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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
2C_47/2023  
 
 
Arrêt du 31 mars 2023  
 
IIe Cour de droit public  
 
Composition 
Mmes et M. les Juges fédéraux 
Aubry Girardin, Présidente, Donzallaz et Hänni. 
Greffier : M. Dubey. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me David Perret, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Secrétariat d'Etat aux migrations, Quellenweg 6, 3003 Berne, 
intimé. 
 
Objet 
Refus d'approbation à la prolongation d'une autorisation de séjour (suite à la dissolution de la famille) et renvoi de Suisse, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal administratif fédéral, Cour VI, du 12 décembre 2022 (F-1194/2021). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Le 25 mai 2016, A.________, ressortissant tunisien né en 1992, a épousé en Tunisie le 25 mars 2016 B.________, une ressortissante portugaise née en 1967 et titulaire d'une autorisation d'établissement en Suisse. A.________ est entré en Suisse le 24 septembre 2016 et a obtenu une autorisation de séjour par regroupement familial. La vie commune des époux a pris fin au plus tard le 30 avril 2018, date à laquelle le Tribunal civil de La Chaux-de-Fonds a autorisé les époux à vivre séparés pour une durée indéterminée. 
Dans une attestation du 21 août 2018, le Centre LAVI à Neuchâtel a informé que A.________ avait été reçu à deux reprises, le 31 juillet 2018 et le 17 août 2018 dans un contexte de «relation de violences psychologiques». L'intéressé était injurié et dénigré quotidiennement par son épouse et il s'était «résigné à déposer plainte pour dénoncer ce harcèlement et cette contrainte qui n'avaient plus de limites». 
Dans son ordonnance de non-lieu du 17 octobre 2018, le Ministère public du canton de Neuchâtel a estimé que la plainte pénale déposée par A.________ à l'encontre de son épouse le 23 juillet 2018 pour injures, menaces et contrainte ne pouvait que conduire à l'acquittement de cette dernière, au vu de l'insuffisance des charges. Cette ordonnance est entrée en force de chose jugée. 
 
B.  
Le 1er octobre 2020, le Service des migrations du canton de Neuchâtel s'est déclaré favorable à la prolongation de l'autorisation de séjour de l'intéressé et a transmis au Secrétariat d'Etat aux migrations le dossier pour approbation. 
Par décision du 17 février 2021, le Secrétariat d'Etat aux migrations a refusé d'approuver la prolongation de l'autorisation de séjour de A.________ et lui a imparti un délai pour quitter la Suisse. La vie commune des époux avait duré moins de trois ans. Les violences conjugales imputées à l'épouse de l'intéressé n'avaient pas revêtu la gravité nécessaire pour admettre l'existence de raisons personnelles majeures. Enfin, la réintégration de l'intéressé en Tunisie n'était pas gravement compromise. 
Le 17 mars 2021, A.________ a interjeté recours auprès du Tribunal administratif fédéral contre la décision rendue le 17 février 2021 par le Secrétariat d'Etat aux migrations. 
Le 18 mai 2022, le Tribunal administratif fédéral a ordonné des mesures d'instruction complémentaires, notamment concernant le suivi thérapeutique de l'intéressé et l'a invité à produire un rapport circonstancié de sa thérapeute au sujet de sa situation conjugale et de l'impact de cette situation sur sa santé psychique. Le 8 juin 2022, l'intéressé a versé au dossier une attestation du Centre LAVI du 3 juin 2022 et un courriel du Centre social protestant (CSP) de Neuchâtel du 2 juin 2022. 
Par arrêt du 12 décembre 2022, le Tribunal administratif fédéral a rejeté le recours que A.________ avait déposé contre la décision rendue le 17 février 2021 par le Secrétariat d'Etat aux migrations. 
 
C.  
Le 26 janvier 2023, A.________ a interjeté un recours en matière de droit public contre l'arrêt rendu le 12 décembre 2022 par le Tribunal administratif fédéral. Il demande au Tribunal fédéral, sous suite de frais et dépens, l'annulation de l'arrêt et l'octroi d'une autorisation de séjour ou, subsidiairement, le renvoi de la cause à l'instance précédente pour nouvelle décision, ainsi que l'effet suspensif. 
Par ordonnance du 27 janvier 2023, le Juge présidant de la IIe Cour de droit public a accordé l'effet suspensif. 
Le Tribunal administratif fédéral a renoncé à prendre position sur le recours. Le Secrétariat d'Etat aux migrations n'a pas déposé de réponse. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
 
1.1. D'après l'art. 83 let. c ch. 2 LTF, le recours en matière de droit public est irrecevable contre les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit. Selon la jurisprudence, il suffit qu'il existe un droit potentiel à l'autorisation, étayé par une motivation soutenable, pour que cette clause d'exclusion ne s'applique pas et, partant, que la voie du recours en matière de droit public soit ouverte. La question de savoir si les conditions d'un tel droit sont effectivement réunies relève du fond (ATF 139 I 330 consid. 1.1).  
L'art. 50 LEI confère à certaines conditions un droit à la poursuite du séjour après la dissolution de l'union. Cette disposition concerne les étrangers qui sont séparés de ressortissants suisses ou d'étrangers au bénéfice d'une autorisation d'établissement. Comme le recourant était marié à une ressortissante étrangère titulaire d'une autorisation d'établissement, il faut admettre que cette condition est réalisée en l'espèce et que partant le recourant peut se prévaloir de l'art. 50 LEI. Il s'ensuit que le recours échappe à la clause d'exception de l'art. 83 let. c ch. 3 LTF, le point de savoir si les conditions à la poursuite du séjour en Suisse sont réunies relevant du fond. La voie du recours en matière de droit public est donc ouverte. 
 
1.2. Pour le surplus, l'arrêt attaqué est une décision finale (art. 90 LTF), rendue par le Tribunal administratif fédéral (art. 86 al. 1 let. a LTF) dans une cause de droit public (art. 82 let. a LTF). Le recours a de surcroît été déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) et dans les formes requises (art. 42 LTF), par le recourant qui est atteint par la décision entreprise et a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification, de sorte qu'il faut lui reconnaître la qualité pour recourir (art. 89 al. 1 LTF). Il est partant recevable.  
 
2.  
 
2.1. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sous réserve des cas prévus à l'art. 105 al. 2 LTF (ATF 142 I 155 consid. 4.4.3). La partie recourante ne peut critiquer les constatations de fait ressortant de la décision attaquée que si celles-ci ont été effectuées en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF ou de manière manifestement inexacte, c'est-à-dire arbitraire, et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF; ATF 145 V 188 consid. 2). La partie recourante doit expliquer de manière circonstanciée en quoi ces conditions seraient réalisées (art. 106 al. 2 LTF).  
Il y a arbitraire dans l'établissement des faits ou l'appréciation des preuves si le juge n'a manifestement pas compris le sens et la portée d'un moyen de preuve, s'il a omis, sans raison sérieuse, de tenir compte d'un moyen important propre à modifier la décision attaquée ou encore si, sur la base des éléments recueillis, il a fait des déductions insoutenables (cf. ATF 146 IV 88 consid. 1.3.1; 143 IV 241 consid. 2.3.1). 
 
2.2. En l'occurrence, le recourant fait grief au Tribunal administratif fédéral d'avoir écarté les rapports du centre LAVI, parce qu'ils avaient été établis plusieurs mois après la séparation, ignorant ainsi qu'il avait continué à entretenir une relation de couple avec son épouse, vivait avec elle sous le même toit et avait suivi des séances de thérapie de couple. Il lui reproche également d'avoir relevé que sa parole n'était pas étayée par des éléments objectifs, alors qu'il ne pouvait en aller autrement s'agissant d'actes commis dans l'intimité du couple. Il est d'avis que les différentes pièces déposées en procédure venaient soutenir ses dires. Enfin, il s'en prend au constat de l'instance précédente qui a considéré qu'il n'avait pas attaqué l'ordonnance de non-entrée en matière du Ministère public, alors qu'il s'agissait en réalité pour lui d'apaiser les relations avec son épouse.  
 
2.3. Ces trois griefs sont irrecevables. Le recourant ne démontre pas que les conditions de l'art. 97 al. 1 LTF respectivement 9 Cst. seraient réunies pour corriger l'état de fait de l'arrêt attaqué. En particulier, il n'expose pas en quoi la correction des vices allégués aurait l'influence sur le sort de la procédure ni n'explique en quoi l'appréciation des preuves par l'instance précédente serait arbitraire.  
Par ailleurs, la Cour de céans relève qu'elle ne tiendra pas compte des "faits" figurant au début du recours ni de ceux qui sont développés dans le chapitre relatif à la violation de l'art. 50 LEI, dès lors que le recourant présente sa propre version des événements, sans critiquer, conformément aux exigences de l'art. 106 al. 2 LTF, celle retenue par le Tribunal administratif fédéral. Le Tribunal fédéral examinera donc la bonne application du droit sur la seule base des faits figurant dans l'arrêt contesté. 
 
