Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
8D_4/2021
Arrêt du 29 mars 2022
Ire Cour de droit social
Composition
MM. et Mme les Juges fédéraux Wirthlin, Président, Heine et Abrecht.
Greffière : Mme von Zwehl.
Participants à la procédure
A.________,
représenté par Me Daniel Kinzer, avocat,
recourant,
contre
Département de la sécurité, de la
population et de la santé (DSPS),
rue de l'Hôtel-de-Ville 14, 1204 Genève,
représenté par Me Nicolas Wisard, avocat,
intimé.
Objet
Droit de la fonction publique,
recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de Genève du 29 juin 2021 (A/3131/2020-FPUBL ATA/665/2021).
Faits :
A.
A.a. A.________ a été engagé en qualité de surveillant de la maison d'arrêt et de fin de peine à la maison de B.________ le 1er décembre 2005. Il a travaillé ensuite à C.________, à D.________, mais jamais à la prison de E.________. Le 13 avril 2017, il est devenu agent de détention sous le régime de la nouvelle loi cantonale sur l'organisation des établissements et le statut du personnel pénitentiaires (LOPP) entrée en vigueur le 1er mars 2017. Le 1er décembre 2018, il a été promu gardien principal adjoint à la maison de B.________, où il est toujours en poste.
Entre le 1er janvier 2014 et le 30 novembre 2019, A.________ prétend avoir accompli un total général de 1870 heures de travail les samedis, dimanches et jours fériés dans le cadre de son horaire planifié, lesquelles ont été inscrites dans la base de données COPP recensant les horaires des fonctionnaires de police et du personnel pénitentiaire.
A.b. Le 5 octobre 2018, l'Union du personnel du corps de police (ci-après: UPCP) s'est adressée au Conseiller d'État chargé du département de l'emploi et de la santé (ci-après: DES) - devenu depuis lors le département de la sécurité, de la population et de la santé (ci-après: DSPS) -, auquel la police était alors rattachée. Elle soutenait que les policiers avaient droit à une indemnité de 7 fr. 55 par heure travaillée le samedi, le dimanche et les jours fériés, en application de l'art. 11D du règlement d'application de la loi cantonale concernant le traitement et les diverses prestations alloués aux membres du personnel de l'État, du pouvoir judiciaire et des établissements hospitaliers (RTrait).
A.c. Le 28 novembre 2018, l'UPCP a encore adressé au chef du DES la copie d'un courriel adressé le 20 août 2010 par F.________, alors directeur administratif et financier de l'office du personnel de l'État (ci-après: OPE), à G.________, alors président de l'UPCP. Répondant à celui-ci qui lui demandait de lui "qualifier clairement l'indemnité" pour risques inhérents à la fonction (IRIF), celui-là avait indiqué ce qui suit: "L'indemnité pour inconvénient de service a été revue, elle ne comporte désormais que des éléments en rapport direct avec le tort moral généré par les éléments suivants: - la suppression lors d'événements d'envergure des congés et des jours de repos; - l'arythmie due aux horaires irréguliers; - les risques professionnels dus à la violence. Par ailleurs, l'entretien des vêtements de service y est intégré. En revanche, la valorisation de l'heure de nuit et le travail du dimanche n'en font plus partie."
A.d. Par courrier du 12 février 2019 adressé au conseiller d'État en charge du DSPS, l'UPCP a repris les mêmes arguments que dans le courrier du 5 octobre 2018 (cf. let. A.b supra) pour soutenir que le personnel pénitentiaire avait également droit à une indemnité, fondée sur l'art. 11D RTrait, de 7 fr. 55 par heure travaillée le samedi, le dimanche et les jours fériés, ce qui était refusé en l'état; elle sollicitait que cette requête fût concrètement traitée dans le cadre des pourparlers entre l'UPCP et le DSPS.
