Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
4A_41/2024
Arrêt du 28 octobre 2024
I
Composition
Mmes les Juges fédérales
Jametti, Présidente, Kiss et May Canellas.
Greffière : Mme Fournier.
Participants à la procédure
A.________,
représenté par Me Marie-Christine Balzan, avocate,
recourant,
contre
B.________ SA,
représentée par Me Olivier Subilia, avocat,
intimée.
Objet
droit du travail,
recours contre le jugement de la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 29 novembre 2023 (PT15.029924-221310, 480).
Faits :
A.
A.a. B.________ SA (ci-après: "l'employeuse") est une société dont le but social est l'analyse, le conseil et le courtage en matière financière.
À compter du 1er août 2001, elle a engagé A.________ (ci-après: "l'employé") en tant que courtier.
Conformément à l'art. 5 du contrat de travail, l'employé était rémunéré à la commission, à hauteur de 25% des montants générés par son activité de négoce en faveur des clients qui lui étaient attribués. Cette commission était calculée à la fin de chaque trimestre, puis versée à l'employé dans les trente jours suivants. L'employé recevait chaque mois une avance sur rémunération de 5'000 fr.
Le contrat prévoyait une compensation entre les commissions effectivement dues à l'employé et les avances versées.
A.b. Sur demande de sa part, l'employé a fréquemment reçu des avances supérieures au montant de 5'000 fr., soit sous la forme de versements, soit sous celle de paiements de factures diverses dont l'employé était le débiteur.
Par ailleurs, à plusieurs occasions, l'employé a contracté d'importants emprunts à l'employeuse.
En tenant compte de ces différents versements et des remboursements partiels effectués par l'employé, il résulte que, pour la période courant de 2005 à 2008, l'employé devait à l'employeuse la somme de 657'484 fr. 40.
A.c. Les parties ont convenu de modifier la rémunération de l'employé à partir du 1er avril 2005. Ainsi, à compter de cette date, la rémunération de l'employé était composée d'une "
broker remuneration " (ci après: la "commission du courtier") et d'une "
manager remuneration " (ci après: la "commission du manager"), conformément à l'offre non signée du 18 mars 2005 qui était formulée comme suit:
"5. Broker Remuneration
Your employment with the Company is on a commission basis. Your commission will be 30% of the net brokerage revenues generated by your clients. Net brokerage revenues are gross revenues, less all discounts and costs directly related to those revenues.
You will be paid a non-reimbursable advance on commission of CHF 5,000 per month, payable on the 25th day of each month.
At the end of each calendar quarter your commission will be calculated as 30% of the net brokerage revenues generated by your clients. The advances received during the calendar quarter will be deducted from your commission.
Commission, if any, will be paid within 30 days after the end of the calendar quarter to which it relates.
6. Manager Remuneration
As compensation for your responsibilities as a manager, you will receive a 5% of the net brokerage revenues generated by the members of the team you manage including yourself. Net brokerage revenues are gross revenues, less all discounts and costs directly related to those revenues.
At the end of each calendar quarter your manager remuneration will be calculated as 5% of the net brokerage revenues generated by the members of the team you manage including yourself.
Manager remuneration, if any, will be paid within 30 days after the end of the calendar quarter to which it relates."
L'offre non signée du 18 mars 2005 prévoyait, en outre, une "
team bonus remuneration " (ci-après: le "bonus d'équipe") selon les termes suivants:
"7. Team Bonus Remuneration
At the end of each calendar year, you, as manager of your team and in consultation with the managing directors, will allocate a bonus pool to the members of your team, including yourself.
Provided that normal levels of profitability and business prudence are maintained, the bonus pool will be calculated as 50% of the team members' net brokerage revenues generated in the year, less remuneration already paid by the Company to the team members including yourself for the year."