3.  
Le recourant se plaint d'une violation de l'art. 50 LEI. Il considère que c'est à tort que le Tribunal administratif fédéral a nié l'existence de raisons personnelles majeures au sens de cette disposition. Il devait admettre qu'il se trouvait dans une situation de violence conjugale grave. 
 
3.1. Selon l'art. 50 al. 1 LEI, après dissolution de la famille, le droit du conjoint et des enfants à l'octroi d'une autorisation de séjour et à la prolongation de sa durée de validité en vertu des art. 42 et 43 subsiste si l'union conjugale a duré au moins trois ans et que l'intégration est réussie (let. a) ou si la poursuite du séjour en Suisse s'impose pour des raisons personnelles majeures (let. b).  
 
3.2. En l'espèce, le recourant ne se prévaut à juste titre pas de l'art. 50 al. 1 let. a LEI. En effet, il a vécu en Suisse en ménage commun avec son épouse moins de trois ans, entre le 24 septembre 2016 et le 30 avril 2018.  
 
3.3. L'art. 50 al. 1 let. b et al. 2 LEI permet au conjoint étranger de demeurer en Suisse après la dissolution de l'union conjugale, lorsque la poursuite de son séjour s'impose pour des raisons personnelles majeures. Les raisons personnelles majeures visées à l'art. 50 al. 1 let. b LEI sont notamment données lorsque le conjoint est victime de violence conjugale, que le mariage a été conclu en violation de la libre volonté d'un des époux ou que la réintégration sociale dans le pays de provenance semble fortement compromise (art. 50 al. 2 LEI). L'art. 50 al. 1 let. b et al. 2 LEI vise à régler les situations qui échappent aux dispositions de l'art. 50 al. 1 let. a LEI, soit parce que le séjour en Suisse durant le mariage n'a pas duré trois ans, soit parce que l'intégration n'est pas suffisamment accomplie ou encore parce que ces deux aspects font défaut, mais que - eu égard à l'ensemble des circonstances - l'étranger se trouve dans un cas de rigueur après la dissolution de la famille (ATF 138 II 393 consid. 3.1; 137 II 345 consid. 3.2.1). A cet égard, c'est la situation personnelle de l'intéressé qui est décisive et non l'intérêt public que revêt une politique migratoire restrictive. Il s'agit par conséquent uniquement de décider du contenu de la notion juridique indéterminée "raisons personnelles majeures" et de l'appliquer au cas d'espèce, en gardant à l'esprit que l'art. 50 al. 1 let. b LEI confère un droit à la poursuite du séjour en Suisse (ATF 138 II 393 consid. 3.1; arrêt 2C_112/2020 du 9 juin 2020 consid. 4.1). Les art. 31 al. 1 et 77 OASA, dont se prévaut le recourant, concrétisent l'art. 50 al. 1 LEI (cf. arrêt 2C_858/2021 du 17 décembre 2021 consid. 8.2).  
 
3.4. S'agissant de la violence conjugale, la personne admise dans le cadre du regroupement familial doit établir qu'on ne peut plus exiger d'elle qu'elle poursuive l'union conjugale, parce que cette situation risque de la perturber gravement. La violence conjugale doit par conséquent revêtir une certaine intensité (ATF 138 II 393 consid. 3.1; arrêt 2C_693/2019 du 21 janvier 2020 consid. 4.2). La notion de violence conjugale inclut également la violence psychologique. A l'instar de violences physiques, seuls des actes de violence psychique d'une intensité particulière peuvent justifier l'application de l'art. 50 al. 1 let. b LEI (ATF 138 II 229 consid. 3.2.2; arrêt 2C_693/2019 du 21 janvier 2020 consid. 4.2). Une attaque verbale à l'occasion d'une dispute, de même qu'une gifle ou le fait pour un époux étranger d'avoir été enfermé une fois dehors par son épouse ne suffisent pas (cf. ATF 138 II 229 consid. 3.2.1; arrêt 2C_693/2019 du 21 janvier 2020 consid. 4.2). En revanche, le Tribunal fédéral a considéré qu'un acte de violence isolé, mais particulièrement grave, pouvait à lui seul conduire à admettre l'existence de raisons personnelles majeures au sens de l'art. 50 al. 1 let. b et al. 2 LEI (cf. arrêt 2C_693/2019 du 21 janvier 2020 consid. 4.2). La personne étrangère qui se prétend victime de violences conjugales sous l'angle de l'art. 50 al. 1 let. b et al. 2 LEI est soumise à un devoir de coopération accru (cf. art. 90 LEI; ATF 138 II 229 consid. 3.2.3; arrêt 2C_777/2015 du 26 mai 2016 consid. 3.2 non publié aux ATF 142 I 152). Elle doit rendre vraisemblable, par des moyens appropriés (rapports médicaux ou expertises psychiatriques, rapports de police, rapports/avis de services spécialisés, témoignages crédibles de proches ou de voisins, etc.), la violence conjugale, respectivement l'oppression domestique alléguée (cf. arrêts 2C_709/2018 du 27 février 2019 consid. 3.4; 2C_68/2017 du 29 novembre 2017 consid. 5.4.1).  
 
4.  
 
4.1. En l'espèce, sous l'angle de la violence conjugale, le Tribunal administratif fédéral a retenu à bon droit que les déclarations du recourant ne permettaient pas d'établir un degré de gravité ou le caractère systématique des violences psychiques exigé par la loi pour pouvoir retenir l'existence de violences conjugales qui imposeraient la poursuite du séjour de l'intéressé en Suisse. S'agissant des injures, le recourant avait certes allégué en faire l'objet quotidiennement, mais son épouse l'avait contesté, n'admettant que l'échange occasionnel d'injures, ce qui, selon l'instance précédente ne pouvait pas être exclu au vu de la situation de tension qui avait pu exister dans le couple. Un échange occasionnel était qualifié, sans violer le droit fédéral, d'insuffisamment grave. Quant au harcèlement téléphonique, le recourant avait indiqué lors de son audition que son épouse ne cessait de lui téléphoner sur son téléphone portable et de lui envoyer des messages. Sur ce dernier point, l'instance précédente a jugé à bon droit également qu'un tel comportement ne revêtait pas en l'espèce une intensité suffisante pour constituer en soi des violences conjugales.  
 
4.2. A l'instar de ce qu'il avait déjà fait valoir devant l'instance, le recourant réitère l'objection selon laquelle les différents éléments au dossier, mis ensemble, constituent un faisceau d'indices suffisant pour démontrer la réalité, la récurrence et l'intensité des violences subies. Il souligne qu'il a longtemps supporté les violences de son épouse.  
 
4.3. D'emblée, il faut relever que c'est à juste titre que le Tribunal administratif fédéral n'a pas tenu compte, dans l'appréciation du caractère systématique ou intense des violences subies, des injures et des communications par téléphone. Ces actes, même considérés globalement comme des indices probants, comme le demande le recourant, n'atteignent en effet pas une intensité suffisante pour être qualifiés de violences conjugales constituant des raisons personnelles majeures. A cela s'ajoute que la plupart des indices dont entend se prévaloir le recourant pour démontrer une plus grande gravité des violences subies ne ressortent pas des faits retenus par l'instance précédente (cf. consid. 2 ci-dessus), de sorte que la Cour de céans ne peut se saisir de ce dernier point.  
 
4.4. En définitive, sur la base des faits constatés dans l'arrêt attaqué (art. 105 al. 1 LTF), le Tribunal administratif fédéral n'a pas violé l'art. 50 al. 1 let. b LEI en confirmant le refus du Secrétariat d'Etat aux migrations d'approuver la prolongation de l'autorisation de séjour du recourant.  
 
5.  
Les considérants qui précèdent conduisent au rejet du recours. 
Succombant, le recourant doit supporter les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). Il n'est pas alloué de dépens (art. 68 al. 1 et 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué au mandataire du recourant, au Secrétariat d'Etat aux migrations et au Tribunal administratif fédéral, Cour VI. 
 
 
Lausanne, le 31 mars 2023 
 
Au nom de la IIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : F. Aubry Girardin 
 
Le Greffier : Dubey