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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
                 
 
 
4A_176/2018  
 
 
Arrêt du 6 août 2018  
 
Ire Cour de droit civil  
 
Composition 
Mmes les Juges fédérales 
Kiss, présidente, Niquille et May Canellas. 
Greffière: Mme Monti. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représentée par Me Pascal Pétroz, 
recourante, 
 
contre  
 
Z.________,  
représentée par Me Christian Grosjean, 
intimée. 
 
Objet 
contrat d'assurance, 
 
recours en matière civile contre l'arrêt rendu 
le 6 février 2018 par la Chambre civile 
de la Cour de justice du canton de Genève 
(C/24175/2015; ACJC/169/2018). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. En décembre 2013, A.________ a acquis une paire de boucles d'oreilles en diamant au prix de USD 880'000.-.  
Elle a souscrit auprès de la compagnie d'assurance Z.________, représentée par sa succursale suisse..., une assurance couvrant un certain nombre d'oeuvres d'art et de bijoux pour la période du 28 février 2014 au 27 février 2015. La couverture territoriale de l'assurance était mondiale. 
Les boucles d'oreilles précitées figuraient dans la liste des bijoux assurés, avec la mention de leur prix d'achat (USD 880'000.-) converti en euros (EUR 638'820.-). 
Le contrat était complété par des conditions générales d'assurance (CGA). 
Selon l'art. 03.1 CGA, l'assurance couvre les cas de perte physique ou de dommage physique survenant aux lieux déterminés dans le contrat ou n'importe où dans le monde pendant la période d'assurance, sous réserve des exclusions, termes et conditions contenus dans lesdites conditions générales. 
(«We will insure your Fine Art and Jewellery up to the amount insured against physical loss or physical damage which occurs at the named location as stated in the schedule or anywhere else in the world during the period of insurance, subject to the exclusions, terms and conditions contained herein».)  
L'art. 04 CGA porte l'intitulé «What is not covered » (ce qui n'est pas couvert). Sont notamment exclus de la couverture d'assurance les bijoux et les montres, à moins que i) ces objets soient portés, ou (ii) transportés à la main sous la surveillance personnelle de l'assuré, ou encore (iii) déposés dans une banque ou dans un coffre fermé, étant précisé que si l'assuré séjourne dans un hôtel ou un motel, les objets doivent être déposés dans le coffre principal de l'établissement. 
(«We do not cover: 
[...] 
Loss of or damage to jewellery or watches unless such items are: 
(i)   being worn or 
(ii) being carried by hand under the personal supervision of the insured or 
(iii) deposited in a bank or locked safe, unless the insured is staying at an hotel or motel when such items are kept in the principal safe of the hotel or motel».) 
Enfin, l'art. 06 CGA impose à l'assuré de prendre des «mesures raisonnables» pour protéger les biens assurés contre la perte ou le dommage et pour qu'ils soient bien entretenus et maintenus en bon état, sous peine d'être déchu de son droit d'indemnisation. 
«You must take reasonable steps to protect the insured property against loss or damage and to keep it in good condition and repair. If you do not, we will not have to pay any related claim».)  
Les parties ont déclaré le droit suisse applicable et les tribunaux suisses compétents. 
 
A.b. A.________ (ci-après: l'assurée) a séjourné à New York avec une amie du 8 au 11 décembre 2014. Elles ont partagé une suite dans un hôtel de luxe.  
Lors de son séjour, l'assurée a entreposé ses bijoux - dont les boucles d'oreilles précitées - dans un étui qu'elle a déposé dans le coffre de sa chambre d'hôtel. Elle a porté les boucles d'oreilles durant une soirée, puis les a replacées dans le coffre dès son retour à l'hôtel. 
Le jour du départ, l'assurée a vidé le coffre et placé l'étui à bijoux - dont elle n'a pas vérifié le contenu - dans une pochette qu'elle a attachée au fond de son sac à main un peu ouvert, de type cabas. 
Les deux amies se sont rendues à l'aéroport en taxi, où elles ont embarqué sur un vol de nuit à destination de Genève. Durant le vol, le sac à main de l'assurée se trouvait soit dans le compartiment à bagages au-dessus des sièges, soit entre l'assurée et son amie, qui occupait le siège voisin. L'assurée a déclaré avoir dormi pendant la majeure partie du vol, avec un masque de nuit et des boules «Quies» [boules de cire protégeant contre les nuisances sonores, réd.]; pendant ce temps-là, son sac était placé dans le compartiment à bagages. 
A son arrivée à Genève le lendemain matin, l'assurée est rentrée directement chez elle à... (VD). Elle s'est aperçue que ses boucles d'oreilles ne se trouvaient plus dans l'étui à bijoux, tandis que les autres pièces, de moindre valeur, y étaient encore. Elle a fouillé son domicile, pris contact avec l'hôtel new-yorkais et la compagnie aérienne et engagé un détective privé pour retrouver les boucles d'oreilles, en vain. 
 
A.c. Le 15 décembre 2014, l'assurée a porté plainte pour le vol de ses boucles d'oreilles au cours du trajet en avion New York-Genève. Ultérieurement, elle a incriminé son amie, qui aurait profité de son sommeil pour lui dérober son bien. Selon un rapport de police du 4 août 2016, elle a également évoqué la possibilité que le vol soit survenu dans sa chambre d'hôtel à New York ou à son domicile vaudois au retour de son voyage, avant d'en revenir au fait qu'il s'était produit dans l'avion.  
Le Ministère public a renoncé à entrer en matière, faute d'avoir pu identifier l'auteur des faits. 
 
A.d. L'assurée a par ailleurs déclaré le sinistre à la compagnie d'assurance le 16 décembre 2014. Considérant que les circonstances étaient troubles, celle-ci a proposé une indemnisation à hauteur de 50%, que l'assurée a refusée. Les parties ont signé une convention soumettant le litige à la compétence des tribunaux genevois.  
 
B.  
 
B.a. Par requête de conciliation du 17 novembre 2015, l'assurée a assigné la compagnie d'assurance devant le Tribunal de première instance du canton de Genève. Le 10 mai 2016, elle a déposé une demande concluant au paiement de CHF 781'468.-, subsidiairement EUR 638'820.-.  
Le Tribunal a rejeté la demande par jugement du 31 juillet 2017. 
 
B.b. Statuant le 6 février 2018 sur appel de l'assurée, la Chambre civile de la Cour de justice genevoise a confirmé cette décision.  
 
C.   
L'assurée saisit le Tribunal fédéral d'un recours en matière civile en concluant derechef au paiement de CHF 781'468.-, subsidiairement EUR 638'820.-. 
La compagnie d'assurance et l'autorité précédente n'ont pas été invitées à se déterminer. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
Les conditions de recevabilité du recours en matière civile sont réalisées sur le principe, en particulier celles afférentes à la valeur litigieuse minimale de 30'000 fr. et au délai de recours (art. 74 al. 1 let. b LTF; art. 100 al. 1 en lien avec l'art. 45 al. 1 LTF). 
 
2.   
A défaut de griefs soulevés par la recourante, l'autorité de céans est liée par les faits constatés dans l'arrêt attaqué (art. 105 al. 1 LTF) ou dans le jugement de première instance, dans la mesure où l'arrêt attaqué les reprend implicitement (arrêt 4A_565/2009 du 21 janvier 2010 consid. 2.2.4; sous l'OJ, ATF 129 IV 246 consid. 1; 118 IV 122 consid. 1). 
Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Eu égard, toutefois, à l'exigence de motivation qu'impose l'art. 42 al. 2 LTF sous peine d'irrecevabilité (art. 108 al. 1 let. b LTF), il n'examine d'ordinaire que les griefs invoqués, sauf en cas d'erreurs juridiques manifestes; il n'est pas tenu de traiter, comme le ferait une autorité de première instance, toutes les questions juridiques qui se posent, lorsque celles-ci ne sont plus discutées devant lui (ATF 140 III 115 consid. 2; 137 III 580 consid. 1.3). 
 
3.  
 
3.1. La recourante dénonce une violation des règles sur le fardeau de la preuve (art. 8 CC). Les juges genevois auraient méconnu que la perte de bijoux était en principe couverte par l'assurance, sous réserve d'exceptions dont l'assureur devait démontrer l'existence. Elle ne saurait subir un préjudice du fait que les circonstances exactes du vol de ses boucles d'oreilles n'ont pas été élucidées.  
 
3.2. Procédant à l'interprétation objective des conditions générales d'assurance, la Cour de justice a considéré que l'art. 04 excluait expressément la perte de bijoux du champ d'application de l'assurance, à moins qu'une des hypothèses alternatives citées ne soit réalisée (art. 04 let. i, ii ou iii) et que l'assurée ait pris les mesures raisonnables pour protéger son bien (art. 06). Le contrat incorporait clairement et expressément des clauses d'exclusion et de déchéance des droits. L'assurée, qui réclamait le versement de prestations nonobstant lesdites clauses, devait dès lors prouver sous l'angle de la vraisemblance prépondérante que, d'une part, la disparition de ses boucles d'oreilles était survenue dans des circonstances couvertes par l'assurance et que, d'autre part, elle avait pris des mesures raisonnables pour leur sauvegarde, ou que la violation de ses incombances n'avait pas eu d'influence sur la survenance de la disparition des bijoux ou sur l'étendue de la prestation de l'assureur. Au demeurant, le grief tiré d'une violation de l'art. 8 CC était dépourvu d'objet, dans la mesure où le premier juge avait établi que le sinistre n'était pas couvert, faute pour l'assurée d'avoir rempli les incombances lui permettant d'être indemnisée.  
 
3.3. Différentes techniques peuvent conduire à restreindre le risque assuré. Les parties peuvent énoncer une liste de situations entraînant une prise en charge par l'assureur, ou définir le risque assuré en introduisant des clauses d'exclusion. La méthode choisie a une incidence sur le fardeau de la preuve (STEPHAN FUHRER, in Basler Kommentar, 2001, n° 12 ad art. 33 LCA). En l'occurrence, la recourante ne discute pas l'interprétation opérée par la cour cantonale; l'assurance contractée énonce effectivement à l'art. 04 CGA une liste limitative de situations dans lesquelles la perte de bijoux ou de montres est prise en charge par l'assureur. Du moment qu'un bijou était en cause, il incombait bel et bien à l'assurée de démontrer la réalisation d'un cas de couverture. Au demeurant, les juges genevois ont relevé que l'art. 8 CC n'était pas en cause. Ils ont rejeté la demande de l'assurée non pas en raison de lacunes quant aux circonstances exactes du vol, mais parce que les conditions d'une prise en charge par l'assurance, au sens des art. 04 et 06 CGA, n'étaient pas réalisées.  
 
4.  
 
4.1. La recourante plaide, apparemment pour la première fois devant l'autorité de céans, que l'art. 04 CGA serait insolite.  
La recevabilité du grief à l'aune du principe de l'épuisement des instances cantonales peut rester indécise; il se révèle de toute façon infondé, pour les motifs qui vont être exposés. 
 
4.2. Selon la règle dite de l'insolite, sont soustraites de l'adhésion censée donnée globalement à des conditions générales toutes les clauses inhabituelles, sur l'existence desquelles l'attention de la partie la plus faible ou la moins expérimentée en affaires n'a pas été spécialement attirée. Pour déterminer si une clause est insolite, il faut se placer du point de vue de celui qui y consent, au moment de la conclusion du contrat. Il faut en outre que, par son objet, la clause considérée soit étrangère à l'affaire, c'est-à-dire qu'elle en modifie de manière essentielle la nature ou sorte notablement du cadre légal d'un type de contrat. La règle de l'insolite s'applique en particulier lorsque la clause a pour effet de réduire drastiquement la couverture d'assurance au point que les risques les plus fréquents ne sont plus couverts, ou lorsque le sens et la portée d'une disposition sont travestis par une formulation compliquée, ou encore lorsque, par son emplacement dans les conditions générales, elle apparaît surprenante et inattendue à l'assuré (ATF 138 III 411 consid. 3.1; 135 III 1 consid. 2.1; arrêt 4A_152/2017 du 2 novembre 2017 consid. 4.3).  
 
4.3. En l'occurrence, la couverture d'assurance est essentiellement définie par les conditions générales. L'art. 03.1 CGA énonce le principe de couverture pour la perte physique ou le dommage physique des biens assurés, sous réserve des exclusions, termes et conditions énoncés «dans les présentes» (  herein). L'art. 04 énonce ce qui n'est pas couvert, selon un intitulé clair affiché en lettres grasses (  What is not covered). L'assurée ne prétend pas que la formulation de la clause serait difficilement compréhensible. Par ailleurs, son contenu n'a rien d'insolite. En exigeant que les bijoux soient portés par la personne assurée, ou transportés «à la main» sous sa surveillance personnelle, ou déposés dans une banque ou dans un coffre fermé, respectivement dans le coffre principal d'un hôtel, l'assureur n'a pas imposé des conditions inattendues s'agissant d'une assurance portant sur des objets de grande valeur (pour un exemple de clause semblable, cf. arrêt 5C.127/1988 du 29 septembre 1988 [partiellement publié in SJ 1989 p. 102] let. A.a). Comme l'a souligné l'autorité précédente sans susciter de critiques, une telle clause vise à atténuer le risque de vol ou de perte desdits objets. Elle ne saurait être qualifiée d'insolite.  
 
5.   
La recourante prétend que les conditions requises pour une prise en charge par l'assureur seraient réalisées. 
La Cour de justice a examiné trois cas de figure de perte du bijou. 
 
5.1. Selon une première hypothèse, la disparition des boucles d'oreilles était survenue à l'hôtel new-yorkais. L'art. 04 (iii) CGA exigeait que les bijoux soient déposés dans le coffre principal de l'hôtel. La recourante n'avait pas satisfait à cette condition exprimée de façon claire et non équivoque; elle avait laissé ses bijoux dans le coffre de sa chambre. Il n'était pas allégué ni démontré que l'hôtel fût dépourvu d'un coffre principal, ce qui était au demeurant douteux. Aussi la Cour de justice a-t-elle conclu que la compagnie d'assurance n'avait pas à prendre en charge la disparition des boucles d'oreilles dans ce contexte.  
La recourante objecte qu'elle a pris toutes les mesures raisonnables en déposant ses bijoux dans le coffre de sa chambre, dont elle affirme qu'il n'a pas été forcé. Selon toute vraisemblance, le dépôt dans le coffre principal de l'hôtel n'aurait pas eu d'influence sur la disparition. Au demeurant, il n'a pas été prouvé que l'hôtel était équipé d'un coffre principal. 
La recourante insinue à tort qu'il incombait à l'assureur de prouver l'existence d'un coffre principal, dès lors que le dépôt de bijoux dans un tel coffre constitue un cas de sinistre assuré (cf. consid. 3.3  supra). Comme l'a relevé l'autorité précédente, un établissement de luxe dans cette mégalopole nord-américaine est censé détenir un coffre principal, et la recourante n'explique pas ce qui l'aurait amenée à séjourner dans un hôtel non équipé de la sorte. Pour le surplus, l'arrêt attaqué ne contient aucune constatation quant à l'état du coffre en chambre (prétendument non forcé) et quant à la sécurité offerte par le coffre central, de sorte que l'affirmation selon laquelle le sinistre se serait aussi produit en cas de dépôt dans le coffre central n'est qu'une pure conjecture. Faute pour la recourante d'avoir démontré que son comportement n'avait eu aucune incidence sur le sinistre, il n'est pas nécessaire d'examiner si l'assureur devrait couvrir un tel cas (cf. les réf. citées  infra consid. 6.3). Au demeurant, en affirmant que le coffre n'a pas été forcé, la recourante elle-même semble exclure l'hypothèse d'un vol à l'hôtel.  
 
5.2. Selon un deuxième cas de figure privilégié par la recourante, les bijoux auraient disparu à bord de l'avion New York-Genève. La Cour de justice a constaté que la recourante avait placé ses bijoux dans une pochette attachée au fond de son sac de style cabas, un peu ouvert, de sorte qu'elle était facilement accessible. La recourante n'avait exercé aucune surveillance sur le sac, le plaçant une grande partie du temps dans le compartiment à bagages au-dessus des sièges, sur lequel elle n'avait pas de visibilité. De surcroît, elle avait dormi durant le vol avec un masque et des boules «Quies», se plaçant ainsi dans une position la privant de toute attention et de tout contrôle sur ses bijoux. Il aurait été aisé de conserver à ses côtés la pochette contenant ses bijoux, ou à un endroit sûr, à tout le moins lorsqu'elle dormait. A aucun moment, elle n'avait vérifié la présence des boucles d'oreilles dans la pochette, ce qui tendait à démontrer son manque de vigilance. La Cour concluait que la recourante n'avait pas rempli ses incombances de surveillance et de sauvegarde durant le vol New York-Genève.  
Cette analyse ne prête pas le flanc à la critique. La recourante tente vainement de la contrer en se fondant sur une version qui diverge partiellement des faits constatés dans l'arrêt attaqué, dont il ressort notamment qu'elle avait déclaré avoir dormi durant la majeure partie du vol. L'argument selon lequel l'avion est un espace clos dont on ne peut s'échapper et auquel on accède après de nombreux contrôles d'identité et de sécurité est inopérant, tant il est évident que lesdits contrôles ne sont pas garants de la probité des occupants de l'avion, et qu'il n'est pas difficile de s'emparer subrepticement d'un objet tel que des boucles d'oreilles durant un trajet aérien nocturne. 
 
5.3. La Cour de justice a encore examiné un dernier cas de figure, soit la disparition du bijou au domicile vaudois de l'assurée, juste après son retour. La Cour a jugé cette hypothèse peu probable. En tout état de cause, la recourante n'avait pas démontré avoir pris les mesures de protection adéquates, son employé de maison ayant déclaré qu'elle avait l'habitude de laisser ses bijoux à l'extérieur du coffre-fort, en particulier sur la table de chevet de sa chambre à coucher.  
La recourante ne remet pas valablement en cause les faits sur lesquels se fonde cette analyse, qui n'est pas critiquable. 
 
6.  
 
6.1. Dans une argumentation qui paraît elle aussi inédite, la recourante reproche enfin à la Cour de justice d'avoir méconnu l'art. 14 al. 4 LCA, dont il découlerait que la compagnie d'assurance ne pouvait pas refuser toute prestation alors qu'elle n'avait commis qu'une faute légère.  
 
6.2. Lorsque le preneur d'assurance ou l'ayant droit a causé le sinistre par une faute grave (négligence grave,  grobfahrlässig), l'assureur est autorisé à réduire sa prestation dans la mesure répondant au degré de la faute (art. 14 al. 2 LCA). Par ailleurs, si le sinistre est dû à une faute légère (négligence légère,  leichtfahrlässig) du preneur d'assurance ou de l'ayant droit, la responsabilité de l'assureur demeure entière (art. 14 al. 4 LCA).  
Le régime de l'art. 14 al. 4 LCA ne peut pas être modifié au détriment du preneur d'assurance ou de l'ayant droit (art. 98 al. 1 LCA). En revanche, les parties sont libres d'exclure toute prestation en cas de faute (négligence) grave (art. 98 al. 1 LCA  a contrario; HÖNGER/SÜSSKIND, in Basler Kommentar, op. cit., n° 54 ad art. 14 LCA; ALFRED MAURER, Schweizerisches Privatversicherungsrecht, 3e éd. 1995, p. 360 s.).  
 
6.3. En l'occurrence, l'art. 06 CGA impose à l'assuré de prendre des mesures raisonnables pour protéger les biens assurés contre la perte ou le dommage, sous peine d'une déchéance de son droit d'indemnisation.  
Point n'est besoin de disserter sur le rapport entre la liberté contractuelle dans la définition du risque assuré et des restrictions de couverture d'une part et le droit impératif d'autre part, qui impose notamment à l'assureur d'assumer une responsabilité entière lorsque le sinistre est dû à une négligence légère de l'assuré (cf. art. 14 al. 4 LCA et art. 29 al. 2 LCA en lien avec l'art. 98 LCA; VALENTIN MONN, Von ausgeschlossenen Verhaltensweisen im Privatversicherungsrecht, REAS 2008 p. 93 ss; MARCEL SÜSSKIND, in Basler Kommentar, Nachführungsband, 2012, n° 56 ad art. 14 LCA; HÖNGER/SÜSSKIND, op. cit., n° 56 ad art. 14 LCA; FUHRER, op. cit., n° 7 ad art. 29 LCA; MAURER, op. cit., p. 351 n. 890a, p. 355 n. 904 et p. 361; ROLAND SCHAER, Rechtsfolgen der Verletzung versicherungsrechtlicher Obliegenheiten, 1972, p. 50 ss; MAX KELLER, Kommentar zum Schweizerischen Bundesgesetz über den Versicherungsvertrag, vol. I, 1968, p. 235 s., 275 et 434; WILLY KOENIG, Schweizerisches Privatversicherungsrecht, 3e éd. 1967, p. 303 s.). 
Il suffit de constater que, d'une part, la formulation des clauses qui imposent un certain devoir de diligence (soit en particulier l'art. 06 CGA et l'art. 04 (ii) CGA en tant qu'il préconise une surveillance personnelle) est suffisamment large pour se concilier avec l'art. 14 al. 4 LCA et que, d'autre part, la faute de l'assurée dans le cas concret ne saurait être qualifiée de légère. Il s'ensuit que le refus de toute prestation ne contrevient pas à la disposition précitée. Pour le surplus, la recourante invoque vainement d'autres affaires jugées par la cour de céans, dès lors que les circonstances et le régime des conditions d'assurance varient d'un cas à l'autre. 
 
7.   
En définitive, le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable. Par conséquent, la recourante supportera les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). Aucune indemnité de dépens n'est due à l'intimée dès lors qu'elle n'a pas eu à déposer de réponse. 
 
 
 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.   
Les frais judiciaires, arrêtés à 10'000 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.   
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties et à la Cour de justice du canton de Genève. 
 
 
Lausanne, le 6 août 2018 
 
Au nom de la Ire Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La présidente: Kiss 
 
La greffière: Monti