Ainsi, le bonus d'équipe se distinguait de la commission du courtier et de la commission du manager notamment en ce qui concernait le cercle de ses bénéficiaires: alors que la commission du courtier et la commission du manager revenaient à l'employé uniquement, le bonus d'équipe était quant à lui destiné aux membres de l'équipe dirigée par le recourant (lui-même inclus) et devait être réparti entre eux selon une décision prise par les "
managing directors " de l'intimée et l'employé.
A.d. L'employé a démissionné avec effet pour la fin du mois de septembre 2008.
Au terme des rapports contractuels, l'employeuse a communiqué à l'employé divers décomptes faisant état de la créance qu'elle estimait détenir à son encontre.
La rémunération effectivement versée à l'employé de 2001 à 2008 s'élève à 8'720'984 fr. au total, soit 7'412'836 fr. 40 de rémunération brute et 1'308'147 fr. 60 versés à titre de frais de représentation. L'employé a par ailleurs reçu 1'505'969 fr. à titre de bonus d'équipe.
B.
B.a. Par requête introduite le 8 janvier 2015 auprès de l'autorité de conciliation, déclarée non conciliée puis portée auprès de la Chambre patrimoniale cantonale vaudoise, l'employeuse a assigné l'employé en paiement de la somme de 657'484 fr. 40 avec intérêts. En bref, elle réclamait à l'employé le solde dû en vertu des avances et du prêt versés en cours d'emploi. Par ailleurs, l'employeuse contestait que les conditions de rémunération de l'employé aient été modifiées au 1er avril 2005.
L'employé a conclu au rejet de la demande et, reconventionnellement, au paiement par l'employeuse de la somme de 638'996 fr. avec intérêts, à porter en compensation de tout montant qu'il serait condamné à lui verser et à ce "qu'il lui soit donné acte de ce qu'il chiffrerait de manière complète et préciserait ses conclusions reconventionnelles après le dépôt de l'expertise définitive", laquelle avait pour but d'éclaircir certains faits de nature comptable. En substance, l'employé se prévalait des conditions de rémunération prévues dans l'offre non signée du 18 mars 2005 et prétendait que l'employeuse était débitrice envers lui d'un solde composé de commissions, de bonus d'équipe ainsi que de frais de représentation.
Lors des plaidoiries finales du 18 mai 2022, l'employé a augmenté ses conclusions reconventionnelles, en ce sens que l'employeuse soit condamnée à lui verser la somme de 3'429'325 fr. 65 avec intérêts, à compenser avec toute somme qu'il serait condamné à payer à l'employeuse.
Par jugement du 23 juin 2022, la Chambre patrimoniale cantonale vaudoise a rejeté la demande principale et la demande reconventionnelle et déclaré irrecevable la demande reconventionnelle déposée par l'employé dans sa teneur modifiée du 18 mai 2022. En substance, les premiers juges ont retenu que l'employé n'avait ni allégué, ni prétendu que ses conclusions reconventionnelles dans leur teneur modifiée reposaient sur des faits nouveaux au sens de l'art. 230 al. 1 let. b CPC (complément d'office sur la base du jugement de première instance). Ils ont en outre estimé que l'employé était débiteur de la somme de 657'484 fr. 40 envers l'employeuse, en lien avec les avances qui lui avaient été versées par celle-ci entre 2005 et 2008. Quant à l'employé, il était titulaire envers l'employeuse de plusieurs créances d'un montant total de 1'659'226 fr. La prescription de celles-ci avait été à juste titre invoquée par l'employeuse; les créances prescrites pouvaient toutefois être opposées en compensation.
B.b. Statuant le 29 novembre 2023, la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud a admis l'appel de l'employeuse et rejeté l'appel joint de l'employé. Ce faisant, elle a condamné l'employé à payer à l'employeuse la somme de 657'484 fr. 40, intérêts en sus.
