Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
7B_355/2023
Arrêt du 30 juillet 2024
IIe Cour de droit pénal
Composition
MM. et Mme les Juges fédéraux Abrecht, Président,
Koch et Kölz.
Greffière : Mme Rubin.
Participants à la procédure
A.________,
représenté par Me Julien Broquet, avocat,
recourant,
contre
1. Ministère public de l'État de Fribourg, case postale 1638, 1701 Fribourg,
2. B.________,
Ministère public, 1701 Fribourg,
intimés,
Objet
Ordonnance de non-entrée en matière (violation du secret de fonction)
recours contre l'arrêt de la Chambre pénale du Tribunal cantonal de l'État de Fribourg du 25 avril 2023 (502 2022 254).
Faits :
A.
A.a. Une instruction pénale, diligentée par B.________, un procureur du Ministère public fribourgeois, a été ouverte à l'endroit de A.________ pour des faits survenus le 26 août 2016 en lien avec l'incendie de sa voiture. Selon la version de ce dernier, il aurait été victime d'un enlèvement à la suite duquel des malfrats auraient incendié sa voiture, dont il n'aurait pu s'échapper qu'avec de graves brûlures. Pour la police, il ne s'agirait que d'une mise en scène de A.________, qui se serait blessé au moment où il aurait lui-même mis le feu à sa voiture.
A.b. Depuis juillet 2019, une procédure civile en annulation de la poursuite oppose A.________ à C.________ par-devant le Tribunal régional de Viamala, aux Grisons. A.________ conteste la validité d'une reconnaissance de dette signée le 6 janvier 2017 en faveur de C.________, dans le cadre de leurs relations de travail au sein de l'entreprise D.________ SA; il prétend avoir été incapable de discernement au moment de la signature de ce document, à cause d'un état de stress post-traumatique causé par les événements du 26 août 2016.
A.c. Le 2 février 2021, les mandataires de C.________ ont demandé au Ministère public de l'État de Fribourg (ci-après: le Ministère public) si A.________ avait fait l'objet d'une ordonnance pénale, dont ils ont demandé le cas échéant à recevoir une copie. À l'appui de leur démarche, ils ont invoqué l'art. 101 al. 3 CPP, en indiquant que si le recourant avait lui-même organisé l'accident allégué, l'argument invoqué en procédure civile pour annuler la poursuite - tiré de son incapacité de discernement au moment de la signature de la reconnaissance de dette - serait mis à mal.
Par courrier du 8 février 2021, B.________ a répondu aux mandataires de C.________ que l'instruction était toujours en cours et qu'aucune ordonnance pénale n'avait été rendue. Il a ajouté que "A.________ a[vait] été entendu à plusieurs reprises depuis les faits survenus le 26 août 2016. Il a[vait] en particulier été entendu le 15 septembre 2016 par la Police en qualité de personne appelée à donner des renseignements et le 24 janvier 2017 au Ministère public en qualité de partie plaignante, puis prévenu. Au cours de ces deux auditions, il était assisté de son mandataire de l'époque et n'a[vait] pas fait valoir qu'il n'était pas en état d'être entendu en raison d'une incapacité de discernement".
B.
B.a. Le 6 avril 2021, A.________ a déposé plainte pénale contre B.________ pour violation du secret de fonction (art. 73 CPP en relation avec l'art. 320 CP) et a demandé que l'instruction de l'affaire soit confiée au ministère public d'un autre canton. En substance, il a reproché à B.________ d'avoir communiqué, dans son courrier du 8 février 2021, des informations confidentielles au sujet de la procédure pénale.
B.b. Par ordonnance du 2 août 2021, le Procureur
ad hoc, nommé par le Conseil de la magistrature de l'État de Fribourg pour instruire l'affaire, a refusé d'entrer en matière sur la plainte pénale déposée par A.________ contre B.________. Il a pour l'essentiel retenu que les renseignements fournis par ce dernier à C.________ étaient couverts par le secret de fonction, mais que leur dévoilement avait été rendu licite par l'art. 101 al. 3 CPP.
