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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
4C.289/2006 /ech 
 
Arrêt du 5 février 2007 
Ire Cour de droit civil 
 
Composition 
MM. et Mmes les Juges Corboz, président, Klett, Rottenberg Liatowitsch, Kolly et Kiss. 
Greffière: Mme Cornaz. 
 
Parties 
X.________ SA, 
défenderesse et recourante principale, représentée par Me Patrick T. Bittel, 
 
contre 
 
Y.________, 
demanderesse, intimée et recourante par voie de jonction, représentée par Me Jean-Luc Marsano. 
 
Objet 
contrat de travail; harcèlement sexuel, 
 
recours en réforme contre l'arrêt de la Cour d'appel 
de la juridiction des prud'hommes du canton de Genève du 19 juin 2006. 
 
Faits : 
A. 
A compter du 2 septembre 2002, X.________ SA (ci-après: X.________) a engagé Y.________ en qualité d'assistante à plein temps. Initialement fixé à 4'000 fr., le salaire mensuel brut, versé treize fois l'an, a été augmenté à 4'300 fr. dès janvier 2003. 
 
Y.________ avait été introduite auprès de X.________ par une connaissance à elle, employé de cette société, A.________. Compte tenu de la distance entre son nouveau lieu de travail et celui où elle habitait jusqu'alors, celle-là est venue s'installer chez celui-ci. Dans un premier temps, elle a travaillé sous les ordres de B.________ et était en collaboration directe avec A.________, avec lequel des tensions sont apparues et dont elle a quitté l'appartement à une date indéterminée. En substance, A.________ avait le sentiment que Y.________ refusait de recevoir ses instructions pour l'exécution de son travail et celle-ci reprochait à celui-là de la harceler en particulier en installant, ostensiblement, sur l'écran de son ordinateur des icônes ou des photos de femmes nues et en tenant en permanence des propos à connotation sexuelle en sa présence. 
 
Y.________ a ensuite travaillé sous les ordres de C.________ et les relations entre les deux femmes ne se sont pas bien développées. Les échanges de courriels relatifs aux instructions données par C.________ à Y.________ révèlent en effet une certaine tension de part et d'autre. Une altercation a même eu lieu en présence de plusieurs collègues, au cours de laquelle C.________ a pris l'employée par le bras, respectivement lui aurait posé la main sur le bras. N'acceptant pas qu'on la touche, Y.________ a alors donné une gifle à sa cheffe selon ce que deux employés, spectateurs de la scène, ont relaté. Elle-même conteste avoir fait un tel geste et soutient avoir seulement voulu repousser loin d'elle son antagoniste. 
 
Du 9 avril au 14 mai 2003, Y.________ a été absente pour cause de maladie et elle a repris son travail à 50 % dès le 15 mai 2003. Souffrant de troubles alimentaires, elle affirme avoir à cette époque perdu en peu de temps seize kilos. 
 
Le 17 juin 2003, un courriel rédigé par Y.________ qui, dans des circonstances non élucidées, avait été imprimé et laissé sur sa place de travail, a été photocopié et placardé en plusieurs endroits de l'entreprise. Y.________ indiquait sur ce document qu'elle travaillait "dans une boîte de fous" qui ne respecte que ses bénéfices et non pas ses employés, de sorte qu'elle s'était retrouvée souffrant d'anorexie et avait perdu du poids. Depuis cependant elle en avait repris et tout allait bien. 
 
Par lettre du 30 juin 2003, X.________ a licencié Y.________ pour le 31 juillet 2003, en raison de la restructuration du département au sein duquel elle travaillait, et l'a libérée immédiatement de son obligation de travailler. L'employée ayant été en incapacité de travail du 11 juillet au 12 septembre 2003, le délai de congé a été reporté au 30 septembre 2003. 
 
Le 20 octobre 2003, le Dr D.________ a attesté que Y.________ était soignée depuis le 8 septembre 2003 pour un trouble dépressif récurrent et qu'elle avait une personnalité émotionnellement labile. Le Dr E.________, mis en oeuvre par l'assurance perte de gain de l'employeur, a conclu à une reprise de travail à 50 % dès le 24 octobre 2003 et à 100 % dès le 21 novembre 2003. Y.________ a cependant consulté la Dresse F.________ et le psychologue G.________, qui ont tous deux conclu à une incapacité totale de travail perdurant le 23 juin 2004 et pour une durée indéterminée, en raison d'une dépression récidivante chronique, dont la rémission était compromise par le mobbing et le harcèlement dont elle avait fait l'objet durant son activité au service de X.________. 
B. 
Le 23 décembre 2003, Y.________ a assigné X.________ devant la juridiction des prud'hommes du canton de Genève en paiement d'indemnités de 25'800 fr. pour congé abusif et de 50'000 fr. pour harcèlement psychologique et sexuel. 
 
Par jugement du 19 août 2005, le Tribunal des prud'hommes du canton de Genève a en particulier condamné X.________ à payer à Y.________ la somme de 4'000 fr. net avec intérêt à 5 % l'an dès le 23 décembre 2003 et invité celle-là à opérer les déductions légales et usuelles. 
 
Saisie par les deux parties et statuant par arrêt du 19 juin 2006, la Cour d'appel de la juridiction des prud'hommes du canton de Genève a modifié le jugement du 19 août 2005 en ce sens que X.________ est condamnée à payer à Y.________ la somme de 12'000 fr. net avec intérêt à 5 % l'an dès le 23 décembre 2003 et l'a confirmé pour le surplus. En substance, elle a considéré qu'il ne pouvait pas être retenu que l'employée avait valablement exprimé, auprès de son employeur, d'autres problèmes que ceux liés à son état de santé, de sorte que le congé ne pouvait être tenu pour abusif. Par ailleurs, aucun élément ne permettait de considérer que l'employée aurait été victime d'actes de mobbing de la part de C.________. En revanche, les agissements de A.________ pouvaient être qualifiés de harcèlement sexuel et aucune mesure adéquate n'avait été prise par l'employeur, ce qui justifiait l'allocation d'une indemnité de 12'000 fr. 
C. 
Parallèlement à un recours de droit public qui a été rejeté par arrêt séparé de ce jour, X.________ (la défenderesse) interjette le présent recours en réforme au Tribunal fédéral. Elle conclut principalement à l'annulation de l'arrêt du 19 juin 2006 et au déboutement de son adverse partie de toutes ses conclusions, subsidiairement à l'annulation de l'arrêt entrepris et au renvoi de la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle décision dans le sens des considérants, le tout avec suite de dépens. 
 
Y.________ (la demanderesse) propose le rejet du recours dans la mesure où il est recevable et forme un recours joint dans lequel elle conclut à l'annulation de l'arrêt du 19 juin 2006 en tant qu'il ne retient aucune prétention à titre de tort moral et à la condamnation de son adverse partie à lui verser la somme de 38'000 fr. de ce chef, le tout sous suite de frais et dépens. 
 
X.________ conclut au rejet du recours joint, avec suite de dépens. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
1. 
La loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est entrée en vigueur le 1er janvier 2007 (RO 2006, 1242). L'acte attaqué ayant été rendu avant cette date, la procédure reste régie par l'OJ (art. 132 al. 1 LTF). 
2. 
2.1 Exercé par la défenderesse, qui a été partiellement déboutée de ses conclusions libératoires, et dirigé contre un jugement final rendu en dernière instance cantonale par un tribunal supérieur (art. 48 al. 1 OJ) sur une contestation civile dont la valeur litigieuse atteint le seuil de 8'000 fr. (art. 46 OJ), le recours en réforme soumis à l'examen du Tribunal fédéral est en principe recevable, puisqu'il a été déposé en temps utile compte tenu des féries (art. 34 al. 1 let. b et 54 al. 1 OJ) et dans les formes requises (art. 55 OJ). Il en va de même du recours joint (art. 59 al. 2 et 3 OJ), déposé dans le délai de réponse (art. 59 al. 1 OJ) par la demanderesse, qui a partiellement succombé dans ses conclusions condamnatoires. 
2.2 Le recours en réforme est ouvert pour violation du droit fédéral (art. 43 al. 1 OJ). En revanche, il ne permet pas de se plaindre de la violation directe d'un droit de rang constitutionnel (art. 43 al. 1 2e phrase OJ), ni de la violation du droit cantonal (art. 55 al. 1 let. c OJ; ATF 127 III 248 consid. 2c p. 252). Saisi d'un tel recours, le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des faits contenus dans la décision attaquée, à moins que des dispositions fédérales en matière de preuve n'aient été violées, qu'il faille rectifier des constatations reposant sur une inadvertance manifeste (art. 63 al. 2 OJ) ou compléter les constatations de l'autorité cantonale parce que celle-ci n'a pas tenu compte de faits pertinents, régulièrement allégués et clairement établis (art. 64 OJ). 
 
Dans la mesure où une partie recourante présente un état de fait qui s'écarte de celui contenu dans la décision attaquée, sans se prévaloir avec précision de l'une des exceptions qui viennent d'être rappelées, il n'est pas possible d'en tenir compte (ATF 130 III 102 consid. 2.2 p. 106, 136 consid. 1.4). Il ne peut être présenté de griefs contre les constatations de fait, ni de faits ou de moyens de preuve nouveaux (art. 55 al. 1 let. c OJ). Le recours en réforme n'est pas ouvert pour remettre en cause l'appréciation des preuves et les constatations de fait qui en découlent (ATF 130 III 136 consid. 1.4; 129 III 618 consid. 3). 
2.3 La jurisprudence n'admet l'existence d'une inadvertance manifeste, susceptible d'être rectifiée par le Tribunal fédéral en application de l'art. 63 al. 2 OJ, que lorsque l'autorité cantonale a omis de prendre en considération une pièce déterminée, versée au dossier, ou l'a mal lue, s'écartant par mégarde de sa teneur exacte, en particulier de son vrai sens littéral (ATF 115 II 399 consid. 2a p. 399; 109 II 159 consid. 2b p. 162). L'inadvertance invoquée doit porter sur une constatation propre à influer sur le sort du recours (cf. ATF 95 II 503 consid. 2a p. 507). 
 
En l'espèce, la défenderesse voit une inadvertence manifeste en ce que la cour cantonale aurait retenu, dans la partie "en fait" de sa décision, que B.________ savait que les relations entre A.________ et la demanderesse étaient difficiles en raison du fait que celle-ci n'acceptait pas les ordres que celui-là pouvait lui donner, tout en considérant, dans la partie "en droit" de son arrêt, que B.________ était au courant des prétendus actes de harcèlement sexuel commis par A.________ et qu'il n'en avait pas avisé la direction. Sous couvert de ce moyen, la défenderesse s'en prend en réalité à l'appréciation des preuves, qui n'a pas été taxée d'arbitraire dans l'arrêt rendu parallèlement sur recours de droit public. En conséquence, le grief fondé sur l'art. 63 al. 2 OJ est irrecevable. 
 
Pour sa part, la demanderesse relève, dans son recours joint, que la cour cantonale a retenu par mégarde que c'était "A.________ (qui) plaisantait (...) sur des sujets polissons", alors qu'il s'agirait en réalité de B.________, conformément aux déclarations du témoin H.________. Cette inadvertance serait importante pour l'issue du litige, dans la mesure où il serait établi par ce biais que B.________ était "du même acabit" que A.________, "soit porté sur le sexe", et que c'est vraisemblablement pour cette raison qu'il n'est pas intervenu plus énergiquement auprès de celui-ci pour qu'il cesse son harcèlement, ne jugeant pas cela répréhensible. Il appert effectivement que, dans ses déclarations, le témoin H.________ parlait de B.________. L'on ne voit toutefois pas que cette inadvertence ait une incidence sur la solution du litige, dans la mesure où il a quoi qu'il en soit été retenu que B.________ était intervenu, de manière informelle, auprès de A.________, tout en admettant lui-même avoir minimisé le problème et n'en avoir pas parlé à la direction. 
3. 
Invoquant l'art. 4 de la loi fédérale sur l'égalité entre femmes et hommes du 24 mars 1995 (LEg; RS 151.1), la défenderesse reproche à la cour cantonale d'avoir méconnu la notion de harcèlement sexuel. 
3.1 De manière générale, le devoir de protection de la personnalité du travailleur par l'employeur est prévu à l'art. 328 CO, qui a été complété lors de l'introduction de la LEg par la mention expresse de la protection contre le harcèlement sexuel (ATF 126 III 395 consid. 7b/aa). 
L'art. 4 LEg dispose que, par comportement discriminatoire, on entend tout comportement importun de caractère sexuel ou tout autre comportement fondé sur l'appartenance sexuelle, qui porte atteinte à la dignité de la personne sur son lieu de travail, en particulier le fait de proférer des menaces, de promettre des avantages, d'imposer des contraintes ou d'exercer des pressions de toute nature sur une personne en vue d'obtenir d'elle des faveurs de nature sexuelle. 
 
Les remarques sexistes et les commentaires grossiers ou embarrassants rentrent dans la définition de l'harcèlement sexuel, prévu à l'art. 4 LEg, dont l'énumération n'est pas exhaustive. Bien que les exemples cités dans cette disposition ne se réfèrent qu'à des cas d'abus d'autorité, la définition n'exclut pas d'autres actes portant atteinte à la dignité du travailleur et ne relevant pas d'un abus d'autorité, mais contribuant à rendre le climat de travail hostile, par exemple des plaisanteries déplacées (ATF 126 III 395 consid. 7b/bb et les références citées), ou l'affichage de photos indécentes (Aubert, Commentaire romand, n. 5 ad art. 328 CO; Bigler-Eggenberger/Kaufmann, Commentaire de la loi sur l'égalité, Lausanne 2000, n. 23 ad art. 4). 
3.2 En substance, la défenderesse soutient que la demanderesse n'aurait jamais eu à subir, sur son lieu de travail - la cour ayant selon elle fait une confusion entre les faits intervenus à l'occasion de la vie commune et au bureau -, aucune insulte ou remarque sexiste ni aucun acte portant atteinte à sa dignité de femme. De même, celle-ci n'aurait jamais fait l'objet de pressions de quiconque sur son lieu de travail en vue d'obtenir d'elle des faveurs d'ordre sexuel. Tout au plus pourrait-on reprocher à A.________ d'avoir adopté un "comportement familier" envers la demanderesse, en se livrant à des plaisanteries "assez lourdes", mais constituant des épisodes isolés. 
 
L'argumentation de la défenderesse repose sur un état de fait qui s'écarte de celui qui ressort de la décision entreprise, ce qui est inadmissible dans la procédure de réforme (cf. consid. 2.2). Les précédents juges ont en effet souverainement retenu que A.________ avait adopté envers sa collègue de travail - non pas en sa qualité de colocataire - un comportement inadapté. L'instruction avait en effet permis de démontrer sa prédilection pour l'affichage, sur son poste de travail, d'icônes et de photos de femmes nues, qu'il montrait à ses collègues et imposait ainsi, dans une certaine mesure, à la demanderesse. Celle-ci avait par ailleurs produit des courriels émanant de celui-là, reçus pendant les heures de travail, contenant des caricatures ou des plaisanteries assez lourdes, à caractère sexuel. En outre, les agissement de A.________ étaient répétés et avaient duré plusieurs mois. L'on ne voit pas que, sur la base de ces éléments, la cour cantonale ait violé l'art. 4 LEg en considérant que, par leur répétition et leur nature, les actes incriminés puissent être qualifiés de harcèlement sexuel, A.________ ayant à l'évidence créé un climat de travail hostile au sens de la jurisprudence susmentionnée (cf. consid. 3.1). 
4. 
La défenderesse reproche ensuite aux précédents juges d'avoir violé l'art. 5 al. 3 LEg en admettant le principe d'une indemnité. 
4.1 Selon l'art. 5 al. 3 LEg, lorsque la discrimination porte sur un cas de harcèlement sexuel, le tribunal peut condamner l'employeur à verser au travailleur une indemnité, à moins que celui-là ne prouve qu'il a pris les mesures que l'expérience commande, qui sont appropriées aux circonstances et que l'on peut équitablement exiger de lui pour prévenir ces actes ou y mettre fin. L'indemnité est fixée compte tenu de toutes les circonstances et calculée sur la base du salaire moyen suisse. Aux termes de l'art. 5 al. 4 in fine LEg, ladite indemnité n'excédera pas le montant correspondant à six mois de salaire. 
 
Il sied de relever que la LEg ne traite que de la responsabilité de l'employeur et non de celle de l'auteur du harcèlement sexuel, qui peut être tenu notamment de réparer le tort moral de la victime en vertu des art. 41 ss CO. La LEg a introduit à l'art. 5 al. 3 un droit supplémentaire, lequel permet au juge de condamner l'employeur à verser au travailleur une indemnité, indépendamment du préjudice subi. L'employeur peut se libérer en démontrant qu'il a pris les mesures que l'expérience commande, qui sont appropriées aux circonstances et que l'on peut équitablement exiger de lui pour prévenir le harcèlement sexuel ou y mettre fin. Si l'employeur prouve qu'il a rempli son devoir de diligence, il ne peut être condamné au versement de ladite indemnité (ATF 126 III 395 consid. 7b/cc p. 397 s. et les références citées). 
4.2 La défenderesse plaide en bref qu'il appartient à qui prétend à l'allocation d'une indemnité fondée sur l'art. 5 al. 3 LEg de porter à la connaissance de l'employeur les faits incriminés et de démontrer que celui-ci a eu connaissance du cas de harcèlement, ce qui ne serait pas le cas dans la présente cause. 
 
Le moyen tombe toutefois à faux, dès lors qu'il a été retenu, d'une manière échappant au grief d'arbitraire ainsi qu'il ressort de l'arrêt rendu sur recours de droit public, que l'on pouvait inférer de l'ensemble des circonstances que B.________ avait connaissance de la situation et que cela devait être imputé à la défenderesse. C'est ainsi à juste titre que les précédents juges sont entrés en matière sur l'allocation d'une indemnité au sens de l'art. 5 al. 3 LEg, puisqu'il apparaît en outre que la défenderesse n'a pris aucune mesure adéquate. 
5. 
Cela étant, la défenderesse reproche subsidiairement à la cour cantonale d'avoir abusé de son pouvoir d'appréciation en fixant l'indemnité litigieuse à 12'000 fr. 
5.1 Comme à chaque fois que l'autorité cantonale qui a statué dispose d'un pouvoir d'appréciation (art. 4 CC), le Tribunal fédéral ne substitue pas sa propre appréciation à celle de l'instance inférieure. Il n'intervient que si la décision s'écarte sans raison sérieuse des règles établies par la doctrine et la jurisprudence en matière de libre appréciation ou s'appuie sur des faits qui, en l'occurrence, ne devaient jouer aucun rôle ou encore ne tient, au contraire, pas compte d'éléments qui auraient absolument dû être pris en considération; le Tribunal fédéral sanctionne, en outre, les décisions rendues en vertu d'un pouvoir d'appréciation lorsqu'elles aboutissent à un résultat manifestement injuste ou à une iniquité choquante (ATF 132 III 109 consid. 2 p. 111 s.; 130 III 504 consid. 4.1 p. 508). 
5.2 La défenderesse se limite pour l'essentiel à critiquer le montant alloué par comparaison avec ceux octroyés dans d'autres causes - dont on observera qu'ils reposent, du moins pour certains d'entre eux, sur un fondement juridique autre que l'art. 5 al. 3 LEg
 
Pour arrêter la quotité de l'indemnité, les précédents juges ont pris en considération le fait que, nonobstant certains torts de l'employée, et son état de santé fragile, les événements qu'elle avait vécus sur son lieu de travail l'avaient fortement heurtée, qu'ils avaient ainsi vraisemblablement contribué à sa dépression et que ses collègues et son employeur avaient manifestement négligé de prendre la mesure de cette pathologie, respectivement de se donner les moyens de prévenir et de gérer les situations de harcèlement, et celle-ci en particulier. 
 
Ce faisant, les juges cantonaux se sont fondés sur des critères pertinents, au contraire du Tribunal des prud'hommes qui avait retenu certains éléments qui ne devaient jouer aucun rôle dans la fixation de l'indemnité au sens de l'art. 5 al. 3 LEg, à l'instar de la brièveté des relations de travail et du conflit ayant opposé la demanderesse à C.________. En particulier, la cour cantonale n'a pas méconnu que la demanderesse avait déjà souffert de problèmes psychologiques et était d'une extrême sensibilité - ce dont la défenderesse ne saurait répondre -, mais retenu que les événements litigieux avaient contribué à aggraver son état. On relèvera par ailleurs que le comportement de A.________ a revêtu un niveau de gravité non négligeable, puisqu'il a délibérément confronté la demanderesse à des images indécentes, parfois même en présence d'autres collaborateurs, et lui a en outre envoyé des courriels inconvenants, de sorte que les actes de harcèlement étaient concrètement dirigés contre celle-ci. La gravité tient en outre ou fait que les agissements incriminés se sont répétés sur plusieurs mois, en dépit - ou en raison - du fait que A.________ constatait que la demanderesse en souffrait, ce que les autres collaborateurs avaient également remarqué, nonobstant quoi la défenderesse n'a pris aucune mesure. 
 
Compte tenu de l'ensemble des circonstances, il apparaît donc que l'indemnité de 12'000 fr. fixée par la cour cantonale, correspondant à un peu plus de deux mois de salaire moyen suisse (réd.: qui s'élevait à 5'417 fr. en 2002 et à 5'493 fr. en 2003), se situe assurément à la limite supérieure, sans que l'on puisse toutefois reprocher aux juges cantonaux d'avoir outrepassé le pouvoir d'appréciation qui leur est conféré en la matière. En conséquence, le recours principal doit être rejeté. 
6. 
Dans son recours joint, la demanderesse soutient que les précédents juges auraient violé les art. 49 CO et 5 al. 5 LEg en refusant de lui allouer une indemnité pour tort moral en sus de celle fondée sur l'art. 5 al. 3 et 4 LEg, compte tenu de la gravité particulière de l'atteinte subie. 
6.1 Dans la mesure où la LEg constitue une loi spéciale par rapport aux dispositions du CO et où la réparation du même préjudice est prévue dans les deux lois, le travailleur n'aura droit qu'à une seule indemnité pour la même atteinte (ATF 126 III 395 consid. 7b/aa et les références citées; plus récemment Aubert, op. cit., n. 8 ad art. 328 CO). 
6.2 En l'espèce, l'indemnité allouée en application de l'art. 5 al. 3 LEg suffit à réparer l'atteinte à la personnalité de la demanderesse causée par le harcèlement sexuel et l'on ne voit pas ce qui justifierait l'allocation d'une indemnité pour tort moral additionnelle, les éléments mis en exergue par la demanderesse ayant d'ores et déjà été pris en considération dans la fixation du montant de l'indemnité susmentionnée. Il s'ensuit que le recours joint doit également être rejeté. 
7. 
Dans sa nouvelle teneur selon le ch. 1 de l'annexe à la LTF, en vigueur depuis le 1er janvier 2007, l'art. 12 al. 2 LEg ne prévoit plus l'application de l'art. 343 CO - consacrant la gratuité de la procédure - indépendamment de la valeur litigieuse devant toutes les instances, mais seulement devant les tribunaux cantonaux. A cet égard, le Conseil fédéral a précisé que, pour la procédure devant le Tribunal fédéral, la LTF applique aux litiges qui portent sur une discrimination à raison du sexe dans les rapports de travail la même règle que pour les prestations d'assurances sociales: la procédure n'est pas gratuite, mais le montant maximal des frais judiciaires est en principe limité à 1'000 fr. (cf. art. 65 al. 4 LTF; Message concernant la révision totale de l'organisation judiciaire fédérale du 28 février 2001, FF 2001 p. 4000 ss, spéc. p. 4152). Dès lors que la procédure est en l'espèce régie par l'OJ (cf. consid. 1), il convient toutefois de traiter la question des frais à la lumière de l'ancien régime (en ce sens, cf. Seiler/von Werdt/Güngerich, Bundesgerichtsgesetz (BGG), Berne 2007, n. 10 ad art. 132, s'agissant des frais en matière de prestations d'assurances sociales), ce qui implique que le présent arrêt soit rendu sans frais. 
 
Cela ne dispense pas d'allouer des dépens. Compte tenu de l'issue du litige, ceux-ci seront compensés (art. 159 al. 3 OJ). 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
1. 
Le recours principal et le recours joint sont rejetés. 
2. 
Il n'est pas perçu de frais. 
3. 
Les dépens sont compensés. 
4. 
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et à la Cour d'appel de la juridiction des prud'hommes du canton de Genève. 
Lausanne, le 5 février 2007 
Au nom de la Ire Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
Le président: La greffière: