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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
4P.148/2003 /ech 
 
Arrêt du 12 novembre 2003 
Ire Cour civile 
 
Composition 
MM. et Mme les Juges Corboz, Président, Walter et Rottenberg Liatowitsch. 
Greffière: Mme de Montmollin. 
 
Parties 
La République X.________, recourante, représentée par Me Manuel Bianchi Della Porta, 
 
contre 
 
A.________ (anciennement dénommée Z.________), intimée, représentée par Me Shelby du Pasquier et Me Daniel Tunik, 
Groupe B.________, . 
intimée, représentée par Me Patrick Schellenberg, 
Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève, case postale 3108, 1211 Genève 3. 
 
Objet 
art. 9 et 29 al. 2 Cst. (procédure civile; révision; appréciation arbitraire des preuves; droit d'être entendu) 
 
recours de droit public contre l'arrêt de la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève du 16 mai 2003. 
 
Faits: 
A. 
Groupe B.________ (ci-après: B.________) est une société de droit libanais active dans dans le domaine des travaux publics et privés ainsi que de leur financement. 
 
Z.________, actuellement A.________ (ci-après: Z.________), est une société de droit X.________ qui exploite divers gisements pétroliers dans la République de X.________. Elle est au bénéfice d'une concession pour laquelle elle verse mensuellement une redevance minière dont le montant dépend de la production réalisée. 
 
Durant les années 90, la République X.________ a mis en oeuvre un programme de construction d'équipements publics. Plusieurs chantiers ont été exécutés par l'une des filiales de B.________, C.________ SA. 
 
Par conventions des 27 avril 1992 (n° 560) et 9 mars 1993 (n° 569), B.________ a accordé des prêts à la République X.________ en vue de la réalisation d'ouvrages de travaux publics. Le remboursement devait intervenir par versements semestriels, échelonnés selon deux échéanciers déterminés. Afin d'assurer le service des prêts à ces échéances, la République X.________ a instruit Z.________ de verser à due concurrence le montant des redevances minières à B.________. Il était précisé que ces paiements vaudraient pleine et entière libération de Z.________ à l'égard de la République X.________ et que les instructions étaient irrévocables. Z.________ les a acceptées les 5 juin 1992 et 16 avril 1993. 
 
Z.________ a régulièrement versé les montants dus pour couvrir les échéances arrivées à terme jusqu'en mai 1995. Les parties ont alors reporté certaines échéances et confirmé la teneur des conventions n°s 560 et 569, par accords des 19 janvier 1996 pour la République X.________ et B.________, et du 24 janvier 1996 pour Z.________. Les parties ont notamment rappelé que les paiements honorés par Z.________ étaient effectués à concurrence des montants dont elle était redevable envers la République X.________ à titre de redevances minières et que l'exécution des instructions susdécrites était indépendante de l'exécution des conventions n°s 560 et 569. 
Alors qu'elle avait régulièrement rempli ses engagements jusque-là, Z.________ n'a effectué qu'un versement partiel à l'échéance de mai 1998. 
 
Le 26 mai 1998, elle a informé B.________ qu'elle ne pouvait plus honorer l'intégralité du service du crédit en raison de la baisse du prix du pétrole qui l'obligeait à répartir les redevances au prorata entre divers ayants droit. 
 
Le même jour, le président du Tribunal de commerce de Y.________, dans la République de X.________, a rendu une ordonnance de référé interdisant à Z.________ de prélever une partie de la redevance minière pour la virer à B.________. En validation de cette ordonnance, la République X.________ a saisi la Cour internationale d'arbitrage d'une demande dirigée contre B.________. Par sentence partielle du 4 juin 2002, le tribunal arbitral a constaté que B.________ avait exécuté ses obligations selon les conventions n°s 560 et 569. 
B. 
Le 1er septembre 1998, B.________ a assigné Z.________ en paiement du solde de l'échéance du 30 mai 1998, amplifiant régulièrement sa demande des montants du remboursement dû pour chaque échéance, dont la défenderesse ne s'acquittait plus. Par jugement du 20 septembre 2001, le Tribunal de première instance du canton de Genève a condamné Z.________ à verser à B.________ 64 219 030 fr. 88, intérêts en sus. La société pétrolière a recouru contre cette décision. En cours de procédure, B.________ a de nouveau amplifié ses conclusions en raison du non-respect d'une échéance de paiement, et la République X.________ est intervenue afin d'appuyer les conclusions prises par Z.________. 
 
Par arrêt du 13 septembre 2002, la Cour de justice du canton de Genève a confirmé le jugement de première instance et fait droit aux conclusions additionnelles de B.________. En substance, la Cour de justice a retenu que les parties étaient liées par un rapport d'assignation se rapprochant d'un accréditif, en raison du caractère irrévocable des instructions. L'ordonnance de référé rendue par le président du Tribunal de commerce de Y.________ ne constituait pas un cas d'impossibilité au sens de l'art. 119 CO libérant Z.________ de son obligation d'honorer les échéances de paiement. 
C. 
L'arrêt du 13 septembre 2002 a fait l'objet d'une demande en révision sur le plan cantonal, ainsi que de deux recours en réforme et un recours de droit public au Tribunal fédéral. Les procédures ouvertes devant le Tribunal fédéral ont été suspendues jusqu'à droit connu sur le recours en révision cantonal. 
D. 
La demande en révision a été déposée par la République X.________ auprès de la Cour de justice genevoise par acte du 21 octobre 2002. A l'appui de sa démarche, la recourante a allégué qu'elle avait découvert, après le prononcé de l'arrêt du 13 septembre 2002, que G.________ avait effectué un paiement de 10 000 000 FF destiné à D.________, ancien président de la République de X.________ et/ou à E.________, ancien ministre de l'économie, par l'intermédiaire d'un compte ouvert par F.________, ancien dirigeant de W.________ SA, auprès de la Banque V.________ à Lausanne. Selon la République, ce versement était très vraisemblablement destiné à un acte de corruption, à savoir convaincre ses bénéficiaires de souscrire des accords de paiement exorbitants en faveur de B.________. Lesdits accords, qu'elle avait invalidés pour cause de dol et d'erreur essentielle le 21 octobre 2002, ne la liaient pas. La demanderesse en révision concluait donc à la rétractation de l'arrêt du 13 septembre 2002 ainsi qu'à la constatation de la nullité des accords de paiement documentés par les courriers des 25 mai 1992, 19 mars 1993 et 24 janvier 1996, B.________ et Z.________ étant déboutées de toutes leurs conclusions. 
 
Parallèlement, la République X.________ a déposé une plainte pénale, classée par le procureur général du canton de Genève dans une ordonnance du 16 décembre 2002. Cette ordonnance a été confirmée par la Chambre d'accusation le 10 mars 2003. 
E. 
La Chambre civile de la Cour de justice a déclaré irrecevable le recours en révision dans un arrêt du 16 mai 2003. 
 
En bref, la Cour de justice a d'abord retenu que la recourante n'indiquait pas, et a fortiori n'établissait pas, la date à laquelle elle avait découvert le versement incriminé, ni les circonstances dans lesquelles elle avait appris ce fait. Faute pour la République d'avoir démontré qu'elle s'était pourvue en révision en temps utile, son recours devait être déclaré formellement irrecevable. 
 
La Cour de justice a également fait reproche à la recourante, qui fondait son recours sur l'art. 157 let. d de la loi de procédure civile genevoise (ci-après: LPC/GE), d'avoir failli à son devoir d'allégation en ne démontrant pas le lien de causalité entre le versement incriminé et ses incidences sur une bonne administration de la justice. L'intéressée n'expliquait en particulier pas comment la conclusion des accords de paiement intervenue le 27 avril 1992, respectivement le 9 mars 1993, aurait pu être viciée par un acte de corruption qui lui serait postérieur, survenu le 4 mai 1993. Elle se ralliait aussi à l'opinion des autorités pénales qui avaient considéré que la justice n'avait pas été induite en erreur par la production de titres falsifiés et que la prétention de B.________ était en tout état de cause fondée parce que ni le financement des travaux ni leur exécution par une filiale de celui-ci n'était contestée. Tous ces motifs commandaient également l'irrecevabilité de la demande en révision. 
 
