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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
9C_237/2024  
 
 
Arrêt du 30 août 2024  
 
IIIe Cour de droit public  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Parrino, Président, Moser-Szeless et Beusch. 
Greffier : M. Feller. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
recourante, 
 
contre  
 
Administration cantonale des impôts du canton de Vaud, 
route de Berne 46, 1014 Lausanne Adm cant VD, 
intimée. 
 
Objet 
Impôts cantonaux et communaux du canton de Vaud et impôt fédéral direct, périodes fiscales 2018-2020 (assujettissement), 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 28 mars 2024 (FI.2023.0134). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. Inscrite en résidence principale dans le canton de Vaud depuis le 15 décembre 2015, A.________ (ci-après: la contribuable), retraitée, a déclaré un revenu nul pour les années fiscales 2018 à 2020 dans le canton de Vaud.  
 
A.b. Par décisions respectives des 16 juin 2020, 22 juin 2021 et 24 novembre 2021, l'Office des impôts de U.________ a fixé le revenu et la fortune imposables de A.________ pour les périodes fiscales 2018 à 2020, tant en matière d'impôt fédéral direct (IFD) qu'en matière d'impôt cantonal et communal (ICC) comme suit:  
 
Années  
2018  
2019  
2020  
IFD  
59'900 fr.  
59'900 fr.  
62'400 fr.  
ICC  
60'400 fr.  
60'200 fr.  
62'400 fr.  
Fortune  
238'000 fr.  
176'000 fr.  
78'000 fr.  
 
 
 
A.c. Le 22 septembre 2023, l'Administration cantonale des impôts du canton de Vaud (ci-après: l'ACI) a partiellement admis les réclamations formées par A.________ entre 2020 et 2021. Elle a notamment considéré que seules les rentes françaises de la Caisse nationale d'assurance vieillesse (ci-après: CNAV) ainsi que celles de Humanis Retraite Agirc-Arrco (ci-après: Agirc-Arrco) étaient imposables en Suisse et que la rente Ircantec était uniquement déterminante pour le taux d'imposition. L'ACI a pour le surplus confirmé que le domicile fiscal de A.________ était en Suisse et qu'elle était assujettie de manière illimitée aux impôts dans le canton de Vaud pour les périodes 2018 à 2020.  
 
B.  
Par arrêt du 28 mars 2024, le Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de droit administratif et public, a rejeté le recours formé par A.________ contre la décision sur réclamation du 22 septembre 2023 tant en matière d'IFD que d'ICC. 
 
C.  
A.________ interjette un recours contre cet arrêt. Elle conclut en substance à sa réforme en ce sens qu'il soit constaté que son domicile fiscal se situait en France pendant les périodes fiscales 2018 à 2020 et à ce que "l'enlisement du dossier fiscal" soit reconnu. Subsidiairement, elle demande à ce que les rentes de la sécurité sociale française ne soient pas prises en compte pour la détermination du revenu imposable. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
 
1.1. L'arrêt attaqué a été rendu en dernière instance cantonale par un tribunal supérieur (art. 86 al. 1 let. d et al. 2 LTF), dans une cause de droit public (art. 82 let. a LTF) qui ne tombe sous le coup d'aucune exception de l'art. 83 LTF. La voie du recours en matière de droit public est donc ouverte (cf. aussi l'art. 146 LIFD [RS 642.11] et l'art. 73 LHID [RS 642.14]).  
 
1.2. La juridiction cantonale a rendu un seul arrêt valant pour les impôts en matière d'IFD et des ICC pour les périodes fiscales 2018 à 2020, ce qui est admissible (ATF 135 II 260 consid. 1.3.1). Partant, le dépôt d'un seul acte de recours est aussi autorisé, dans la mesure où la recourante s'en prend clairement aux deux catégories d'impôt (cf. ATF 135 II 260 consid. 1.3.2). Au surplus, le recours a été déposé en temps utile (art. 46 al. 1 let. c et 100 al. 1 LTF) et dans les formes prescrites (art. 42 LTF) par la destinataire de la décision attaquée, qui a qualité pour recourir (art. 89 al. 1 LTF). Il convient donc d'entrer en matière.  
 