La cour cantonale a considéré que l'employé n'avait pas de créance à opposer en compensation à cette somme qui était incontestée. La rémunération à laquelle il avait droit se montait tout au plus à 7'871'818 fr. 45, incluant notamment la commission du courtier (3'543'656 fr.), la commission du manager (2'468'535 fr. 65) et sa part au bonus d'équipe (1'505'969 fr.). Or, il avait reçu 8'720'984 fr. en tout, y compris des frais de représentation, de sorte que l'employeuse ne lui devait plus rien. Certes, l'employé prétendait que le bonus d'équipe lui était dû en intégralité (soit 5'906'197 fr.) - et non seulement en partie, avec les membres de son équipe - mais tel n'était pas le cas contrairement à ce qu'avait retenu l'instance précédente. Comme il n'était pas fondé à réclamer l'entier de ce montant, l'employé aurait dû démontrer quel montant lui était dû à titre de bonus d'équipe pour chaque année, ce qu'il n'avait pas fait. Dans ces circonstances, la cour cantonale a retenu le montant admis par l'employeuse, soit 1'505'969 fr. à titre de bonus d'équipe pour les années 2005 à 2007, ce qui correspondait à 25% du total arrêté par l'expert. S'agissant d'un bonus d'équipe
pro rata temporis pour l'année 2008, durant laquelle le contrat de travail avait pris fin, la cour cantonale a confirmé que l'employé n'y avait pas droit. D'une part, l'employé n'avait derechef pas démontré à quelle part de ce bonus d'équipe il aurait eu droit pour l'année en question. D'autre part, il s'agissait d'une gratification au sens de l'art. 322d CO laquelle se situait largement au-delà du plafond justifiant une requalification du bonus en salaire en vertu du principe de l'accessoriété. Et comme ni le contrat initial ni le document du 18 mars 2005 ne contenaient de clause prévoyant un droit au versement du bonus en cas de fin du contrat de travail en cours d'année, l'employé ne pouvait prétendre à quoi que ce soit (art. 322d al. 2 CO).
C.
L'employé (ci-après: le "recourant") forme un recours en matière civile à l'encontre de cet arrêt, assorti d'une requête d'effet suspensif. Il conclut, principalement, à ce que le Tribunal fédéral dise et constate qu'il est créancier de l'employeuse (ci-après: l'"intimée") pour un montant de 904'983 fr. 85 et qu'il est en droit de compenser ladite créance avec celle que l'intimée détient à son encontre. Subsidiairement, il sollicite l'annulation de l'arrêt querellé et le renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision dans le sens des considérants.
La demande d'effet suspensif a été rejetée par ordonnance présidentielle du 22 février 2024.
Invitée à répondre au recours, l'intimée a conclu au rejet de celui-ci dans la mesure de sa recevabilité, suscitant une réplique du recourant à laquelle elle a dupliqué.
La cour cantonale s'est référée aux considérants de son arrêt.
Considérant en droit :
1.
Le recours est dirigé contre un arrêt final (art. 90 LTF) rendu en matière civile (art. 72 al. 1 LTF) par un tribunal supérieur désigné comme autorité cantonale de dernière instance, lequel a statué sur recours (art. 75 LTF). La cause atteint le seuil de 15'000 fr. fixé à l'art. 74 al. 1 let. a LTF. Au surplus, le recours est exercé par la partie qui a succombé dans ses conclusions et qui a donc qualité pour recourir (art. 76 al. 1 LTF). Déposé dans le délai (art. 100 al. 1 LTF et art. 46 al. 1 let. c LTF) et la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi, le recours est en principe recevable. Demeure réservée, à ce stade, la recevabilité des griefs soulevés par le recourant.
2.
2.1. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si ces faits ont été établis de façon manifestement inexacte - ce qui correspond à la notion d'arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 140 III 115 consid. 2; 137 I 58 consid. 4.1.2; 137 II 353 consid. 5.1) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF), et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF).
Concernant l'appréciation des preuves, le Tribunal fédéral n'intervient, du chef de l'art. 9 Cst., que si le juge du fait n'a manifestement pas compris le sens et la portée d'un moyen de preuve, a omis sans raisons objectives de tenir compte des preuves pertinentes ou a effectué, sur la base des éléments recueillis, des déductions insoutenables (ATF 137 III 226 consid. 4.2; 136 III 552 consid. 4.2; 134 V 53 consid. 4.3).
La critique de l'état de fait retenu est soumise au principe strict de l'allégation énoncé par l'art. 106 al. 2 LTF (ATF 140 III 264 consid. 2.3 et les références citées). La partie qui entend attaquer les faits constatés par l'autorité précédente doit expliquer clairement et de manière circonstanciée en quoi ces conditions seraient réalisées (ATF 140 III 16 consid. 1.3.1 et les références citées). Si la critique ne satisfait pas à ces exigences, les allégations relatives à un état de fait qui s'écarterait de celui de la décision attaquée ne pourront pas être prises en considération (ATF 140 III 16 consid. 1.3.1). Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 130 I 258 consid. 1.3).
Le complètement de l'état de fait ne relève pas de l'arbitraire; un fait non constaté ne peut pas être arbitraire, c'est-à-dire constaté de manière insoutenable. En revanche, si un fait omis est juridiquement pertinent, le recourant peut obtenir qu'il soit constaté s'il démontre qu'en vertu des règles de la procédure civile, l'autorité précédente aurait objectivement pu en tenir compte et s'il désigne précisément les allégués et les offres de preuves qu'il lui avait présentés, avec référence aux pièces du dossier (ATF 140 III 86 consid. 2).
2.2. C'est le lieu de relever que les éléments de fait qui ressortent du mémoire de recours, notamment de la partie "en fait", et divergent de ceux retenus par la cour cantonale, sans que l'arbitraire ou le complètement de l'état de fait ne soit invoqué dans les formes prescrites, ne seront pas pris en considération.
2.3. Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Compte tenu de l'exigence de motivation contenue à l' art. 42 al. 1 et 2 LTF , sous peine d'irrecevabilité (art. 108 al. 1 let. b LTF), il n'examine en principe que les griefs invoqués, sauf en cas d'erreurs juridiques manifestes. Il n'est pas tenu de traiter, comme le ferait une autorité de première instance, toutes les questions juridiques qui pourraient se poser, lorsque celles-ci ne sont plus discutées devant lui (ATF 140 III 86 consid. 2; 137 III 580 consid. 1.3). Par exception à la règle selon laquelle il applique le droit d'office, il n'examine la violation d'un droit constitutionnel que si le grief a été invoqué et motivé de façon détaillée (art. 106 al. 2 LTF; ATF 137 III 580 consid. 1.3; 135 III 397 consid. 1.4).
3.
Il est acquis que les parties ont été liées par un contrat de travail dont les conditions de rémunération ont été modifiées conformément à l'offre non signée du 18 mars 2005 avec effet au 1er avril 2005. La qualification juridique de la commission du courtier et de la commission du manager, respectivement en tant que provision (art. 322b s. CO) et participation au résultat de l'exploitation (art. 322a CO), n'est en outre pas contestée. N'est également plus débattue l'existence de la créance de l'intimée à l'encontre du recourant, ni son montant de 657'484 fr. 40.
À ce stade, le recourant reproche à la cour cantonale d'avoir nié qu'il détiendrait une créance (prescrite) découlant du contrat de travail d'un montant de 904'983 fr. 85, laquelle pourrait être opposée en compensation de la créance de l'intimée. Le recourant conteste en effet avoir perçu l'intégralité de sa rémunération pour l'année 2008 (à titre de commission du courtier et commission du manager) et avoir perçu son bonus d'équipe relatif à l'année 2007, qui lui serait pourtant dû (
infra 5). Ce faisant, il dénonce un établissement arbitraire des faits (
infra 4).
4.
Selon le recourant, les faits seraient entachés d'arbitraire sur plusieurs aspects.
4.1. Tout d'abord, le recourant reproche à l'instance précédente d'avoir déclaré irrecevables ses allégués - dans la mesure où ils s'écartaient des faits retenus par les premiers juges -, dès lors que ces allégués n'étaient pas assortis du grief de la constatation inexacte des faits. Si l'on saisit bien, il reproche concrètement à la cour cantonale de n'avoir pas reproduit dans son arrêt les chiffres de deux tableaux établis par l'expert concernant le détail de la rémunération qui lui serait due en vertu du contrat et qu'il aurait perçue. S'ensuivrait selon lui un résultat arbitraire, puisque l'instance précédente aurait admis à tort que le recourant avait déjà perçu l'intégralité de sa rémunération.
La critique du recourant ne répond pas aux exigences rappelées ci-dessus, celui-ci ne démontrant pas en quoi l'autorité précédente aurait établi les faits de manière arbitraire (art. 106 al. 2 LTF). Faute de références précises à l'arrêt cantonal, le Tribunal fédéral ne parvient même pas à discerner quels points de l'état de fait auraient d'après lui été constatés de manière insoutenable. La vague référence aux "commissions dues au recourant chaque année" et à la "rémunération qu'il avait effectivement perçue annuellement" n'est manifestement pas suffisante. Par ailleurs, il n'appartient pas à la cour de céans de rechercher dans la partie "en fait" du mémoire de recours d'éventuels fragments de critiques qui pourraient être utilisés à l'appui du grief. Enfin, on peine à comprendre en quoi la cour cantonale aurait ignoré l'expertise, cette dernière s'y étant référée à plusieurs reprises en citant précisément les chiffres que ses tableaux contenaient.
Partant, le grief est irrecevable.
4.2. Sous un deuxième grief intitulé "violation des articles 322 ss CO [...]", le recourant reproche en substance à la cour cantonale d'avoir, dans les faits, retenu qu'il avait perçu l'intégralité de sa "
broker remuneration " (commission du courtier)
et de sa "
manager remuneration " (commission du manager) telles que définies dans le document du 18 mars 2005. Or, à le lire, tel ne serait pas le cas pour l'année 2008. Il résulterait en effet des tableaux de l'expert, en comparant les montants desdites commissions dues pour l'année 2008 avec le montant total indiqué sur le certificat de salaire de cette année-là, qu'un solde de 532'140 fr. 35 lui serait encore dû, respectivement un solde de 139'763 fr. 95 (les chiffres variant en fonction de la composition de l'équipe que supervisait le recourant; la composition de l'équipe n'avait pas été arrêtée par la cour cantonale bien qu'elle influençait notamment la commission du manager, calculée sur les résultats de l'équipe en question; cf.
infra consid. 4.3).
À la lecture de l'arrêt attaqué, il ressort que la cour cantonale n'a pas ignoré les chiffres des tableaux en question. Pour déterminer si le recourant détenait encore une créance à l'encontre de l'intimée, l'instance précédente a procédé à un calcul global sur toute la durée de la relation contractuelle. Ce faisant, elle a constaté que le montant total de 8'720'984 fr., composé des sommes versées au recourant entre 2001 et 2008, couvrait, même en tenant compte d'une composition de son équipe favorable à celui-ci, l'intégralité de la commission du courtier (3'543'656 fr.), de la commission du manager (2'468'535 fr. 65) et de sa part au bonus d'équipe équivalant, selon la cour cantonale, au montant de 1'505'969 fr.. Sur cette base, la cour cantonale a jugé que l'intimée ne devait plus rien au recourant en vertu du contrat de travail.
Le recourant ne démontre pas que, procédant par ce calcul, la juridiction cantonale aurait versé dans l'arbitraire. Tel n'est d'ailleurs pas le cas, d'autant moins que le calcul global effectué par l'instance précédente s'imposait en raison du fait que les parties s'étaient entendues sur des paiements effectués d'avance par l'intimée et sur un système de commission dont le montant était parfois calculé et versé après l'année à laquelle chaque commission était rattachée.
Le grief doit dès lors être rejeté.
4.3. Dans un troisième grief, le recourant reproche encore à la cour cantonale d'avoir arbitrairement omis de se prononcer sur la composition de l'équipe qu'il dirigeait. Or, les parties se disputaient cette composition d'équipe qui avait une influence sur la rémunération du recourant. Certains postes de la rémunération étaient en effet calculés sur les résultats de l'équipe. L'expert avait effectué ses calculs sur la base des hypothèses des deux parties. Selon le recourant, l'autorité précédente aurait dû retenir qu'il avait dirigé l'ensemble des membres du "
Turkish desk " jusqu'au terme des rapports de travail et dès lors se baser sur les chiffres de l'expertise correspondant à cette hypothèse, qui lui étaient par ailleurs plus favorables.
Contrairement à ce que soulève le recourant, un fait non constaté ne peut pas être arbitraire, c'est-à-dire constaté de manière insoutenable. Pour obtenir la constatation du fait en question, le recourant aurait dû (notamment) démontrer que ce fait était juridiquement pertinent. Or, il n'expose à ce propos aucun argument concluant. En effet, si la cour cantonale n'a pas établi la composition de l'équipe chapeautée par le recourant, c'est que ce point n'avait aucune influence sur l'issue de la cause. L'arrêt entrepris démontre en effet qu'en calculant la rémunération globale du recourant selon les chiffres des deux hypothèses, la même conclusion s'impose: la rémunération du recourant était couverte par les versements opérés par l'intimée (
supra consid. 4.2).
Ainsi, le grief doit lui aussi être rejeté.
5.
Dans un autre moyen figurant sous le titre "violation des articles 322 ss CO [...]", le recourant prétend qu'il détiendrait une créance envers l'intimée à titre de bonus d'équipe.
5.1. Le recourant soutient que la cour cantonale aurait, de manière erronée, qualifié le bonus d'équipe de gratification discrétionnaire (art. 322d CO). Selon lui, le bonus d'équipe serait une "gratification due dans son principe". Ainsi, un bonus d'équipe lui serait dû notamment pour l'année 2007; celui-ci s'élèverait à 372'843 fr. 50. Or, l'intimée ne lui aurait pas versé ce montant. Preuve en serait que le certificat de salaire de l'année 2008 indiquerait un montant qui ne permettrait même pas de couvrir son salaire variable.
5.2. Contrairement à ce que semble croire le recourant, la cour cantonale a rejeté ses prétentions relatives au bonus d'équipe pour 2007 non pas sur la base de sa qualification juridique en tant que gratification, mais - à juste titre - en raison du fait que le recourant n'avait pas démontré à quelle part dudit bonus il avait droit (
supra let. B.b). On ignore effectivement à quoi correspond la somme qu'il articule dans son grief et où cette prétention aurait été alléguée et démontrée en procédure.
Au vu de ce qui précède, il n'est donc pas nécessaire de revenir sur la qualification juridique du bonus d'équipe.
Partant, le grief doit être rejeté, dans la mesure où il est recevable.
6.
Enfin, le recourant reproche à l'instance précédente de n'avoir pas examiné la recevabilité des conclusions modifiées lors des plaidoiries finales ainsi que les conditions relatives à la compensation.
En l'occurrence, point n'est besoin d'analyser ses critiques, puisqu'il ressort de ce qui précède que le recourant n'est titulaire d'aucune créance à l'encontre de l'intimée.
7.
En définitive, le recours doit être rejeté dans la mesure de sa recevabilité. Le recourant, qui succombe, supportera les frais de procédure (art. 66 al. 1 LTF) et versera des dépens à l'intimée ( art. 68 al. 1 et 2 LTF ).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 16'500 fr., sont mis à la charge du recourant.
3.
Le recourant versera à l'intimée une indemnité de 18'500 fr. à titre de dépens.
4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud.
Lausanne, le 28 octobre 2024
Au nom de la I re Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
La Présidente : Jametti
La Greffière : Fournier