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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
4A_200/2017  
   
   
 
 
 
Arrêt du 29 août 2017  
 
Ire Cour de droit civil  
 
Composition 
Mmes les Juges fédérales 
Kiss, Présidente, Klett et Hohl. 
Greffier : M. Piaget. 
 
Participants à la procédure 
A.________, représentée par Me Boris Lachat, 
recourante, 
 
contre  
 
B.________, représentée par Me Karin Grobet Thorens, 
intimée. 
 
Objet 
résiliation de bail pour d'importants travaux de rénovation, conditions de validité; 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice du canton de Genève, Chambre des baux et loyers, du 13 mars 2017. 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. Par contrat de bail de durée indéterminée du 21 janvier 1997, A.________ (ci-après: la bailleresse ou la défenderesse) a remis à bail à B.________ (ci-après: la locataire ou la demanderesse) une arcade d'environ 47 m2, avec une cave accessible de l'extérieur, destinée à l'exploitation d'une crêperie, au rez-de-chaussée d'un de ses immeubles à Genève, à compter du 15 février 1997 pour un loyer annuel de 16'200 fr., soit 1'350 fr. par mois, charges comprises.  
Peu après, par contrat de bail de durée indéterminée du 30 avril 1997, la bailleresse a également remis à bail à la locataire un appartement de deux pièces, au 1er étage dans le même immeuble, à compter du 1er mai 1997 pour un loyer de 6'000 fr. par an, soit 500 fr. par mois. 
Le rez-de-chaussée de l'immeuble est affecté au commerce et les étages comportent six appartements. En 2001, l'immeuble se trouvait déjà dans un état de détérioration avancée dû au vieillissement des matériaux, de sorte que l'enveloppe, la cage d'escalier, les murs, la voûte et les planchers du sous-sol, les installations techniques, les cuisines et les salles d'eau devaient être refaits. 
 
A.b. En 2002, un crédit d'étude pour la rénovation de l'immeuble, qualifiée de légère, a été accordé, mais le projet n'a pas été réalisé.  
 
A.c. En août 2013, la bailleresse a inscrit à son plan financier d'investissement, qui a été approuvé, un montant de 2'314'000 fr. pour la rénovation de l'immeuble. La pièce produite ne permet pas de déterminer la nature des travaux envisagés.  
Le 11 décembre 2013, la bailleresse a demandé un crédit d'étude supplémentaire de 100'000 fr. pour une rénovation plus lourde que celle estimée en 2002, crédit qu'elle a obtenu le 21 mai 2014. 
Il ne ressort pas des faits constatés quelles rencontres auraient eu lieu avec la locataire et quelles informations lui auraient été données quant à la possibilité ou à l'impossibilité de rester dans les locaux pendant la durée des travaux, voire de les libérer pour cette seule durée. 
 
B.   
 
B.a. Moins de trois semaines après l'approbation du crédit d'étude, sur formule officielle datée du 6 juin 2014, envoyée à une adresse différente de celle de l'immeuble, remise à la poste le 12 juin 2014 et déposée dans la boîte aux lettres le 13 juin 2014, la bailleresse a résilié le bail de l'arcade louée par la locataire.  
Dans son courrier accompagnant la formule officielle de résiliation, la bailleresse a indiqué: 
 
Je vous confirme que A.________, propriétaire..., entend procéder à d'importants travaux qui nécessitent une résiliation du bail dont vous bénéficiez. "  
Il ne ressort pas des faits constatés que la locataire aurait demandé la motivation du congé. 
Le bail de l'appartement de la locataire et les baux des autres appartements de l'immeuble n'ont pas été résiliés, la bailleresse envisageant de procéder à des rocades durant les travaux. 
 
B.b. Avant d'avoir pris connaissance de la résiliation du bail le 20 juin 2014, la locataire avait déposé le 18 juin 2014 deux requêtes de conciliation en vue de l'exécution de travaux de réfection dans son arcade et son appartement.  
 
C.   
 