Le conseiller d'État en charge du DSPS a répondu par courrier du 11 mars 2019 en rappelant l'évolution législative, soit le passage de l'ancienne LOPP à la nouvelle. L'art. 51 ROPP disposait que l'indemnité pour service de nuit était versée aux agents de détention pour les heures de services effectuées entre 19h00 et 6h00. Cela excluait l'indemnité relative au travail réalisé les samedis, dimanches ou jours fériés. L'art. 51 ROPP constituait une "lex specialis" par rapport à l'art. 11D RTrait. Il en était d'ailleurs de même avant l'entrée en vigueur de la LOPP du 3 novembre 2016. Ni l'ancienne LOPP ni l'ancien ROPP ne prévoyaient d'indemnité pour le travail effectué le week-end ou les jours fériés. Une telle indemnité n'avait jamais été versée aux agents de détention, d'autant plus que l'IRIF prenait déjà en considération l'arythmie des horaires de ces agents.
A.e. Le 28 juin 2019, le président de l'UPCP a sollicité du DSPS qu'il rende une décision au sens de l'art. 4A LPA. Le 15 octobre 2019, le Conseiller d'État en charge du DSPS a répondu que s'agissant d'une situation claire du point de vue légal, il n'avait pas l'intention de rendre une décision formelle; par ailleurs, il s'était avéré que ledit département avait versé par erreur aux agents de sécurité publique (ASP) une indemnité fondée sur l'art. 11D RTrait et une réflexion était en cours en vue de cesser de verser ces indemnités.
A.f. Le 19 février 2020, A.________ a sollicité du DSPS une indemnité de 12'253 fr. 65 pour les heures travaillées les samedis, dimanches et jours fériés entre le 1er novembre 2014 et le 30 novembre 2019. Par décision du 2 septembre 2020, le DSPS a rejeté la demande pour les mêmes motifs que ceux déjà exposés dans son courrier du 11 mars 2019 (cf. let. A.d supra).
B.
Par arrêt du 29 juin 2021, la Chambre administrative de la Cour de justice de la République et canton de Genève a rejeté le recours interjeté par A.________ contre cette décision.
C.
A.________ forme un recours constitutionnel subsidiaire contre cet arrêt, en concluant à sa réforme en ce sens que la République et canton de Genève soit condamnée à lui payer la somme de 11'913 fr. 90 plus intérêts à 5 % l'an dès le 19 février 2020.
Le DSPS conclut au rejet du recours dans la mesure où il est recevable. La cour cantonale déclare persister dans les considérants et le dispositif de son arrêt. Le recourant a répliqué et le DSPS a dupliqué.
Considérant en droit :
1.
1.1. L'arrêt attaqué tranche une contestation pécuniaire en matière de rapports de travail de droit public (cf. art. 83 let. g LTF) dont la valeur litigieuse n'atteint pas le seuil de 15'000 fr. (art. 85 al. 1 let. b LTF), compte tenu des conclusions en paiement litigieuses devant l'autorité précédente (art. 51 al. 1 let. a LTF). Le recourant ne prétend à juste titre pas que la cause soulèverait une question juridique de principe (art. 85 al. 2 LTF; en lien avec l'application du droit cantonal, cf. ATF 145 I 239 consid. 4.3). Partant, seule la voie du recours constitutionnel subsidiaire est ouverte (art. 113 LTF).
1.2. Le recours a été déposé en temps utile ( art. 100 al. 1 et 117 LTF ) contre une décision finale ( art. 90 et 117 LTF ) prise par un tribunal supérieur statuant sur recours en dernière instance cantonale (art. 86 al. 1 let. d et 114 LTF). Formé par une partie qui a pris part à la procédure devant l'autorité précédente et qui a un intérêt juridique à la modification de la décision attaquée (art. 115 LTF), le recours est dès lors recevable.
2.
2.1. Comme son intitulé l'indique, le recours constitutionnel subsidiaire peut être formé pour violation des droits constitutionnels uniquement (art. 116 LTF). Le Tribunal fédéral n'examine l'éventuelle violation de droits fondamentaux que si le grief a été invoqué et motivé par la partie recourante conformément à l'art. 106 al. 2 LTF, applicable par renvoi de l'art. 117 LTF. Cette disposition reprend le principe strict de l'invocation (Rügeprinzip), selon lequel l'acte de recours doit, sous peine d'irrecevabilité, contenir un exposé succinct des droits constitutionnels ou des principes juridiques violés et démontrer, par une argumentation précise, en quoi consiste la violation (ATF 142 V 577 consid. 3.2; 142 I 135 consid. 1.5).
2.2. En matière d'application du droit cantonal, l'arbitraire et la violation du droit matériel ne sauraient en outre être confondus. Le Tribunal fédéral n'a pas à déterminer quelle est l'interprétation correcte que l'autorité cantonale aurait dû donner des dispositions applicables; il doit uniquement examiner si l'interprétation qui en a été faite est défendable (ATF 144 III 145 consid. 2; 132 I 13 consid. 5.1 et les références). Aussi, lorsque celle-ci ne se révèle pas déraisonnable ou manifestement contraire au sens et au but de la disposition ou de la législation cantonale en cause, elle sera confirmée, même si une autre solution paraît également concevable, voire préférable. De plus, il ne suffit pas que les motifs de la décision attaquée soient insoutenables, encore faut-il que cette dernière soit arbitraire dans son résultat (ATF 142 V 513 consid. 4.2 et les références).
3.
3.1. Les prétentions du recourant portant sur des heures de travail accomplies du 1er janvier 2014 au 30 novembre 2019, il y a lieu, comme l'a rappelé à juste titre la cour cantonale, de tenir compte des différentes normes successivement en vigueur durant cette période.
Pour la période comprise entre le 1er janvier 2014 et le 28 février 2017, sont applicables la loi cantonale sur l'organisation et le personnel de la prison du 21 juin 1984 (aLOPP), en vigueur jusqu'au 28 février 2017, et son règlement d'application (aROPP).
Pour la période comprise entre le 1er mars 2017 et le 30 novembre 2019, sont applicables la loi cantonale sur l'organisation des établissements et le statut du personnel pénitentiaires du 3 novembre 2016 (LOPP; RS/GE F 1 50) et son règlement d'application (ROPP; RS/GE F 1 50.1), en vigueur depuis le 1er mars 2017. Sont également applicables, par renvoi de la LOPP et sous réserve des dispositions de cette loi (art. 6 al. 1 et 2 LOPP), la loi cantonale générale relative au personnel de l'administration cantonale, du pouvoir judiciaire et des établissements publics médicaux du 4 décembre 1997 (LPAC; RS/GE B 5 05) et son règlement d'application (RPAC; RS/GE B 5 05.1), ainsi que la loi cantonale concernant le traitement et les diverses prestations alloués aux membres du personnel de l'État, du pouvoir judiciaire et des établissements hospitaliers du 21 décembre 1973 (LTrait; RS/GE B 5 15) et son règlement d'application (RTrait; RS/GE B 5 15.01). L'art. 7 RPAC, en vigueur depuis 1999, a été remplacé par les art. 7, 7A, 7B et 8 RPAC dès le 24 juillet 2019. L'art. 11D RTrait a été introduit le 16 mars 2011 et est entré en vigueur le 24 mars 2011; il a été modifié le 17 juillet 2018 avec entrée en vigueur au 26 juillet 2019.
Est en outre applicable, sur l'ensemble de la période considérée, le règlement fixant les indemnités pour la direction et le personnel de surveillance des établissements de détention du 31 octobre 2012 (RIED; RS/GE F 1 50.09).
3.2.
3.2.1. Les juges cantonaux ont exposé que de par leur mission légale, les membres du personnel de surveillance des établissements de détention étaient appelés à devoir travailler pendant la journée, la nuit, les samedis, dimanches et jours fériés afin de ne pas laisser les personnes détenues sans surveillance. Pour tenir compte de cela, leurs plannings les amenaient à travailler parfois la journée, parfois la nuit, en alternant avec des jours de repos et d'autres où ils travaillaient les week-ends et jours fériés. Cette arythmie de travail était compensée par l'IRIF, dont le montant était fixé à 15 % du traitement initial et était versé chaque mois (cf. art. 2 RIED). Comme cela avait été rappelé à plusieurs reprises, notamment dans l'exposé des motifs du RIED, cette indemnité couvrait également la suppression, lors d'événements d'envergure, des congés et des jours de repos, ainsi que les risques dus à la violence du milieu carcéral. Seul le service de nuit et pour travaux spéciaux avait été traité séparément par l'art. 3 RIED, les heures accomplies la nuit (entre 19h00 et 06h00) étant ainsi décomptées et remboursées, à raison de 7 fr. 55 par heure. Comme l'IRIF équivalait à 15 % du traitement initial du gardien, cela signifiait que l'arythmie due à cette fonction était déjà compensée par cette partie du salaire perçue tous les mois indépendamment du nombre d'heures travaillées. Ce raisonnement avait été appliqué également aux policiers, l'IRIF ayant aussi pour but de compenser, aux termes de l'art. 39 al. 3 RGPPol (Règlement général sur le personnel de la police du 16 mars 2016; RS/GE F 1 05 07), les horaires irréguliers et le caractère parfois imprévisible de la planification des horaires. Dès lors, la même interprétation devait être donnée à l'IRIF payée au personnel de surveillance des établissements de détention, comme cela était par ailleurs clairement indiqué dans l'exposé des motifs du RIED.
3.2.2. Se référant à la législation générale sur le personnel de la fonction publique cantonale, la juridiction précédente a précisé qu'aucune loi ni aucun règlement n'indiquait que les heures travaillées les week-ends et jours fériés par le personnel pénitentiaire devaient être rémunérées, mis à part les heures de nuit. Elle a exposé que dès le 1er mars 2017, c'était la LOPP du 13 novembre 2016 qui s'appliquait, laquelle renvoyait par ailleurs, sous réserve d'autres dispositions de la LOPP, à la LPAC et à ses dispositions d'application, ainsi qu'à la LTrait et à ses dispositions d'application (art. 6 al. 1 LOPP). Le seul article de cette loi consacré à la rémunération concernait les heures supplémentaires, soit les heures pendant lesquelles le membre du personnel pénitentiaire intervenait au besoin, en conformité aux instructions reçues, même s'il n'était pas en service (art. 13 LOPP). Au surplus, l'art. 29 LOPP déléguait au Conseil d'État la compétence de déterminer par règlement la nature et le montant des indemnités et compensations auxquelles avaient droit les membres du personnel pénitentiaire (art. 29 LOPP). C'était donc dans le ROPP qu'on trouvait les différentes indemnités versées aux membres du personnel pénitentiaire, soit l'indemnité pour service de nuit, versée pour les heures de travail effectuées entre 19h00 et 6h00 dans le cadre de l'horaire de travail fixé et dont le montant était fixé selon l'art. 11D RTrait (art. 51 ROPP), l'indemnité pour responsabilité spéciale (art. 52 ROPP), l'indemnité pour surpopulation carcérale (art. 53 ROPP) et l'indemnité pour utilisation du téléphone portable privé (art. 54 ROPP). Dès lors, en examinant le cadre légal très strict mis en place dès le 1er mars 2017, force était de conclure que la loi ne présentait aucune lacune, seul le travail de nuit étant rémunéré pour les heures effectuées dans le cadre de l'horaire de travail fixé.
3.3. La cour cantonale a ensuite examiné l'objection du recourant selon laquelle le courriel de l'OPE du 20 août 2010 confirmerait que la valorisation du travail du dimanche ne faisait plus partie de l'IRIF (cf. let. A.c supra). Elle a observé qu'une contradiction pourrait certes être vue entre la prise en compte de l'arythmie, d'une part, et l'exclusion de la valorisation du travail du dimanche, d'autre part, compte tenu des considérations exposées plus haut sur la portée de l'IRlF. Toutefois, l'intimé avait indiqué que l'échange s'était produit dans le cadre de discussions sur la fiscalisation de tout ou de partie de l'IRlF, et cette lecture était corroborée par un document intitulé "Indemnité pour risques inhérents à la fonction" établi le 5 mai 2011 par l'UPCP. En effet, ce document mentionnait que l'indemnité était déjà associée au salaire en 1963 et que sa fiscalisation avait fait l'objet de discussions de longue date (p. 1). La prime recouvrait les aléas liés aux exigences du métier (suppression des congés et des jours de repos, horaires irréguliers, travail la nuit et le dimanche, risques professionnels dus à la violence) (p. 2). La compensation de l'exposition à la violence portait sur un risque d'atteinte à l'intégrité physique ou psychique; elle pouvait être qualifiée d'indemnité pour tort moral et soustraite à ce titre à l'imposition (p. 4). La référence explicite au "tort moral" dans le courriel du 20 août 2010 corroborait l'explication fournie par le DSPS quant aux finalités fiscales de l'échange. Par ailleurs, ce courriel, qui ne communiquait qu'une interprétation, ne pouvait pas être considéré comme une décision, et encore moins comme emportant une modification, même matérielle, du dispositif réglementaire, de sorte qu'il n'était d'aucun secours au recourant.
3.4. La juridiction cantonale a également écarté l'argument du recourant selon lequel l'IRlF ne constituerait qu'une compensation "pour le principe" des horaires irréguliers, laquelle n'exclurait pas que les heures effectivement travaillées le samedi, le dimanche ou les jours fériés dussent au surplus être compensées individuellement. En effet, la compensation d'un inconvénient paraissait difficilement pouvoir être divisée entre inconvénient théorique et pratique, ou encore de principe et effectif. À suivre le raisonnement proposé par le recourant, le personnel pénitentiaire exposé effectivement par son affectation au risque de violence ou encore appelé à entretenir effectivement ses vêtements pourrait prétendre à une indemnisation effective s'ajoutant à l'indemnisation de principe de l'IRlF. Or, selon la juridiction cantonale, un inconvénient existait ou n'existait pas. L'IRlF n'était donc pas liée à un inconvénient effectif qui serait survenu le mois où elle était payée, puisqu'elle était versée tous les mois indépendamment des heures effectuées.
3.5. La Chambre administrative a enfin écarté le grief d'inégalité de traitement que le recourant entendait tirer du fait que les assistants de sécurité publique (ASP), tout en étant soumis à la loi cantonale sur la police (LPol; RS/GE F 1 05), se verraient appliquer l'art. 11D RTrait. Elle a exposé que les ASP - qui étaient attachés aux forces de police et non à l'office de détention - n'accomplissaient pas le même travail que les membres du personnel pénitentiaire. S'il était possible que les ASP 3 pussent être amenés à convoyer des détenus, leurs tâches n'étaient pas comparables à celles du personnel pénitentiaire, qui devait s'occuper de la sécurité et du maintien en détention des détenus et était chargé de leur resocialisation. La situation des ASP n'étant ainsi pas comparable à celle du personnel pénitentiaire, le grief d'inégalité de traitement ne pouvait pas être admis.
4.
4.1. Dans un grief d'ordre formel qu'il convient d'examiner en premier lieu, le recourant reproche à la cour cantonale d'avoir violé son droit d'être entendu et commis un déni de justice formel pour s'être contentée d'examiner les différentes thématiques tour à tour, sans toutefois procéder à une véritable interprétation (littérale, historique, téléologique et systématique) de l'art. 11D RTrait, pourtant expressément invoqué comme base réglementaire de sa demande du 19 février 2020.
4.2. La jurisprudence a déduit du droit d'être entendu (art. 29 al. 2 Cst.) l'obligation pour le juge de motiver ses décisions, afin que le justiciable puisse les comprendre et exercer ses droits de recours à bon escient. Le juge doit ainsi mentionner, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidé et sur lesquels il a fondé sa décision, de manière à ce que l'intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause. Le juge n'a toutefois pas l'obligation d'exposer et de discuter tous les faits, moyens de preuve et griefs invoqués par les parties, mais peut au contraire se limiter à l'examen des questions décisives pour l'issue du litige (ATF 142 II 154 consid. 4.2; 141 IV 249 consid. 1.3.1; 139 IV 179 consid. 2.2). Une autorité judiciaire ne commet un déni de justice formel prohibé par l'art. 29 al. 2 Cst. que si elle omet de se prononcer sur des griefs qui présentent une certaine pertinence ou de prendre en considération des allégués et arguments importants pour la décision à rendre (ATF 143 III 65 consid. 5.2; 142 II 154 consid. 4.2; 141 V 557 consid. 3.2.1).
4.3. En l'espèce, la motivation de l'arrêt attaqué échappe à la critique au regard des principes qui viennent d'être exposés. La cour cantonale a répondu aux arguments pertinents soulevés par le recourant. En substance, elle a suivi un raisonnement consistant à résoudre le potentiel conflit de normes entre la réglementation cantonale applicable au personnel pénitentiaire (LOPP, ROPP, RIED) d'une part et celle applicable à la fonction publique en général (LPAC, LTrait, RTrait) d'autre part, afin de déterminer dans quelle mesure la première et les indemnités spécifiques qu'elle prévoit laissent une place aux indemnités prévues par la seconde et en particulier par l'art. 11D RTrait. On ne voit pas en quoi une telle motivation contreviendrait à l'art. 29 al. 2 Cst.
5.
5.1. Sous le titre "application arbitraire du droit cantonal", le recourant critique l'interprétation de la portée de l'IRIF faite par l'intimé et par les juges cantonaux s'agissant des horaires (cf. consid. 3.2 et 3.4 supra). Il soutient, comme il l'avait déjà fait au niveau cantonal, que l'IRIF ne constituerait qu'une indemnité "pour le principe" des horaires irréguliers, mais non pour l'ampleur du travail effectué le samedi, le dimanche ou les jours fériés; les heures effectuées par chaque agent selon son horaire individuel devraient ainsi faire l'objet d'une compensation supplémentaire concrète en application de l'art. 11D RTrait. La teneur de l'art. 7 RPAC et de l'art. 8 RPAC n'aurait pas pour effet de priver l'art. 11D RTrait de sa portée pour les agents de détention. La conclusion que l'art. 11D RTrait n'est pas applicable au personnel de détention lorsqu'il accomplit son horaire de travail réglementaire les samedis, dimanches ou jours fériés serait arbitraire.
5.2. Selon l'interprétation du droit cantonal faite par la Chambre administrative, l'arythmie liée au fait que les agents de détention sont nécessairement amenés, de par leur mission, à travailler parfois les samedis, dimanches et jours fériés est intégralement et forfaitairement compensée par l'IRIF, dont le montant correspond à 15 % du traitement initial (cf. art. 2 RIED). Conformément aux art. 51 ROPP et 3 RIED, seules les heures de travail effectuées la nuit (soit entre 19h00 et 06h00) dans le cadre de l'horaire de travail fixé font l'objet d'une indemnité qui est versée en fonction des heures effectivement accomplies et dont le montant est fixé selon l'art. 11D RTrait (cf. art. 51 al. 2 ROPP) à 7 fr. 55 par heure. Le caractère forfaitaire de la compensation de l'arythmie par l'IRIF découle clairement de l'exposé des motifs du RIED et s'applique de la même manière aux policiers (cf. arrêt 8D_2/2021 du 15 mars 2022), lesquels perçoivent une indemnité de nature identique (cf. art. 36 al. 4 let. a LOPP et art. 67 al. 6 let. a ROPP d'une part; art. 67 al. 1 let. a LPol et art. 39 al. 1 let. a RGPPol d'autre part).
Le recourant ne démontre nullement en quoi cette interprétation du droit cantonal serait arbitraire au regard des éléments exposés par la cour cantonale, soit le fait que l'IRIF couvre en particulier l'arythmie due aux horaires irréguliers par une indemnité forfaitaire (correspondant à 15 % du traitement initial) et le fait qu'hormis l'IRIF (prévue aux art. 36 al. 4 let. a LOPP, 67 al. 6 let. a ROPP et 2 RIED), la réglementation applicable aux agents de détention ne prévoit d'indemnité liée aux horaires que pour les heures accomplies de nuit (art. 51 ROPP et 3 RIED), et qu'elle ne renvoie à l'art. 11D RTrait que pour cette indemnité pour service de nuit. Dès lors que la LTrait et ses dispositions d'application ne sont applicables que sous réserve des dispositions de la LOPP (art. 6 al. 2 LOPP), le grief de violation de l'art. 11D RTrait tombe à faux et l'interprétation fait par la Chambre administrative du système de rémunération des agents de détention prévu par le droit cantonal échappe au grief d'arbitraire.
6.
6.1. Le recourant invoque le courriel de F.________, alors directeur administratif et financier de l'OPE, du 20 août 2010 (cf. let. A.c supra) et soutient que les conditions posées par la jurisprudence pour fonder la protection de la bonne foi seraient réalisées.
6.2. Découlant directement de l'art. 9 Cst. et valant pour l'ensemble de l'activité étatique, le principe de la bonne foi protège le citoyen dans la confiance légitime qu'il met dans les assurances reçues des autorités, lorsqu'il a réglé sa conduite d'après des décisions, des déclarations ou un comportement déterminé de l'administration. Selon la jurisprudence, un renseignement ou une décision erronés de l'administration peuvent obliger celle-ci à consentir à un administré un avantage contraire à la réglementation en vigueur, à condition que l'autorité soit intervenue dans une situation concrète à l'égard de personnes déterminées, qu'elle ait agi ou soit censée avoir agi dans les limites de ses compétences et que l'administré n'ait pas pu se rendre compte immédiatement de l'inexactitude du renseignement obtenu. Il faut encore qu'il se soit fondé sur les assurances ou le comportement dont il se prévaut pour prendre des dispositions auxquelles il ne saurait renoncer sans subir de préjudice et que la réglementation n'ait pas changé depuis le moment où l'assurance a été donnée (ATF 141 V 530 consid. 6.2; 131 II 627 consid. 6; arrêt 1C_160/2021 du 27 septembre 2021 consid. 5.1).
6.3. En l'espèce, on ne voit pas que le recourant se serait fondé sur le courriel du 20 août 2010 pour prendre des dispositions auxquelles il ne saurait renoncer sans subir de préjudice. A cet égard, son allégation selon laquelle ce serait en raison du courriel en question qu'il aurait accepté de travailler le samedi, le dimanche et les jours fériés frise la témérité. En effet, indépendamment du fait que les membres du personnel pénitentiaire sont tenus de se soumettre aux horaires de service (art. 11 LOPP) - lesquels peuvent les amener, de par leur mission, à devoir travailler les samedis, dimanches et jours fériés afin de ne pas laisser les personnes détenues sans surveillance (cf. consid. 3.2.1 supra) - et qu'il n'est nullement établi que le recourant aurait eu connaissance du courriel litigieux à l'époque, ce n'est que le 12 février 2019 que l'UPCP a soutenu que les membres du personnel pénitentiaire auraient droit à une indemnité de 7 fr. 55 par heure travaillée le samedi, le dimanche et les jours fériés, en application de l'art. 11D RTrait; quant à lui, le recourant a même attendu le 19 février 2020 pour solliciter une indemnité pour les heures travaillées le samedi, le dimanche et les jours fériés entre le 1er novembre 2014 et le 30 novembre 2019. Son argumentation fondée sur la protection de la bonne foi ne peut dès lors qu'être écartée.
7.
7.1. Comme il l'avait déjà fait en instance cantonale, le recourant se plaint enfin d'une violation du principe de l'égalité entre d'un côté les agents de détention et de l'autre les ASP 3 et 4, dès lors que ceux-ci bénéficieraient à la fois de l'IRIF et de l'indemnité de l'art. 11D RTrait.
7.2. Dans sa réponse au recours, l'intimé relève que selon l'art. 19 al. 3 LPol, le statut des ASP ainsi que du personnel administratif doté de pouvoirs d'autorité doit faire l'objet d'un règlement spécifique du Conseil d'État. Or ce règlement n'a à ce jour pas été adopté, de sorte qu'en l'état, les ASP - contrairement aux agents de détention - ne disposent pas d'un règlement spécifique qui aurait pour effet dérogatoire d'empêcher l'application de l'art. 11D RTrait. Toutefois, le règlement relatif aux ASP est en cours d'élaboration par le Conseil d'État et prévoit d'exclure explicitement le versement de l'indemnité basée sur l'art. 11D RTrait, de sorte que même si les ASP 3 et 4 ont pu par erreur - comme le relevait déjà le 15 octobre 2019 le Conseiller d'État en charge du DSPS (cf. lettre A.e supra) - cumuler l'IRIF et l'indemnité de l'art. 11D RTrait, la suppression de cette indemnité pour ces derniers résoudra tout grief lié à l'inégalité de traitement au détriment des agents de détention.
7.3. La question de savoir si c'est à juste titre que la cour cantonale a jugé que la situation des agents de détention n'était pas comparable à celle des ASP 3 et 4 (cf. consid. 3.5 supra) peut ainsi rester ouverte. En effet, en tout état de cause, dès l'entrée en vigueur du règlement relatif au statut des ASP ainsi que du personnel administratif doté de pouvoirs d'autorité que le Conseil d'État est en train d'adopter conformément à l'art. 19 al. 3 LPol, l'exclusion expresse du versement aux ASP 3 et 4 de l'indemnité basée sur l'art. 11D RTrait résoudra tout grief lié à une inégalité de traitement au détriment des agents de détention. L'existence ponctuelle d'une telle inégalité de traitement par le passé ne saurait conduire à accorder rétroactivement au recourant des avantages indus. On rappellera à cet égard que le principe de la légalité de l'activité administrative prévaut en principe sur celui de l'égalité de traitement; en conséquence, le justiciable ne peut généralement pas se prétendre victime d'une inégalité devant la loi lorsque celle-ci est correctement appliquée à son cas, alors qu'elle l'aurait été faussement dans d'autres cas, pour autant qu'on puisse admettre que l'autorité appliquera correctement à l'avenir les dispositions légales en question (ATF 126 V 390 consid. 6a et les références citées; arrêt 1C_436/2014 du 5 janvier 2015 consid. 5.1).
8.
Examinant la question de la prescription des heures effectuées avant le 20 février 2015 invoquée par l'intimé, les premiers juges ont indiqué que "la prescription [était] acquise pour les éventuelles créances antérieures au 20 février 2020" vu que le courrier du recourant interrompant le délai de prescription de cinq ans (cf. art. 128 ch. 3 CO) datait du 19 février 2020. Alors que le recourant se plaint à cet égard d'une "appréciation erronée", il s'agit en réalité manifestement d'une erreur de plume, qui peut être corrigée d'office. Cela ne change toutefois rien à l'issue du litige dès lors que, comme on l'a vu, les prétentions du recourant doivent de toute manière être intégralement rejetées.
9.
Il s'ensuit que le recours doit être rejeté. Le recourant, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). Bien qu'obtenant gain de cause, l'intimé n'a pas droit à des dépens ( art. 68 al. 1 et 3 LTF ; cf. arrêt 8C_151/2010 du 31 août 2010 consid. 6.2).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 1000 fr., sont mis à la charge du recourant.
3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre administrative.
Lucerne, le 29 mars 2022
Au nom de la Ire Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Wirthlin
La Greffière : von Zwehl