1.3. D'après l'art. 106 al. 1 LTF, le Tribunal fédéral applique le droit d'office. Il examine en principe librement l'application du droit fédéral ainsi que la conformité du droit cantonal harmonisé et de sa mise en application par les instances cantonales aux dispositions de la LHID (arrêt 2C_132/2020 du 26 novembre 2020 consid. 2.1, non publié in ATF 147 II 155). Conformément à l'art. 106 al. 2 LTF, il n'examine toutefois la violation de droits fondamentaux que si ce grief a été invoqué et motivé par la partie recourante, c'est-à-dire s'il a été expressément soulevé et exposé de façon claire et détaillée (cf. ATF 146 I 62 consid. 3; 142 II 369 consid. 2.1).  
 
2.  
 
2.1. Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sous réserve des cas prévus à l'art. 105 al. 2 LTF. La partie recourante ne peut critiquer les constatations de fait ressortant de la décision attaquée que si celles-ci ont été effectuées en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF ou de manière manifestement inexacte, c'est-à-dire arbitraire, et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF; ATF 147 I 73 consid. 2.1; 145 V 188 consid. 2 et les références).  
 
2.2. Dans la mesure où la recourante reproche à la juridiction cantonale de n'avoir pas tenu compte notamment de son statut de résident fiscal à partir de 2021, elle perd de vue que le litige porte sur les périodes fiscales de 2018 à 2020, de sorte que les faits postérieurs invoqués ne sont pas pertinents.  
 
3.  
Conformément à l'art. 99 al. 1 LTF, aucun fait nouveau ni preuve nouvelle ne peuvent être présentés à moins de résulter de la décision de l'autorité précédente. En l'occurrence, les pièces produites par la recourante pour la première fois devant la Cour de céans (intitulées, dans le recours "calculs taxe foncière 2018/2019 et 2020/2021"; "Relevé de formalités publiées du 01/01/1971 au 06/06/2021"; "Demande de renseignements") n'ont pas à être prises en compte. En effet, il n'est pas admissible de présenter devant le Tribunal fédéral une pièce que la partie a négligé de produire devant l'autorité précédente (cf. ATF 136 III 123 consid. 4.4.3; arrêt 9D_6/2023 du 6 juin 2024 consid. 1.7 et les références). 
 
4.  
Compte tenu des motifs du recours, le litige porte principalement sur la détermination du domicile fiscal de la recourante et donc de son assujettissement, ainsi que, le cas échéant, sur son revenu imposable pour les années 2018 à 2020. S'agissant des éléments imposables, demeure seule litigieuse l'imposition des rentes françaises de la sécurité sociale versées à la recourante par la CNAV et par Agirc-Arrco. 
 
5.  
La juridiction cantonale a rappelé de manière complète le droit et la jurisprudence applicables au principe de célérité (cf. art. 29 al. 1 Cst; ATF 130 I 312 consid. 5.2), en matière d'assujettissement international (cf. art. 3 LIFD; art. 3 LHID; art. 3de la loi vaudoise du 4 juillet 2000 sur les impôts directs cantonaux [LI/VD; RS/VD 642.11]; art. 4 de la Convention du 9 septembre 1966 entre la Suisse et la France en vue d'éliminer les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune et de prévenir la fraude et l'évasion fiscales [CDI CH-FR]; RS 0.672.934.91; arrêts 2C_436/2016 du 21 décembre 2016 consid. 4; 2C_627/2011 du 7 mars 2012 consid. 4., 5.1 et 6) ainsi qu'à la détermination du revenu imposable relatif à des rentes françaises (art. 22 al. 1 LIFD; art. 26 al. 1 LI/VD; art. 20 à 23 CDI CH-FR; ATF 150 II 202); il suffit de renvoyer à l'arrêt attaqué sur ces points (art. 109 al. 3 LTF). Dès lors que les dispositions cantonales ont un contenu identique à la LIFD et la LHID, il peut aussi être renvoyé à la jurisprudence développée en matière d'IFD (ATF 140 II 88 consid. 10 et les références citées; cf. arrêt 2C_648/2021 du 17 décembre 2021 consid. 4.1 et les références). 
 
6.  
 
6.1. La recourante soutient d'abord que les autorités fiscales auraient violé le principe de célérité, notamment parce qu'elles n'auraient pas introduit de procédure d'office pour la détermination de son domicile fiscal. Dans la mesure où elle fait valoir ensuite, en substance, que la propriété de son bien immobilier constituerait un élément objectif prouvant sa résidence en France et qu'il serait trop exigeant de devoir fournir des justificatifs des trajets effectués vers la France ainsi que des attestations de résidence de la part de sa famille et de ses proches, on comprend qu'elle reproche à la juridiction cantonale d'avoir apprécié arbitrairement les moyens de preuve et qu'elle se plaint de son obligation de collaborer et de prouver son assujettissement.  
 
6.2.  
 
6.2.1. Le grief (formel) de la recourante relatif au principe de célérité est mal fondé. Comme l'ont retenu à juste titre les juges précédents, la recourante ne saurait se plaindre avec succès d'un retard injustifié, au regard de la complexité relative de la cause et de la circonstance qu'elle a fait valoir l'absence de résidence fiscale en Suisse seulement à un stade avancé de la procédure administrative (procédure de réclamation). En reprochant à l'Office des impôts d'avoir tardé à examiner la question de son domicile fiscal, la recourante omet qu'elle a rempli ses déclarations dans le canton de Vaud en indiquant y résider. Au cours de la procédure, elle a par ailleurs mentionné à plusieurs reprises son départ de France suivi de son installation en Suisse en 2015 (cf. p. ex. lettre à l'ACI du 5 juin 2021), de sorte que les autorités fiscales n'avaient pas à douter de son lieu de résidence en Suisse, avant qu'elle n'invoque elle-même le contraire.  
 
6.2.2. En ce qui concerne la détermination de son domicile fiscal, la recourante ne remet nullement en cause les constatations de la juridiction cantonale, selon lesquelles elle s'était annoncée auprès de la commune de V.________ en 2015 en provenance de France et qu'elle avait depuis lors rempli ses déclarations fiscales suisses, sans jamais indiquer l'existence d'un bien immobilier en France où elle aurait résidé. À cet égard, il convient de rappeler que l'autorité fiscale peut, en principe, considérer que la déclaration d'impôt est exacte et complète et qu'elle n'est pas tenue, à défaut d'indices correspondants, de rechercher des informations complémentaires (ATF 144 II 359 consid. 4.5.1 et les références). On ne peut ainsi pas reprocher à l'ACI, comme le fait en vain la recourante, de ne pas avoir introduit une procédure d'office, respectivement de ne pas avoir investigué plus avant cette question, dès lors qu'il n'existait aucun élément laissant penser que la recourante avait changé de domicile jusqu'à ce qu'elle fasse valoir expressément être résidente en France (cf. arrêt 9C_689/2022 du 12 avril 2023 consid. 9.1, non publié in ATF 149 II 177).  
En outre, en se limitant à affirmer que les juges précédents auraient exclu l'existence d'un domicile fiscal français alors qu'elle avait fourni une attestation de propriété, la recourante n'explique pas en quoi ils seraient tombés dans l'arbitraire. À cet égard, s'ils ont certes constaté qu'elle avait fourni un acte d'achat du 27 juillet 2007 (attestation de propriété), ils ont cependant considéré que ce document ne suffisait pas à lui seul pour démontrer qu'elle était domiciliée en France pendant les périodes fiscales litigieuses, ce d'autant plus que les autres éléments invoqués constituaient de simples allégations sans preuve (logement chez des amis et chez la famille; absence d'avis de taxation français; trajets effectués vers la France). Dans ce contexte, on ne peut pas non plus suivre la recourante lorsqu'elle soutient que l'exigence de fournir les preuves en cause serait trop élevée, dès lors que selon le principe du fardeau de la preuve, il lui revenait d'établir qu'elle s'était constituée un nouveau domicile (cf. ATF 138 II 300 consid. 3.4). On précisera ici que son obligation de collaborer découlant de l'art. 124 LIFD est particulièrement accrue en l'espèce, dans la mesure où les moyens d'investigation de l'autorité fiscale suisse sont nécessairement restreints au regard du contexte international ne lui permettant pas d'exiger des documents se trouvant auprès de personnes domiciliées à l'étranger (cf. ATF 144 II 427 consid. 2.3.2). 
 
6.3. En conséquence de ce qui précède, la Cour de céans n'a pas à s'écarter des considérations de la juridiction cantonale selon lesquelles la recourante est assujettie de manière illimitée en Suisse à raison de son domicile dans ce pays pour les périodes fiscales en cause.  
 
7.  
 
7.1. En ce qui concerne l'assiette imposable, la recourante fait valoir - pour autant que son argumentation soit compréhensible - que les rentes de la sécurité sociale française devraient être imposées en France, dès lors qu'elles seraient versées par une institution de droit public française ("nature publique du paiement"), ce qui exclurait, conformément aux dispositions de la CDI CH-FR qui prévaudraient sur le droit suisse, la nécessité de les qualifier de publiques ou privées.  
 
7.2. En se prévalant de la "nature publique du paiement" en relation avec les rentes versées par la CNAV et par Agirc-Arrco, la recourante ne met pas en évidence que l'arrêt entrepris reposerait sur une violation du droit. En premier lieu, le "caractère public" de la CNAV a été reconnu par la juridiction cantonale, dans la mesure où elle a considéré que l'assurance retraite française était assimilable à la rente de l'assurance-vieillesse et survivants (AVS; 1 er pilier). En deuxième lieu, dans l'hypothèse où l'art. 20 CDI CH-FR devait être appliqué à ces rentes, comme le soutient la recourante, il en résulterait de toute façon un droit exclusif de la Suisse d'imposer ces pensions. Cette norme prévoit que "Sous réserve des dispositions de l'art. 21, les pensions et autres rémunérations similaires, versées à un résident d'un État contractant au titre d'un emploi antérieur, ne sont imposables que dans cet État" et la recourante ne prétend pas que les rentes en cause tomberaient dans le champ d'application de l'art. 21 CDI CH-FR. Cela reviendrait au même résultat (imposition par la Suisse) que celui auquel est parvenue la juridiction cantonale. Par ailleurs, les juges précédents ont appliqué l'art. 20 CDI CH-FR à la rente Agirc-Arrco, de sorte que la critique de la recourante selon laquelle cette disposition aurait dû être applicable tombe à faux. Au surplus, une violation du droit fédéral en relation avec l'interprétation qu'a faite la juridiction cantonale des art. 20 ss CDI CH-FR n'est pas manifeste, de sorte que la Cour de céans n'a pas à examiner plus avant l'argumentation juridique des juges précédents.  
 
8.  
Compte tenu de ce qui précède, les griefs invoqués sont manifestement mal fondés et le recours doit être rejeté selon la procédure simplifiée de l'art. 109 al. 2 let. a LTF. La recourante, qui succombe, doit supporter les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 4'500 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de droit administratif et public, et à l'Administration fédérale des contributions. 
 
 
Lucerne, le 30 août 2024 
 
Au nom de la IIIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Parrino 
 
Le Greffier : Feller