Wichtiger Hinweis:
Diese Website wird in älteren Versionen von Netscape ohne graphische Elemente dargestellt. Die Funktionalität der Website ist aber trotzdem gewährleistet. Wenn Sie diese Website regelmässig benutzen, empfehlen wir Ihnen, auf Ihrem Computer einen aktuellen Browser zu installieren.
Zurück zur Einstiegsseite Drucken
Grössere Schrift
 
 
Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
2C_80/2021  
 
 
Arrêt du 29 juillet 2021  
 
IIe Cour de droit public  
 
Composition 
MM. et Mmes les Juges fédéraux Seiler, Président, 
Aubry Girardin, Donzallaz, Hänni et Berger, juge suppléant. 
Greffier : M. Dubey. 
 
Participants à la procédure 
Administration fédérale des contributions AFC, Division principale IFD, impôt anticipé, droits de timbre, Eigerstrasse 65, 3003 Berne, 
recourante, 
 
contre  
 
A.________ SA, 
représenté par B.________ SA, 
intimé. 
 
Objet 
Impôt anticipé; droit au remboursement; évasion fiscale, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal administratif fédéral, Cour I, du 1er décembre 2020 (A-1795/2017). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. A.________ SA est une société anonyme de droit suisse inscrite au registre du commerce du canton de Vaud depuis le 9 octobre 2002, dont le capital action s'élève à 240'000 fr. Elle était entièrement détenue, en 2005, par la société C.________ SA. Elle a pour but la prise de participations dans toute société industrielle, commerciale, financière et immobilière. Elle détenait, au 31 décembre 2004, l'entier du capital-actions de trois sociétés fiduciaires. Entre 2005 et 2010, elle a encore acquis le capital-actions ou pris des participations dans quatre sociétés fiduciaires.  
 
D.________ SA est une société anonyme de droit suisse inscrite au registre du commerce du canton de Genève, puis, dès le 10 janvier 2011 au registre du commerce du canton de Vaud. Elle avait pour but l'exercice d'activités entrant dans le cadre d'une fiduciaire, notamment l'organisation, la tenue et la révision de comptabilités, l'informatique par ordinateur et les affaires fiscales et juridiques jusqu'à sa radiation le 26 juillet 2012 à la suite d'une fusion avec une de ses sociétés soeurs. 
 
A.b. Par contrat de vente daté du 23 mars 2005, E.________, domicilié au Paraguay, a cédé à A.________ SA l'entier du capital-actions de D.________ SA, constitué de 100 actions de 1'000 francs chacune, au porteur et entièrement libérées, pour un montant de 1'100'000 fr. Les parties à la transaction se sont engagées à maintenir une gestion normale de D.________ SA, à tout le moins pour l'année de la vente.  
 
A.c. Il ressort des comptes de A.________ SA au 31 décembre 2004 que celle-ci disposait, au moment de la vente, d'un capital-actions de 240'000 fr. et comptabilisait une perte reportée de 59'904 fr. La part de ses fonds étrangers s'élevait à 2'574'139 fr. 30 au 31 décembre 2004 et à 4'802626 fr. 37 en 2005. Courant 2005, C.________ SA lui a en outre prêté 650'000 fr.  
 
A.d. Selon le bilan au 31 décembre 2004 de D.________ SA, l'actif s'élevait à 1'703'300 fr. 93, essentiellement composé d'actifs circulants comptabilisés pour 943'683 fr., dont 759'414 fr. 93 de liquidités (caisse et avoirs sur des comptes d'établissements financiers [banques, poste]). Au passif, les capitaux étrangers se montaient à 917'126 fr. 50, dont 650'000 fr. à titre de "créanciers divers", et les fonds propres atteignaient 786'174 fr. 43, incluant 100'000 fr. de capital-actions, 50'000 fr. de réserve générale et 636'174 fr. 43 de bénéfices reportés (celui net de l'exercice était de 168'990 fr. 64).  
 
En 2005, le chiffre d'affaires de D.________ SA a augmenté d'un tiers environ pour atteindre 939'000 fr. De 2006 à 2008, il s'est réduit à 691'000 fr., à 509'000, puis à 49'000 fr., avant de s'élever, en 2009, à 182'000 fr. Les charges afférentes au personnel (salaires et charges sociales uniquement) ont baissé en 2007 jusqu'à quasiment s'éteindre en 2008 (199 fr. 40), ce qui sera le cas en 2009. 
 
B.  
D.________ SA a déclaré à l'Administration fédérale des contributions, par formule 103 datée du 26 juillet 2011, la distribution d'un dividende de 820'300 fr., décidée par son assemblée générale en date du 10 juin 2010 pour l'exercice commercial 2009 et dont l'échéance avait été fixée au 20 décembre 2010. L'impôt anticipé déclaré s'élevait à 287'105 fr. 
 
Le 12 octobre 2011, l'Administration fédérale des contributions a refusé la demande du 21 juin 2011 de A.________ SA de s'acquitter de l'impôt anticipé par déclaration et considéré que D.________ SA devait lui verser un montant de 222'661 fr. 05, soit 35 % des réserves de 636'174 fr. 43 disponibles au moment de la vente en 2005. La vente des actions avait eu pour effet que des réserves avaient été transférées au vendeur domicilié à l'étranger, sous forme de liquidités non nécessaires à l'exploitation, en franchise d'impôt anticipé. A.________ SA s'est acquittée, le 1er décembre 2011 d'un impôt anticipé de 287'105 fr. et, le 19 septembre 2012, d'un intérêt moratoire de 12'441 fr. 20. Le 2 décembre 2011, A.________ SA a sollicité le remboursement du montant de l'impôt anticipé de 287'105 fr. Le 5 février 2013, l'Administration fédérale des contributions a remboursé à A.________ SA un montant 64'443 fr. 95 correspondant à la différence entre la somme versée de 287'105 fr. et l'impôt anticipé finalement arrêté à 222'661 fr. 05. 
 
Par décision du 5 août 2015, l'Administration fédérale des contributions a refusé le remboursement de l'impôt anticipé de 222'661 fr. 05 correspondant à 35 % du montant des réserves dites distribuables au 31 décembre 2004 de 636'174 fr. 43. 
 
Par décision sur réclamation du 24 février 2017, l'Administration fédérale des contributions a confirmé sa décision du 5 août 2015, précisant qu'un remboursement ne pouvait être accordé en l'occurrence, les conditions d'une évasion fiscale étant réunies, sous réserve de la restitution de 64'443 fr. 95 déjà intervenue. 
 
C.  
Par arrêt du 1er décembre 2020, le Tribunal administratif fédéral a admis le recours que A.________ SA avait déposé contre la décision sur réclamation rendue le 24 février 2017 par l'Administration fédérale des contributions. Quand bien même D.________ SA détenait des liquidités non nécessaires à l'exploitation au moment de la vente des actions, les conditions d'une évasion fiscale n'étaient pas réunies parce que des motifs économiques justifiaient l'opération en cause. L'acquisition de D.________ SA correspondait au but statutaire de la recourante de prendre des participations dans des sociétés financières dites fiduciaires. L'activité de D.________ SA avait subsisté encore trois ans après son rachat par la société mère. De plus, il avait été démontré que les réserves au sein de D.________ SA s'inséraient dans le but précité. Enfin, il s'était écoulé une longue période entre le transfert et la distribution de celles-ci et la démonstration d'un financement inhabituel faisait défaut. Pour toutes ces raisons, l'élément dit insolite de l'opération ne pouvait être retenu. 
 
D.  
Le 25 janvier 2021, l'Administration fédérale des contributions a déposé un recours en matière de droit public auprès du Tribunal fédéral contre l'arrêt rendu le 1er décembre 2020 par le Tribunal administratif fédéral. Elle soutient en substance que les conditions de l'évasion fiscale sont réunies, l'opération se résumant à un achat d'argent à concurrence des anciennes réserves, sans justification économique. 
 
A.________ SA conclut au rejet du recours. Le Tribunal administratif fédéral se réfère à l'arrêt attaqué et ne formule aucune observation. L'Administration fédérale des contributions a répliqué. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le présent recours en matière de droit public est dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF) rendue dans une cause de droit public (art. 82 let. a LTF) par le Tribunal administratif fédéral (art. 86 al. 1 let. a LTF) en matière d'impôt anticipé, soit un domaine qui ne tombe sous aucun des cas d'exceptions mentionnés à l'art. 83 LTF. La voie du recours en matière de droit public est donc en principe ouverte. Le recours a en outre été déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) et dans les formes prescrites (art. 42 LTF). La recourante a qualité pour recourir (art. 89 al. 2 let. a LTF). Il convient donc d'entrer en matière. 
 
2.  
 
2.1. La Confédération perçoit un impôt anticipé sur les revenus de capitaux mobiliers, les gains faits dans les loteries et les prestations d'assurances; dans les cas prévus par la loi, la déclaration de la prestation imposable remplace le paiement de l'impôt (art. 1 al. 1 LIA). La Confédération, ou le canton pour le compte de la Confédération, rembourse l'impôt anticipé, conformément à la présente loi, au bénéficiaire de la prestation diminuée de l'impôt (art. 1 al. 2 LIA).  
 
2.2. L'impôt anticipé sur les revenus de capitaux mobiliers a pour objet les intérêts, rentes, participations aux bénéfices et tous autres rendements des actions, parts sociales sur des sociétés à responsabilité limitée, des sociétés coopératives, des bons de participation ou des bons de jouissance, émis par une personne domiciliée en Suisse (art. 4 al. 1 let. b LIA). Sont en particulier des rendements imposables, les dividendes, bonis, actions gratuites, bons de participation gratuits, excédents de liquidation ou autres prestations de ce genre (cf. art. 20 al. 1 de l'ordonnance du 19 décembre 1966 sur l'impôt anticipé [OIA; RS 642.211]). Est contribuable le débiteur de la prestation imposable (art. 10 al. 1 LIA). Pour les revenus de capitaux mobiliers et les gains faits dans les loteries, l'impôt s'élève à 35% (art. 13 al. 1 let. a LIA).  
 
Conformément à l'art. 11 al. 1 LIA, l'obligation fiscale est exécutée soit par le paiement de l'impôt (art. 12 ss LIA), soit par la déclaration de la prestation imposable (art. 19 et 20 LIA). 
 
2.3. L'impôt anticipé poursuit des buts différents selon que le destinataire de la prestation imposable est, ou non, domicilié en Suisse (ou y a, ou non, son siège). Dans le premier cas, l'impôt anticipé est remboursé aux contribuables qui déclarent les rendements soumis à l'impôt ordinaire; il a alors un but de garantie parce qu'il tend à décourager le contribuable de soustraire à l'impôt ordinaire les montants frappés par l'impôt anticipé. Dans le deuxième cas, il poursuit un but fiscal, puisque les bénéficiaires de prestations imposables qui résident à l'étranger sont privés du droit au remboursement de l'impôt, sous réserve de l'application d'une convention de double imposition (cf. ATF 141 II 447 consid. 2.2 p. 450 et les références citées). L'impôt anticipé peut également poursuivre un but fiscal pour les personnes domiciliées en Suisse, lorsque les conditions matérielles à un remboursement ne sont pas réunies (arrêts 2C_597/2016 du 10 août 2017 consid. 2.4; 2C_404/2015 du 15 septembre 2016 consid. 2.3).  
 
2.4. Le droit au remboursement de l'impôt anticipé est soumis à la réalisation des conditions des art. 21 ss LIA. D'après l'art. 21 al. 1 let. a LIA, l'ayant droit peut demander le remboursement de l'impôt anticipé sur les revenus de capitaux mobiliers retenus à sa charge par le débiteur s'il avait à l'échéance de la prestation imposable le droit de jouissance sur les valeurs qui ont produit le rendement soumis à l'impôt. Si l'ayant droit est une personne physique, elle doit en outre être domiciliée en Suisse à l'échéance de la prestation imposable (art. 22 al. 1 LIA), s'il s'agit d'une personne morale, elle doit à cette même échéance y avoir son siège (art. 24 al. 2 LIA). Toutefois, le remboursement est inadmissible dans tous les cas où il pourrait permettre d'éluder un impôt (art. 21 al. 2 LIA). L'existence d'une évasion fiscale en lien avec l'impôt anticipé ne doit être examinée que si les conditions justifiant le remboursement en vertu de la loi sont réunies (ATF 142 II 9 consid. 4).  
 
2.5. En l'occurrence, l'instance précédente a jugé à bon droit que la société intimée avait bien à l'échéance de la prestation imposable un droit de jouissance sur les actions qui ont produit le rendement soumis à l'impôt. Il ressort également des faits retenus dans l'arrêt attaqué que la société intimée avait son siège en Suisse. Se pose donc uniquement la question de l'existence d'une évasion fiscale en l'espèce.  
 
3.  
 
3.1. Selon la jurisprudence, il y a évasion fiscale: a) lorsque la forme juridique choisie par le contribuable apparaît comme insolite, inappropriée ou étrange, en tout cas inadaptée au but économique poursuivi, b) lorsqu'il y a lieu d'admettre que ce choix a été abusivement exercé uniquement dans le but d'économiser des impôts qui seraient dus si les rapports de droit étaient aménagés de façon appropriée, c) lorsque le procédé choisi conduirait effectivement à une notable économie d'impôt dans la mesure où il serait accepté par l'autorité fiscale (sur la signification de ces conditions, cf. ATF 138 II 239 consid. 4.1 p. 243 ss et les références). Si ces trois conditions sont remplies, l'imposition doit être fondée non pas sur la forme choisie par le contribuable, mais sur la situation qui aurait dû être l'expression appropriée au but économique poursuivi par les intéressés (ATF 142 II 399 consid. 4.2 p. 408 et les références). L'autorité fiscale doit en principe s'arrêter à la forme juridique choisie par le contribuable. Ce dernier est libre d'organiser ses relations de manière à générer le moins d'impôt possible. Il n'y a rien à redire à une telle planification fiscale, tant que des moyens autorisés sont mis en oeuvre. L'état de fait de l'évasion fiscale est réservé à des constellations extraordinaires, dans lesquelles il existe un aménagement juridique (élément objectif) qui - abstraction faite des aspects fiscaux - va au-delà de ce qui est raisonnable d'un point de vue économique. Une intention abusive (élément subjectif) ne peut de surcroît pas être admise si d'autres raisons que la seule volonté d'épargner des impôts jouent un rôle décisif dans la mise en place de la forme juridique. Une certaine structure peut en effet se justifier pour d'autres raisons commerciales ou personnelles (ATF 142 II 399 consid. 4.2 p. 408 et les références).  
 
3.2. En matière fiscale, les règles générales du fardeau de la preuve ancrées à l'art. 8 CC, destinées à déterminer qui doit supporter les conséquences de l'échec de la preuve ou de l'absence de preuve d'un fait, ont pour effet que l'autorité fiscale doit établir les faits qui justifient l'assujettissement et qui augmentent la taxation, tandis que le contribuable doit prouver les faits qui diminuent la dette ou la suppriment. Si les preuves recueillies par l'autorité fiscale apportent suffisamment d'indices révélant l'existence d'éléments imposables, il appartient à nouveau au contribuable d'établir l'exactitude de ses allégations et de supporter le fardeau de la preuve du fait qui justifie son exonération (ATF 146 II 6 consid. 4.2).  
 
3.3. Bien qu'en l'espèce, il s'agisse d'un refus de remboursement, il est intéressant de remarquer que, selon la jurisprudence rendue en matière de procédure de déclaration de la prestation imposable remplaçant le paiement de l'impôt anticipé au sens des art. 11 al. 1 let. b et 19 ss LIA (cf. consid. 2.2 ci-dessus), c'est-à-dire en phase de perception de l'impôt anticipé, l'Administration fédérale doit se limiter à un examen sommaire du droit au remboursement : dans l'éventualité où ce droit ne peut pas sans autre être reconnu ou s'il subsiste des doutes sérieux quant à son existence, la procédure de déclaration doit être exclue (cf. arrêts 2C_470/2018 du 5 octobre 2018 consid. 6.2; 2C_597/2016 du 10 août 2017 consid. 2.5.3; 2C_689/2011 du 23 novembre 2012 consid. 2.4.1). Tel est le cas dès que l'on soupçonne l'existence d'une évasion fiscale. A cet égard, en lien avec l'impôt anticipé perçu sur le bénéfice de liquidation, le Tribunal fédéral a jugé que la question de l'évasion fiscale au sens de l'art. 21 al. 2 LIA se pose dès qu'une personne domiciliée à l'étranger - pour laquelle l'impôt anticipé correspond à une charge fiscale définitive - vend ses droits de participation dans une société suisse en vue de la prochaine liquidation de cette société à une personne physique domiciliée en Suisse ou à une personne morale dont le siège est en Suisse, afin d'obtenir néanmoins le remboursement de l'impôt anticipé. Il a par conséquent confirmé le refus de l'Administration fédérale des contributions d'autoriser la procédure de déclaration et, de fait, renvoyé l'examen approfondi de l'éventuelle existence d'une évasion fiscale à la phase de remboursement de l'impôt anticipé (arrêts 2C_470/2018 du 5 octobre 2018 consid. 6.3.2; 2C_551/2009 du 13 avril 2010 consid. 3.3 et les références citées).  
 
3.4. En matière de remboursement de l'impôt anticipé directement, comme en la présente cause, le Tribunal fédéral a admis l'évasion fiscale dans deux arrêts. Dans l'arrêt A.87/1980 du 11 décembre 1981, il a jugé que la vente au prix de 3'640'000 fr. par des actionnaires domiciliés à l'étranger à deux sociétés anonymes détenues par des actionnaires suisses de l'ensemble des actions d'une société anonyme qui disposait de réserves ouvertes d'un montant de 3'193' fr. comprenant une créance envers les actionnaires étrangers de 2'850'000 issue d'un prêt à ces derniers constituait une évasion fiscale en matière de remboursement de l'impôt anticipé. En effet, le prix de vente avait été payé par reprise de la dette des actionnaires étrangers par les acquéreurs suisses. Il a également conclu à l'existence d'une évasion fiscale dans l'arrêt 2A.660/2006 (in RDAF 2008 II 536) : dans cette affaire, une société anonyme voulait procéder à une réduction de capital. Les 20'000 actions prévues à cet effet avaient déjà été acquises, sans que les vendeurs n'aient dû prendre en charge l'impôt anticipé. Sur les conseils d'une banque, cette société a vendu ces 20'000 actions dans le but de les racheter à bref délai et de procéder à la réduction de capital. Cette dernière a reporté l'impôt anticipé sur la banque qui, par la suite, en a réclamé le remboursement auprès de l'Administration fédérale des contributions. Le Tribunal fédéral a jugé que ce mode de procéder constituait une évasion fiscale, le bénéficiaire et conseiller ayant collaboré en connaissance de cause. Par conséquent, il a refusé à la banque le droit au remboursement de l'impôt anticipé. Cet arrêt a fait l'objet, de la part de la doctrine, de critiques qui ont été relatées dans l'arrêt 2C_896/2008 du 30 octobre 2009 (consid. 4.4).  
 
Le Tribunal fédéral a en revanche nié l'existence d'une évasion fiscale dans deux autres arrêts. Dans l'arrêt 2A.11/1994 du 16 août 1996, il a jugé que le transfert des actions des deux actionnaires à leur société mère ne constituait pas une évasion fiscale car on ne pouvait voir dans pareille restructuration un procédé insolite qui ne correspondrait pas aux données économiques du cas. Elle représentait toutefois une opération, allant contre la ratio de l'article VI, al. 2 de la Convention du 24 mai 1951 entre la Confédération suisse et les Etats-Unis d'Amérique en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu, entreprise principalement pour réaliser une économie d'impôt. 
 
Dans l'arrêt 2C_896/2008 du 30 octobre 2009 enfin, il a jugé que la vente et le rachat d'actions en vue d'une réduction de capital avaient certes pour but d'éviter l'impôt anticipé, mais ne pouvaient être considérés comme insolites et inappropriés car il s'agissait d'un procédé usuel de la part de la banque chargée de l'opération (consid. 4.2.2). Faute de preuve démontrant la collaboration de la banque ayant droit au remboursement et sa connaissance de l'ensemble de l'opération voulue par la société désireuse de réduire son capital action, le remboursement de l'impôt anticipé ne pouvait lui être refusé. 
 
3.5. Hormis ces jurisprudences, la doctrine relate l'existence de la pratique, en cause en l'espèce, de l'Administration fédérale des contributions du 15 novembre 1990 dite de " l'achat d'un porte-monnaie plein " (" Kauf eines vollen Portemonnaies " ou pratique dite des anciennes réserves; publiée in Die Praxis der Bundessteuern, Verrechnungssteuer, n° 18 ad art. 21 al. 2 LIA). Selon cette pratique, " il y a lieu d'admettre une évasion fiscale lorsqu'une société holding ayant son siège en Suisse achète à des personnes domiciliées (ou ayant leur siège) à l'étranger à un prix supérieur à leur valeur nominale toutes les actions d'une société ayant son siège en Suisse qui dispose d'importantes réserves, représentées par des avoirs en banque, titres et encaisse non nécessaires à l'exploitation de la société achetée " (voir également Maja Bauer-Balmelli, Bundesgesetz über die Verrechnungssteuer, Zweifel/Beusch/Bauer-Balmelli Ed., 2e éd., 2012, n° 45 ad art. 21 LIA; Gion Clopath, Changement d'actionnaire et impôt anticipé, in L'expert-comptable suisse 12/93, p. 889 ss). La description sommaire de cette pratique dans la doctrine ne permet pas de savoir si, dans le cas concret en cause à l'époque, l'Administration fédérale l'a appliquée dans la phase de perception de l'impôt anticipé, ce qui aurait conduit au refus d'autoriser la procédure de déclaration, ou si elle a considéré que son application remplaçait l'examen des conditions légales prévues aux art. 21 ss LIA auxquelles est subordonné le droit au remboursement. Quoi qu'il en soit, telle qu'elle est décrite, dite pratique ne passe pas en revue toutes les conditions auxquelles la jurisprudence soumet l'existence d'une évasion fiscale (cf. consid. 3.1).  
 
Par conséquent, au vu des jurisprudences rappelées ci-dessus, il faut considérer, avec la doctrine (Maja Bauer-Balmelli, Bundesgesetz über die Verrechnungssteuer, Zweifel/Beusch/Bauer-Balmelli Ed., 2e éd., 2012, n° 64 ad art. 21 LIA; la même, Die Steuerumgehung im Verrechnungssteuerrecht, in IFF Forum für Steuerrecht 2002, p. 162 ss, 170), que cette pratique constitue un fort indice de l'existence d'une potentielle évasion fiscale, mais ne remplace en aucun cas l'examen approfondi et concret des conditions auxquelles la jurisprudence soumet l'existence d'une telle évasion, ce qui au demeurant est conforme à la lettre de l'art. 21 al. 2 LIA. Il ne s'agit par conséquent pas d'une objectivation des conditions de l'évasion fiscale au sens où l'entend cette dernière disposition, contrairement à ce qu'affirme l'instance précédente. 
 
3.6. C'est à la lumière de ces considérants qu'il convient d'examiner si la société intimée a un droit au remboursement de l'impôt anticipé d'un montant de 222'661 fr. 05. L'instance précédente a jugé que les conditions d'une évasion fiscale n'étaient pas réunies. La recourante considère pour sa part que l'acquisition d'un porte-monnaie plein est insolite et qu'en l'espèce, elle n'est pas justifiée par des motifs économiques suffisants.  
 
4.  
 
4.1. L'instance précédente et la société intimée ne contestent à juste titre pas que l'achat de toutes les actions de D.________ SA en 2005 constituait l'achat d'un porte-monnaie plein au sens où l'entend la pratique de la recourante du 15 novembre 1990. Il est en effet établi que le vendeur avait son domicile à l'étranger, que l'acheteur était une société ayant son siège en Suisse, qu'elle avait acheté les actions à un prix supérieur à leur valeur nominale et que la société dont les actions ont été transférées détenait au moment de la vente d'importantes (anciennes) réserves en avoirs bancaires (636'174 fr. 43 de bénéfices reportés, cf. en fait A. ci-dessus).  
 
S'ajoute à cela, bien que cela ne joue qu'un rôle secondaire dans la démonstration de l'existence de l'évasion fiscale en l'espèce, parce qu'il ne s'agit pas en la présente cause à proprement parler d'une opération destinée à éviter l'impôt anticipé sur le bénéfice de liquidation, que, trois ans après l'achat des actions, D.________ SA n'exerçait plus véritablement d'activités économiques puisque les charges de personnel se sont élevées à 199 fr. 40 en 2008 et ont disparu en 2009. Ces faits correspondent à l'hypothèse, déjà décrite par la jurisprudence (cf. consid. 3.3 ci-dessus) en matière d'évasion fiscale, dans laquelle une personne domiciliée à l'étranger - pour laquelle l'impôt anticipé correspond à une charge fiscale définitive - vend ses droits de participation dans une société suisse en vue de la prochaine liquidation de cette société à une personne physique domiciliée en Suisse ou à une personne morale dont le siège est en Suisse afin que la société suisse obtienne néanmoins le remboursement de l'impôt anticipé. D.________ SA étant liquidée de fait dès 2008 faute de personnel actif, il importe peu qu'elle ait disparu peu après ensuite d'une liquidation formelle ou, comme en l'espèce, par fusion avec l'une de ses sociétés soeurs. 
 
Ces deux constats démontrent que l'opération en cause pose doublement la question de l'existence d'une éventuelle évasion fiscale. 
 
4.2. Il résulte également des faits retenus dans l'arrêt attaqué que si la distribution des anciennes réserves de D.________ SA avait eu lieu, de manière appropriée, avant la vente des actions, l'impôt anticipé, qui aurait dû être prélevé sur le rendement des dites actions, aurait constitué une charge fiscale définitive, puisque l'actionnaire vendeur qui disposait du droit de jouissance sur les actions était domicilié à l'étranger (art. 4 al. 1 let. b LIA) dans un pays avec lequel la Suisse n'a pas signé de convention de double imposition. Rien n'empêchait la société intimée d'exiger de l'actionnaire vendeur la distribution des anciennes réserves avant l'opération d'achat pour éviter le risque de supporter à sa place la charge fiscale latente qui les grevait ou de prévoir une réduction du prix d'achat en compensation de cette charge.  
 
 
4.3. Enfin, il est évident que l'achat des actions avant que ne soient distribuées les anciennes réserves conduit à une notable économie d'impôt d'un montant de 222'661 fr. 05, qui profite au vendeur à l'étranger.  
 
4.4. Le constat de soupçon d'évasion fiscale (cf. consid. 4.1 ci-dessus) ainsi que la réalisation des deux autres conditions posées par la jurisprudence en la matière (cf. consid. 4.2 et 4.3 ci-dessus) permettent d'affirmer, en accord avec les règles relatives au fardeau de la preuve en matière fiscale également valable en matière d'impôt anticipé (cf. consid. 3.2. ci-dessus), que l'autorité fiscale - qui supporte le fardeau de la preuve de l'existence d'une évasion fiscale - a apporté suffisamment d'indices révélant l'existence d'éléments imposables, pour que la société intimée, qui se plaint à tort d'un renversement indû du fardeau de la preuve (mémoire de réponse du 26 février 2021, p. 2 ch. 1.2.1), doive démontrer la justification économique du procédé choisi. C'est par conséquent à bon droit que l'instance précédente a mis l'accent sur l'examen de cette question et les arguments invoqués par les parties à cet égard.  
 
5.  
La recourante conteste les motifs économiques que l'instance précédente a retenus pour exclure l'existence d'une évasion fiscale. 
 
5.1. Dans l'arrêt attaqué, l'instance précédente a considéré que l'achat des actions par A.________ SA ne visait pas exclusivement un but d'économie d'impôt, mais s'inscrivait dans la stratégie de développement de cette société consistant à acquérir des sociétés fiduciaires, ce qui excluait l'existence d'une évasion fiscale. A cet effet, l'instance précédente a rappelé que la société intimée détenait, au 31 décembre 2004, l'entier du capital-actions de trois autres sociétés fiduciaires et qu'entre 2005 et 2010, elle avait encore acquis le capital-actions ou pris des participations dans quatre sociétés fiduciaires supplémentaires. Elle ajoute que les (anciennes) réserves acquises par l'achat des actions en 2005 présentaient un intérêt pour C.________ SA et la société intimée, en ce sens qu'il n'était, à son avis, pas insolite que celles-ci aient envisagé des investissements au moyen desdites liquidités, quand bien même aucune occasion favorable intéressante après l'achat des actions de D.________ SA ne se soit présentée.  
 
 
5.2. Ce raisonnement ne peut pas être suivi. Si, comme elle le soutenait, la société intimée envisageait réellement de financer sa politique d'acquisition d'autres sociétés fiduciaires au moyen des liquidités disponibles sur les comptes bancaires de D.________ SA, on ne comprend pas qu'elle n'en ait pas déjà fait usage pour l'acquisition, qui a eu lieu entre 2005 et 2010, de quatre fiduciaires supplémentaires. En effet, D.________ SA, dominée à 100 % par la société intimée, qui pouvait par conséquent l'amener à distribuer ses liquidités, a attendu 2010 pour distribuer un dividende prélevé sur les anciennes réserves, alors que cette même société intimée a obtenu un prêt de 650'000 fr.,- soit supérieur au montant des anciennes réserves de D.________ SA - de la part de C.________ SA précisément dans l'année d'achat des actions de D.________ SA. Il est pour le moins insolite d'acheter une société qui détient de l'argent liquide tout en contractant un emprunt de 650'000 fr. et de ne pas l'utiliser alors que des opérations d'acquisition ont lieu. Sous cet angle, il importe peu que d'autres opportunités d'acquisition ne se soient pas présentées après 2010. L'assertion de l'intimée sur ce point repose uniquement sur ses propres déclarations, invérifiables. Il n'est au demeurant pas démontré qu'elle aurait développé ou cherché à investir dans d'autres activités avec les liquidités achetées avec les actions.  
 
5.3. Enfin, il faut encore constater qu'hormis les liquidités dont elle disposait au moment de l'achat de ses actions, mais dont la société intimée n'a pas fait usage entre 2005 et 2010, D.________ SA n'a d'emblée pas représenté d'intérêt économique pour celle-ci puisqu'elle a choisi de la liquider de fait dès 2008 en la privant de personnel et parachevé sa fin par une fusion deux ans plus tard. Il s'ensuit que l'achat des actions de D.________ SA à un actionnaire domicilié à l'étranger par la société intimée, qui équivaut à l'achat d'un porte-monnaie plein (d'anciennes réserves), ne peut s'expliquer que par l'intention d'éviter à l'actionnaire étranger la charge d'impôt anticipé dû sur une distribution antérieure au dit achat.  
 
5.4. Le temps écoulé entre l'achat des actions par la société intimée et la distribution du dividende par D.________ SA, de plus de cinq ans, n'a, contrairement à ce que prévoit l'art. 20a al. 1 de la loi fédérale du 14 décembre 1990 sur l'impôt fédéral direct (LIFD; RS 642.11), qui ne trouve pas d'application en matière d'impôt anticipé, aucune importance, du moment qu'aucun motif économique ne justifie le procédé insolite choisi. En effet, lorsqu'une évasion fiscale au sens de l'art. 21 al. 2 LIA est reconnue, l'écoulement du temps n'y change rien (cf. arrêt A.87/1980 du 11 décembre 1981, consid. 3 in Archives 50 p. 583). Il n'y a pas de parallélisme sous cet angle entre l'art. 20a al. 1 LIFD et l'art. 21 al. 2 LIA, contrairement à ce que semble soutenir l'instance précédente.  
 
6.  
Les considérants qui précèdent conduisent à l'admission du recours et à l'annulation de l'arrêt rendu le 1er décembre 2020 par le Tribunal administratif fédéral. La décision sur réclamation du 24 février 2017 est confirmée. Succombant, la société intimée doit supporter les frais de justice devant le Tribunal fédéral (art. 66 al. 1 LTF). Il n'est pas alloué de dépens (art. 68 al.1 et 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est admis. L'arrêt rendu le 1er décembre 2020 par le Tribunal administratif fédéral est annulé. La décision sur réclamation du 24 février 2017 est confirmée. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 6'000 fr., sont mis à la charge de la société intimée. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué à l'Administration fédérale des contributions, à la représentante de la société intimée et au Tribunal administratif fédéral, Cour I. 
 
 
Lausanne, le 29 juillet 2021 
 
Au nom de la IIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Seiler 
 
Le Greffier : Dubey