui avait été signalé par le lésé. 
 
 Le 7 décembre 1992, le Dr I.________, médecin d'arrondissement de la CNA, a procédé à un examen médical du lésé. Dans son rapport, il observe que l'accident, qui s'est déroulé 14 mois auparavant, semble s'être " soldé par une simple plaie frontale gauche ", mais que celle-ci mérite d'être révisée. Il reconnaît également " quelques signes d'une PSH de l'épaule gauche " consécutive à l'accident, mais qui ne justifie pas une incapacité de travail totale. 
 
 La Dresse J.________, consultée par le lésé, a indiqué dans son rapport que le lésé n'avait plus consulté de médecin à partir du 23 mars 1992, mais que la symptomatologie douloureuse avait repris le 19 octobre 1992. 
 
 La feuille accident LAA indique que le lésé a été en incapacité de travail à 100% du 19 octobre 1992 au 28 janvier 1993, puis à 50% du 29 janvier au 5 mars 1993 et que, dès le 8 mars 1993, sa capacité de travail a été de 100%. 
 
 Le Dr K.________, dans son rapport du 16 mars 1993, a noté que, d'un point de vue rhumatologique, la capacité de travail était entière dès le 15 mars 1993. 
 
 Entendu le 3 mai 1993 par la CNA, le lésé a reconnu qu'il avait pu retravailler à 100% dès le 8 avril 1993. 
 
 Dans son courrier du 17 juin 1993, la Dresse J.________ a indiqué que le lésé se plaignait de toutes sortes de symptômes, vertiges, céphalées, hémicrânies gauches, nausées, etc. mais que ces différents symptômes parfois gênants ne limitaient plus sa capacité de travail " qui était à ce jour normale ". 
 
 Les Drs L.________ et M.________, dans un rapport radiologique du 31 août 1993, ont exclu l'existence de lésions au niveau de la charnière cervico-occipitale et de la colonne cervicale. 
 
 Dans un rapport du 2 septembre 1993 à l'intention de la CNA, le Dr S.________, spécialiste FMH en neurologie, a conclu n'avoir, sur le plan neurologique, aucune proposition de traitement particulier et ne retenir aucune incapacité de travail significative. 
 
 Le conseil d'alors du lésé, dans un courrier adressé à la CNA le 1er décembre 1993, a exposé que les céphalées et la gêne au niveau sus-orbitaire avaient peu à peu disparu et que le lésé s'estimait rétabli, sa capacité de travail étant complète. 
 
A.c. Dans un rapport du 17 octobre 1995, le Prof. N.________ a indiqué que le lésé souffrait de céphalées et cervicalgies gauches apparaissant à l'effort ainsi que d'une névralgie après lésion du nerf sus-orbitaire gauche avec probable développement d'un névrome de ce nerf, ces deux formes de douleurs devant être considérées comme des séquelles de l'accident de 1991. Il a en outre estimé que la capacité de travail du lésé n'était pas réduite et (dans une projection non exempte de contradictions) que l'on pouvait envisager une reprise progressive du travail pour arriver à une capacité de travail de 100% vers la fin 1995 ou au début 1996.  
 
 Le 21 novembre 1995, le Dr I.________ a indiqué que l'appréciation du Prof. N.________ (quant au lien de causalité entre l'accident et les douleurs ressenties par le lésé) lui paraissait fondée sur une argumentation insuffisante et qu'à cet égard l'appréciation du Dr S.________ était " nettement plus nuancée et plausible ". 
 
 Dans un jugement du 6 novembre 1998 (arrêt U84/97 du 6 novembre 1998 consid. 5), le Tribunal fédéral des assurances a retenu que le lésé n'était pas entravé de manière significative dans sa capacité de travail depuis le 8 avril 1993, mais qu'il subsistait une gêne et des douleurs probables au-delà du 9 septembre 1993 qui justifiaient la prise en charge d'un traitement approprié. 
 
 Le demandeur a subi deux interventions chirurgicales dans le but de réséquer le névrome précité. 
 
 Le lésé a ensuite encore été examiné par de nombreux spécialistes, notamment le Dr O.________ le 7 juin 1999, le Dr P.________ le 11 janvier 2000, le Prof. Q.________ et la Dresse R.________ à une date indéterminée, et la Dresse T.________ le 1er mars 2000. 
 
 Sur mandat de la CNA, une expertise médicale a encore été confiée au Service de neurologie du CHUV. Dans leur rapport du 5 septembre 2001, le Prof. U.________ et le Dr V.________, médecin associé, qui a principalement agi dans le cadre de cette expertise, ont notamment affirmé que " les céphalées du lésé sont, avec l'hypoesthésie, la constante majeure dans les plaintes du patient depuis 1991 " et qu'il y a " donc une relation certaine entre les céphalées et l'accident de 1991 ". Ils précisent qu'il " n'y a pas d'incapacité de travail directement liée aux céphalées. Les céphalées de même que le scotome au niveau de l'oeil gauche n'ont pas d'impact sur le travail. Par contre, les cervicalgies limitent les activités de force avec la nuque vers le haut (...) ". Ils estiment que, " dans une activité qui ne se situerait pas en hauteur, le patient aurait tout à fait de quoi retrouver une capacité de travail normale, pour autant que le port de charge ne dépasse pas le poids de 20 kilos en raison des douleurs cervicales " . 
 
 Dans un rapport complémentaire du 13 novembre 2001, le Prof. U.________ note toutefois qu'en " conclusion, il est difficile de lier à l'accident de 1991 une aggravation clinique survenue entre 1995 et actuellement ". Diverses précisions ont encore été apportées par les deux experts dans un courrier du 14 février 2002. 
 
 Divers avis médicaux ont ensuite été rendus par les Dresses W.________ et X.________, le Dr H.________ et le Prof. Q.________. 
 
A.d. Par décision du 12 janvier 2006, résultant d'une transaction judiciaire conclue entre le lésé et la CNA, celle-ci a reconnu à celui-là un taux d'incapacité de gain de 70% et lui a versé, dès le 1er avril 1993, une rente mensuelle de 1'680 fr., plus les allocations de renchérissement.  
 
 Le 24 janvier 2005, l'Office de l'assurance invalidité pour le canton de Vaud a rendu une décision fixant l'invalidité à 9,5%. Cette décision retient que le lésé pourrait gagner 65'000 fr. s'il obtenait un diplôme d'administrateur réseau après avoir poursuivi la formation qu'il avait débutée en informatique. 
 
 Le lésé a fait opposition à la décision, puis il a recouru jusqu'au Tribunal fédéral qui, dans un arrêt 9C_343/2007, a rejeté le recours. 
 
 Au 1er février 2011, une procédure était toujours pendante entre l'Office AI et le lésé, celui-ci ayant déposé une nouvelle demande de prestations AI, en raison, selon lui, d'une aggravation de son état de santé. 
 
A.e. Par courrier du 8 octobre 1996, l'assureur a renoncé à se prévaloir de la prescription, pour autant qu'elle n'ait pas déjà été acquise, jusqu'au 17 octobre 1998. Ayant changé de conseil, le lésé a écrit le 28 octobre 1998 à l'assureur pour obtenir une nouvelle renonciation jusqu'au 17 octobre 1999. Par courrier du 2 novembre 1998, l'assureur lui a fait savoir qu'il considérait que la prescription était acquise. Sur requête renouvelée du conseil du lésé, l'assureur a renoncé à se prévaloir de la prescription, pour autant qu'elle ne soit pas acquise, jusqu'au 30 novembre 2000, puis chaque année, jusqu'au 30 novembre 2006.  
 
B.  
 
B.a. Par demande du 7 août 2006, le lésé (ci-après également: le demandeur) a entrepris une action contre l'assureur du responsable de l'accident auprès de la Cour civile du Tribunal cantonal vaudois. Il a conclu à ce que celui-ci lui verse le montant de 2'451'985 fr. 10, intérêts en sus.  
 
 Dans son ordonnance sur preuves du 19 décembre 2007, le Juge instructeur a chargé un neurologue de répondre aux allégués soumis à la preuve par expertise médicale. Le demandeur a alors refusé de se prêter à l'expertise médicale, ce dont le Juge instructeur a pris acte. 
 
 Une expertise comptable (visant la détermination du revenu du lésé) et une expertise technique (sur le déroulement de l'accident) ont été sollicitées par le Juge instructeur. 
 
 Par jugement du 8 mars 2013, la Cour civile a rejeté la demande. 
 
B.b. Par arrêt du 2 mai 2014, la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal vaudois a rejeté l'appel formé par le demandeur et confirmé le jugement entrepris.  
 
C.   
Le demandeur exerce un " recours en matière civile et recours constitutionnel subsidiaire " contre l'arrêt de la Cour d'appel civile. Il conclut à l'admission du recours et à ce que l'arrêt entrepris soit réformé dans le sens des conclusions de sa demande, subsidiairement, à ce que l'arrêt soit annulé et le dossier renvoyé à l'instance précédente pour complément d'instruction et nouvelle décision. 
 
 L'intimée n'a pas été invitée à déposer une réponse. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
 
1.1. Le recourant, bien que qualifiant son acte de " recours en matière civile et recours constitutionnel subsidiaire ", a formé en réalité un seul recours contre l'arrêt cantonal (cf. les conclusions prises p. 28 de son mémoire) (cf. arrêt 4A_180/2013 du 6 janvier 2014 consid. 1.1).  
 
 Interjeté par la partie qui a succombé dans ses conclusions en paiement (art. 76 al. 1 LTF) et dirigé contre un arrêt final (art. 90 LTF) rendu en matière civile (art. 72 al. 1 LTF) par un tribunal supérieur statuant sur recours (art. 75 LTF) dans une affaire pécuniaire dont la valeur litigieuse dépasse le seuil de 30'000 fr. (art. 74 al. 1 let. b LTF), le recours est en principe recevable, puisqu'il a été déposé dans le délai (art. 48 al. 1 et 100 al. 1 LTF) et la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi. 
 
1.2. Le recours en matière civile peut être interjeté pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF. Il peut donc également être formé pour violation d'un droit constitutionnel (ATF 136 I 241 consid. 2.1 p. 247; 136 II 304 consid. 2.4 p. 313).  
 
1.3. Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte - ce qui correspond à la notion d'arbitraire (ATF 136 II 304 consid. 2.4 p. 314; 135 III 127 consid. 1.5 p. 130) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF).  
 
 Il incombe à la partie recourante, qui entend s'écarter des constatations de l'autorité précédente, d'expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions d'une exception prévue par l'art. 105 al. 2 LTF seraient réalisées, faute de quoi il n'est pas possible de tenir compte d'un état de fait qui diverge de celui contenu dans la décision attaquée (ATF 133 IV 286 consid. 1.4 p. 287 s. et consid. 6.2 p. 288). Une rectification de l'état de fait ne peut être demandée que si elle est de nature à influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF). 
 
2.   
Les premiers juges ont considéré que l'action en paiement était prescrite, tant sous l'angle de la prescription pénale (cf. art. 60 al. 2 CO) que dans la perspective de la prescription civile au sens de l'art. 83 al. 1 LCR
La Cour d'appel civile juge que les premiers magistrats ont considéré à bon droit que l'action du lésé était prescrite. Sous l'angle de la prescription civile (cf. art. 83 al. 1 LCR), elle observe que les céphalées mentionnées dans le rapport U.________ (2001) et détaillées dans les rapports O.________ (1999) et N.________ (1995) ont déjà été décrites (comme étant " typiques d'un syndrome post-commotionnel ") dans le rapport du Dr S.________ (2 septembre 1993). Selon la cour cantonale, on ne peut que constater que la présence de troubles persistants quelque deux ans après l'accident était établie médicalement et connue du lésé, à tout le moins dès le mois de septembre 1993, et que les avis médicaux ultérieurs, notamment le rapport de 2001, n'ont rien apporté à ce sujet. Les juges cantonaux relèvent qu'à compter de 1993, il n'y a eu ni changement dans la situation médicale du lésé, ni traitements, ni empêchement de travailler. Ils soulignent que le fait que la SUVA ait mandaté le Prof. U.________ plusieurs années après l'accident n'ôte rien au fait que le lésé connaissait son état et disposait d'avis médicaux circonstanciés dès le mois de septembre 1993. Ils laissent ainsi entendre que, selon leur appréciation, les expertises ultérieures, notamment celle de 2001, ne remettent pas en question le contenu des avis déjà exprimés jusqu'en 1993. L'autorité précédente insiste sur le fait que l'issue de la procédure conduite par l'AI ou la CNA n'est pas déterminante pour la connaissance du dommage. 
S'agissant de la prescription pénale (cf. art. 60 al. 2 CO), la cour cantonale, en se basant sur l'ATF 137 III 481, applique l'ancien droit (art. 70 aCP) prévoyant un délai de prescription relatif de cinq ans. Le dies a quo correspondant au jour où l'auteur a agi, le délai de prescription est venu à échéance le 18 octobre 1996. Le 8 octobre 1996, l'assureur a renoncé à se prévaloir de la prescription jusqu'au 17 octobre 1998. Le lésé n'ayant ensuite sollicité l'assureur que le 28 octobre 1998 afin d'obtenir une nouvelle renonciation, il n'était plus au bénéfice d'un acte susceptible de modifier le cours de la prescription, de sorte que celle-ci était acquise le 18 octobre 1998. 
 
3.  
 
3.1. Le recourant estime qu'en 1993 son état de santé n'était manifestement pas stabilisé, à tout le moins n'était-il pas en mesure de circonscrire son dommage à cette période. Selon lui, l'arrêt cantonal est arrivé à la conclusion inverse en effectuant une appréciation arbitraire de l'état de fait résultant de son dossier médical complexe et pluridisciplinaire.  
 
3.2. D'après l'art. 83 al. 1 LCR, les actions en dommages-intérêts et en réparation du tort moral qui découlent d'accidents causés par des véhicules automobiles se prescrivent par deux ans à partir du jour où le lésé a eu connaissance du dommage et de la personne qui en est responsable, mais en tout cas par dix ans dès le jour de l'accident.  
 
 La connaissance du dommage est une notion figurant notamment à l'art. 60 al. 1 CO, de sorte que l'on peut se référer à la jurisprudence rendue en rapport avec cette disposition (arrêt 4A_136/2012 du 18 juillet 2012 consid. 4.2). 
 
 Le lésé connaît suffisamment le dommage lorsqu'il apprend, relativement à son existence, sa nature et ses éléments, les circonstances propres à fonder et à motiver une demande en justice (ATF 131 III 61 consid. 3.1.1 p. 68; arrêt 4A_576/2010 du 7 juin 2011 consid. 3.2 non publié in ATF 137 III 352). Le lésé n'est pas admis à différer sa demande jusqu'au moment où il connaît le montant absolument exact de son préjudice, car le dommage peut devoir être estimé selon l'art. 42 al. 2 CO (ATF 131 III 61 consid. 3.1.1 p. 68; 111 II 55 consid. 3a p. 57 s.). Le dommage est tenu pour suffisamment défini lorsque le lésé détient assez d'éléments pour être en mesure de l'apprécier (ATF 111 II 55 consid. 3a p. 57; 109 II 433 consid. 2 p. 434). 
 
 En considération de la relative brièveté du délai de prescription entrant en considération, la notion de " connaissance du dommage " doit être interprétée strictement (arrêt 4A_136/2012 déjà cité consid. 4.2). 
 
 Lorsque l'ampleur du préjudice dépend d'une situation qui évolue, le délai de prescription ne court pas avant le terme de cette évolution. Tel est le cas notamment du préjudice consécutif à une atteinte à la santé dont il n'est pas possible de prévoir d'emblée l'évolution avec suffisamment de certitude (ATF 112 II 118 consid. 4 p. 123; 108 Ib 97 consid. 1c p. 100). En particulier, la connaissance du dommage résultant d'une invalidité permanente suppose que, selon un expert, l'état de santé soit stabilisé sur le plan médical et que le taux de l'incapacité de travail soit fixé au moins approximativement; le lésé doit en outre savoir, sur la base des rapports médicaux, quelle peut être l'évolution de son état (arrêt 4A_289/2008 du 1er octobre 2008 consid. 4 publié in JdT 2008 I 483; arrêt 4A_647/2010 du 4 avril 2010 consid. 3.1). 
 
 Le fait que le lésé continue à manifester des plaintes qui ne correspondent plus à de véritables pathologies n'est pas déterminant (cf. ATF 96 II 39 consid. 2b p. 43; Alfred Keller, Haftpflicht im Privatrecht, Band II, 2e éd. 1998, p. 286). 
 
 Lorsque le lésé est si sévèrement atteint qu'une rente de l'assurance-invalidité doit lui être allouée, la décision de rente offre souvent l'information nécessaire à la connaissance du dommage. Mais la communication de la décision de l'assureur social ne constitue pas systématiquement le point de départ du délai de prescription relatif. En effet, l'issue de la procédure conduite par l'AI ou la SUVA n'est pas en soi déterminante pour la connaissance du dommage, car la rente d'invalidité ne réduit pas le dommage subi par un assuré, mais le couvre, du moins partiellement (arrêts 4A_136/2012 déjà cité consid. 4.2). 
 
 Pour le surplus, le délai de prescription part du moment où le lésé a effectivement connaissance du dommage, et non de celui où il aurait pu découvrir l'importance de sa créance en faisant preuve de l'attention commandée par les circonstances (ATF 136 III 322 consid. 4.1 p. 330; 111 II 55 consid. 3a p. 58 s.). 
 
3.3. En l'espèce, à la suite des premiers juges, l'autorité précédente a retenu que le lésé " connaissait son état et disposait d'avis médicaux circonstanciés à ce sujet à tout le moins dès septembre 1993 " et que " les avis médicaux ultérieurs, notamment le rapport du 5 septembre 2001, n'ont rien apporté à ce sujet ". Selon les constatations cantonales, " à compter de 1993, il n'y a eu ni changement dans la situation médicale de l'appelant, ni traitements, ni empêchement de travailler ".  
 
 La cour cantonale laisse ainsi entendre que les diverses investigations médicales menées après 1993, notamment par le Prof. U.________ en 2001, ne remettent pas en question les avis médicaux à disposition du lésé depuis septembre 1993. 
 
 Il incombait au lésé de démontrer l'arbitraire de cette appréciation. 
 
3.4. Selon la jurisprudence, l'arbitraire ne résulte pas du seul fait qu'une autre solution pourrait entrer en considération ou même qu'elle serait préférable; le Tribunal fédéral n'annulera la décision attaquée que lorsque celle-ci est manifestement insoutenable, qu'elle se trouve en contradiction claire avec la situation de fait, qu'elle viole gravement une norme ou un principe juridique indiscuté, ou encore lorsqu'elle heurte de manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité; pour qu'une décision soit annulée pour cause d'arbitraire, il ne suffit pas que la motivation formulée soit insoutenable, il faut encore que la décision apparaisse arbitraire dans son résultat (ATF 135 V 2 consid. 1.3 p. 4 s.; 134 I 140 consid. 5.4 p. 148, 263 consid. 3.1 p. 265 s.).  
 
 En matière d'appréciation des preuves et d'établissement des faits, la décision n'est arbitraire que si le juge n'a manifestement pas compris le sens et la portée d'un moyen de preuve, s'il a omis, sans raison sérieuse, de tenir compte d'un moyen important propre à modifier la décision attaquée ou encore si, sur la base des éléments recueillis, il a fait des déductions insoutenables (ATF 129 I 8 consid. 2.1). Le grief tiré de l'appréciation arbitraire des preuves ne peut être pris en considération que si son admission est de nature à modifier le sort du litige, ce qui n'est pas le cas lorsqu'il vise une constatation de fait n'ayant aucune incidence sur l'application du droit (ATF 129 I 8 consid. 2.1 p. 9; arrêt 4P.305/2001 du 18 mars 2002 consid. 2a). 
 
3.5. D'emblée, on voit mal comment on pourrait reprocher à la cour cantonale d'avoir sombré dans l'arbitraire en retenant la stabilisation de l'état de santé du lésé depuis la communication du rapport du Dr S.________ (2 septembre 1993). D'une part, ce constat a été confirmé par le demandeur, par son conseil de l'époque, dans un courrier adressé à la CNA le 1er décembre 1993 (arrêt entrepris p. 14; arrêt du Tribunal fédéral des assurances U 84/97 du 6 novembre 1998 consid. 5). D'autre part, l'existence d'un état de santé stabilisé a encore été reconnue par le lésé qui a signé une transaction avec la SUVA. Dans ce cadre, les parties ont prévu de fixer le début du droit à la rente d'invalidité du demandeur au 1er avril 1993 (arrêt entrepris p. 24 s.), ce qui signifie que le cas était stabilisé sur le plan médical (cf. art. 19 al. 1 LAA).  
 
 Quoi qu'il en soit, les divers arguments présentés par le recourant ne permettent pas de démontrer que le résultat auquel est parvenue la cour cantonale serait arbitraire. 
 
3.5.1. Premièrement, le recourant reproche à la cour cantonale de n'avoir fait état que des céphalées. Il observe qu'il fallait également tenir compte d'autres troubles, notamment la présence de cervicalgies dont l'aggravation a débuté en 1993 et 1994. Il insiste sur le fait que ces troubles évolutifs, consécutifs à l'accident, ont été constatés dans un rapport du Prof. N.________ du 17 octobre 1995.  
 
 Cette argumentation n'a toutefois aucune incidence sur le sort de la cause (cf. art. 97 al. 1 LTF). En effet, même à admettre qu'il faudrait prendre comme point de départ le 17 octobre 1995, en raison de la mention à partir de cette date de cervicalgies, le résultat ne serait pas différent. Dans cette hypothèse, la prescription est intervenue le 17 octobre 1997. La défenderesse a valablement renoncé à l'invoquer jusqu'au 17 octobre 1998, pour autant qu'elle n'ait pas déjà été acquise. La prescription était donc effective le 18 octobre 1998 et la seconde renonciation, intervenue au plus tôt le 2 novembre 1998, n'a pas eu d'effet. 
 
3.5.2. Deuxièmement, le recourant insiste sur le rapport établi le 5 septembre 2001 par le Prof. U.________ et le Dr V.________, dans lequel ces spécialistes constatent notamment que les cervicalgies ont débuté en 1993 et qu'elles se trouvent en relation certaine avec l'accident. Le lésé insiste sur le fait que ce rapport (et de manière plus générale, les autres rapports rendus à cette époque) démontre (nt) que des changements importants ont eu lieu quant à son état de santé.  
 
 Le recourant se limite à présenter les conclusions prises dans ces rapports, sans toutefois démontrer, selon les exigences strictes de la LTF, en quoi il était arbitraire de donner la préférence aux premiers avis médicaux (jusqu'en septembre 1993), plutôt qu'au rapport de 2001, ou, plus généralement aux divers rapports rédigés durant cette période. On observera à ce sujet que le simple fait d'indiquer que l'expertise U.________ contient une appréciation différente de celle entreprise par plusieurs médecins jusqu'en 1993 (cf. déjà arrêt du Tribunal fédéral des assurances U 84/97 du 6 novembre 1998 consid. 5) est impropre à démontrer une appréciation arbitraire des juges précédents. 
 
3.5.3. En ce qui concerne, troisièmement, le rapport de juin 1999 de la Dresse T.________ qui spécifie les troubles de la vision du demandeur, il ne lui est d'aucune aide. En effet, il avait déjà été question de ce problème dans le rapport du Dr F.________ en 1991. Si le diagnostic du scotome n'a été posé qu'en 2002 et que le demandeur a subi deux interventions chirurgicales, en 1999 et 2003, dans le but de réséquer un névrome cicatriciel sur la plaie frontale gauche, il n'est pas établi que son état de santé se serait péjoré à la suite de ces diagnostics et opérations (cf. jugement de première instance p. 50).  
 
3.6. Sur la base des constatations cantonales, exemptes d'arbitraire, on ne voit en outre pas que la cour précédente ait violé le droit fédéral dans sa décision.  
 
 Certes, au début des années 2000, la SUVA instruisait encore le dossier et elle a jugé nécessaire, en 2001, de mandater le Prof. U.________ afin de déterminer les troubles dont souffrait le demandeur et leur lien de causalité avec l'accident. Il résulte toutefois de la jurisprudence rappelée ci-dessus que l'issue des procédures relevant de l'assurance-accident ou invalidité n'est pas déterminante. Ce qui est pertinent, c'est le moment où le lésé connaît effectivement son dommage. 
 
 Il n'y a, contrairement à ce que le recourant laisse entendre, pas lieu de réfléchir, depuis septembre 1993 (ou à tout le moins depuis 1995), à une évolution de son état de santé. Selon les constatations médicales, celui-ci s'est stabilisé, le degré de capacité de travail du lésé a été déterminé et il savait, sur la base d'un rapport médical, comment son état de santé risquait d'évoluer, de sorte qu'il n'y a aucune raison d'admettre que le point de départ du délai de prescription relatif de deux années devait être reporté à une période ultérieure, lorsque le Prof. U.________ et le Dr V.________ ont rendu leur rapport. 
 
 Enfin, le fait que le demandeur a continué à manifester des plaintes après septembre 2003, qui ne correspondaient plus à de véritables pathologies (jugement de première instance p. 51), n'est pas déterminant. 
 
3.7. La prescription étant acquise le 18 octobre 1998, l'action déposée par le demandeur le 7 août 2006 était prescrite eu égard au délai de deux ans de l'art. 83 al. 1 LCR.  
 
4.   
Il reste à déterminer si le demandeur peut se prévaloir de la prescription pénale de plus longue durée applicable en matière civile (art. 60 al. 2 CO). 
 
4.1. La cour cantonale, se fondant sur l'ATF 137 III 481, considère que le délai de prescription de cinq ans de l'art. 70 aCP est applicable et elle observe qu'il est venu à échéance le 18 octobre 1996 (sur l'argumentation cf. arrêt entrepris consid. 5 p. 42 ss). L'assureur ayant renoncé à se prévaloir de la prescription jusqu'au 17 octobre 1998 et le lésé n'ayant sollicité celui-ci afin d'obtenir une nouvelle renonciation que le 28 octobre 1998, le lésé n'était, durant cette brève période, plus au bénéfice d'un acte susceptible de modifier le cours de la prescription, de sorte que celle-ci était acquise le 18 octobre 1998.  
 
 Le recourant ne conteste pas que la prescription serait acquise si le délai était de cinq ans. Il tente plutôt de revenir sur le raisonnement de la cour cantonale en soutenant que le délai absolu de prescription de sept ans et demi est applicable (cf. art. 70 aCP) et non le délai relatif de cinq ans comme retenu par l'arrêt entrepris. 
 
4.2. Selon la jurisprudence, pour dire si le délai de prescription est plus long au pénal qu'au civil, il faut prendre en considération la prescription relative du droit pénal, et non pas la prescription absolue (ATF 137 III 481 consid. 2.5 p. 484; 100 II 339 consid. 1b p. 342).  
 
 Même si l'on parvient à la conclusion qu'il faut appliquer le délai de la prescription pénale, celui-ci peut être interrompu selon les règles du droit civil (ATF 100 II 339 consid. 1b p. 342). Autrement dit, la prescription de l'action civile, dans son mécanisme, est entièrement régie par le droit privé; cela vaut notamment pour déterminer les actes interruptifs de la prescription et les effets d'une interruption; le droit pénal n'intervient que pour substituer au délai prévu par le droit civil le délai plus long découlant du droit pénal. 
 
 En conséquence, pour connaître les actes qui peuvent interrompre la prescription, il faut se référer aux art. 135 et 138 CO. Lorsque la prescription a été interrompue, un nouveau délai commence à courir dès l'interruption (art. 137 al. 1 CO). 
 
 Lorsque le délai de la prescription pénale est applicable, son interruption fait courir à nouveau le délai de la prescription pénale, quand bien même la prescription pénale absolue interviendrait dans ce nouveau délai (ATF 137 III 481 consid. 2.5 p. 484 s.; 131 III 430 consid. 1.2 p. 434 let. d; 127 III 538 consid. 4d p. 542). 
 
 En revanche, lorsque la prescription pénale absolue est atteinte, un acte interruptif ultérieur ne peut faire courir que le délai prévu par le droit civil (ATF 137 III 481 consid. 2.5 p. 485; 131 III 430 consid. 1.3 et 1.4 p. 435). 
 
4.3. L'argumentation du recourant repose sur une mauvaise compréhension de l'ATF 137 III 481. Celui-ci indique, sans aucune ambiguïté, que, pour dire si le délai de prescription est plus long au pénal qu'au civil, il faut prendre en considération la prescription relative du droit pénal, et non pas la prescription absolue (sous l'angle de l'art. 70 aCP: ATF 137 III 418 consid. 2.5 p. 484; ATF 100 II 339 consid. 1b p. 342; CHRISTOPH MÜLLER, La responsabilité civile extracontractuelle, 2013, n. 778 p. 244 note de pied 1522).  
 
 Quant à la mention de la prescription pénale absolue, dans les deux derniers paragraphes du considérant 5 de l'arrêt, elle ne remet pas en question la règle claire de la prise en considération de la prescription relative du droit pénal. Elle joue un rôle dans l'hypothèse d'un acte qui interromprait la prescription pénale applicable. Si cet acte intervient alors que la prescription pénale absolue n'est pas atteinte, il fait courir à nouveau le délai relatif de la prescription pénale. Si l'acte interruptif intervient alors que la prescription pénale absolue est atteinte, le nouveau délai qu'il fait courir est alors celui (relatif) prévu par le droit civil. 
 
 En l'espèce, il n'est question d'aucune interruption de la prescription, de sorte que c'est en vain que le recourant tente de tirer, de la mention de la prescription pénale absolue dans l'arrêt précité, un argument en faveur de sa thèse. 
 
 Les critiques soulevées par le recourant sont infondées. 
 
 La prescription étant acquise, on peut se dispenser d'examiner les autres arguments du recourant ayant trait aux conditions de la responsabilité. 
 
5.   
Il résulte des considérations qui précèdent que le recours en matière civile doit être rejeté. 
 
 Selon l'art. 64 al. 1 LTF, le Tribunal fédéral peut accorder l'assistance judiciaire à une partie à condition que celle-ci ne dispose pas de ressources suffisantes et que ses conclusions ne paraissent pas d'emblée vouées à l'échec. En l'occurrence, la procédure entreprise devant le Tribunal fédéral était dépourvue de chances de succès, ce qui entraîne le rejet de la demande d'assistance judiciaire. 
 
 Les frais de la procédure devant le Tribunal fédéral doivent être mis à la charge du recourant. Pour le calcul de l'émolument judiciaire, il y a lieu de tenir compte qu'en l'espèce la Cour de céans ne s'est penchée que sur la question de la prescription. Cela étant, il paraît adéquat de fixer l'émolument à 5'000 fr. 
 
 Il n'est pas alloué de dépens, la partie intimée n'ayant pas été invitée à se déterminer. 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.   
La demande d'assistance judiciaire est rejetée. 
 
3.   
Le recourant acquittera un émolument judiciaire de 5'000 fr. 
 
4.   
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour d'appel civile. 
 
 
Lausanne, le 28 janvier 2015 
 
Au nom de la Ire Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Kiss 
 
Le Greffier : Piaget