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Ecriture agrandie
 
 
Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
                 
 
 
6B_371/2019  
 
 
Arrêt du 28 mars 2019  
 
Cour de droit pénal  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Denys, Président, 
Rüedi et Jametti. 
Greffier : M. Vallat. 
 
Participants à la procédure 
X.________, 
recourant, 
 
contre  
 
Service juridique, Exécution des peines et mesures, 
intimé. 
 
Objet 
Restitution de l'effet suspensif (médication), 
 
recours contre la décision du Tribunal cantonal de la République et canton du Jura, Cour administrative, du 18 février 2019 (ADM 8 / 2019 + AJ 9 / 2019). 
 
 
Considérant en fait et en droit :  
 
1.   
Par acte daté du 21 mars 2019, X.________ recourt contre une décision du 18 février 2019. Par cette dernière, la Présidente de la Cour administrative du Tribunal cantonal jurassien rejette notamment la requête tendant à ce que soit restitué l'effet suspensif au recours formé par l'intéressé contre une décision du 21 décembre 2018. Dite décision, qui émane du Service d'exécution des peines et des mesures du canton du Jura, autorise le service médical de A.________ à mettre en oeuvre une médication sous contrainte pour X.________ dans le cadre de la mesure thérapeutique institutionnelle ordonnée par jugement du 28 juin 2016. X.________ conclut principalement, avec suite de frais et d'indemnité, à ce que la décision entreprise soit modifiée en ce sens que l'effet suspensif soit restitué. Il requiert, à titre préjudiciel, qu'une copie de la procédure, dans sa totalité, lui soit remise et que des copies des communications qui lui seront adressées - sous pli recommandé, selon sa requête -, soient envoyées à son conseil d'office dans la procédure cantonale. 
 
2.   
Est querellée devant le Tribunal fédéral la décision du 18 février 2019 en tant qu'elle refuse de restituer l'effet suspensif au recours dirigé contre une décision autorisant le recours à la médication forcée dans le cadre d'un traitement institutionnel. Le refus de restituer l'effet suspensif constitue une décision incidente notifiée séparément au sens des art. 92 s. LTF. Au Tribunal fédéral, la voie de droit est déterminée par l'objet de la procédure principale dans laquelle la décision incidente a été rendue (arrêts 6B_1126/2016 du 10 octobre 2016 consid. 1.3; 5A_237/2009 du 10 juin 2009 consid. 1.1 et les références citées). 
 
En l'espèce, la voie du recours en matière pénale est ouverte dès lors que l'autorisation d'administrer une médication sous contrainte dans le cadre d'une mesure institutionnelle constitue une décision sur l'exécution d'une mesure au sens de l'art. 78 al. 2 let. b LTF. La Cour de droit pénal est compétente pour en connaître (arrêts 6B_1126/2016 du 10 octobre 2016 consid. 1.3; 6B_824/2015 du 22 septembre 2015 consid. 1.1). 
 
3.   
Conformément à l'art. 93 al. 1 LTF en corrélation avec l'art. 92 LTF, les décisions préjudicielles et incidentes notifiées séparément qui ne concernent ni la compétence ni la récusation peuvent faire l'objet d'un recours si elles peuvent causer un préjudice irréparable (let. a) ou si l'admission du recours peut conduire immédiatement à une décision finale qui permet d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse (let. b). On renvoie quant à la notion de préjudice irréparable à l'ATF 142 III 798 consid. 2.2 p. 800 s. et les citations. 
 
La médication forcée constitue une atteinte importante à l'intégrité physique et mentale (arrêt 6B_821/2012 consid. 4.4). Une décision finale même entièrement favorable au recourant ne pourrait pas faire totalement disparaître un tel préjudice, de sorte que le recours est recevable quant à son objet. 
 
4.   
Conformément à l'art. 98 LTF, dans le cas des recours formés contre des décisions portant sur des mesures provisionnelles, seule peut être invoquée la violation des droits constitutionnels. Le Tribunal fédéral n'examine toutefois de tels moyens que s'ils sont invoqués et motivés par le recourant (art. 106 al. 2 LTF), c'est-à-dire s'ils ont été expressément soulevés et exposés de manière claire et détaillée (ATF 142 III 364 consid. 2.4 p. 368 et les références citées). Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 142 III 364 consid. 2.4 p. 368 et les références citées). 
 
4.1. En l'espèce, le recourant n'invoque expressément que la violation du droit fédéral en se référant à l'art. 393 CPP. Il ne cite aucune norme constitutionnelle ou conventionnelle ni ne mentionne un quelconque droit fondamental qu'il considérerait comme violé par la décision entreprise. Les développements de l'écriture de recours ne répondent dès lors pas, à la forme, aux exigences auxquelles l'art. 106 al. 2 LTF soumet la recevabilité des seuls griefs qui peuvent être élevés conformément à l'art. 98 LTF contre une décision incidente. Cela conduit à l'irrecevabilité du recours en matière pénale.  
 
4.2. Au demeurant, et à supposer que le recourant, qui n'est pas assisté, ait formulé ses critiques d'une manière plus conforme aux exigences précitées, les arguments qu'il présente ne sont pas de nature à démontrer matériellement l'existence d'une violation de ses droits fondamentaux.  
 
4.2.1. Les voies de recours du Code de procédure pénale n'ont, en principe, pas d'effet suspensif, mais la direction de la procédure de l'autorité de recours peut en décider autrement (art. 387 CPP). Cette dernière dispose d'un large pouvoir d'appréciation afin de décider si l'effet suspensif doit être restitué. En matière de mesures provisionnelles, la même autorité dispose d'un pouvoir comparable en vertu de l'art. 388 CPP. Elle doit néanmoins s'assurer que le droit de recourir reconnu par la loi ne soit pas compromis, et en particulier que le recours puisse garder son objet (ATF 137 IV 237 consid. 2.2 p. 241). En règle générale, l'autorité qui prononce le refus ou l'octroi de l'effet suspensif à un recours, le fait en l'état du dossier, à l'issue d'un examen sommaire des pièces, sous l'angle de la vraisemblance (cf. arrêt 6B_882/2017 du 1er septembre 2017; v. aussi VIKTOR LIEBER, in Kommentar zur Schweizerischen Strafprozessordnung, 2e éd. 2014, no 3 ad art. 387 CPP).  
 
4.2.2. La cour cantonale a notamment retenu de son examen des pièces du dossier que pour le Dr B.________ (expertise du 12 mai 2018 et complément du 5 octobre 2018), la schizophrénie indifférenciée du recourant n'était que partiellement compensée, ce qui pouvait contribuer à augmenter un risque de passage à l'acte violent en cas de décompensation aiguë (risque de degré moyen) et justifiait la réintroduction d'une médication. La remise en route d'un tel traitement neuroleptique était aussi recommandée sans réserve par le Pr C.________ et le Dr D.________ dans un rapport de suivi du mois de septembre 2018. Depuis son admission à A.________ en octobre 2016, le recourant avait fait l'objet de 12 sanctions entre le 19 mars et le 2 octobre 2018, notamment pour refus d'obtempérer ainsi que des menaces et des comportements inappropriés; depuis son admission à l'unité de mesure no 5, sa prise en charge était devenue plus difficile et les mesures disciplinaires s'étaient poursuivies en 2019. Le 11 septembre 2018, le recourant avait fait l'objet d'un placement à des fins d'assistance en milieu psychiatrique en raison d'une décompensation psychotique et d'un risque de passage à l'acte auto-hétéro-agressif. L'expertise réalisée dans ce cadre relevait que l'hospitalisation était tout à fait indiquée, que le patient refusait toute médication, que son état était loin d'être stabilisé, que la poursuite de l'hospitalisation s'imposait dans le but de lui faire accepter la prise d'un traitement neuroleptique, qu'à défaut de placement son état psychique se serait dégradé et que cela aurait conduit à la répétition d'actes hétéro-agressifs envers les gardiens et l'équipe soignante. Le placement avait été interrompu le 18 septembre 2018 ensuite de l'amélioration de l'état clinique.  
 
4.2.3. Dans la mesure où le recourant, tenu pour anosognosique par les psychiatres qui l'ont examiné, conteste les diagnostics posés et l'existence de tout risque de passage à l'acte hétéro-agressif en se référant à son ressenti et à des définitions d'encyclopédie, ses explications ne sont pas propres à mettre en évidence des raisons sérieuses de douter des conclusions des expertises auxquelles s'est référée la cour cantonale, sous l'angle de la vraisemblance. Il n'en va pas différemment lorsqu'il critique l'un de ces rapports en imputant à son auteur d'avoir versé dans la subjectivité, motif pris de la longueur inhabituelle du document. En niant toute agressivité physique envers des tiers et tout passage à l'acte concret par le passé, le recourant, dont l'argumentation consiste essentiellement à opposer sa propre appréciation à celle de la cour cantonale, perd de vue, d'une part, que la décision cantonale tient aussi compte de l'intérêt à le protéger contre lui-même (risque auto-agressif) et, d'autre part, qu'il s'agit déjà de contenir  l'accroissement du risque de passage à l'acte lié à une éventuelle décompensation. Or, un tel événement a nécessité un placement en institution psychiatrique au mois de septembre 2018 et l'état actuel de l'intéressé n'est toujours que partiellement compensé. On ne saurait ainsi reprocher à la cour cantonale d'avoir retenu l'existence de risques auto- et hétéro-agressifs qui apparaissent d'autant plus concrets qu'une décompensation récente a justifié un placement en institution psychiatrique. De surcroît, tant la période antérieure à cet épisode que celle postérieure sont et restent marquées par des comportements sanctionnés disciplinairement (des menaces notamment), qui paraissent devoir être mis en relation avec la compensation seulement partielle de l'état psychique du recourant attestée par les experts et constatée par la cour cantonale. Enfin, la médication en question doit également permettre au recourant de reprendre son programme de resocialisation et, plus généralement, elle doit permettre à la mesure institutionnelle dont il bénéficie d'atteindre son but. En tant que la cour cantonale a ainsi souligné de manière convaincante la conjonction d'un intérêt public non négligeable à protéger les tiers (notamment le personnel encadrant et soignant de l'établissement) contre des actes hétéro-agressifs et d'un intérêt privé du recourant à sa propre protection contre des actes auto-agressifs, la priorité reconnue à ces intérêts-ci, face au seul intérêt privé du recourant à refuser tout traitement, n'apparaît pas critiquable, même compte tenu de l'atteinte que constitue la médication forcée, pour peu, toutefois, qu'une décision soit rendue à bref délai sur le fond par la cour cantonale.  
 
L'argumentation développée par le recourant apparaît ainsi essentiellement appellatoire. Supposée recevable, elle ne serait de toute manière pas de nature à démontrer matériellement que la décision cantonale serait arbitraire dans sa motivation ou son résultat et, plus généralement qu'elle violerait un droit fondamental du recourant. 
 
5.   
Exceptionnellement, la présente décision est rendue sans frais (art. 66 al. 1 LTF). Vu l'issue de la procédure, le recourant ne peut prétendre à aucune indemnité et doit être renvoyé à l'autorité cantonale en ce qui concerne ses demandes tendant à obtenir copie du dossier de la cause, respectivement qu'une copie de la présente décision soit adressée à son conseil d'office en procédure cantonale. 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.   
Il n'est pas perçu de frais judiciaires. 
 
3.   
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal de la République et canton du Jura, Cour administrative. 
 
 
Lausanne, le 28 mars 2019 
 
Au nom de la Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Denys 
 
Le Greffier : Vallat