B.c. Par arrêt du 25 octobre 2021, la Chambre pénale du Tribunal cantonal de l'État de Fribourg (ci-après: la cour cantonale ou l'autorité précédente) a admis le recours déposé par A.________ contre l'ordonnance du 2 août 2021, a annulé celle-ci et a renvoyé la cause au Procureur
ad hoc pour reprise de la procédure. Cette autorité a en substance considéré qu'on ne pouvait pas retenir, à ce stade, que le dévoilement des informations litigieuses était clairement licite; celles-ci avaient en effet été transmises à un tiers, C.________, qui n'avait pas démontré son intérêt digne de protection à les obtenir.
B.d. Après avoir demandé des explications complémentaires au mandataire de C.________, le Procureur
ad hoc a, le 13 octobre 2022, rendu une nouvelle ordonnance de non-entrée en matière sur la plainte pénale déposée le 6 avril 2021 contre B.________.
B.e. Par arrêt du 25 avril 2023, la cour cantonale a déclaré irrecevable le recours formé par A.________ contre l'ordonnance de non-entrée en matière du 13 octobre 2022, faute de motivation suffisante.
C.
A.________ interjette un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre l'arrêt du 25 avril 2023, en concluant à son annulation et au renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision dans le sens des considérants.
Invités à se déterminer, le Ministère public et B.________ (ci-après: l'intimé) ont conclu au rejet du recours. La cour cantonale a renvoyé aux considérants de son arrêt. Ces écritures ont été transmises à A.________, qui a déposé des observations finales le 24 avril 2024, confirmant les conclusions de son recours.
Considérant en droit :
1.
Le Tribunal fédéral examine d'office sa compétence (art. 29 al. 1 LTF) et contrôle librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 149 IV 9 consid. 2).
1.1. Le présent recours est dirigé contre une décision d'irrecevabilité prise en dernière instance cantonale (art. 80 al. 1 LTF) dans le cadre d'une procédure pénale. Le recours en matière pénale, au sens de l'art. 78 al. 1 LTF, est donc en principe ouvert. Le recours a en outre été déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF).
1.2. En principe, la partie plaignante qui a participé à la procédure de dernière instance cantonale n'est habilitée à recourir au Tribunal fédéral que si la décision attaquée a des effets sur le jugement de ses prétentions civiles (art. 81 al. 1 let. a et b ch. 5 LTF). Cela étant, lorsque le recours est formé, comme dans le cas présent, contre une décision d'irrecevabilité, cette situation équivaut à un déni de justice permettant l'entrée en matière indépendamment des conditions posées par l'art. 81 al. 1 LTF; dans ce cas, seule la question de la recevabilité peut toutefois être portée devant le Tribunal fédéral, qui n'a, à ce stade, pas à examiner le fond de la contestation (arrêts 7B_9/2023 du 22 novembre 2023 consid. 1.2; 7B_36/2022 du 13 septembre 2023 consid. 2.2; cf. arrêt 7B_51/2024 du 25 avril 2024 consid. 1.2.2 et les arrêts cités; ATF 144 II 188 consid. 1.1; 135 II 38 consid. 1.2). Il s'ensuit que l'argumentation développée par le recourant au chiffre 2 de son recours, visant à démontrer que le Procureur
ad hoc aurait violé le principe
in dubio pro duriore et n'aurait pas eu la possibilité de rendre une ordonnance de non-entrée en matière, est exorbitante au présent litige. Elle est, dans cette mesure, irrecevable (cf. art. 80 al. 1 LTF).
1.3. Sous réserve de ce qui précède, il y a lieu d'entrer en matière sur le recours.
1.4. La requête du recourant tendant à la production du dossier de la cause est sans objet, dans la mesure où l'autorité précédente l'a transmis au Tribunal fédéral en application de l'art. 102 al. 2 LTF.
2.
2.1. Le recourant fait grief à l'autorité précédente d'avoir déclaré son recours irrecevable, au motif qu'il ne l'avait pas suffisamment motivé. Il se plaint à ce titre de formalisme excessif et de la violation de l'art. 385 CPP. En substance, il fait valoir que la motivation et les conclusions de son recours cantonal répondraient aux exigences imposées par cette disposition, de sorte que la cour cantonale aurait dû entrer en matière sur son recours et examiner le bien-fondé de celui-ci.
2.2.
2.2.1. L'art. 385 al. 1 CPP prévoit que si le code exige que le recours soit motivé, la personne ou l'autorité qui recourt doit indiquer précisément les points de la décision qu'elle attaque (let. a), les motifs qui commandent une autre décision (let. b) et les moyens de preuve qu'elle invoque (let. c). Les motifs au sens de l'art. 385 al. 1 let. b CPP doivent être étayés par le recourant sous l'angle des faits et du droit (arrêt 7B_51/2024 du 25 avril 2024 consid. 2.2.2 et les références citées). La motivation d'un acte de recours doit être entièrement contenue dans l'acte lui-même et ne saurait être complétée ultérieurement (arrêt 7B_51/2024 du 25 avril 2024 consid. 2.2.2 et les références citées). La motivation doit être complète, si bien qu'un simple renvoi à d'autres écritures n'est pas suffisant (arrêt 7B_51/2024 du 25 avril 2024 consid. 2.2.2 et les références citées; cf. en lien avec l'art. 42 LTF, ATF 140 III 115 consid. 2).
En ce qui concerne les ordonnances de non-entrée en matière, la jurisprudence exige que les motifs qui auraient dû inciter le ministère public à poursuivre l'instruction pénale ressortent clairement du recours (cf. art. 310 al. 1 CPP; arrêt 7B_385/2023 du 24 mai 2024 consid. 2.1 et les références citées). Les explications doivent se référer, au moins dans les grandes lignes, à la motivation de l'ordonnance de non-entrée en matière attaquée (arrêt 7B_385/2023 du 24 mai 2024 consid. 2.1 et les références citées).
2.2.2. L'art. 385 al. 2 CPP concrétise l'interdiction, pour les autorités, du formalisme excessif. Selon cette disposition, si le mémoire ne satisfait pas à ces exigences, l'autorité de recours le renvoie au recourant afin que ce dernier le complète dans un bref délai. Si, après l'expiration de ce délai supplémentaire, le mémoire ne satisfait toujours pas à ces exigences, l'autorité de recours n'entre pas en matière (arrêt 7B_51/2024 du 25 avril 2024 consid. 2.2.2 et les références citées). Selon la jurisprudence, il y a formalisme excessif, constitutif d'un déni de justice formel prohibé par l'art. 29 al. 1 Cst., lorsque la stricte application des règles de procédure ne se justifie par aucun intérêt digne de protection, devient une fin en soi et complique de manière insoutenable la réalisation du droit matériel ou entrave de manière inadmissible l'accès aux tribunaux (ATF 149 IV 9 consid. 7.2; 145 I 201 consid. 4.2.1; arrêt 7B_903/2023 du 24 mai 2024 consid. 2.2.2).
Les allégués contenus dans le mémoire de recours adressé à l'autorité, en particulier les moyens de droit, doivent en principe satisfaire aux exigences de motivation. Cela doit notamment permettre de comprendre pour quelles raisons le recourant s'en prend à la décision attaquée et dans quelle mesure celle-ci doit être modifiée ou annulée. Dès lors, si la validité d'un moyen de droit présuppose, en vertu d'une règle légale expresse, une motivation - même minimale -, le fait d'exiger une motivation ne viole ni le droit d'être entendu ni l'interdiction du formalisme excessif (ATF 134 II 244 consid. 2.4.2; arrêts 6B_991/2016 du 3 novembre 2017 consid. 2.2.1; 6B_396/2015 du 5 février 2016 consid. 2.1). L'art. 385 al. 2 CPP ne s'applique pas aux requêtes déposées par une partie qui connaît les exigences de forme et ne les respecte toutefois pas, sans quoi il serait possible de contourner la règle selon laquelle les délais fixés par la loi ne peuvent pas être prolongés (art. 89 al. 1 CPP; arrêt 7B_51/2024 du 25 avril 2024 consid. 2.2.2 et les références citées).
2.2.3. Conformément à l'art. 393 al. 2 CPP, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation, le déni de justice et le retard injustifié (let. a), pour constatation incomplète ou erronée des faits (let. b) ou pour inopportunité (let. c). L'autorité de recours dispose d'un plein pouvoir d'examen en fait et en droit (arrêts 7B_234/2024 du 14 mars 2024 consid. 2.2; 7B_84/2023 du 27 septembre 2023 consid. 3.3) et applique ce dernier d'office (arrêts 6B_1261/2021 du 5 octobre 2022 consid. 1.2.2; 1B_318/2021 du 25 janvier 2022 consid. 4.1). Elle n'est par ailleurs pas liée par les motifs invoqués par les parties (art. 391 al. 1 let. a CPP).
2.3.
2.3.1. Dans l'ordonnance de non-entrée en matière litigieuse, le Procureur
ad hoc a retenu qu'aucune infraction - en particulier celle de violation du secret de fonction - ne pouvait être reprochée à l'intimé, qui avait agi dans le cadre de l'art. 101 CPP et, partant, de manière licite au sens de l'art. 14 CP. En substance, il a relevé que les informations communiquées par l'intimé aux mandataires de C.________ - à savoir que le recourant avait été entendu à plusieurs reprises par les autorités de poursuite pénale et qu'il n'avait pas indiqué ne pas pouvoir être entendu en raison d'une incapacité de discernement - étaient en principe couvertes par le secret de fonction. Il a toutefois considéré que le fait que le recourant avait été entendu tant par la police que par le Ministère public dans le cadre de la procédure ouverte ensuite de l'incendie de sa voiture - ce qui était connu du grand public, y compris de C.________, comme cela ressortait d'une interview radiodiffusée et de la déposition écrite du médecin du recourant - permettait de déduire qu'il avait accepté d'être entendu sur les faits reprochés, ce qui "supposait de par la loi qu'il ne prétendait pas être incapable de participer à cet acte d'enquête (art. 114 al. 1 CPP) ". Il a ajouté que les renseignements fournis à C.________ étaient propres à aider le juge civil dans sa recherche de la vérité et qu'ils étaient suffisamment importants pour que le prénommé puisse se prévaloir d'un intérêt juridique prépondérant à les obtenir. Même si l'intéressé n'avait pas démontré de manière suffisante un tel intérêt lors de sa demande du 2 février 2021, celui-ci ne pouvait pas être nié définitivement (cf. ch. 11 et 12 de l'ordonnance de non-entrée en matière).
2.3.2. La cour cantonale a estimé que le recourant n'invoquait, dans son recours cantonal, aucune norme qui aurait été violée (ni conventionnelle, ni constitutionnelle, ni légale, ni réglementaire), ni ne mentionnait aucune constatation de fait du Procureur
ad hoc qu'il estimerait incomplète ou erronée. Décortiquant le recours partie par partie, elle a conclu que le recourant ne développait aucun moyen concret et spécifique à l'endroit de la motivation du Procureur
ad hoc, qu'il laissait intacte, se limitant à invoquer des arguments pêle-mêle dont on ne comprenait pas toujours ce qu'il voulait en tirer; en outre, son argumentation était à certains égards contradictoire. Partant, le recours devait être déclaré irrecevable pour défaut de motivation, sans procédure de régularisation.
Par ailleurs, la cour cantonale a exposé que le recourant n'avait pas entrepris la "deuxième motivation indépendante" du Procureur
ad hoc, par laquelle celui-ci avait remis en cause que les renseignements litigieux aient été couverts par le secret de fonction, de sorte que l'absence de toute motivation à ce sujet suffisait à elle seule à entraîner l'irrecevabilité du recours. Elle a encore précisé que même à considérer qu'il ne s'agissait pas véritablement d'une deuxième motivation, le fait que le recourant n'ait "dit mot" à ce sujet contribuait dans tous les cas au même résultat (cf. pp. 7-12 de l'arrêt entrepris).
2.3.3. La question de savoir si le Procureur
ad hoc a, dans son ordonnance du 13 octobre 2022, adopté une véritable deuxième motivation indépendante (sur cette notion au niveau du recours cantonal, voir l'arrêt 6B_120/2016 du 20 juin 2016 consid. 3.1 et les références citées) peut en l'occurrence demeurer indécise vu ce qui suit.
3.
Ainsi que le recourant le fait valoir devant la Cour de céans, il ressort de son acte de recours cantonal qu'il a conclu formellement à l'annulation de l'ordonnance de non-entrée en matière du Procureur
ad hoc et au renvoi de la cause à celui-ci avec pour instruction de solliciter sans délai la levée de l'immunité de l'intimé et d'ouvrir une instruction pénale pour violation du secret de fonction.
3.1. Dans la partie intitulée "Contexte procédural" de son écriture, le recourant s'est expressément référé à la motivation du Procureur
ad hoc relative au refus d'ouvrir une instruction (ch. 6 de l'ordonnance du Procureur
ad hoc), contestant d'une part que les conditions de l'art. 309 al. 1 let. a CPP ne soient pas réalisées et reprochant d'autre part au Procureur
ad hoc de ne pas avoir ouvert d'instruction formelle malgré les actes entrepris dans le cadre de son "investigation préliminaire". Il a souligné qu'une telle intervention de la part du Ministère public, qui n'était pas prévue par le législateur, s'apparentait en réalité à une instruction matérielle de la cause et que, sur la base du dossier, il existait des soupçons suffisants d'une violation du secret de fonction par l'intimé. Il a conclu qu'"
il s'agi
[ssait]
de constater que l'intervention du procureur extraordinaire rel
[evait]
bel et bien d'une instruction proprement dite, et qu'en conséquence, c'
[était]
le principe in dubio pro duriore qui trouv
[ait]
application dans le cas d'espèce, s'agissant de l'appréciation des faits et des conséquences quant à la suite à donner à la procédure " (cf. ch. 2, p. 3 du recours cantonal). On comprend ainsi que le recourant contestait toute possibilité pour le Procureur
ad hoc de rendre une ordonnance de non-entrée en matière et pour quels motifs il estimait que celle-ci devait être annulée. Partant, la cour cantonale ne peut pas être suivie lorsqu'elle indique ne pas discerner les griefs invoqués, ni l'objet du recours déposé par le recourant.
3.2. Ensuite, sous la rubrique "Motifs de recours", le recourant a exposé en détail pour quelles raisons l'intimé se serait selon lui rendu coupable de violation du secret de fonction et, par conséquent, pourquoi le Procureur
ad hoc aurait fait une mauvaise application de l'art. 310 CPP et du principe
in dubio pro duriore, qu'il cite tous deux expressément. Il a conclu à ce qu'une instruction soit ouverte "sans délai" à l'endroit de l'intimé et qu'il y ait lieu "d'ordonner la levée de l'immunité" de ce dernier, "à tout le moins d'en donner expressément instruction au procureur
ad hoc " (cf. ch. 4 à 14, pp. 5 à 9 du recours cantonal). On déduit sans ambiguïté de ses développements que le recourant s'en prend à la motivation du Procureur
ad hoc - en particulier aux chiffres 10 à 13 qu'il énonce -, au sujet de laquelle il fait valoir plusieurs griefs.
3.3. Considérant que l'ordonnance de non-entrée en matière du 13 octobre 2022 souffrait des mêmes "lacunes et approximations" que la précédente, le recourant a premièrement contesté la démarche du Procureur
ad hoc après l'arrêt de renvoi, qui avait consisté à solliciter de C.________ qu'il justifie si et dans quelle mesure il disposait d'un intérêt digne de protection à obtenir les renseignements que l'intimé lui avait fournis. S'il a certes renvoyé à ses observations du 7 octobre 2022, le recourant n'en a pas moins rappelé leur teneur essentielle ainsi que ses arguments juridiques à cet égard, à savoir qu'un "intérêt démontré
a posteriori ne répond[ait] pas aux exigences les plus élémentaires en matière de bonne foi et de sécurité du droit" et que l'examen auquel s'était livré le Procureur
ad hoc "fais[ait] totalement abstraction de la question du dévoilement licite en vertu de l'article 14 CP en relation avec l'art. 101 al. 3 CPP" (cf. chiffres 7 à 13 du recours cantonal). Par ces développements, il est aisément compréhensible que le recourant a contesté que l'intérêt digne de protection du tiers à consulter le dossier pénal au sens de l'art. 101 al. 3 CPP puisse être démontré
a posteriori - soit également après l'arrêt de renvoi - et que, par ce fait, le dévoilement des informations litigieuses puisse être considéré comme licite. La cour cantonale, qui a du reste elle-même considéré cette problématique comme "centrale" pour l'issue du litige, ne pouvait pas refuser de l'examiner au motif que le recourant ne s'en était pas pris à l'argumentation du Procureur
ad hoc, ce qu'il a précisément fait.
Deuxièmement, le recourant a fait valoir que C.________ n'avait pas démontré qu'il aurait sollicité de la justice civile la production du dossier pénal, ni qu'une telle requête lui aurait déjà été refusée, élément qui serait pourtant "fondamental" pour apprécier le caractère licite du dévoilement des faits. Il a ajouté que l'intimé aurait dû constater l'absence d'intérêt digne de protection effectif du prénommé et a contesté qu'une motivation, respectivement une appréciation de cette question, puisse survenir
a posteriori. La cour cantonale, qui semble avoir bien compris ce grief, ne l'a toutefois que partiellement examiné; elle ne s'est en particulier pas prononcée sur la question de la licéité d'une justification apportée à ce propos
a posteriori, soit une fois les informations litigieuses transmises.
3.4. En outre, sous le chiffre 13 de la même rubrique, le recourant a attaqué la motivation du Procureur
ad hoc au sujet de la nature confidentielle des informations partagées par l'intimé, contestant que celles-ci puissent ne pas être couvertes par le secret de fonction.
Pour rappel, le Procureur
ad hoc a déduit de l'acceptation par le recourant d'être entendu sur les faits de la cause - ce qui était connu du grand public - que celui-ci n'avait pas prétendu être incapable de discernement; il s'est référé à l'art. 114 al. 1 CPP, qui prévoit que "le prévenu est capable de prendre part aux débats s'il est physiquement et mentalement apte à les suivre" (cf. consid. 2.3.1
supra). Il a de plus retenu qu'en se contentant de communiquer ce qui précède à C.________, l'intimé n'avait pas pris position sur la santé psychique du recourant en janvier 2017 (cf. ch. 11 de l'ordonnance de non-entrée en matière).
Or, même si le recourant ne reprend pas textuellement cette motivation, on comprend aisément qu'il la critique. Il motive en effet sur près de deux pages, se référant à plusieurs pièces du dossier et à une expertise psychiatrique effectuée sur sa personne en 2019, que "[sa] capacité de discernement lors de ses auditions était bien sujette à réserve" et que l'intimé ne pouvait pas l'ignorer puisqu'il aurait "évoqué la possibilité de [le] soumettre à une expertise médico-légale s'agissant de son aptitude à participer valablement aux actes d'instruction". Comme le recourant l'a expressément souligné, son exposé visait à faire constater, d'une part, que l'intimé avait transmis des "éléments couverts par le secret de fonction" et, d'autre part, "que ces éléments ne correspondaient pas à la vérité"; il fallait ainsi en déduire que le secret de fonction avait été violé et que les informations transmises avaient été communiquées intentionnellement à C.________, ce qui avait eu pour effet de lui porter gravement préjudice. Partant, quoi qu'en dise la cour cantonale, le recourant a également entrepris l'éventuelle motivation alternative du Procureur
ad hoc, indiquant de manière suffisante pour quelles raisons il la considérait comme mal fondée.
3.5. Au vu de tout ce qui précède, il apparaît que le recourant a exposé de manière distincte et reconnaissable quels points de l'ordonnance de non-entrée en matière étaient attaqués. Il a de plus étayé - en fait et en droit - les motifs qui, à ses yeux, auraient dû conduire le Procureur
ad hoc à ouvrir formellement une instruction contre l'intimé pour violation du secret de fonction et en quoi cette infraction était réalisée.
La cour cantonale pouvait ainsi aisément comprendre l'objet de la contestation du recourant. Tel semble d'ailleurs avoir été en partie le cas, puisqu'elle a développé sur près de six pages les arguments du recourant, tout en se limitant à ne répondre qu'à certains d'entre eux. Elle a, en particulier et en substance, constaté que la cause avait été renvoyée au Procureur
ad hoc pour "reprise" de la procédure; que le ministère public pouvait effectuer certaines vérifications préalables sans avoir à ordonner l'ouverture d'une instruction; que l'intention de nuire que le recourant persistait à reprocher à l'intimé avait déjà été niée à deux reprises; qu'il était contradictoire de reprocher à l'intimé de ne pas avoir communiqué à C.________ ses soupçons quant à la capacité de discernement du recourant tout en le dénonçant pour violation du secret de fonction; et que l'expertise psychiatrique effectuée sur la personne du recourant, tout comme l'audition de sa psychologue, n'étaient pas pertinentes pour déterminer si l'intimé avait commis une violation de son secret de fonction. Ce faisant, la cour cantonale n'a pas examiné l'objet principal du litige, à savoir s'il existait des soupçons suffisants d'une infraction justifiant l'ouverture d'une instruction pénale contre l'intimé, respectivement si le Procureur
ad hoc pouvait rendre une ordonnance de non-entrée en matière au motif que les éléments constitutifs de l'infraction de violation du secret de fonction n'étaient manifestement pas réunis.
Jouissant d'un plein pouvoir d'examen et tenue d'appliquer le droit d'office, la cour cantonale ne pouvait pas se dispenser d'examiner les questions - en particulier celle de l'existence d'éléments couverts par le secret de fonction et de la licéité de leur dévoilement à un tiers - valablement soulevées devant elle par le recourant. Il importe d'ailleurs peu que ce dernier n'ait pas discuté tous les arguments contenus dans l'ordonnance de non-entrée en matière (par exemple l'incidence du résultat de la procédure pénale sur la procédure civile ou les renseignements minimum dont devait disposer le Grand Conseil pour lever l'immunité de l'intimé) ou qu'il ne l'ait pas fait dans les mêmes termes que ceux énoncés par la cour cantonale (cf. ch. 2.2.2 et 2.2.3, pp. 8-9 de l'arrêt attaqué). En effet, l'autorité de recours n'est pas liée par les motifs invoqués devant elle (cf. consid. 2.2.3
supra) et il suffit que le recourant étaye suffisamment un grief recevable pour qu'elle doive entrer en matière, tout en pouvant se limiter à examiner les griefs qui sont suffisamment motivés (arrêt 7B_385/2023 du 24 mai 2024 consid. 2.2)..
3.6. Il s'ensuit que c'est à tort que la cour cantonale a considéré que le recours souffrait d'un défaut de motivation. En refusant d'entrer en matière pour ce motif, la cour cantonale a appliqué les règles relatives à la motivation d'un recours (art. 385 CPP) de manière excessivement stricte. Elle a empêché de manière insoutenable le contrôle, sur le plan matériel, de l'ordonnance de non-entrée en matière rendue par le Procureur
ad hoc et a ainsi versé dans le formalisme excessif.
4.
Le recours doit être admis. L'arrêt du 25 avril 2023 de la cour cantonale sera annulé et la cause lui sera renvoyée pour qu'elle statue sur les arguments développés à l'endroit de l'ordonnance du Procureur
ad hoc du 13 octobre 2022.
Le recourant, qui obtient gain de cause avec l'assistance d'un mandataire, ne supportera pas de frais judiciaires ( art. 66 al. 1 et 4 LTF ). Il peut prétendre à de pleins dépens pour la procédure devant le Tribunal fédéral, à la charge du canton de Fribourg (art. 68 al. 1 LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est admis. L'arrêt entrepris est annulé et la cause est renvoyée à la cour cantonale afin qu'elle procède dans le sens des considérants.
2.
Il n'est pas perçu de frais judiciaires.
3.
L'État de Fribourg versera en main du conseil du recourant la somme de 2'000 fr. à titre de dépens pour la procédure fédérale.
4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Chambre pénale du Tribunal cantonal de l'État de Fribourg.
Lausanne, le 30 juillet 2024
Au nom de la IIe Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Abrecht
La Greffière : Rubin