Aurait-elle été recevable, que la demande en révision aurait dû de toute façon être rejetée, a considéré la Cour de justice dans un troisième temps. En effet, en supposant que l'acte de corruption du 4 mai 1993 ait déterminé la recourante à souscrire des accords de paiement exorbitants en faveur de B.________, la validité des conventions des 27 avril 1992 et 9 mars 1993 n'en aurait pas été affectée en raison de la licéité de l'objet de ces conventions. De plus, Z.________, en notifiant les 5 juin 1992 et 16 avril 1993 son acceptation sans réserve et irrévocable des instructions de paiement de la République X.________, avait accepté une dette nouvelle, de caractère abstrait, indépendante du rapport de base entre B.________ et la recourante (rapport de valeur) et du rapport de provision liant Z.________ à la République X.________, de sorte qu'une éventuelle immoralité, erreur essentielle ou défaut de représentation affectant le rapport de valeur ne préjugeait pas la validité de ses engagements envers B.________. Pour le même motif, l'invalidation des accords de paiement restait sans effet à l'égard des engagements souscrits par Z.________ en faveur de B.________. 
F. 
La République X.________ interjette un recours de droit public contre l'arrêt du 16 mai 2003. Se plaignant de violation de son droit d'être entendue et d'arbitraire dans l'application de la loi de procédure civile genevoise, elle conclut à l'annulation de la décision attaquée. A titre provisionnel, elle sollicite le maintien de la suspension des procédures relatives aux recours déposés devant le Tribunal fédéral contre l'arrêt du 13 septembre 2002. 
 
B.________ invite le Tribunal fédéral à rejeter le recours et à confirmer l'arrêt du 16 mai 2003. 
 
Z.________ propose l'admission du recours. 
 
La cour cantonale se réfère à ses considérants. 
G. 
Par ordonnance du 2 juillet 2003, le président de la Ire Cour civile du Tribunal fédéral a avisé les parties que les procédures relatives aux recours interjetés devant le Tribunal fédéral contre l'arrêt du 13 septembre 2002 seraient traitées en même temps que le recours dirigé contre l'arrêt sur la demande en révision rendu le 16 mai 2003. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
1. 
L'admission du recours de droit public dirigé contre l'arrêt sur demande en révision du 16 mai 2003 rendrait sans objet les autres procédures fédérales pendantes devant le Tribunal fédéral en ce qui concerne l'arrêt du 13 septembre 2002, dont l'annulation devrait finalement être prononcée. Il convient par conséquent de traiter ce recours de droit public en premier lieu. 
2. 
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 129 I 173 consid. 1 et les références). S'agissant du fond, dans la procédure du recours de droit public, il n'entre par contre en matière que sur les griefs expressément soulevés et motivés dans l'acte de recours, c'est-à-dire qui font l'objet d'une argumentation précise et détaillée, compréhensible à la seule lecture du recours, démontrant en quoi consiste concrètement la violation alléguée. Le recourant ne saurait se contenter de soulever de vagues griefs ou de renvoyer aux actes cantonaux (art. 90 al. 1 let. b OJ; ATF 129 I 113 consid. 2.1; 128 III 50 consid. 1c et les arrêts cités). 
3. 
Le recours de droit public constitue une procédure indépendante, dont le seul objet est la conformité de l'acte attaqué à la Constitution fédérale, et non la continuation de la procédure cantonale. C'est pourquoi les conditions de sa recevabilité sont déterminées exclusivement par la loi d'organisation judiciaire fédérale. Selon l'art. 88 OJ, ont qualité pour recourir les particuliers ou les collectivités lésés par des arrêtés ou des décisions qui les concernent personnellement ou qui sont d'une portée générale. Le recours destiné à préserver de simples intérêts de fait est irrecevable (ATF 126 I 43 consid. 1a). Il faut que la personne lésée soit directement atteinte dans ses intérêts juridiquement protégés (ATF 70 I 78). En l'occurrence, la recourante n'est intervenue dans le litige que pour appuyer les conclusions de la défenderesse. Se pose donc la question de savoir dans quelle mesure elle dispose de la qualité pour recourir au sens de l'art. 88 OJ
 
En matière d'intervention, la jurisprudence a précisé qu'il est sans importance que le recourant ait eu la qualité de partie dans la procédure cantonale - sous réserve du grief tiré d'une violation arbitraire des dispositions de procédure qui régissent l'intervention en droit cantonal. L'intervenant accessoire à un procès civil est directement atteint s'il ne peut plus, ultérieurement, opposer à une action récursoire les exceptions qu'il aurait pu élever dans le premier procès. Autrement dit, il faut que la situation juridique de l'intervenant soit directement atteinte par la décision rendue contre la partie à laquelle il s'était joint. En revanche, lorsque le premier jugement n'est pas opposable à l'intervenant dans le second procès, celui-ci n'a pas la qualité pour recourir en droit public contre le premier jugement (ATF 126 I 43 consid. 1d/aa; 114 Ia 93 consid. 1b et les références). 
 
En l'occurrence, la recourante ne démontre nullement en quoi sa situation juridique est directement atteinte par la décision rendue à l'encontre de Z.________, dont elle sollicite la révision. Sous cet angle, (même si sa qualité pour former le présent recours de droit public n'est pas contestée par les autres parties), on peut douter de la recevabilité de celui-ci. 
 
Celui qui n'a pas la qualité pour recourir sur le fond peut cependant, s'il avait la qualité de partie dans la procédure cantonale, se plaindre d'un déni de justice formel, ou en d'autres termes de la violation des garanties formelles offertes aux parties par le droit cantonal de procédure ou par le droit constitutionnel fédéral, notamment le droit d'être entendu (art. 29 al. 2 Cst.). L'intérêt juridiquement protégé exigé par l'art. 88 OJ découle alors du droit de participer, en tant que partie, à la procédure cantonale. Ainsi, celui qui n'a pas la qualité pour recourir au fond mais qui avait qualité de partie en procédure cantonale peut se plaindre par exemple de ce qu'un recours cantonal a été à tort déclaré irrecevable, ou que lui même n'a pas été entendu, ou qu'on ne lui a pas donné l'occasion de présenter des moyens de preuve, voire qu'il n'a pas pu prendre connaissance du dossier. En revanche, il ne saurait se plaindre d'une appréciation prétendument arbitraire des preuves, ni du fait que des moyens de preuve ont été écartés pour défaut de pertinence ou par appréciation anticipée; en effet, l'examen de telles questions ne peut être séparé de l'examen du fond lui-même; or celui qui n'a pas qualité pour recourir au fond ne peut pas exiger un tel examen (ATF 126 I 81 consid. 3b; 125 II 86 consid. 3b; 121 IV 317 consid. 3b; 114 Ia 307 consid. 3c). 
 
En droit genevois, l'intervention est réglée aux art. 109 ss LPC/GE. Selon l'art 111, si l'intervention est admise - c'est bien le cas en l'espèce - l'intervenant participe, "comme les autres parties", au déroulement de la procédure en cours (Bertossa/Gaillard/ Guyet/Schmidt, Commentaire de la LPC/GE, n° 1 ad art. 111; cf. aussi Tevini Du Pasquier, Le crédit documentaire en droit suisse, note de pied de page 220 et ss, p. 274). 
 
Au vu de ce qui précède, il convient d'entrer en matière sur le grief de violation du droit d'être entendu que la recourante invoque en premier lieu. En revanche, les griefs touchant même indirectement le fond n'ont pas à être abordés. 
4. 
4.1 La recourante reproche à la cour cantonale de ne pas avoir ouvert d'enquêtes sur les conditions de recevabilité du recours en révision, notamment sur le moment de la découverte du fait qui a motivé le dépôt de celui-ci ainsi que sur l'objet des accords de paiement et les circonstances de leur conclusion. Elle expose qu'elle avait pourtant, à quatre reprises, requis de la Cour de justice de lui permettre de rapporter la preuve des faits qu'elle alléguait à l'appui de la révision: 
- elle aurait formulé une offre de preuve générale "par toutes voies de droit" dans les conclusions de son recours en révision. 
- le 25 mars 2003, prenant acte de ce que l'instruction ne pourrait pas se faire par voie pénale, elle aurait requis expressément "diverses mesures probatoires" de la Cour de justice. 
- lors de l'audience du 1er avril 2003 devant la Cour de justice, elle aurait consacré une partie importante de sa plaidoirie à requérir l'ouverture d'une instruction sur les faits allégués dans son recours en révision. 
- à la suite des articles parus dans la presse française, elle aurait rappelé une dernière fois la nécessité d'ouvrir des enquêtes. 
 
De l'avis de la recourante, la confirmation par la Chambre d'accusation du classement de sa plainte pour escroquerie à jugement ne serait pas propre à libérer la Cour de justice de son devoir d'instruire les faits de la révision. L'autorité pénale aurait classé la plainte sans jamais l'instruire. Elle se serait référée au principe de subsidiarité du droit pénal en soulignant qu'une instruction pénale n'avait pas pour vocation de faciliter le déroulement d'un procès civil. Pour la recourante, la Cour de justice ne pourrait pas d'un côté, par sa Chambre d'accusation, refuser l'instruction au motif que c'est une affaire civile et d'un autre côté, par sa Chambre civile, refuser d'instruire au civil en se fondant sur l'ordonnance de classement pénale. 
4.2 Le droit d'être entendu et les modalités de sa mise en oeuvre sont tout d'abord déterminés par la législation cantonale (ATF 127 I 54 consid. 2b). Lorsque la protection accordée par le droit cantonal est inférieure ou équivalente aux garanties minimales déduites de l'art. 29 al. 2 Cst., que le Tribunal fédéral examine librement, le justiciable peut invoquer celles-ci directement (ATF 126 I 15 consid. 2a p. 16 et les arrêts cités). En l'occurrence, la recourante ne se réfère qu'à l'art. 29 al. 2 Cst. 
 
Tel qu'il est reconnu par cette dernière disposition, le droit d'être entendu comprend en particulier le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes, de prendre connaissance du dossier, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l'administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s'exprimer sur son résultat lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 126 I 15 consid. 2a/aa p. 16 et les références). 
 
Le droit d'être entendu n'existe que si la preuve a été offerte ou fournie en temps utile (ATF 106 II 170 consid. 6b) et dans les formes prescrites, si elle se rapporte à un fait pertinent qui n'est pas déjà établi et si le moyen proposé est apte à apporter la démonstration voulue preuve (arrêt 4P.79/2002 du 2 juillet 2002 consid. 3.1). En l'espèce, la cour cantonale a considéré que la recourante n'avait pas allégué ni établi la date à laquelle elle avait découvert le fait justifiant le dépôt de la demande en révision, à savoir l'existence d'un paiement de 10 000 000 FF qui serait constitutif d'un pot-de-vin et montrerait que l'arrêt du 13 septembre 2002 admettant la demande de la société libanaise aurait été obtenue par "machination frauduleuse" au sens de l'art. 157 let. d LPC/GE. S'agissant des conditions d'ouverture d'une voie de droit cantonale, les questions touchant à la précision des allégués et à la formulation des offres de preuve sont régies par le droit cantonal, dont la bonne application ne peut être réexaminée que sous l'angle de l'arbitraire. Il convient donc de se saisir immédiatement des griefs d'application arbitraire des dispositions cantonales topiques que la recourante développe dans la seconde partie de son recours. 
4.3 
Pour ce qui est des règles relatives à l'allégation des faits, la recourante invoque les art. 166 al. 1, 7 et 126 LPC/GE. La première de ces dispositions indique que la révision est formée par une assignation, laquelle est réglée à l'art. 7 qui stipule que l'assignation doit contenir un exposé des faits, auquel l'art. 126 est applicable par analogie. Selon celui-ci "la partie qui se prévaut desdits faits est tenue de les articuler avec précision". La recourante explique que l'exigence de précision ainsi mise en exergue doit être mise en relation avec l'exigence de concision soulignée par les commentateurs du CPC/GE, appliquée sans formalisme excessif, fonction en particulier de la possibilité ou non de rapporter la preuve du fait allégué. En l'espèce, elle soutient qu'en alléguant dans son recours en révision qu'elle avait appris le fait donnant lieu à révision "peu avant le dépôt de la plainte pénale du 16 octobre 2002", et qu'elle "ignorait encore l'existence du versement (...)" lorsque la cour a rendu son jugement, elle a satisfait aux exigences de précision des allégués; dès lors qu'il est évident de la sorte qu'elle a allégué avoir découvert les faits après le 13 septembre 2002 et dans les jours précédant le 16 octobre 2002, elle a respecté le délai de deux mois à compter de la découverte du motif de révision ancré à l'art. 163 LPC/GE. 
4.4 
Selon la jurisprudence, une décision est arbitraire lorsqu'elle est manifestement insoutenable, méconnaît gravement une norme ou un principe juridique clair et indiscuté, ou encore heurte de manière choquante le sentiment de la justice ou de l'équité. Il ne suffit pas que la motivation soit arbitraire; encore faut-il que la décision soit arbitraire dans son résultat. A cet égard, le Tribunal fédéral ne s'écarte de la solution retenue que si celle-ci apparaît insoutenable, en contradiction manifeste avec la situation effective, adoptée sans motif objectif et en violation d'un droit certain. Il n'y a pas arbitraire du seul fait qu'une autre solution paraît également concevable voire préférable (ATF 129 I 8 consid. 2.1 et les arrêts cités). 
 
La question litigieuse en l'espèce est de savoir si la demande en révision a été déposée en temps utile; si tel n'est pas le cas, alors tous les griefs à propos des autres conditions de recevabilité ou du bien-fondé de la demande de révision sont sans objet. 
 
Selon l'art. 163 LPC/GE, le délai pour se pourvoir en révision est de deux mois à compter du jour de la découverte du cas d'ouverture à révision invoqué - en l'espèce une machination frauduleuse au sens de l'art. 157 let. d CPC/GE, cette machination étant constituée, selon la recourante, par un versement de 10 000 000 FF. Il est constant que c'est à la recourante, qui d'ailleurs le reconnaît dans son recours de droit public, qu'il appartient d'établir le respect du délai utile. A la lecture de la demande en révision, on constate certes que l'intéressée a fait valoir dans son exposé des conditions de recevabilité, sous deux points différents mais de manière compréhensible, qu'elle avait découvert le paiement invoqué dans le délai utile de deux mois. On ne voit toutefois nullement ce qui empêchait la recourante de dire exactement quand et comment elle avait découvert le fait, de manière à permettre à son adverse partie, qui s'est du reste élevée contre l'absence de précision de ses allégués, de contester celui-ci et le cas échéant d'offrir d'administrer les contre-preuves qu'elle jugeait nécessaires. Il s'agissait en effet d'un élément au sujet duquel la recourante pouvait aisément apporter des précisions supplémentaires, étant donné qu'elle devait forcément savoir le moment exact où elle avait pris conscience de cet élément. En exigeant ainsi de la part de la recourante l'allégation d'une date, ou alors à tout le moins des circonstances concernant la découverte du fait donnant lieu à révision, la cour cantonale n'a pas donné une interprétation insoutenable des dispositions cantonales relatives à la forme et la précision des allégués. 
 
La recourante se plaint aussi d'application arbitraire des normes sur l'administration des preuves. Comme elle l'écrit elle-même (p. 14), en citant le Commentaire de la loi de procédure civile genevoise, le droit des parties de rapporter, par les moyens utiles, la preuve des faits qu'elles invoquent ne vaut que pour les faits qui ont été allégués régulièrement. Sous cet angle également, sa critique est vaine. 
5. 
Le recours est rejeté. La recourante supportera les frais de justice et versera une indemnité de dépens à l'intimée B.________, qui a conclu au rejet du recours. 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
1. 
Le recours est rejeté. 
2. 
Un émolument judiciaire de 70 000 fr. est mis à la charge de la recourante. 
3. 
La recourante versera à l'intimée Groupe B.________ une indemnité de 80 000 fr. à titre de dépens. 
4. 
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et à la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève. 
 
Lausanne, le 12 novembre 2003 
Au nom de la Ire Cour civile 
du Tribunal fédéral suisse 
Le président: La greffière: