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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
1P.679/2006 /fzc 
 
Arrêt du 7 décembre 2006 
Ire Cour de droit public 
 
Composition 
MM. les Juges Féraud, Président, 
Aeschlimann et Fonjallaz. 
Greffier: M. Rittener. 
 
Parties 
X.________, 
recourant, représenté par Me Pascal Pétroz, avocat, 
 
contre 
 
Commission fédérale des maisons de jeu, 
Eigerplatz 1, 3003 Berne, 
Ministère public de la Confédération, 
Taubenstrasse 16, 3003 Berne, 
Procureur général du canton de Genève, 
case postale 3565, 1211 Genève 3, 
Cour de cassation du canton de Genève, 
case postale 3108, 1211 Genève 3. 
 
Objet 
procédure pénale; confiscation, 
 
recours de droit public contre l'arrêt de la Cour de cassation du canton de Genève du 8 septembre 2006. 
 
Faits : 
A. 
X.________ est le propriétaire d'appareils de jeux qui ont été saisis par la Commission fédérale des maisons de jeu (ci-après: la Commission fédérale) dans divers établissements publics de Genève. Par décision du 27 septembre 2004, la Commission fédérale a ordonné la confiscation de deux appareils. Le 3 mars 2005, elle a prononcé la confiscation de 521 fr. retrouvés dans trois autres machines. Enfin, par décision du 9 juin 2005, elle a ordonné la confiscation de seize appareils, ainsi que de 3'186 fr. retrouvés à l'intérieur de ceux-ci . 
 
X.________ a demandé à être jugé par un tribunal, conformément à l'art. 72 al. 1 de la loi fédérale du 22 mars 1974 sur le droit pénal administratif (DPA; RS 313.0). Devant le Tribunal de police du canton de Genève (ci-après: le Tribunal de police), se fondant sur un rapport établi le 24 janvier 2006 par l'ingénieur Y.________, X.________ a contesté que les machines confisquées soient des "appareils à sous servant à des jeux de hasard" comme le soutenait la Commission fédérale. Il sollicitait l'administration d'une expertise des appareils litigieux. Le Tribunal de police a rejeté cette requête par jugement préparatoire du 15 septembre 2005, au motif que l'expertise en question avait déjà été refusée dans des cas analogues et qu'une analyse technique de la Commission fédérale figurait déjà au dossier. X.________ a pu déposer le rapport d'expertise susmentionné et l'auteur de celui-ci a été entendu en audience du 3 février 2006. 
B. 
Par jugement du 31 mars 2006, le Tribunal de police a ordonné, sur la base des art. 58 et 59 CP, la confiscation et la destruction, aux frais de X.________, de dix-sept appareils ainsi que la confiscation et la dévolution à l'Etat de 3'707 fr. retrouvés à l'intérieur de ceux-ci. En substance, cette autorité a considéré que les machines saisies étaient des appareils à sous servant aux jeux de hasard au sens de l'art. 3 al. 2 de la loi fédérale sur les jeux de hasard et les maisons de jeu (LMJ; RS 935.52), dont l'exploitation est prohibée en dehors des casinos (art. 4 LMJ). En installant de tels appareils, qui n'ont pas fait l'objet d'un examen, d'une évaluation de la conformité ou d'une homologation, X.________ s'était rendu coupable des infractions réprimées par l'art. 56 al. 1 let. c LMJ. 
C. 
X.________ a recouru contre ce jugement devant la Cour de cassation du canton de Genève, qui a rejeté le recours par arrêt du 8 septembre 2006. Cette autorité a notamment considéré que le Tribunal de police n'avait pas violé le droit d'être entendu de l'intéressé en refusant d'ordonner une expertise judiciaire portant sur le fonctionnement des appareils confisqués et qu'elle n'avait pas fait preuve d'arbitraire en écartant l'avis privé émis par l'ingénieur Y.________. 
D. 
Agissant par la voie du recours de droit public, X.________ demande au Tribunal fédéral d'annuler cet arrêt. Il se plaint d'une violation de son droit d'être entendu (art. 29 al. 2 Cst.), d'une violation de l'art. 6 par. 1 CEDH et d'une appréciation arbitraire des preuves (art. 9 Cst.). La Cour de cassation genevoise et le Procureur général du canton de Genève ont renoncé à formuler des observations, ce dernier concluant néanmoins à la confirmation de l'arrêt attaqué. La Commission fédérale des maisons de jeu s'est déterminée; elle conclut au rejet du recours, dans la mesure où il est recevable. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
1. 
Le recours de droit public est formé contre un arrêt final rendu en dernière instance cantonale, pour violation de droits constitutionnels (art. 84 al. 1 let. a et 86 al. 1 OJ). Le recourant, qui voit la confiscation de ses appareils de jeux et des montants qui s'y trouvaient confirmée par l'arrêt attaqué, a qualité pour contester ce prononcé (art. 88 OJ). Les autres conditions de recevabilité étant réunies, il convient d'entrer en matière. 
2. 
Dans un grief d'ordre formel, le recourant se plaint d'une violation de son droit d'être entendu, au motif que l'expertise qu'il avait sollicitée n'a pas été administrée. 
2.1 Le contenu du droit d'être entendu est déterminé en premier lieu par les dispositions cantonales de procédure, dont le Tribunal fédéral ne contrôle l'application et l'interprétation que sous l'angle de l'arbitraire; dans tous les cas, l'autorité cantonale doit cependant respecter les garanties minimales déduites directement de l'art. 29 al. 2 Cst., dont le Tribunal fédéral examine librement le respect (ATF 127 III 193 consid. 3 p. 194; 126 I 19 consid. 2a p. 22; 124 I 49 consid. 3a p. 51 et les références). 
 
