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[AZA 0/2] 
6P.140/2000/ROD 
 
COUR DE CASSATION PENALE 
************************************************* 
 
Séance du 9 août 2001 
 
Présidence de M. Schubarth, Président, 
Présents: M. Schneider, M. Wiprächtiger, M. Kolly et 
Mme Escher, Juges. Greffier: M. Denys. 
______________ 
 
Statuant sur le recours de droit public 
formé par 
X.________, représentée par Me Jean-Luc Colombini, avocat à Lausanne, 
 
contre 
le jugement rendu le 21 juillet 2000 par le Tribunal de police du district de Lausanne; 
 
(arbitraire) 
 
Vu les pièces du dossier d'où ressortent 
les faits suivants: 
 
A.- Par prononcé préfectoral du 1er février 2000, le Préfet du district de Lausanne a retenu que X.________ avait contrevenu à l'art. 3 al. 1 de l'ordonnance sur les règles de la circulation routière (OCR; RS 741. 11), mais, qualifiant le cas de très peu de gravité, a renoncé à lui infliger une amende, en application de l'art. 100 ch. 1 al. 2 de la loi fédérale sur la circulation routière (LCR; RS 741. 01). Par prononcé du même jour, le Préfet a considéré que Y.________ avait contrevenu à l'art. 3 al. 1 OCR et lui a infligé, en application de l'art 96 OCR, une amende de 100 francs. 
 
 
B.- Par jugement du 21 juillet 2000, le Tribunal de police du district de Lausanne a rejeté l'appel formé par X.________ et a confirmé le prononcé préfectoral. Par le même jugement, le Tribunal de police a admis l'appel de Y.________ et a annulé le prononcé préfectoral le concernant. 
 
En résumé, il en ressort les éléments suivants: 
 
Le 5 mai 1999 vers 8 h 20, un accrochage s'est produit à l'entrée du giratoire de la Maladière à Lausanne depuis le débouché de la route de Chavannes entre la voiture conduite par X.________ et le trolleybus conduit par Y.________. Le point de choc se situe sur la voie extérieure du giratoire. 
 
X.________ a déclaré qu'elle circulait sur la voie de droite de la route de Chavannes dans l'intention d'emprunter la voie extérieure du giratoire pour se rendre à l'avenue de Cour; elle s'est immobilisée en première position derrière la ligne d'attente, en attendant que la voie extérieure du giratoire se libère; elle soutient avoir regardé dans le rétroviseur central et celui de droite et n'avoir vu venir aucun véhicule dans la voie parallèle sur sa droite, c'est-à-dire dans la voie de circulation réservée aux bus; elle a laissé passer quelques véhicules qui venaient sur sa gauche dans le giratoire puis s'y est engagée après avoir regardé une fois encore dans son rétroviseur central, sans rien remarquer; elle a roulé quelques mètres sur le giratoire et a ressenti un choc, l'angle avant-droit de sa voiture étant heurté par un trolleybus, qui s'était également engagé dans le giratoire à partir de la voie qui lui était réservée. 
 
De son côté, Y.________ a expliqué qu'il circulait sur la route de Chavannes sur la voie réservée aux bus, à une allure d'environ 40 km/h; à l'approche du giratoire - à une quarantaine de mètres de la ligne d'attente selon le tachygraphe -, il a ralenti et a remarqué qu'une file de véhicules était arrêtée sur sa gauche; celui de X.________ se trouvait en tête; voyant ce véhicule à l'arrêt, Y.________ en a déduit qu'il avait été vu et qu'il pouvait s'engager dans le giratoire; il a progressivement réduit sa vitesse de 40 à 5 km/h; lorsque la voie extérieure du giratoire s'est trouvée libre, il a accéléré et poursuivi sa progression; c'est à ce moment-là qu'il a ressenti un choc à l'angle gauche du trolleybus en raison d'une collision avec la voiture de X.________. 
 
Avec l'accord des parties, le Tribunal de police s'est référé à un croquis versé au dossier. Sur cette base, il a constaté qu'au point de choc, l'avant de la voiture de X.________ se situait à 5 mètres de la ligne d'attente, admettant qu'il n'était pas impossible que celle-ci ait parcouru depuis l'endroit où elle avait démarré pour s'engager sur le giratoire une distance maximale de 8 mètres. Relevant qu'elle excluait avoir pu parcourir cette distance en moins de 3 secondes, il en a conclu que sa vitesse était moindre que celle du trolleybus. 
Il a par ailleurs noté que Y.________ était quant à lui engagé à raison de 2 mètres sur le giratoire et qu'en référence au tachygraphe, il avait roulé à 8 km/h environ sur les 4 mètres avant le choc, soit à une allure moyenne de 2,2 m/s. 
 
Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal de police est parvenu à la conclusion que X.________ s'était engagée sur le giratoire après Y.________, ajoutant que si celle-là s'était engagée, comme elle le soutenait, avant celui-ci, elle se serait trouvée devant lui et aucun choc ne se serait produit. Quoi qu'il en soit, le Tribunal de police est parvenu à la conclusion que X.________ devait de toute façon céder la priorité, conformément à la règle selon laquelle lorsque deux voies dans le même sens se rejoignent en une seule, il incombe au conducteur circulant sur la voie de gauche de reprendre la droite de la chaussée sans gêner celui qui y circule normalement. 
 
C.- X.________ forme un recours de droit public au Tribunal fédéral contre le jugement précité. Elle conclut à son annulation. 
 
Le Ministère public renonce à se déterminer alors que le Tribunal de police se réfère à son jugement. 
 
Considérant en droit : 
 
1.- Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 126 I 81 consid. 1 p. 83). 
 
a) La recevabilité du recours de droit public suppose l'épuisement des instances cantonales (art. 86 al. 1 OJ). 
 
En l'espèce, la recourante a été condamnée dans un premier temps par le préfet, sans citation (art. 70 de la loi vaudoise sur les contraventions [LC/VD]). Elle a demandé le réexamen de la cause et a été entendue par le préfet (art. 70a LC/VD). Celui-ci a rendu un nouveau prononcé et l'a reconnue coupable de l'infraction reprochée mais l'a exemptée de toute peine. Elle a formé un appel contre cette décision devant le Tribunal de police (art. 74 ss LC/VD). L'appel a pour effet de suspendre le prononcé préfectoral (art. 79 LC/VD). Il n'y a pas de recours au plan cantonal contre le jugement rendu sur appel "en matière de contravention de droit fédéral ou de délit" (art. 80a LC/VD). Le Tribunal de police a donc statué sur l'appel en seconde et dernière instance cantonale (cf. ATF 126 IV 95 consid. 1b p. 97/98). Les conditions posées par l'art. 86 al. 1 OJ sont réalisées. 
 
b) La recourante a été exemptée de toute peine. 
Selon la jurisprudence relative à l'art. 88 OJ, le recours de droit public est ouvert seulement à celui qui est atteint par l'acte attaqué dans un intérêt juridiquement protégé (ATF 123 I 41 consid. 5b p. 42). Au regard de ce principe, il faut admettre que celui qui est reconnu coupable d'une infraction pénale subit une lésion suffisante, même s'il est exempté de toute peine. 
2.- La recourante se plaint d'arbitraire, respectivement de violation de la présomption d'innocence, dans l'appréciation des preuves et l'établissement des faits à propos de la question de savoir qui d'elle ou du trolleybus a pénétré en premier sur le giratoire. 
 
a) Sauf exceptions dont les conditions ne sont pas remplies en l'espèce, il n'est pas possible d'invoquer des moyens ou des faits nouveaux dans un recours de droit public (ATF 118 Ia 20 consid. 5a p. 26), ni de produire des pièces nouvelles (ATF 108 II 69 consid. 1 p. 71). Le nouveau document - une expertise privée du dénommé Philippe Masserey datée du 21 août 2000 - que la recourante joint à son recours pour appuyer son argumentation est dès lors irrecevable. 
 
b) Dans la mesure où l'appréciation des preuves est critiquée en référence avec la présomption d'innocence, celle-ci n'a pas de portée plus large que l'interdiction de l'arbitraire (ATF 120 Ia 31 consid. 2d p. 37/38). 
Selon la jurisprudence, est arbitraire une décision qui méconnaît gravement une norme ou un principe juridique clair et indiscuté ou qui heurte de manière choquante le sentiment de la justice ou de l'équité. En d'autres termes, il ne se justifie de l'annuler que si elle est insoutenable, en contradiction manifeste avec la situation effective, si elle a été adoptée sans motif objectif ou en violation d'un droit certain. Il ne suffit pas que la motivation de la décision soit insoutenable; encore faut-il qu'elle soit arbitraire dans son résultat (ATF 125 I 166 consid. 2a p. 168; 125 II 10 consid. 3a p. 15, 129 consid. 5b p. 134; 124 V 137 consid. 2b p. 139; 124 IV 86 consid. 2a p. 88 et les arrêts cités). 
 
c) Selon les constatations cantonales, le trolleybus était engagé à raison de deux mètres sur le giratoire lorsque le choc s'est produit et a circulé sur cette distance à 8 km/h (2,2 m/s). Il faut donc admettre avec la recourante qu'environ une seconde s'est écoulée entre le moment où le trolleybus a franchi la ligne d'attente jusqu'au point de choc. Pour ce qui concerne la recourante, le Tribunal de police a retenu qu'au point de choc, l'avant de sa voiture se situait à 5 mètres de la ligne d'attente et qu'il n'était pas impossible qu'elle ait parcouru depuis l'endroit où elle avait démarré pour s'engager sur le giratoire une distance maximale de 8 mètres. 
Il a ajouté, sans dire s'il tenait ce fait pour établi, que la recourante excluait avoir pu parcourir cette distance en moins de 3 secondes. Quoi qu'il en soit, selon les faits retenus, l'avant de la voiture se situait au point de choc à 5 mètres de la ligne d'attente. 
Selon la conclusion du Tribunal de police, la recourante a pénétré après le trolleybus dans le giratoire. 
Il a donc fallu qu'elle accomplisse la distance qui la séparait du point de choc - 5 mètres - en moins d'une seconde, le trolleybus ayant approximativement mis une seconde entre le moment où il a franchi la ligne d'attente et le choc. Cette solution apparaît impossible si l'on tient compte du fait que la recourante était à l'arrêt avant de s'engager sur le giratoire. Le peu qu'en dit le Tribunal de police ne permet en tout cas pas de comprendre sur quoi il fonde sa conviction que le trolleybus a pénétré avant la recourante sur le giratoire. 
La réponse à cette question factuelle paraît avoir été arbitrairement tranchée. Le recours doit donc être admis. 
 
3.- Il ne sera pas perçu de frais et le canton de Vaud versera à la recourante une indemnité pour ses dépens (art. 159 al. 1 OJ). 
 
Par ces motifs, 
 
le Tribunal fédéral, 
 
1. Admet le recours, annule le jugement attaqué et renvoie la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle décision. 
 
2. Dit qu'il n'est pas perçu de frais. 
 
3. Dit que le canton de Vaud versera une indemnité de 1'500 francs à la recourante. 
 
4. Communique le présent arrêt en copie au mandataire de la recourante, au Ministère public du canton de Vaud ainsi qu'au Tribunal de police du district de Lausanne. 
__________ 
Lausanne, le 9 août 2001 
 
Au nom de la Cour de cassation pénale 
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE: 
Le Président, 
 
Le Greffier,