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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
4C.316/2003 /ech 
 
Arrêt du 3 mars 2003 
Ire Cour civile 
 
Composition 
MM. les Juges Corboz, président, Nyffeler et Favre. 
Greffière: Mme Aubry Girardin. 
 
Parties 
la Banque X.________, et 
Masse en faillite Y.________ S.A., 
demanderesses et recourantes, toutes les deux représentées par Me Bernard Katz, 
 
contre 
 
1. A.________, 
défendeur et intimé, représenté par Me Jacques-Henri Wanner, 
2. B.________, 
défendeur et intimé, représenté par Me Olivier Rodondi. 
 
Objet 
responsabilité des administrateurs d'une société anonyme 
 
(recours en réforme contre le jugement de la Cour civile du Tribunal cantonal vaudois du 21 novembre 2002). 
 
Faits: 
A. 
Le 29 novembre 1988, C.________, qui exploitait le "D.________ Magazine" sous la raison individuelle E.________, a engagé A.________ pour qu'il dirige le département se référant à ce magazine. 
 
Dans le courant 1989, des démarches ont été effectuées en vue de la création de la société Z.________ S.A. Le 14 novembre 1989, A.________ a signé avec C.________ une demande de crédit auprès de la Banque X.________ (ci-après: la Banque) pour le compte de Z.________ en formation. Le même jour, A.________ a également signé pour la société un document intitulé "cession des créances" établi par la Banque. 
 
Le 30 novembre 1989, l'assemblée générale constitutive de la société Z.________ S.A. s'est tenue. Les cent actions de celle-ci ont été souscrites à raison de 74 actions pour W.________ S.A., 25 actions pour A.________ et 1 action pour C.________. B.________ et A.________ ont été élus administrateurs avec signature individuelle. B.________ a en outre été nommé secrétaire du conseil et A.________ directeur général. La Fiduciaire U.________ S.A. (ci-après: la Fiduciaire) a été désignée comme organe de contrôle. 
 
Z.________ S.A., dont le but était d'effectuer des opérations liées à l'édition et à la publication, a été inscrite au registre du commerce de Lausanne le 4 décembre 1989. 
 
Après la création de Z.________ S.A., A.________ a continué à effectuer les mêmes tâches que celles pour lesquelles il avait été engagé en novembre 1988, se consacrant à l'acquisition et à la vente d'espaces publicitaires pour le "D.________ Magazine", sans s'occuper de la gestion de la société. Il avait en outre la signature individuelle sur le compte de Z.________ S.A. auprès de la Banque. 
 
B.________ était uniquement chargé des aspects techniques (mise en page et graphisme) du D.________ Magazine. Il ne s'est pas occupé de la gestion de Z.________ S.A. 
 
C.________, actionnaire majoritaire de la société W.________ S.A., était le moteur de Z.________ S.A. Il en assurait la gestion et traitait en particulier des questions financières. 
Le 19 décembre 1989, B.________ a informé Z.________ S.A. qu'il démissionnait de sa fonction de secrétaire du conseil d'administration et qu'il refusait d'accepter des mandats pour les parutions des prochains "D.________ Magazine". Dans le numéro suivant du magazine édité le 15 mars 1990, le nom de B.________ n'a plus été mentionné. Celui-ci est resté au service de W.________ S.A. jusqu'au 5 avril 1990. 
 
Le 19 avril 1990, A.________ a écrit à Y.________ S.A. (devenue par la suite Masse en faillite Y.________ S.A.; ci-après: Y.________) pour lui confirmer que l'impression de trois numéros du D.________ Magazine lui était confiée. 
 
Le 16 mai 1990, la Fiduciaire a informé Z.________ S.A. que son capital social n'avait été libéré qu'à concurrence de 20'000 fr. sur 50'000 fr., les 30'000 fr. restant correspondant à un prêt accordé par la Banque. Le 17 mai 1990, elle a établi les comptes consolidés de W.________ Groupe au 31 décembre 1989. Il en ressort notamment que le peu d'activité de Z.________ S.A. n'a pas été pris en considération pour l'exercice 1989. Au passif de W.________ S.A. figure, sous la mention Z.________ S.A., un montant de 30'000 fr. et, dans le bilan consolidé au 31 décembre 1989 de W.________ Groupe, la somme de 30'000 fr. a été portée en faveur de Z.________ S.A. Le bilan indique aussi une dette de Z.________ S.A. de 206'656,65 fr. envers W.________ S.A., qui correspond au "goodwill" cédé par cette dernière et dont il a été retenu que la valeur était surfaite. 
 
Le 27 août 1990, la Fiduciaire a attiré l'attention de C.________ en particulier sur les obligations légales concernant les documents comptables à mettre à la disposition des actionnaires et les renseignements à leur dispenser. 
 
Lors de l'assemblée générale du 4 septembre 1990, A.________ a démissionné de son poste d'administrateur. Le procès-verbal de cette séance ne comporte aucune signature. 
 
Le 21 décembre 1990, la mention de A.________ au registre du commerce en tant qu'administrateur a été radiée, de même que celle de B.________, le 11 du même mois. Depuis cette date, C.________ apparaît comme le seul administrateur de Z.________ S.A. 
 
B. 
A partir du 23 janvier 1991, plusieurs poursuites ont été intentées à l'encontre de Z.________ S.A. et, le 11 avril 1991, la faillite de cette société a été prononcée. 
 
Le 22 août 1991, le Président du Tribunal du district de Lausanne a suspendu la faillite de Z.________ S.A. faute d'actif. Y.________ a versé l'avance de frais requise permettant d'éviter la clôture de la faillite. 
 
Le Président a précisé que l'administration de la masse n'avait pas pu prendre possession des pièces comptables de la société et il a dénoncé pénalement C.________. 
 
La Banque et Y.________ ont produit des créances dans la faillite. La première pour 165'755,30 fr., la seconde pour 171'991,60 fr. Aucun dividende ne leur a été versé, le montant total du découvert de Z.________ S.A. s'élevant à 576'508,15 fr. 
 
Dans son rapport final, l'Office des faillites a indiqué qu'il lui était difficile de se faire une idée précise des circonstances ayant amené la société dans cette situation, faute d'obtenir les documents comptables des organes responsables. 
 
Le 29 avril 1993, C.________ a été condamné, par le Tribunal correctionnel du district de Lausanne, notamment pour escroquerie et violation de l'obligation de tenir une comptabilité. 
C. 
Après avoir obtenu la cession des droits de la masse, la Banque et Y.________ ont introduit, le 23 décembre 1992 au moyen d'une requête de conciliation, une action en responsabilité contre A.________, B.________ et la Fiduciaire. Les sociétés demanderesses ont conclu à ce que les deux anciens administrateurs et l'organe de révision soient reconnus leurs débiteurs, conjointement et solidairement ou chacun pour la part que justice dira, de la somme de 576'508,65 fr. avec intérêt à 5 % l'an dès le 11 avril 1991. A.________, B.________ et la Fiduciaire ont conclu principalement au rejet de la demande en ce qu'elle les concernait personnellement et, subsidiairement à ce que les autres codéfendeurs les relèvent d'une éventuelle condamnation, tout en appelant en cause C.________. 
Par jugement du 21 novembre 2002, dont la motivation a été communiquée aux parties le 29 septembre 2003, la Cour civile du Tribunal cantonal vaudois a rejeté les conclusions formulées par la Banque et Y.________. 
D. 
Contre ce jugement, la Banque et Y.________ (les demanderesses) interjettent un recours en réforme au Tribunal fédéral. Elles concluent à la réforme du jugement entrepris en ce sens que A.________ et B.________ sont reconnus débiteurs conjoints et solidaires ou chacun pour la part que justice dira des demanderesses, conjointement et solidairement entre elles, ou chacune pour la part que justice dira, de la somme de 337'746,90 fr. plus intérêt à 5 % l'an dès le 11 avril 1991. 
 
A.________ (le défendeur 1) propose le rejet du recours, avec suite de frais et dépens, à l'instar de B.________ (le défendeur 2). 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
1. 
1.1 Interjeté par les demanderesses qui ont intégralement succombé dans leurs conclusions, le présent recours est dirigé contre un jugement final rendu en dernière instance cantonale par un tribunal supérieur (art. 48 al. 1 OJ; art. 451a CPC vaud.), sur une contestation civile dont la valeur litigieuse dépasse largement le seuil de 8'000 fr. (art. 46 OJ). 
 
Il a en outre été déposé en temps utile (art. 54 al. 1 OJ) et dans les formes requises (art. 55 OJ), de sorte qu'il convient d'entrer en matière. 
1.2 Quant aux observations présentées par les deux défendeurs, elles ont également été formées en temps utile compte tenu des féries (art. 34 al. 1 let. c et 59 al. 1 OJ) 
2. 
Les demanderesses ne remettent pas en cause le jugement entrepris dans la mesure où il considère que l'organe de révision ne peut être tenu pour responsable. Non contesté, ce point sera donc considéré comme acquis (art. 55 al. 1 let. b OJ). 
3. 
Saisi d'un recours en réforme, le Tribunal fédéral doit mener son raisonnement juridique sur la base des faits contenus dans la décision attaquée, à moins que des dispositions fédérales en matière de preuve n'aient été violées, qu'il y ait lieu de rectifier des constatations reposant sur une inadvertance manifeste (art. 63 al. 2 OJ) ou qu'il faille compléter les constatations de l'autorité cantonale parce que celle-ci n'a pas tenu compte de faits pertinents, régulièrement allégués et clairement établis (art. 64 OJ; ATF 127 III 248 consid. 2c et l'arrêt cité). Dans la mesure où une partie recourante présente un état de fait qui s'écarte de celui contenu dans la décision attaquée, sans se prévaloir avec précision de l'une des exceptions qui viennent d'être rappelées, il n'est pas possible d'en tenir compte (ATF 127 III 248 consid. 2c). Il ne peut être présenté de griefs contre les constatations de fait, ni de faits ou de moyens de preuve nouveaux (art. 55 al. 1 let. c OJ). 
 
Les demanderesses méconnaissent ces principes, dès lors qu'à l'appui des violations du droit fédéral invoquées, elles présentent des faits qui n'ont pas été constatés par la cour cantonale. Elles se fondent en particulier sur des avis émanant de l'expert judiciaire auxquels les juges cantonaux ne se sont pas ralliés. Or, seuls les éléments de l'expertise retenus par la cour cantonale font partie des faits pertinents. 
 
Au demeurant, si elles entendaient remettre en cause la façon dont les juges cantonaux ont apprécié l'expertise, les demanderesses auraient dû agir par la voie du recours de droit public, car il s'agit d'une question qui relève du fait et qui échappe à l'examen de la juridiction fédérale de réforme (ATF 98 II 265 consid. II/2, confirmé notamment dans l'arrêt du Tribunal fédéral 5C.67/2002 du 15 avril 2002, in SJ 2002 I 514, consid. 3a). 
 
La Cour de céans n'examinera donc les griefs soulevés qu'à la lumière des faits constatés par les juges cantonaux. 
4. 
Appliquant l'ancien droit de la société anonyme, la cour cantonale a tout d'abord exclut la responsabilité du défendeur 1 en tant que fondateur, car, bien que le capital social n'ait pas été entièrement libéré et que la valeur du goodwill figurant au bilan d'entrée soit surfaite, ces éléments étaient connus des autres fondateurs. Les juges ont ensuite examiné si la responsabilité en qualité d'administrateur des deux défendeurs pouvaient être engagée. Ils l'ont nié s'agissant du défendeur 2, car celui-ci n'avait été administrateur que pendant un temps extrêmement court. En ce qui concerne le défendeur 1, la cour cantonale a considéré que l'absence de comptabilité ne pouvait lui être imputée, car il n'était plus administrateur à la clôture de l'exercice annuel de 1990, puisqu'il avait démissionné le 4 septembre 1990. Au surplus, elle a relevé que l'existence d'un dommage n'était pas établie et qu'un lien de causalité entre l'absence de comptabilité et un éventuel dommage n'était pas non plus clairement établi. 
5. 
Les événements pertinents étant survenus avant le 1er juillet 1992, date de l'entrée en vigueur du nouveau droit de la société anonyme, c'est à juste titre que la cour cantonale a examiné l'éventuelle responsabilité des défendeurs envers les demanderesses à la lumière de l'ancien droit (ATF 128 III 180 consid. 2b; 122 III 488 consid. 3a). 
6. 
Dans leur recours, les demanderesses invoquent le dommage qu'elles ont subi personnellement, alors qu'il ressort du jugement entrepris qu'elles agissent en tant que cessionnaires des droits de la masse. Il convient donc de préciser le fondement de leur action. 
6.1 Les créanciers sociaux qui s'estiment lésés par des actes d'un organe de la société peuvent agir à titre individuel contre celui-ci pour demander réparation de leur dommage direct, c'est-à-dire du préjudice qu'ils ont subi à titre personnel, indépendamment d'un dommage de la société (ATF 110 II 391 consid. 1). Cette action suppose toutefois que le comportement reproché à cet organe constitue un acte illicite fondant à l'égard du créancier une responsabilité sur la base de l'art. 41 CO, qu'il se caractérise à son endroit comme une culpa in contrahendo, ou encore qu'il viole une norme du droit des sociétés conçue exclusivement pour protéger les créanciers (cf. ATF 128 III 180 consid. 2c; 127 III 374 consid. 3b; 125 III 86 consid. 3a; 122 III 176 consid. 7b). La réparation du dommage direct subi par les créanciers peut être invoquée en tout temps par l'intéressé, peu importe que la société ait été mise en faillite ou non (cf. ATF 127 III 374 consid. 3a p. 377). En cas de faillite, les créanciers n'ont pas besoin d'obtenir l'accord de l'administration pour agir (Walter, Ungereimtheiten im Verantwortlichkeitsrecht, in Aktuelle Fragen zur aktienrechtlichen Verantwortlichkeit, Berne 2003, p. 73 ss, 90). 
Dans le cadre d'une faillite, les créanciers sociaux peuvent aussi subir une perte s'ils ne récupèrent pas la totalité de leurs prétentions. Par rapport à d'éventuels manquements des organes, leur dommage n'est alors qu'indirect, car il découle de l'insolvabilité de la société (ATF 128 III 180 consid. 2c p. 183). C'est la société qui apparaît comme directement lésée par le comportement de ses organes, les créanciers ne l'étant que par ricochet. Tant que la société demeure solvable, c'est-à-dire qu'elle est en mesure d'honorer ses engagements, le dommage reste dans sa seule sphère, sans toucher les créanciers sociaux qui pourront obtenir l'entier de leurs prétentions (cf. arrêt du Tribunal fédéral 4C.188/2003 du 22 octobre 2003 consid. 3.1). En principe, seule la masse en faillite peut agir contre les organes pour réclamer la réparation du préjudice que leur comportement a causé à la société; pour que le créancier social soit en droit d'introduire une telle action, il faut qu'il dispose d'un mandat procédural, c'est-à-dire qu'il ait obtenu la cession des droits de la masse (art. 260 LP; art. 756 al. 2 aCO; cf. ATF 128 III 180 consid. 2c p. 183: 127 III 374 consid. 3a p. 377). Le cessionnaire peut alors réclamer réparation du dommage causé directement à la société et indirectement à ses créanciers (ATF 122 III 195 consid. 9a in fine). 
6.2 En l'espèce, les demanderesses ne prétendent pas être lésées en raison d'un acte illicite ou d'une culpa in contrahendo. En outre, les dispositions du droit de la société anonyme dont elles invoquent la violation, à savoir l'art. 722 al. 3 aCO concernant l'obligation de tenir une comptabilité, l'art. 699 aCO obligeant l'administrateur à convoquer l'assemblée générale, l'art. 687 aCO relatif à la libération totale du capital-actions et l'art. 725 aCO exigeant un avis obligatoire en cas de diminution du capital et d'insolvabilité, sont des règles qui ne visent pas exclusivement à protéger les intérêts des actionnaires et des créanciers, mais aussi ceux de la société (cf. ATF 128 III 180 consid. 2c p. 183; 125 III 86 consid. 3b). Par conséquent, les demanderesses ne peuvent actionner les défendeurs en réparation de leur dommage direct. En revanche, comme elles ont obtenu la cession des droits de la masse, elles sont en droit d'agir pour réclamer la réparation du dommage que les organes auraient causé directement à la société et indirectement à elles-mêmes. 
7. 
Les demanderesses soutiennent que le jugement attaqué conclut à tort à la libération des défendeurs de toute responsabilité. 
7.1 En vertu de l'art. 754 aCO, toutes les personnes chargées de l'administration, de la gestion ou du contrôle répondent, à l'égard de la société notamment, du dommage qu'elles lui causent en manquant intentionnellement ou par négligence à leurs devoirs. La responsabilité des administrateurs envers la société, fondée sur l'art. 754 aCO, est subordonnée à la réunion des quatre conditions générales suivantes, à savoir un manquement par l'organe à ses devoirs, une faute (intentionnelle ou par négligence), un dommage et un lien de causalité adéquate entre le manquement et le dommage (Forstmoser, Aktienrechtliche Verantwortlichkeit, Zurich 1987, p. 33; cf. ATF 127 III 453 consid. 5a concernant l'organe de contrôle). Il appartient au demandeur à l'action en responsabilité de prouver la réalisation de ces conditions (art. 8 CC). 
7.2 Les demanderesses reprochent tout d'abord à la cour cantonale de n'avoir pas examiné la responsabilité des défendeurs sous l'angle des articles 699 aCO, 687 aCO et 725 aCO. 
7.2.1 L'art 699 aCO impose en particulier aux administrateurs de convoquer une assemblée générale chaque année, dans les six mois qui suivent la clôture de l'exercice. Ce délai n'est qu'une prescription d'ordre (ATF 116 IV 26 consid. 4b p. 30), qui est en pratique fréquemment repoussé (Bürgi, Commentaire zurichois, art. 699 aCO no 36). En l'espèce, la cour cantonale a constaté qu'une assemblé générale s'était tenue le 4 septembre 1990. Comme la société, constituée le 30 novembre 1989, n'était inscrite au registre du commerce que depuis le 4 décembre 1989, on ne peut reprocher aux administrateurs d'avoir manqué à leurs devoirs en fixant la première assemblée générale de la société moins d'un an après sa création. Au demeurant, il n'y a pas lieu d'entrer plus avant sur les critiques des demanderesses à cet égard, car elles sont en contradiction avec les faits constatés. En effet, lorsqu'elles affirment, à l'inverse du jugement attaqué, qu'aucune assemblée générale ne s'est déroulée le 4 septembre 1990, elles perdent de vue qu'il ne s'agit que de la position exprimée par l'expert, qui a considéré que les lacunes dans le procès-verbal de la séance du 4 septembre empêchaient de valider une véritable assemblée. Dès lors que les juges cantonaux n'ont pas retenu ces faits, la Cour de céans ne saurait en tenir compte dans un recours en réforme (cf. supra consid. 3). 
7.2.2 L'art. 687 al. 1 aCO prévoit que l'acquéreur d'une action nominative qui n'est pas intégralement libérée répond des versements à l'égard de la société dès qu'il est inscrit sur le registre des actions. La société peut réclamer en tout temps l'exécution de cette obligation à l'actionnaire (ATF 102 II 353 consid. 4a in fine). Les obligations découlant de la disposition invoquée par les demanderesses incombent ainsi aux actionnaires, alors qu'en l'espèce, seuls les manquements imputables aux organes entrent en ligne de compte. On pourrait certes reprocher aux défendeurs d'avoir manqué à leurs devoirs de fondateurs en ne réclamant pas la libération entière du capital social lors de la fondation de la société, étant donné que le consentement des autres fondateurs, admis en l'espèce, est un élément qui est opposable à la société (ATF 102 II 353 consid. 2), mais qui ne l'est plus lorsque l'action en responsabilité est exercée par la masse en faillite ou par son cessionnaire (cf. ATF 117 II 432 consid. 1b/gg p. 440). Il n'y a cependant pas lieu de se pencher plus avant sur cette question, car la cour cantonale a constaté, d'une manière qui lie le Tribunal fédéral en instance de réforme (art. 63 al. 2 OJ), que la fiduciaire, s'apercevant que le capital social n'avait été libéré qu'à concurrence de 20'000 fr. sur 50'000 fr., en a avisé l'actionnaire majoritaire en mai 1990. A la même période, elle a établi les comptes du groupe W.________ et a porté au bilan consolidé au 31 décembre 1989 la somme de 30'000 fr. en faveur de Z.________ S.A. et inscrit celle-ci au passif du bilan de l'actionnaire majoritaire. Il en découle ainsi qu'il a été remédié rapidement à la libération partielle du capital social, de sorte que l'on ne voit pas que cet élément ait pu causer un préjudice à la société et, par voie de conséquence, entraîner la responsabilité des fondateurs, ce que les demanderesses ne démontrent du reste nullement. 
7.2.3 Quant à l'art. 725 aCO, l'examen du recours ne permet pas de comprendre en quoi l'on pourrait reprocher à la cour cantonale de ne pas avoir retenu une violation du devoir d'avis au sens de cette disposition, ce d'autant que le jugement attaqué envisage un tel manquement. Le grief, insuffisamment motivé (art. 55 al. 1 let. c OJ), est donc irrecevable. 
 
Aucune des dispositions invoquées par les demanderesses ne révèle ainsi des manquements propres à engager la responsabilité des défendeurs envers la société autres que ceux pris en considération par la cour cantonale. 
7.3 Les demanderesses reprochent également aux juges cantonaux d'avoir considéré l'existence d'un dommage comme non établie, alors que les pertes qu'elles ont subies à la suite de la faillite de la société entrent dans la définition juridique du dommage. 
7.3.1 Il ressort de cette argumentation que les demanderesses cherchent à se prévaloir de leur dommage propre, perdant de vue qu'elles ne disposent pas d'une action directe envers les administrateurs, mais qu'elles ne sont en droit d'agir qu'en tant que cessionnaires des droits de la masse, en réparation du dommage subi directement par la société et indirectement par elles-mêmes (cf. supra consid. 6.2). Elles font ainsi valoir en premier lieu le droit de la société à obtenir réparation (cf. Walter, op. cit., p. 81). Il ne suffit donc pas que les demanderesses aient subi une perte en raison de l'insolvabilité de la société, mais il faut encore que celle-ci ait été directement lésée par les actes de ses organes. 
7.3.2 Le dommage juridiquement reconnu réside dans la diminution involontaire de la fortune nette; il correspond à la différence entre le montant actuel du patrimoine du lésé et le montant qu'aurait ce même patrimoine si l'événement dommageable ne s'était pas produit (ATF 129 III 331 consid. 2.1 et les arrêts cités). Saisi d'un recours en réforme, le Tribunal fédéral n'intervient que si l'autorité cantonale a méconnu la notion juridique du dommage. En revanche, savoir s'il y a eu un dommage et quelle en est la quotité est une question de fait qui lie le Tribunal fédéral en instance de réforme (ATF 129 III 135 consid. 4.2.1 p. 153; 127 III 73 consid. 3c, 543 consid. 2b). 
 
Selon la cour cantonale, il n'était pas possible d'affirmer qu'une comptabilité régulièrement tenue au cours de l'année 1990 aurait changé quelque chose à la situation de la société et des créanciers de cette dernière, ni qu'un dépôt de bilan effectué plus tôt aurait permis de réduire le dommage. Les juges en ont conclu que l'existence d'un dommage n'était pas établie. On ne peut déduire de ce raisonnement que la notion juridique du dommage a été méconnue, puisque la cour cantonale s'est demandée quelle aurait été la situation de la société si les éventuels manquements des administrateurs ne s'étaient pas produits. Pour le surplus, l'affirmation selon laquelle l'existence d'un dommage n'était pas établie relève des faits, de sorte que les critiques formulées par les demanderesses dans leur recours en réforme à ce propos sont irrecevables. Si, comme elles le font valoir, cette conclusion leur paraissait pour le moins surprenante et résulter d'un raisonnement trop succinct, elles devaient s'en plaindre dans le cadre d'un recours de droit public, en invoquant le grief d'arbitraire dans l'appréciation des preuves et l'établissement des faits ou un défaut de motivation du jugement entrepris. 
7.4 L'une des conditions à la responsabilité des défendeurs au sens de l'art. 754 aCO faisant défaut, on ne peut reprocher à la cour cantonale d'avoir violé le droit fédéral en rejetant les prétentions des demanderesses. Il n'y a ainsi pas lieu de se pencher sur les autres griefs soulevés. 
 
Dans ces circonstances, le recours doit être rejeté dans la mesure de sa recevabilité. 
8. 
Compte tenu de l'issue du litige, les frais et dépens seront mis à la charge des demanderesses, solidairement entre elles (art. 156 al. 1 et 7, ainsi que 159 al. 1 et 5 OJ). 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
1. 
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
2. 
Un émolument judiciaire de 6'500 fr. est mis à la charge des demanderesses, solidairement entre elles. 
3. 
Les demanderesses, débitrices solidaires, verseront à chacun des deux défendeurs une indemnité de 7'500 fr. à titre de dépens. 
4. 
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et à la Cour civile du Tribunal cantonal vaudois. 
Lausanne, le 3 mars 2004 
Au nom de la Ire Cour civile 
du Tribunal fédéral suisse 
Le président: La greffière: