Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
9C_689/2023
Arrêt du 29 janvier 2024
IIIe Cour de droit public
Composition
M. et Mmes les Juges fédéraux Parrino, Président, Moser-Szeless et Scherrer Reber.
Greffier : M. Cretton.
Participants à la procédure
A.________,
représenté par Me Jean-Michel Duc, avocat,
recourant,
contre
Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud,
avenue du Général-Guisan 8, 1800 Vevey,
intimé.
Objet
Assurance-invalidité (procédure cantonale en matière d'assurances sociales),
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 26 septembre 2023 (AI 211/23 - 259/2023).
Faits :
A.
Invoquant des troubles psychiques (crises d'angoisse et dépression) apparus à la suite de mobbing, A.________, né en 1966, a requis des prestations de l'assurance-invalidité le 12 janvier 2017. Averti par un projet de décision du 21 juin 2022 que l'Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud (ci-après: l'office AI) envisageait de lui octroyer trois quarts de rente du 1er juillet 2017 au 31 juillet 2021 et un quart de rente dès le 1er août 2021, il a mandaté l'association Inclusion Handicap pour le représenter. Par décision du 3 novembre 2022, notifiée directement à l'assuré, l'office AI a reconnu le droit de ce dernier à un quart de rente à partir du 1er décembre 2022. Par courrier du même jour, Inclusion Handicap a informé l'administration qu'elle ne représentait plus l'assuré. Par courriel du 9 novembre 2022, A.________ a demandé à l'office AI qu'il lui fournisse des précisions supplémentaires (notamment en ce qui concerne la différence entre un recours et une demande de révision) et, comme son représentant avait résilié son mandat, qu'il lui accorde "un délai de recours rallongé" afin qu'il puisse s'entretenir avec son psychiatre traitant et son assistante sociale pour déterminer l'opportunité de recourir contre la décision du 3 novembre 2022. Il s'est également adressé à la caisse de compensation pour obtenir des informations sur le calcul de sa rente par courrier du même jour. Par décision du 22 décembre 2022, l'administration a accordé à l'assuré trois quarts de rente du 1er juillet 2017 au 30 avril 2018 et un quart de rente du 1er août 2021 au 30 novembre 2022, le droit à la rente ayant été suspendu du 1er mai 2018 au 31 juillet 2021 en raison des indemnités journalières versées durant la réalisation de mesures des réadaptation. Par acte du 28 décembre 2022, A.________ a formé une demande de révision de la rente motivée par une péjoration de ses troubles psychiques. A l'appui de sa demande, il a produit un rapport établi le 23 décembre 2022 par son psychiatre traitant.
B.
Par acte du 7 juillet 2023, A.________ a saisi la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal du canton de Vaud d'un recours contre la décision du 3 novembre 2022. Il a demandé la restitution du délai de recours et conclu, principalement, à la réforme de cette décision en ce sens qu'il a droit à une rente entière d'invalidité depuis le 1er juillet 2017 et, subsidiairement, à son annulation et au renvoi de la cause à l'office AI pour qu'il complète l'instruction et rende une nouvelle décision.
Par arrêt du 26 septembre 2023, la juridiction cantonale a rejeté la demande de restitution de délai et déclaré le recours irrecevable pour cause de tardiveté.
C.
A.________ interjette un recours en matière de droit public contre cet arrêt. Il en demande l'annulation et conclut au renvoi de la cause au tribunal cantonal pour qu'il procède conformément aux considérants et rende un nouveau jugement.
Considérant en droit :
1.
Le recours en matière de droit public (au sens des art. 82 ss LTF) peut être formé pour violation du droit (circonscrit par les art. 95 et 96 LTF ). Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Il n'est limité ni par l'argumentation de la partie recourante ni par la motivation de l'autorité précédente. Il statue sur la base des faits établis par cette dernière (art. 105 al. 1 LTF). Cependant, il peut rectifier les faits ou les compléter d'office s'ils ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). Le recourant ne peut critiquer les faits que s'ils ont été constatés de façon manifestement inexacte ou contraire au droit et si la correction d'un tel vice peut influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF).
2.
Est avant tout litigieux le point de savoir si la juridiction cantonale était en droit de rejeter la demande de restitution du délai de recours contre la décision du 3 novembre 2022 et, partant, de déclarer irrecevable, parce que tardif, le recours que l'assuré avait déposé le 7 juillet 2023.
3.
L'arrêt attaqué expose les normes et la jurisprudence indispensables à la résolution du litige, en particulier celles relatives au délai de recours, son calcul, son observation, sa prolongation et sa restitution (art. 60 LPGA en lien avec les art. 38-41 LPGA ; ATF 119 II 86 consid. 2a; 112 V 255 consid. 2a), au devoir d'information des assureurs (art. 27 al. 1 LPGA) en relation avec le principe de la protection de la bonne foi (art. 9 Cst.; ATF 131 V 472 consid. 5; 131 II 627 consid. 6.1), au degré de vraisemblance auquel les faits doivent être établis en matière d'assurances sociales et à la portée de la maxime inquisitoire dans la procédure (ATF 144 V 427 consid. 3.2; 139 V 176 consid. 5.3; 125 V 193 consid. 2), ainsi qu'à l'organisation de débats publics (art. 6 par. 1 CEDH; ATF 136 I 279 consid. 1; 122 V 47 consid. 3b/dd). Il suffit d'y renvoyer.
4.
Le tribunal cantonal a considéré que la demande de restitution du délai de recours était manifestement infondée. Il a exclu dans un premier temps que la simultanéité de la notification de la décision litigieuse et de la résiliation du mandat de représentation ait empêché le recourant d'agir dans le délai légal de recours. Se fondant en particulier sur les deux courriers adressés par l'assuré aux autorités compétentes le 9 novembre 2022, il a notamment relevé que l'assuré avait compris le contenu de la décision du 3 novembre 2022 ainsi que le fait qu'elle était susceptible de recours et avait entrepris des démarches sans l'aide d'un avocat dès le début du délai pour déterminer l'opportunité de recourir. Il a exclu dans un deuxième temps que le recourant puisse faire valoir un empêchement d'ordre médical pour justifier le fait qu'il n'avait pas déposé de recours dans le délai. Il a constaté à ce propos que la détérioration de la situation médicale dont le psychiatre traitant avait fait état durait depuis le 15 juillet 2022, qu'elle ne s'était pas accentuée pendant le délai de recours et qu'elle n'avait pas empêché l'assuré d'entreprendre rapidement des démarches utiles pour la préservation de ses droits, ni de déposer sans l'aide d'un avocat une demande de révision le 28 décembre 2022. Il a exclu dans un troisième temps que l'office intimé ait violé son devoir de renseigner et dissuadé le recourant d'agir en omettant de répondre à la demande de prolongation de délai contenue dans le courriel du 9 novembre 2022. Il a relevé à cet égard que la décision litigieuse donnait toutes les informations nécessaires et indiquait expressément que le délai de recours ne pouvait pas être prolongé, ainsi que les conséquences de l'absence de recours déposé dans le délai. Il a également retenu que si l'absence de réponse de la part de l'administration pouvait être déplorée, elle ne justifiait en tout cas pas l'absence de toute démarche de contestation pendant plusieurs mois. Il a par ailleurs écarté la demande de débats publics au motif que la demande de restitution de délai était manifestement mal fondée.
5.
5.1. Le recourant reproche d'abord aux premiers juges d'avoir établi les faits d'une manière manifestement inexacte. Il soutient essentiellement que l'autorité précédente a omis de prendre en compte le fait que son état de santé psychique durant le délai de recours ne lui permettait pas "de se défendre utilement sur le plan procédural et administratif, dans un contexte de non-assistance juridique de surcroît". Ce grief n'est toutefois pas fondé dès lors que, sur la base du rapport du psychiatre traitant du 23 décembre 2022, la juridiction cantonale a expressément constaté, de manière dénuée d'arbitraire, que la nature de l'aggravation de la situation (recrudescence des symptômes avec augmentation de la fréquence et de l'intensité des crises d'angoisse et réapparition de symptômes dépressifs ayant notamment motivé une augmentation du traitement médicamenteux) et les limitations fonctionnelles (difficultés à gérer des situations imprévues et/ou stressantes, difficultés d'organisation et de gestion des tâches, difficultés de concentration, troubles attentionnels, fatigabilité accrue, diminution de rendement) n'avaient pas empêché le recourant d'entreprendre des démarches démontrant que celui-ci était à même de se défendre ou, au moins, de mandater un nouvel avocat.
De même, c'est en vain que le recourant se plaint d'arbitraire en ce que la juridiction cantonale aurait constaté une absence de volonté de sa part de recourir dans son courriel du 9 novembre 2022 puisqu'il y a indiqué ne pas être en mesure de décider sur l'opportunité de recourir avant notamment d'avoir consulté son psychiatre et son assistante sociale.
5.2. L'assuré reproche ensuite au tribunal cantonal d'avoir violé les art. 27 et 41 LPGA . Il soutient en substance qu'il s'imposait à l'office intimé de répondre à sa demande de prolongation du délai de recours sous peine de violer gravement son obligation d'informer, d'autant plus que cette requête avait été faite dans le contexte de crises d'angoisse dues à la perte de soutien de son avocat. Cet argument n'est pas davantage fondé que le précédent. Le recourant se contente en effet de procéder à sa propre appréciation générale de la situation, mais ne critique pas les motifs qui ont conduit la juridiction cantonale à nier une violation du devoir d'information. On rappellera à ce sujet que l'autorité précédente a déploré l'absence de réponse à la demande de prolongation de délai. Elle a cependant exclu un manquement de la part de l'office intimé qui aurait justifié l'absence de toute démarche de contestation de la décision du 3 novembre 2022 durant plusieurs mois dès lors que celle-ci contenait toutes les informations nécessaires pour recourir, plus particulièrement la mention de l'impossibilité de prolonger le délai de recours. Elle a aussi exclu que la résiliation du mandat de représentation et la situation médicales aient empêché l'assuré de recourir. Le recourant n'établit pas que cette appréciation serait arbitraire ou autrement contraire au droit.
5.3. L'assuré reproche enfin aux premiers juges d'avoir violé son droit d'être entendu en refusant d'organiser des débats publics. Il soutient qu'au contraire de ce qu'avait retenu l'autorité précédente, sa requête de prolongation du délai n'était pas manifestement infondée compte tenu de la résiliation du mandat de représentation et de son état de santé au moment de la notification de la décision litigieuse ainsi que du comportement contraire à la bonne foi adopté par l'office intimé. Cette argumentation n'est pas pertinente dès lors que le recourant a échoué à démontrer que les conclusions du tribunal cantonal quant aux conséquences de la résiliation du mandat de représentation, de sa situation médicale et du comportement de l'office intimé étaient arbitraires ou contraires au droit.
6.
Entièrement mal fondé, le recours doit être rejeté. Vu l'issue du litige, les frais judiciaires sont mis à la charge de l'assuré (art. 66 al. 1 LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté.
2.
Les frais judiciaires arrêtés à 500 fr. sont mis à la charge du recourant.
3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour des assurances sociales, et à l'Office fédéral des assurances sociales.
Lucerne, le 29 janvier 2024
Au nom de la IIIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Parrino
Le Greffier : Cretton