C.a. Le 4 juillet 2014, la locataire a saisi la Commission de conciliation en matière de baux et loyers du canton de Genève d'une action en annulation de la résiliation du bail de l'arcade et, subsidiairement, en prolongation du bail d'une durée de 6 ans. Après l'échec de la conciliation, elle a déposé sa demande devant le Tribunal des baux et loyers du canton de Genève le 18 mars 2015, en prenant les mêmes conclusions que précédemment.  
Il ressort des faits constatés qu'une rénovation " plus lourde " qu'en 2002 était prévue, mais ils ne donnent aucune indication sur les informations que la bailleresse aurait données dans sa réponse à la demande en première instance quant aux travaux prévus, à la durée de ceux-ci et à la nécessité pour la locataire de quitter les locaux pendant les travaux et, partant, quant à la justification de la résiliation. Il n'en ressort pas non plus que le bail de l'appartement de la locataire et les baux des autres locataires des appartements auraient été résiliés ultérieurement. Il en résulte uniquement que la bailleresse a indiqué que les études étaient terminées et que le projet avait été examiné par une sous-commission des monuments et des sites qui avait donné un préavis favorable, que la demande d'autorisation de construire serait déposée prochainement en parallèle avec une demande de dépôt de crédit de réalisation et que, selon la planification, les travaux pourraient débuter en été 2016, date à laquelle le logement (sic) et l'arcade devraient être libérés. 
Le Tribunal des baux et loyers a, par jugement du 10 mars 2016, déclaré valable la résiliation du bail de l'arcade (ch. 2) et octroyé à la locataire une première prolongation de bail de deux ans, soit jusqu'au 28 février 2017 (ch. 3); il a également accordé une réduction du loyer de l'arcade (ch. 4) et de celui de l'appartement (ch. 5), les deux jusqu'à l'élimination des défauts. 
 
C.b. La demande d'autorisation de construire a été déposée le 19 juillet 2016. Le devis des travaux excède 3'000'000 fr. Ces pièces ont été produites devant la Chambre des baux et loyers de la Cour de justice du canton de Genève, saisie d'un appel de la locataire.  
Statuant le 13 mars 2017, ladite Chambre a annulé les ch. 2 et 3 (concernant la résiliation et la prolongation du bail de l'arcade), les a réformés en ce sens que le congé est annulé, puis a condamné la bailleresse à procéder, à ses frais et dans les règles de l'art, d'une part, à la réparation des volets et à la réfection des peintures des murs et plafonds de l'arcade et, d'autre part, à la réfection des sols de l'appartement; elle a confirmé le jugement pour le surplus, soit en ce qui concerne les réductions des loyers de l'arcade et de l'appartement jusqu'à l'élimination des défauts. 
 
D.   
Contre cet arrêt, la bailleresse a interjeté un recours en matière civile au Tribunal fédéral le 20 avril 2017, concluant à l'annulation des ch. 2 et 3 et à leur réforme en ce sens, comme l'avait jugé le tribunal des baux, que la résiliation du bail est valable et qu'une première prolongation de deux ans jusqu'au 28 février 2017 soit octroyée à la locataire. Elle se plaint d'état de fait incomplet et invoque, d'une part, la violation de l'art. 9 Cst., des art. 266a al. 1, 271 al. 1 et 271a CO (quant à la validité de la résiliation du bail) et, d'autre part, de l'art. 259a al. 1 let. a CO et du principe de la proportionnalité (quant aux travaux de remise en état qui lui ont été imposés). 
La locataire conclut au rejet du recours. Elle remet en outre en cause, premièrement, la validité de la notification de la résiliation, celle-ci lui ayant été notifiée irrégulièrement à l'adresse de l'appartement boulevard..., occupé par sa fille, et ce en violation des conditions générales du bail; deuxièmement, elle invoque que, si la résiliation devait être considérée comme régulière, il ne saurait être admis que, selon la théorie de la réception absolue, elle pouvait en prendre connaissance le 14 juin 2014 puisque l'avis n'est pas entré dans sa sphère d'influence à cette date, qu'elle n'a pu prendre connaissance de la notification de la résiliation du 6 juin, postée le 12 juin, que le 20 juin, et, partant, que la résiliation lui a été donnée pendant qu'une procédure était pendante, puisqu'elle a ouvert action en réfection de défauts le 18 juin 2014; troisièmement, elle soutient qu'il s'agit d'un congé de représailles, parce qu'elle a fait valoir des prétentions en réparation de la cave, inutilisable depuis son inondation. En ce qui concerne le motif de résiliation pour travaux de rénovation, elle estime que des informations suffisantes pour lui permettre d'apprécier la nécessité de quitter les locaux ne lui ont pas été fournies dans le délai de 30 jours de l'art. 273 al. 1 CO et que, d'ailleurs, elle avait communiqué être disposée à libérer les locaux pendant la durée des travaux et à les réintégrer ensuite. 
Les parties n'ont pas déposé d'observations complémentaires. 
La cour cantonale se réfère aux considérants de son arrêt. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
Interjeté en temps utile (art. 100 al. 1 et 46 al. 1 let. a LTF), par la partie qui a succombé dans ses conclusions (art. 76 al. 1 LTF), dirigé contre un arrêt final (art. 90 LTF) rendu en matière civile (art. 72 al. 1 LTF) par un tribunal supérieur statuant sur recours (art. 75 LTF) dans une affaire de résiliation et prolongation de bail, ainsi que de réfection de défauts, dont la valeur litigieuse excède 15'000 fr. (art. 74 al. 1 let. a LTF), le recours en matière civile est recevable. 
L'état de fait a été complété s'agissant de la motivation du congé (art. 105 al. 2 LTF). 
 
2.   
 
2.1. En tant qu'elle se plaint d'arbitraire et reproche à la cour cantonale d'avoir omis des faits, la recourante méconnaît que le complètement de l'état de fait ne relève pas de l'arbitraire - un fait non constaté ne peut pas être arbitraire, c'est-à-dire constaté de manière insoutenable -, mais que, si un fait est juridiquement pertinent, elle peut obtenir qu'il soit constaté si elle démontre qu'en vertu des règles de la procédure civile, l'autorité précédente aurait objectivement pu en tenir compte, en désignant précisément les allégués et les offres de preuves qu'elle lui avait présentés, avec référence aux pièces du dossier (art. 106 al. 2 LTF; ATF 140 III 86 consid. 2). Au demeurant, contrairement à ce que la recourante soutient, la cour cantonale n'a pas ignoré qu'il s'agit d'un immeuble ancien, qui était déjà très vétuste en 2002 et dont un appartement avait subi des dégâts d'eau en 2012 et était demeuré vacant depuis, que des autorisations du service des monuments et des sites seraient nécessaires et que la rénovation pour laquelle le crédit d'étude supplémentaire avait été demandé devait être " plus lourde " qu'en 2002.  
 
2.2. Saisi d'un recours en matière civile, le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Il n'est toutefois lié ni par les motifs invoqués par les parties, ni par l'argumentation juridique retenue par l'autorité cantonale; il peut donc admettre le recours pour d'autres motifs que ceux invoqués par le recourant, comme il peut le rejeter en opérant une substitution de motifs (ATF 135 III 397 consid. 1.4 et l'arrêt cité).  
 
3.   
Avant d'examiner les questions relatives à la motivation de la résiliation, il s'impose de rappeler les principes applicables à la résiliation ordinaire du bail. 
 
3.1.   
 
3.1.1. Lorsque le contrat de bail est de durée indéterminée, ce qu'il est lorsqu'il contient une clause de reconduction tacite, chaque partie est en principe libre de le résilier pour la prochaine échéance convenue en respectant le délai de congé prévu (cf. art. 266a al. 1 CO; ATF 140 III 496 consid. 4.1; 138 III 59 consid. 2.1). Le bail est en effet un contrat qui n'oblige les parties que jusqu'à l'expiration de la période convenue; au terme du contrat, la liberté contractuelle renaît et chacune a la faculté de conclure ou non un nouveau contrat et de choisir son cocontractant (arrêts 4A_19/2016 du 2 mai 2017 consid. 2.1; 4A_484/2012 du 28 février 2013 consid. 2.3.1; 4A_167/2012 du 2 août 2012 consid. 2.2; 4A_735/2011 du 16 janvier 2012 consid. 2.2). La résiliation ordinaire du bail ne suppose pas l'existence d'un motif de résiliation particulier (art. 266a al. 1 CO), et ce même si elle entraîne des conséquences pénibles pour le locataire (ATF 141 III 496 consid. 4.1; 138 III 59 consid. 2.1 p. 62).  
En principe, le bailleur est libre de résilier le bail, notamment, dans le but d'adapter la manière d'exploiter son bien selon ce qu'il juge le plus conforme à ses intérêts (ATF 136 III 190 consid. 3 p. 193), pour effectuer des travaux de transformation, de rénovation ou d'assainissement (ATF 142 III 91 consid. 3.2.2 et 3.2.3; 140 III 496 consid. 4.1), pour des motifs économiques (arrêts 4A_19/2016 précité consid. 4.2; 4A_475/2015 du 19 mai 2016 consid. 4.1 et 4.3; 4A_293/2016 du 13 décembre 2016 consid. 5.2.1 et 5.2.3; ATF 120 II 105 consid. 3b/bb), ou encore pour utiliser les locaux lui-même ou pour ses proches parents ou alliés (arrêt 4A_198/2016 du 7 octobre 2016 consid. 4.3 et 4.5; 4A_18/2016 du 26 août 2016 consid. 3.3 et 4). 
 
3.1.2. La seule limite à la liberté contractuelle des parties découle des règles de la bonne foi: lorsque le bail porte sur une habitation ou un local commercial, le congé est annulable lorsqu'il contrevient aux règles de la bonne foi (art. 271 al. 1 CO; cf. également art. 271a CO; ATF 140 III 496 consid. 4.1; 138 III 59 consid. 2.1; arrêts 4A_19/2016 du 2 mai 2017 consid. 2.2; 4A_290/2015 du 9 septembre 2015 consid. 4.1).  
La protection conférée par les art. 271 et 271a CO procède à la fois du principe de la bonne foi (art. 2 al. 1 CC) et de l'interdiction de l'abus de droit (art. 2 al. 2 CC). 
Les cas typiques d'abus de droit (art. 2 al. 2 CC), à savoir l'absence d'intérêt à l'exercice d'un droit, l'utilisation d'une institution juridique contrairement à son but, la disproportion grossière des intérêts en présence, l'exercice d'un droit sans ménagement et l'attitude contradictoire, permettent de dire si le congé contrevient aux règles de la bonne foi au sens de l'art. 271 al. 1 CO (ATF 120 II 105 consid. 3 p. 108; sur les cas typiques d'abus de droit: ATF 135 III 162 consid. 3.3.1 p. 169). Il n'est toutefois pas nécessaire que l'attitude de la partie donnant congé à l'autre constitue un abus de droit " manifeste " au sens de l'art. 2 al. 2 CC (ATF 136 III 190 consid. 2; 135 III 112 consid. 4.1; 120 II 31 consid. 4a). Ainsi, le congé doit être considéré comme abusif lorsqu'il ne répond à aucun intérêt objectif, sérieux et digne de protection (ATF 135 III 112 consid. 4.1). Tel est le cas lorsque le congé apparaît purement chicanier, lorsqu'il est fondé sur un motif qui ne constitue manifestement qu'un prétexte ou lorsque sa motivation est lacunaire ou fausse (ATF 140 III 496 consid. 4.1; 136 III 190 consid. 2; 135 III 112 consid. 4.1). 
Les règles de la bonne foi (art. 2 al. 1 CC) qui régissent le rapport de confiance inhérent à la relation contractuelle permettent aussi d'obtenir l'annulation du congé si le motif sur lequel il repose s'avère incompatible avec elles (ATF 120 II 105 consid. 3a). 
Le but de la réglementation des art. 271 et 271a CO est uniquement de protéger le locataire contre des résiliations abusives. Un congé n'est pas contraire aux règles de la bonne foi du seul fait que la résiliation entraîne des conséquences pénibles pour le locataire (ATF 140 III 496 consid. 4.1) ou que l'intérêt du locataire au maintien du bail paraît plus important que celui du bailleur à ce qu'il prenne fin (arrêts 4A_297/2010 du 6 octobre 2010 consid. 2.2; 4A_322/2007 du 12 novembre 2007 consid. 6). Pour statuer sur la validité d'un congé, il ne faut examiner que l'intérêt qu'a le bailleur à récupérer son bien, et non pas procéder à une pesée entre l'intérêt du bailleur et celui du locataire à rester dans les locaux; cette pesée des intérêts n'intervient que dans l'examen de la prolongation du bail (arrêts 4A_18/2016 précité consid. 3.2; 4A_484/2012 précité consid. 2.3.1 et les arrêts cités). 
 
3.1.3. Le congé ordinaire donné par le bailleur pour effectuer d'importants travaux de transformation (  Umbauarbeiten), de rénovation (  Renovationsarbeiten) ou d'assainissement (  Sanierungsarbeiten) n'est donc annulable que s'il se révèle incompatible avec les règles de la bonne foi au sens des art. 271 et 271a CO. Ce motif de résiliation ne doit être confondu ni avec celui d'une résiliation pour motif économique (pour optimiser le rendement de son immeuble, cf. arrêt 4A_475/2015 du 19 mai 2016 consid. 4.3; 4A_293/2016 du 13 décembre 2016 consid. 5, non publié aux ATF 143 III 15; 4A_19/2016 précité consid. 3), ni avec celui d'un changement d'affectation des locaux (arrêt 4A_167/2012 du 2 août 2012 consid. 2.2), lesquels nécessitent chacun des informations y correspondant.  
Selon la jurisprudence, le congé pour effectuer des travaux est annulable si, au moment de la résiliation du bail (cf. infra consid. 3.2), le bailleur ne dispose pas d'un projet suffisamment mûr et élaboré (  nicht realitätsnah; consid. 3.1.3.1) ou que celui-ci apparaît objectivement impossible (  objektiv unmöglich erscheint; consid. 3.1.3.2).  
 
3.1.3.1. Le bailleur doit disposer d'un projet suffisamment mûr et élaboré pour que l'on puisse constater concrètement que la présence du locataire entraverait les travaux ou engendrerait des complications, des coûts supplémentaires ou des retards dans les travaux envisagés, à défaut de quoi le congé est abusif (ATF 142 III 91 consid. 3.2.2 et 3.2.3; 140 III 496 consid. 4.2.2; 135 III 112 consid. 4; arrêts 4A_19/2016 précité consid. 4.1.1; 4A_583/2014 du 23 janvier 2015 consid. 2.1.1). Il s'ensuit qu'il ne suffit pas que le locataire se dise prêt à rester dans les locaux durant les travaux et à s'accommoder des inconvénients qui en résultent; ce n'est en effet que si sa présence ne compliquerait pas les travaux, ou seulement de manière insignifiante, que la résiliation est annulable (arrêt 4A_583/2014 précité consid. 2.1.1).  
Il n'est toutefois pas nécessaire que le bailleur ait déjà obtenu les autorisations administratives nécessaires, ni même qu'il ait déposé auprès des autorités compétentes les documents dont elles dépendent (ATF 142 III 91 consid. 3.2.1; 140 III 496 consid. 4.1; arrêt 4A_19/2016 précité consid. 4.1.1). 
Le juge doit être convaincu de l'existence de cette condition, le degré de la preuve étant la certitude; la simple vraisemblance ne suffit pas. 
Il faut bien distinguer cette condition objective, dont la réalisation est nécessaire (au moment de la résiliation du bail) pour que le juge puisse constater la validité de la résiliation, de la connaissance interne que le bailleur a de l'existence de son projet et de ses propres intentions de réalisation. Il faut également distinguer les incombances qui pèsent sur le locataire et celles, procédurales, qui incombent au bailleur (cf. infra consid. 3.2.2). 
 
3.1.3.2. La résiliation du bail est aussi abusive et, partant, annulable lorsque le projet du bailleur apparaît objectivement impossible, notamment parce qu'il est de toute évidence incompatible avec les règles du droit public applicables et que le bailleur n'obtiendra pas les autorisations nécessaires. La preuve de l'impossibilité objective incombe au locataire (arrêt 4A_703/2016 du 24 mai 2017 consid. 4.2, destiné à la publication; ATF 142 III 91 consid. 3.2.2 et 3.2.3; 140 III 496 consid. 4.1).  
 
3.2. Pour pouvoir examiner si le congé ordinaire contrevient ou non aux règles de la bonne foi (art. 271 et 271a CO), il faut déterminer quel est le motif de congé invoqué par le bailleur.  
 
3.2.1. Pour ce faire, il faut se placer au moment où le congé a été notifié (ATF 140 III 496 consid. 4.1 p. 497; 138 III 59 consid. 2.1 p. 62; arrêt 4A_735/2011 du 16 janvier 2012 consid. 2.2  in fine). Des faits survenus ultérieurement ne sont en effet pas susceptibles d'influer  a posteriori sur cette qualification; tout au plus peuvent-ils fournir un éclairage sur les intentions du bailleur au moment de la résiliation (ATF 138 III 59 consid. 2.1  in fine p. 62; arrêts 4A_19/2016 précité consid. 2.3; 4A_67/2016 du 7 juin 2016 consid. 6.1; 4A_430/2013 du 14 février 2014 consid. 2; 4A_623/2010 du 2 février 2011 consid. 2.4).  
Le fait que le terme de résiliation contractuel soit très éloigné du moment de la résiliation n'y change rien, comme il ne modifie rien à l'exigence de l'existence d'un projet mûr et élaboré à ce moment-ci (au sens précisé au consid. 3.1.3.1 ci-dessus; ATF 142 III 91 consid. 3.2.2). 
 
3.2.2. En vertu de l'art. 271 al. 2 CO, le congé ne doit être motivé que si l'autre partie le demande. La motivation du congé revêt toutefois une importance décisive lorsqu'il s'agit de décider si le congé est contraire aux règles de la bonne foi (art. 271 al. 1 CO).  
Il appartient donc au locataire qui veut contester le congé de requérir la motivation de celui-ci. S'il ne l'a pas requise, le bailleur peut encore indiquer ses motifs devant le tribunal de première instance en respectant les règles en matière d'allégations et d'offres de preuves, la maxime inquisitoire simple étant applicable (art. 229 al. 3, 247 al. 2 let. a en relation avec l'art. 243 al. 2 let. c CPC); une allégation tardive peut éventuellement constituer un indice en sa défaveur ou avoir une conséquence sur les frais (ATF 138 III 59 consid. 2.3). Des précisions sur le motif de congé indiqué peuvent toujours être apportées en complément en procédure (ATF 138 loc. cit.). 
 
3.2.3. Déterminer quel est le motif de congé et si ce motif est réel, ou s'il n'est qu'un prétexte, relève des constatations de fait (ATF 136 III 190 consid. 2 p. 192; 131 III 535 consid. 4.3 p. 540; 130 III 699 consid. 4.1 p. 702). A cet égard, le Tribunal fédéral est en principe lié par les constatations de l'arrêt cantonal (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si le recourant démontre, en soulevant expressément le grief de violation de l'art. 9 Cst. et en exposant celui-ci de façon claire et détaillée (art. 106 al. 2 LTF), que l'autorité cantonale a constaté arbitrairement les faits et apprécié arbitrairement les preuves (art. 97 al. 1 LTF; cf. supra consid. 2.1).  
En revanche, savoir si le congé contrevient aux règles de la bonne foi est une question qui relève du droit et le Tribunal fédéral la revoit librement (arrêt 4A_476/2016 du 20 février 2017 consid. 2.2.1). 
 
4.   
 
4.1. En l'espèce, il est vrai, comme le soutient l'intimée, que la lettre accompagnant l'avis de résiliation officiel ne contenait qu'une annonce très générale du motif invoqué par la bailleresse, de laquelle on ne pouvait déduire si les travaux envisagés nécessitaient que la locataire quitte les locaux.  
Cela n'est toutefois pas décisif. En effet, il ne résulte pas des faits constatés que la locataire aurait requis une motivation de ce congé, conformément à l'art. 271 al. 2 CO. C'est à tort que l'intimée croit que le bailleur doit fournir des informations dans les 30 jours pour contester le congé (art. 273 al. 1 CO) même lorsque le locataire ne les a pas demandées. Il ne faut en effet pas confondre le droit du locataire de demander une motivation et, partant, de l'obtenir et, en l'absence d'une demande de motivation du locataire, la faculté pour le bailleur d'indiquer (encore) ses motifs devant le tribunal de première instance. 
 
4.2. Pour apprécier si, au moment de la résiliation, le projet était suffisamment mûr et élaboré au point que l'on puisse déterminer concrètement si la présence de la locataire durant les travaux dans l'arcade, voire dans le bâtiment, entraverait ceux-ci, il faut se baser sur tous les faits allégués en procédure de première instance et prouvés.  
 
4.2.1. La cour cantonale s'est fondée sur le bref laps de temps entre l'approbation du crédit d'étude et l'avis de résiliation - trois semaines - et sur le fait que le devis des travaux n'a été approuvé et la demande d'autorisation de construire déposée que deux ans plus tard, pour conclure que le projet était encore à l'étude et n'était donc pas suffisamment abouti.  
Cette conception est trop restrictive. Il résulte en effet des constatations de fait que le projet de rénovation de 2001-2002, qui a été qualifié postérieurement de léger, a été abandonné et que, le 28 août 2013, le plan financier d'une rénovation de l'immeuble pour un montant de 2'314'000 fr. a été approuvé, et qu'environ quatre mois plus tard, le 11 décembre 2013, un crédit d'étude complémentaire de 100'000 fr. pour une rénovation complète - rénovation " plus lourde " que celle de 2002 - a été demandé et accordé seulement le 21 mai 2014. Même si seul un crédit d'étude a été approuvé, cela ne suffit en soi pas pour nier l'existence d'un projet de rénovation complète voulu par le bailleur et nécessitant le départ des locataires, comme il ne peut être affirmé, sans arbitraire, que la locataire n'aurait pas pu obtenir de la bailleresse une motivation lui permettant d'apprécier la gêne que sa présence entraînerait. 
On ne saurait non plus exiger que la commune bailleresse, qui doit faire face à des procédures d'approbation de crédit, doive attendre que ceux-ci soient approuvés pour signifier la résiliation de leurs baux aux locataires, ce d'autant que, comme en l'espèce, le bâtiment se trouvait dans un état de détérioration avancé, qu'une rénovation plus légère avait été envisagé en 2002 et que désormais une rénovation lourde était envisagée, dont le montant était indiqué à son plan financier d'investissement d'août 2013. 
 