En l'espèce, le recourant se plaint implicitement d'une application arbitraire de l'art. 65 al. 1 du code de procédure pénale genevois du 29 septembre 1977 (CPP/GE), aux termes duquel toutes les fois que se posent des questions de fait qui revêtent un caractère technique ou exigent des recherches particulières, le juge peut, d'office ou à la demande des parties, prendre l'avis d'experts. Cette disposition ne va pas au-delà des garanties minimales déduites de l'art. 29 al. 2 Cst., étant précisé que l'expertise peut, comme les autres moyens de preuve proposés par les parties, faire l'objet d'une appréciation anticipée (cf. infra consid. 2.2). Il y a donc lieu de se limiter à un examen de ce grief à la lumière de l'art. 29 al. 2 Cst. 
2.2 Le droit d'être entendu, tel qu'il est garanti à l'art. 29 al. 2 Cst., comprend notamment le droit pour l'intéressé de s'exprimer sur les éléments pertinents avant qu'une décision ne soit prise touchant sa situation juridique, de produire des preuves pertinentes, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuve pertinentes, de participer à l'administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s'exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 129 II 497 consid. 2.2 p. 504 s.; 127 I 54 consid. 2b p. 56; 124 I 48 consid. 3a p. 51 et les arrêts cités). L'autorité peut cependant renoncer à procéder à des mesures d'instruction lorsque les preuves administrées lui ont permis de former sa conviction et que, procédant d'une manière non arbitraire à une appréciation anticipée des preuves qui lui sont encore proposées, elle a la certitude que ces dernières ne pourraient l'amener à modifier son opinion (ATF 130 II 425 consid. 2.1 p. 429; 125 I 127 consid. 6c/cc in fine p. 135; 124 I 208 consid. 4a p. 211 et les arrêts cités). En matière d'appréciation des preuves et d'établissement des faits, il y a arbitraire lorsque l'autorité n'a manifestement pas compris le sens et la portée d'un moyen de preuve, si elle ne prend pas en compte, sans raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision ou lorsqu'elle tire des constatations insoutenables des éléments recueillis (ATF 129 I 8 consid. 2.1 p. 9; 127 I 38 consid. 2a p. 41). 
2.2.1 Selon le recourant, le Tribunal de police aurait dû faire administrer l'expertise qu'il sollicitait en raison du fait que les collaborateurs de la Commission fédérale ne disposaient pas des qualifications techniques nécessaires pour examiner les appareils litigieux. Il est douteux que ce grief satisfasse aux exigences minimales de motivation posées par l'art. 90 al. 1 let. b OJ. Au demeurant, l'affirmation du recourant n'est aucunement démontrée par l'expertise privée du 24 janvier 2006, celle-ci partant d'ailleurs du principe erroné qu'une "machine à sous" doit être équipée d'un "système technique permettant de matérialiser un gain immédiat en argent", alors que la seule possibilité d'obtenir un gain en nature, des bons ou des points est suffisante (cf. Message du Conseil fédéral du 26 février 1997 relatif à la LMJ, in FF 1997 III p. 163). Pour le surplus, les allégations du recourant quant aux qualifications des collaborateurs de la Commission fédérale sont purement gratuites et ne sont corroborées par aucun élément du dossier; elles ne suffisent dès lors manifestement pas à fonder la nécessité d'ordonner une expertise supplémentaire. 
2.2.2 Le recourant affirme également qu'une expertise aurait eu des effets sur le jugement du Tribunal de police, dans la mesure où le temps de jeu et la possibilité de bénéficier de parties gratuites n'auraient pas été prises en compte par les techniciens de la Commission fédérale. Il y a d'abord lieu de relever que l'exemple cité par le recourant pour démontrer une fausse appréciation de la durée de jeu concerne l'appareil "Magic Card", qui ne fait pas l'objet des confiscations litigieuses. Au demeurant, contrairement à ce qu'affirme le recourant, le critère décisif pour distinguer les appareils à sous servant aux jeux d'argent ("Geldspielautomaten") des autres automates de jeu n'est pas "le rapport entre la mise et le temps de jeu", mais le rapport entre la mise en argent et le degré de divertissement du jeu (cf. arrêts 6P.15/2005 du 22 mars 2005, consid. 5; 1A.22/2000 du 7 juillet 2000, consid. 3c). Le temps de jeu n'est donc qu'un indice parmi d'autres, au nombre desquels figurent par exemple la part du hasard dans le déroulement du jeu ou la présence d'un dispositif de remise à zéro des crédits (arrêt 6P.15/2005 précité, consid. 6.2). En l'espèce, le Tribunal de police a d'ailleurs précisé que le temps supplémentaire en cas de gain ne modifiait pas le degré de divertissement du jeu (arrêt du Tribunal de police p. 8). Dans ces conditions, les premiers juges pouvaient considérer sans arbitraire que l'expertise réclamée par le recourant n'était pas de nature à modifier leur opinion. 
2.3 Dès lors que l'appréciation anticipée de la preuve offerte par le recourant n'était pas manifestement insoutenable, le refus des premiers juges de l'administrer ne porte pas atteinte aux garanties déduites de l'art. 29 al. 2 Cst. Par ailleurs, il y a lieu de relever que le recourant a eu tout loisir de s'exprimer sur les éléments pertinents ainsi que sur le résultat de l'administration des preuves essentielles et qu'il a pu produire une expertise privée et faire entendre son auteur. Dans ces conditions, il ne saurait se plaindre d'une violation de son droit d'être entendu, de sorte que ce premier grief doit être rejeté. 
3. 
Dans un deuxième moyen, le recourant se plaint d'une violation de l'art. 6 par. 1 CEDH, qui garantit à toute personne le droit à ce que sa cause soit entendue équitablement par un tribunal indépendant et impartial, qui décidera notamment du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. 
3.1 Les critiques relatives à une présentation inéquitable des moyens de preuve et à l'omission de prendre en compte l'expertise produite par le recourant se confondent avec le grief d'appréciation arbitraire des preuves tel qu'il a été examiné précédemment (cf. supra consid. 2). Au demeurant, même si l'on devait comprendre ces critiques comme une démonstration du manque d'impartialité et d'équité des premiers juges, il y a lieu de constater qu'un tel grief n'a pas été formulé devant la Cour de cassation genevoise. Or, sauf exceptions dont aucune n'est réalisée en l'espèce, il découle du principe de l'épuisement des voies de recours cantonales (art. 86 al. 1 OJ) que les griefs qui n'ont pas été présentés à l'autorité cantonale de dernière instance alors qu'ils pouvaient l'être sont irrecevables devant le Tribunal fédéral (ATF 119 Ia 88 consid. 1a p. 90 s.; 117 Ia 491 consid. 2a p. 495, 522 consid. 3a p. 525 s.). 
3.2 Il y a donc lieu de se limiter à l'examen de l'affirmation du recourant selon laquelle le fait que la Cour de cassation genevoise ait qualifié la Commission fédérale de "juge administratif" démontrerait qu'il n'a pas été jugé de manière indépendante et impartiale. Cette seule allégation n'est pas suffisante pour ébaucher une démonstration de la violation alléguée et ne répond pas aux exigences minimales de motivation de l'art. 90 al. 1 let. b OJ, de sorte que cette partie du grief doit elle aussi être déclarée irrecevable (cf. ATF 130 I 258 consid. 1.3 p. 261, 26 consid. 2.1 p. 31; 125 I 71 consid. 1c p. 76 et les références). Quoi qu'il en soit, on ne voit pas en quoi le simple fait de qualifier la Commission fédérale de "juge administratif" ferait douter de l'indépendance et de l'impartialité de la Cour cantonale de cassation. Le recourant perd en outre de vue que la Commission fédérale ne devient une partie à la procédure qu'à compter du moment où l'intéressé a fait usage de la faculté que lui donne l'art. 72 al. 1 DPA d'être jugé par un tribunal; auparavant elle est un organe d'enquête et de décision, chargé notamment de juger des infractions au sens de l'art. 21 DPA. Dès lors que c'est en référence à cette dernière fonction que la Cour de cassation genevoise a utilisé le terme de "juge administratif", on ne saurait y voir une quelconque partialité. 
4. 
Il s'ensuit que le recours de droit public doit être rejeté, dans la mesure où il est recevable. Le recourant, qui succombe, doit supporter un émolument judiciaire (art. 153, 153a et 156 al. 1 OJ). 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
1. 
Le recours est rejeté, dans la mesure où il est recevable. 
2. 
Un émolument judiciaire de 2000 fr. est mis à la charge du recourant. 
3. 
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant, à la Commission fédérale des maisons de jeu, au Ministère public de la Confédération, au Procureur général et à la Cour de cassation du canton de Genève. 
Lausanne, le 7 décembre 2006 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
Le président: Le greffier: