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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
6B_976/2023  
 
 
Arrêt du 29 novembre 2023  
 
Ire Cour de droit pénal  
 
Composition 
Mmes et M. les Juges fédéraux 
Jacquemoud-Rossari, Présidente, 
Muschietti et van de Graaf. 
Greffière : Mme Brun. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Valentin Aebischer 
et Me Guillaume Hess, 
recourant, 
 
contre  
 
Ministère public de l'État de Fribourg, 
place Notre-Dame 4, 1700 Fribourg, 
intimé. 
 
Objet 
Lésions corporelles simples par négligence, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal 
de l'État de Fribourg, Cour d'appel pénal, 
du 16 juin 2023 (501 2022 192). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Par jugement du 3 octobre 2022, le Juge de police de l'arrondissement de la Sarine a reconnu A.________ coupable de lésions corporelles simples par négligence et l'a condamné à une peine pécuniaire de 20 jours-amende à 130 fr. le jour, avec sursis pendant deux ans, ainsi qu'à une amende de 500 francs. 
 
B.  
Par arrêt du 16 juin 2023, la Cour d'appel pénal du Tribunal cantonal de Fribourg a rejeté l'appel de A.________ et confirmé le jugement du 3 octobre 2022. 
 
La cour cantonale a retenu les faits suivants: 
Le 28 juin 2021, B.________ s'est introduit dans la circulation avec son vélo sur la voie droite (voie réservée aux bus, taxis et cycles) de l'avenue U.________, peu avant le giratoire de l'avenue V.________, en ville de Y.________. Arrivé au giratoire, après avoir eu un contact visuel avec la conductrice d'une voiture rouge qui se trouvait sur la voie gauche de présélection, à l'extérieur du giratoire, et avait mis le clignotant pour obliquer à droite et après s'être assuré qu'aucun véhicule n'arrive depuis sa gauche, B.________ est entré dans le giratoire, puis a changé de voie en contournant par la gauche un véhicule gris qui était à l'arrêt à l'intérieur du giratoire, pour obliquer à droite vers la rue W.________/rue X.________. C.________, qui roulait à environ cinq mètres derrière B.________, mais déjà sur la voie gauche de la chaussée, l'a suivi. Les deux cyclistes roulaient très lentement, voire sans pédaler. Le bus conduit par A.________, qui arrivait au giratoire depuis la rue X.________ et qui voulait tourner à gauche pour rejoindre l'avenue U.________, n'était pas encore entré dans le giratoire au moment où les deux cyclistes y sont entrés. Voyant le bus arriver, C.________ a pu s'arrêter à temps et éviter une collision, puis a posé un pied sur le cercle intérieur du giratoire. B.________ a essayé de serrer encore plus à gauche afin d'éviter le bus, puis frappé à la fenêtre du conducteur du bus et essayé de s'y agripper. A.________ n'a, soit pas vu les deux cyclistes arriver, soit mal estimé la distance et a heurté B.________ avec la roue gauche avant du bus, puis a freiné. B.________ a été blessé. 
 
C.  
A.________ forme un recours en matière pénale à l'encontre de l'arrêt cantonal du 16 juin 2023. Il conclut à son acquittement. Subsidiairement, il conclut au renvoi de la cause à l'autorité inférieure pour nouvelle décision au sens des considérants. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le recourant conteste sa condamnation du chef de lésions corporelles simples par négligence (art. 125 al. 1 en lien avec l'art. 12 CP). Il se plaint d'un établissement arbitraire des faits, d'une violation de la présomption d'innocence, et reproche aux juges cantonaux d'avoir violé les art. 26, 27 al. 1, 34 al. 2, 35 al. 2 et 4 et 36 LCR, 14 al. 1, 41b al.1 et 2 OCR et 73 al. 6 let. a OSR en retenant qu'il n'avait pas respecté la priorité dont il était débiteur et en ignorant le fait que B.________ n'avait pas signalé son changement de voie dans le giratoire, avait franchi une ligne de sécurité en s'engageant dans la circulation et avait contourné des véhicules dans le giratoire. 
 
1.1. Le Tribunal fédéral n'est pas une autorité d'appel, auprès de laquelle les faits pourraient être rediscutés librement. Il est lié par les constatations de fait de la décision entreprise (art. 105 al. 1 LTF), à moins que celles-ci n'aient été établies en violation du droit ou de manière manifestement inexacte au sens des art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF, à savoir pour l'essentiel de façon arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. Une décision n'est pas arbitraire du seul fait qu'elle apparaît discutable ou même critiquable; il faut qu'elle soit manifestement insoutenable et cela non seulement dans sa motivation, mais aussi dans son résultat (ATF 146 IV 88 consid. 1.3.1; 145 IV 154 consid. 1.1; 143 IV 241 consid. 2.3.1). Le Tribunal fédéral n'entre en matière sur les moyens fondés sur la violation de droits fondamentaux, dont l'interdiction de l'arbitraire, que s'ils ont été invoqués et motivés de manière précise (art. 106 al. 2 LTF; ATF 143 IV 500 consid. 1.1). Les critiques de nature appellatoires sont irrecevables (ATF 146 IV 88 consid. 1.3.1; 145 IV 154 consid. 1.1). En matière d'appréciation des preuves et d'établissement des faits, il n'y a arbitraire que lorsque l'autorité ne prend pas en compte, sans aucune raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore lorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle en tire des constatations insoutenables (ATF 144 II 281 consid. 3.6.2; 143 IV 500 consid. 1.1 et les références citées). Lorsque l'appréciation des preuves et la constatation des faits sont critiquées en référence à la présomption d'innocence (art. 6 par. 2 CEDH, 32 al. 1 Cst. et 10 CPP), le principe "in dubio pro reo" n'a pas de portée plus large que l'interdiction de l'arbitraire (ATF 146 IV 88 consid. 1.3.1; 145 IV 154 consid. 1.1).  
Dans une large mesure, le recourant se borne à porter en instance fédérale les griefs soulevés devant la cour cantonale et auxquels cette dernière a répondu de manière exhaustive et convaincante. Il ré-expose sa propre vision de l'ensemble du litige dans une démarche de nature appellatoire qui ne remplit à l'évidence pas les exigences de motivation, ni ne démontre que l'appréciation cantonale serait insoutenable. Les griefs de fait seront traités ci-après pour autant qu'ils n'apparaissent pas d'emblée irrecevables pour les motifs qui précèdent. 
 
1.2. L'art. 125 al. 1 CP réprime le comportement de celui qui, par négligence, aura fait subir à une personne une atteinte à l'intégrité corporelle ou à la santé. La réalisation de l'infraction réprimée par l'art. 125 CP suppose la réunion de trois éléments constitutifs, à savoir une négligence imputable à l'auteur, des lésions corporelles subies par la victime, ainsi qu'un lien de causalité naturelle et adéquate entre la négligence et les lésions (arrêts 6B_33/2021 du 12 juillet 2021 consid. 3.1; 6B_1081/2020 du 17 novembre 2021 consid. 1.2).  
Conformément à l'art. 12 al. 3 CP, il y a négligence si, par une imprévoyance coupable, l'auteur a agi sans se rendre compte ou sans tenir compte des conséquences de son acte. Il faut que l'auteur ait, d'une part, violé les règles de prudence que les circonstances lui imposaient pour ne pas excéder les limites du risque admissible et que, d'autre part, il n'ait pas déployé l'attention et les efforts que l'on pouvait attendre de lui pour se conformer à son devoir (ATF 143 IV 138 consid. 2.1; 135 IV 56 consid. 2.1 et les références citées). Pour déterminer plus précisément les devoirs imposés par la prudence, on peut se référer à des normes édictées par l'ordre juridique pour assurer la sécurité et éviter des accidents (ATF 143 IV 138 consid. 2.1 p. 140). S'agissant d'un accident de la route, il convient de se référer aux règles de la circulation routière (ATF 122 IV 133 consid. 2a; arrêt 6B_286/2022 du 15 juin 2023 consid. 4.1.1). 
Il faut en outre qu'il existe un rapport de causalité entre la violation fautive du devoir de prudence et les lésions de la victime. Le rapport de causalité est qualifié d'adéquat lorsque, d'après le cours ordinaire des choses et l'expérience de la vie, le comportement était propre à entraîner un résultat du genre de celui qui s'est produit (ATF 138 IV 57 consid. 4.1.3). La causalité adéquate sera admise même si le comportement de l'auteur n'est pas la cause directe ou unique du résultat. Peu importe que le résultat soit dû à d'autres causes, notamment à l'état de la victime, à son comportement ou à celui de tiers (ATF 131 IV 145 consid. 5.2). La causalité adéquate peut être exclue si une autre cause concomitante, par exemple une force naturelle, le comportement de la victime ou d'un tiers, constitue une circonstance tout à fait exceptionnelle ou apparaît si extraordinaire que l'on ne pouvait s'y attendre. L'imprévisibilité d'un acte concurrent ne suffit pas en soi à interrompre le rapport de causalité adéquate. Il faut encore que cet acte ait une importance telle qu'il s'impose comme la cause la plus probable et la plus immédiate de l'événement considéré, reléguant à l'arrière-plan tous les autres facteurs qui ont contribué à l'amener et notamment le comportement de l'auteur (ATF 143 III 242 consid. 3.7; 134 IV 255 consid. 4.4.2; 133 IV 158 consid. 6.1; 131 IV 145 consid. 5.2). La question de la causalité adéquate constitue une question de droit que le Tribunal fédéral revoit librement (ATF 142 IV 237 consid. 1.5.1 et 1.5.2; 139 V 176 consid 8.4.1 à 8.4.3; 138 IV 57 consid. 4.1.3). 
 
1.3.  
 
1.3.1. La circulation dans les giratoires et à leurs abords est régie par l'art. 41b OCR (RS 741.11). L'art. 41b al. 1 OCR prescrit dans ce cas qu'avant d'entrer dans un carrefour à sens giratoire, le conducteur doit ralentir et accorder la priorité aux véhicules qui, sur sa gauche, surviennent dans le giratoire.  
 
1.3.2. L'art. 14 al. 1 OCR précise que celui qui est tenu d'accorder la priorité ne doit pas gêner dans sa marche le conducteur bénéficiaire de la priorité; il réduira sa vitesse à temps et, s'il doit attendre, s'arrêtera avant le début de l'intersection. Le bénéficiaire de la priorité est gêné dans sa marche au sens de cette disposition, lorsqu'il doit modifier brusquement sa manière de conduire, par exemple parce qu'il est brusquement contraint de freiner, d'accélérer ou de faire une manoeuvre d'évitement sur l'intersection, voire peu avant ou peu après celle-ci, sans qu'il importe de savoir si une collision survient ou non (ATF 114 IV 146; arrêt 6B_1315/2016 du 14 septembre 2017).  
 
1.3.3. L'art. 26 al. 1 LCR prescrit que chacun doit se comporter, dans la circulation, de manière à ne pas gêner ni mettre en danger ceux qui utilisent la route conformément aux règles établies (al. 1). La jurisprudence a déduit de cette règle le principe de la confiance, qui permet à l'usager qui se comporte réglementairement d'attendre des autres usagers, aussi longtemps que des circonstances particulières ne doivent pas l'en dissuader, qu'ils se comportent également de manière conforme aux règles de la circulation, c'est-à-dire ne le gênent ni ne le mettent en danger (ATF 143 IV 500 consid. 1.2.4; 143 IV 138 consid. 2.1; 125 IV 83 consid. 2b et les références citées). Seul celui qui s'est comporté réglementairement peut invoquer le principe de la confiance (ATF 143 IV 500 consid. 1.2.4; 129 IV 282 consid. 2.2.1; arrêt 6B_1081/2020 du 17 novembre 2021 consid. 1.3.1).  
 
1.4. Le recourant conteste avoir violé la priorité de B.________ dans le giratoire et, par conséquent, son devoir de prudence, de sorte qu'il pouvait valablement se prévaloir du principe de la confiance.  
 
1.4.1. La cour cantonale a jugé que B.________ s'est introduit correctement dans le giratoire et, qu'en ne lui cédant pas la priorité, le recourant a enfreint les règles sur la circulation routière. L'autorité précédente pouvait, sans arbitraire, se fier aux déclarations de la deuxième cycliste, C.________, de B.________ lui-même et de l'analyse du RAG 2000 qui ont permis d'établir l'ordre des priorités à l'entrée du giratoire; B.________ a atteint le giratoire avant le bus conduit par le recourant et pouvait, de manière prioritaire, s'engager dans le giratoire (cf. arrêt attaqué, pp. 10 et 13).  
A l'exception de voies réservées et de priorité accordée au départ d'un arrêt signalé à l'intérieur des localités (art. 17 al. 5 OCR), la circulation des bus reste soumise aux règles des véhicules automobiles (art. 7 LCR). Ils ne bénéficient donc pas de règles de priorité supplémentaires en raison notamment de leur poids et ne sauraient être assimilés à des trains routiers (cf. BUSSY/RUSCONI/JEANNERET/KUHN/ MIZEL/MÜLLER, Code suisse de la circulation routière, commentaire, 4e éd. 2015, n° 3.2 ad art. 7 LCR). C'est donc à tort que le recourant se prévaut de l'ATF 89 IV 140
Pour le surplus, par ses développements tendant à indiquer que c'est le cycliste qui aurait en réalité gêné le bus dans le giratoire, le recourant se borne à opposer sa propre appréciation des faits et des preuves à celle opérée par la cour cantonale, cela d'une manière appellatoire et partant irrecevable dans le recours en matière pénale. 
 
1.4.2. Le recourant reproche à la cour cantonale de ne pas avoir pris en considération que B.________ avait lui-même violé plusieurs règles de la circulation routière (cf. supra consid. 1) et d'une manière propre à rompre tout lien de causalité adéquate entre le comportement qui lui est reproché et les lésions subies par B.________.  
Le recourant a violé la priorité et, c'est à raison, que la cour cantonale a estimé qu'il avait commis une négligence et qu'il ne saurait valablement invoquer le principe de la confiance (art. 26 al. 1 LCR). En effet, celui qui viole des règles de la circulation, contribuant ainsi à créer une situation dangereuse, ne peut pas attendre des autres qu'ils parent à ce danger par une attention accrue (cf. ATF 143 IV 500 consid. 1.2.4). Par ailleurs, son argumentation tirée du comportement exceptionnel et imprévisible du cycliste est irrecevable faute de reposer sur des faits établis. Pour le surplus, celle-ci est irrecevable car de nature appellatoire. En effet, le recourant présente à nouveau sa propre appréciation des faits sans démontrer que ceux retenus par la cour cantonale seraient arbitraires. 
 
1.5. Le recourant fait grief à la cour cantonale de ne pas avoir examiné l'élément de la faute (art. 12 al. 3 CP). A cet égard, il soutient que l'intersection est particulièrement complexe, avec de multiples signaux et feux de signalisation, et qu'un manque d'effort blâmable ne peut dès lors pas lui être reproché.  
Savoir si, sur la base des faits retenus, qui lient la cour de céans et dont l'arbitraire n'a pas été démontré, une faute peut être retenue est une question de droit que celle-ci peut examiner librement. Il ressort du jugement que B.________ était prioritaire en arrivant au giratoire et que le recourant ne lui a pas cédé la priorité, alors que celui-ci arrivait depuis la gauche et qu'il s'était engagé correctement dans le giratoire. Comme l'a relevé la cour cantonale, il faut considérer que le recourant n'a pas vu B.________ alors que son champ de vision était dégagé (cf. jugement attaqué, p. 14). Le recourant, chauffeur professionnel, a été, à tout le moins, inattentif. Les arguments du recourant tirés de faits non établis et expressément écartés, comme la densité de la circulation, sont irrecevables. C'est donc à tort qu'il compare sa situation à celle de l'ATF 103 IV 101 consid. 2c. 
C'est à juste titre que la cour cantonale a retenu une négligence qui peut être qualifiée de fautive. 
 
1.6. Au vu de ce qui précède, la cour cantonale n'a pas violé le droit fédéral en estimant que c'était bien le comportement du recourant, qui s'est octroyé la priorité dans le giratoire alors qu'il en était le débiteur, en violation de son devoir de prudence découlant des règles de la circulation routière, qui constituait la cause la plus probable et la plus immédiate de la collision avec B.________.  
Le recourant ne contestant pas, au surplus, que les blessures subies par B.________ sont des conséquences de cette collision, sa condamnation pour lésions corporelles simples par négligence (art. 125 al. 1 CP) doit être confirmée. 
 
2.  
Le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable. Le recourant, qui succombe, supporte les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
Les frais judiciaire, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal de l'État de Fribourg, Cour d'appel pénal. 
 
 
Lausanne, le 29 novembre 2023 
 
Au nom de la Ire Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Jacquemoud-Rossari 
 
La Greffière : Brun