4.2.2. En l'espèce, les faits constatés dans l'arrêt attaqué ne permettent toutefois pas de décider si le projet était suffisamment mûr et élaboré pour que l'on puisse constater si la présence de la locataire entraverait ou compliquerait les travaux. La bailleresse devait donner à la locataire et au juge, au plus tard devant le tribunal de première instance, comme on l'a vu (cf. ci-dessus consid. 3.2.2), des informations précises sur l'état de son projet, sur la nécessité pour la locataire de quitter les locaux et sur la date envisagée pour le début des travaux. Sur la base de ces éléments, le juge doit pouvoir se convaincre avec certitude de l'existence du projet de rénovation, de la volonté et de la possibilité pour le bailleur de le réaliser et de la nécessité que les locataires quittent définitivement les locaux.  
Or, le plan financier d'investissement pour la rénovation de 2'314'000 fr. ne permet pas, à lui seul, de déterminer la nature des travaux envisagés. On ignore tout des informations éventuellement communiquées à la locataire avant l'avis de résiliation, lors de rencontres qui auraient eu lieu avec celle-ci, comme de celles que la bailleresse aurait indiquées et précisées dans sa réponse en première instance. Il ressort uniquement des faits constatés qu'une rénovation " plus lourde qu'en 2002 " était prévue, mais cela ne signifie pas encore que la locataire devait quitter - définitivement ou provisoirement - l'arcade, ce d'autant qu'aucun des locataires des appartements, la locataire y compris, ne devait quitter son logement. Il ne résulte pas non plus du recours de la bailleresse, avec indication de ses allégués, voire, vu que la maxime inquisitoire simple est applicable, de références à des pièces du dossier, qu'elle aurait fourni des informations suffisantes, en temps utile. 
La connaissance interne que la bailleresse a de son projet n'est pas décisive. Il faut encore que celui-ci ait été communiqué à la locataire, au plus tard en procédure de première instance, de telle façon que celle-ci puisse se rendre compte si elle doit ou non quitter les locaux, et que le juge puisse se prononcer. 
En tant que la bailleresse recourante soutient que la locataire connaissait l'état de dégradation avancé de l'immeuble et pouvait apprécier l'importance des travaux et la gêne que sa présence engendrerait, elle se limite à une pure affirmation, qui ne repose sur aucun fait constaté. 
Lorsqu'elle soutient qu'il ne serait pas admissible pour des raisons d'hygiène d'exploiter une crêperie pendant la durée des travaux, elle ne peut se fonder sur aucun fait constaté. 
 
4.2.3. Le fait que la locataire ait accepté en cours de procédure - ou même avant la résiliation du bail comme elle le soutient dans sa réponse au recours - de quitter les locaux de l'arcade pour la durée des travaux a été retenu par la cour cantonale à titre superfétatoire, sans plus ample motivation.  
Le recours devant déjà être rejeté pour le motif précédent, il n'y a pas lieu d'examiner ici à quelles conditions la locataire pouvait s'opposer à la résiliation de son bail en proposant de quitter les locaux pendant la durée des travaux. On ignore d'ailleurs quelle en serait la durée, s'il s'agit seulement de la durée des travaux dans l'arcade ou de la durée des travaux de tout le bâtiment. 
Vu que la résiliation n'est pas valable pour les motifs qui précèdent, il n'y a pas lieu d'examiner les griefs de l'intimée en relation avec l'irrégularité de la notification de la résiliation, avec la résiliation donnée alors qu'une procédure relative au bail est pendante, avec un prétendu congé de représailles et avec la prolongation du bail. 
 
5.   
En ce qui concerne les travaux de réfection dans l'arcade et dans l'appartement, que la bailleresse a été condamnée à exécuter par la cour cantonale, la recourante se limite à rappeler qu'une rénovation lourde est prévue et que les travaux sollicités par la locataire doivent être effectués dans ce cadre. Ce faisant, elle ne s'en prend pas à la motivation de la cour cantonale qui a considéré qu'il n'est pas disproportionné d'ordonner qu'il soit procédé à ces réparations qui n'apparaissent pas de grande ampleur, les travaux dans la cave étant réservés. 
 
6.   
Il s'ensuit que le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable, aux frais de la recourante (art. 66 al. 1 LTF). Celle-ci devra également verser une indemnité de dépens à l'intimée (art. 68 al. 1 et 2 LTF). 
 
 
 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.   
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'500 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.   
La recourante versera à l'intimée une indemnité de dépens de 3'000 fr. 
 
4.   
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice du canton de Genève, Chambre des baux et loyers. 
 
 
Lausanne, le 29 août 2017 
 
Au nom de la Ire Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Kiss 
 
Le Greffier : Piaget