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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
2A.586/2006 /svc 
 
Arrêt du 6 décembre 2006 
IIe Cour de droit public 
 
Composition 
MM. les Juges Merkli, Président, 
Wurzburger et Meylan, Juge suppléant. 
Greffier: M. Vianin. 
 
Parties 
X.________, 
recourant, représenté par Me Yves Hofstetter, avocat, 
 
contre 
 
Département fédéral de justice et police, 3003 Berne. 
 
Objet 
exception aux mesures de limitation, 
 
recours de droit administratif contre la décision du Département fédéral de justice et police du 30 août 2006. 
 
Faits : 
A. 
Ressortissant de la République de Serbie né en 1976, X.________ a déposé le 31 août 1994 auprès de l'Ambassade de Suisse en Yougoslavie une demande d'autorisation d'entrée et de séjour en Suisse pour études, qui lui a été refusée. 
Le 1er octobre 1997, le prénommé a déposé en Suisse une demande d'asile, qui a été rejetée par décision du 12 août 1999. Il a été mis au bénéfice de l'admission provisoire collective, laquelle a été levée le 16 août 1999. 
En date du 19 octobre 2004, X.________ a sollicité du Service de la population du canton de Vaud (ci-après: le Service de la population) l'octroi d'une autorisation de séjour et de travail. Il a indiqué qu'il était arrivé en Suisse en octobre 1996 et y exerçait depuis le mois de mars 1997 des activités régulières dans l'hôtellerie. 
Le 12 mai 2005, le Service de la population a informé X.________ qu'il était disposé à lui délivrer une autorisation de séjour et a transmis son dossier à l'autorité fédérale pour examen sous l'angle de l'art. 13 lettre f de l'ordonnance du Conseil fédéral du 6 octobre 1986 limitant le nombre des étrangers (OLE; RS 823.21). 
Après lui avoir donné l'occasion de se déterminer, l'Office fédéral des migrations (ODM) a, en date du 8 novembre 2005, rendu à l'endroit de X.________ une décision de refus d'exception aux mesures de limitation. 
B. 
X.________ a porté sa cause devant le Département fédéral de justice et police (ci-après: le Département) qui, par décision du 30 août 2006, a rejeté le recours dans la mesure où il était recevable. Le Département a considéré que la présence en Suisse du recourant était suffisamment établie depuis le printemps 1997 seulement. Il a estimé que la relation que celui-ci avait établie avec ce pays n'était pas à ce point exceptionnelle qu'il faille faire abstraction de l'illégalité de son séjour et admettre l'existence d'un cas personnel d'extrême gravité. X.________ avait, il est vrai, développé des attaches certaines avec la Suisse, appris la langue française et assuré son indépendance financière sans émarger à l'aide sociale. Toutefois, même si ses efforts pour assimiler les moeurs helvétiques étaient indéniables, ces liens n'étaient pas à ce point étroits qu'il n'ait pu envisager un retour dans son pays d'origine, où il avait vécu les vingt et une premières années de son existence et où il avait encore ses parents, son frère et sa soeur. Il avait toujours travaillé dans l'hôtellerie, d'abord comme aide de cuisine et serveur; il était maintenant chef de service, responsable du personnel de service, ainsi que de la planification des horaires et des opérations de caisse journalières; si ces responsabilités nouvelles témoignaient assurément de la confiance accordée par son employeur, on ne pouvait y voir une ascension professionnelle sortant de l'ordinaire; on ne pouvait donc pas non plus considérer qu'il avait acquis en Suisse des qualifications professionnelles à ce point spécifiques qu'il n'ait pu en aucune façon les mettre en pratique dans son pays d'origine. Son retour dans son pays d'origine n'aurait certes pas été exempt de difficultés, mais l'art. 13 lettre f OLE n'avait pas pour objet de soustraire des étrangers aux conditions générales de vie de leur pays d'origine. Quant à l'hostilité et à la violence de certains de ses compatriotes, qu'il disait avoir voulu fuir en venant en Suisse, les menaces alléguées n'avaient jamais été confirmées par aucun indice probant. Cet aspect avait d'ailleurs été dûment examiné lors du traitement de sa demande d'asile et de la levée de son admission provisoire, dans les deux cas avec une issue négative. 
C. 
Agissant par la voie du recours de droit administratif, X.________ demande au Tribunal fédéral d'annuler cette décision et de dire qu'il n'est pas assujetti aux mesures de limitation du nombre des étrangers et bénéficie de l'application de l'art. 13 lettre f OLE, le tout sous suite de dépens. 
Le Département conclut au rejet du recours. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
1. 
Le Tribunal fédéral examine d'office et avec plein pouvoir d'examen la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 132 III 291 consid. 1 p. 292; 131 II 58 consid. 1 p. 60; 130 I 312 consid. 1 p. 317 et la jurisprudence citée). 
La voie du recours de droit administratif est, en principe, ouverte contre les décisions relatives à l'assujettissement aux mesures de limitation prévues par l'ordonnance limitant le nombre des étrangers (ATF 122 II 403 consid. 1 p. 404/405). Tendant exclusivement à l'octroi d'une exception aux mesures de limitation, le présent recours, qui respecte par ailleurs les formes et délais légaux, est donc recevable. 
2. 
2.1 Les mesures de limitation visent en premier lieu à assurer un rapport équilibré entre l'effectif de la population en Suisse et celui de la population étrangère résidente, ainsi qu'à améliorer la structure du marché du travail et à assurer l'équilibre optimal en matière d'emploi (art. 1er let. a et c OLE). L'art. 13 lettre f OLE, selon lequel un étranger n'est pas compté dans les nombres maximums fixés par le Conseil fédéral, a pour but de faciliter la présence en Suisse d'étrangers qui, en principe, seraient comptés dans ces nombres maximums, mais pour lesquels cet assujettissement paraîtrait trop rigoureux par rapport aux circonstances particulières de leur cas et pas souhaitable du point de vue politique. Il découle de la formulation de l'art. 13 lettre f OLE que cette disposition dérogatoire présente un caractère exceptionnel et que les conditions de la reconnaissance d'un cas de rigueur doivent être appréciées restrictivement. Il est nécessaire que l'étranger concerné se trouve dans une situation de détresse personnelle. Cela signifie que ses conditions de vie et d'existence, comparées à celles applicables à la moyenne des étrangers, doivent être mises en cause de manière accrue, c'est-à-dire que le refus de soustraire l'intéressé aux restrictions des nombres maximums comporte pour lui de graves conséquences. Pour l'appréciation du cas d'extrême gravité, il y a lieu de tenir compte de l'ensemble des circonstances du cas particulier. La reconnaissance d'un tel cas n'implique pas forcément que la présence de l'étranger en Suisse constitue l'unique moyen pour échapper à une situation de détresse. D'un autre côté, le fait que l'étranger ait séjourné en Suisse pendant une assez longue période, qu'il s'y soit bien intégré socialement et professionnellement et que son comportement n'ait pas fait l'objet de plaintes ne suffit pas, à lui seul, à constituer un cas d'extrême gravité; il faut encore que sa relation avec la Suisse soit si étroite qu'on ne saurait exiger qu'il aille vivre dans un autre pays, notamment dans son pays d'origine. A cet égard, les relations de travail, d'amitié ou de voisinage que l'étranger a pu nouer pendant son séjour ne constituent normalement pas des liens si étroits avec la Suisse qu'ils justifieraient une exemption des mesures de limitation (ATF 130 II 39 consid. 3 p. 41/42 et les arrêts cités). 
Le Tribunal fédéral a précisé que les séjours illégaux en Suisse n'étaient en principe pas pris en compte dans l'examen d'un cas de rigueur. La longue durée d'un séjour en Suisse n'est pas, à elle seule, un élément constitutif d'un cas personnel d'extrême gravité dans la mesure où ce séjour est illégal. Il appartient dès lors à l'autorité compétente d'examiner si l'intéressé se trouve pour d'autres raisons dans un état de détresse justifiant de l'exempter des mesures de limitation du nombre des étrangers. Pour cela, il y a lieu de se fonder sur les relations familiales de l'intéressé en Suisse et dans sa patrie, sur son état de santé, sur sa situation professionnelle, sur son intégration sociale, etc. (ATF 130 II 39 consid. 3 p. 42 et les arrêts cités). Il n'y a pas lieu de revenir sur cette jurisprudence. Celle-ci crée, assurément, une inégalité de traitement entre les étrangers qui séjournent illégalement dans notre pays et ceux qui, dès leur arrivée, entreprennent d'obtenir par les voies légales un statut de police des étrangers, mais cette inégalité est voulue; sa justification réside dans le fait que, à vouloir tenir compte de la durée d'un séjour illégal, on créerait une prime à l'illégalité et l'on consacrerait une autre inégalité, tout à fait injustifiée celle-ci, au détriment des étrangers respectueux de la légalité. Quant au marché illégal du travail évoqué par le recourant, comme l'a rappelé le Tribunal fédéral (ATF 130 II 39 consid. 5 p. 44/45), il existe et subsiste uniquement parce qu'il permet la rencontre d'une certaine offre et d'une certaine demande, souvent du reste au détriment de la rationalisation souhaitée de certains secteurs économiques. Or, l'attitude que le recourant a adoptée pour pouvoir travailler en Suisse contribue à ce marché condamnable. D'ailleurs, l'employeur qui engage un travailleur clandestin est lui-même passible de sanctions; que celles-ci ne soient pas toujours appliquées ne saurait avoir pour conséquence que, s'agissant d'examiner le cas du travailleur clandestin sous l'angle de l'art. 13 lettre f OLE, il devrait être fait abstraction du caractère illégal de son séjour. Le recourant est d'ailleurs d'autant plus mal venu de soutenir cette thèse que l'établissement qui l'employait entre août 2000 et fin septembre 2001 a été dénoncé pour avoir employé treize ressortissants étrangers, dont le recourant, en situation irrégulière. Enfin, le recourant ne saurait rien tirer non plus en sa faveur de la jurisprudence selon laquelle des séjours pour études manifestement trop nombreux et trop longs finissent par créer des cas humanitaires (cf. 2A.103/1990 consid. 2d et 3f, arrêt cité par le recourant). S'il en est ainsi, c'est précisément parce que ces séjours dont il faut éviter qu'ils ne se prolongent ou se multiplient à l'excès sont des séjours régulièrement autorisés; cette problématique est donc dénuée de toute pertinence s'agissant de déterminer le traitement applicable à des séjours illégaux. Et si le Tribunal fédéral a jugé qu'un cas personnel d'extrême gravité serait en principe réalisé en cas de renvoi après un séjour en Suisse de dix ans au moins, il s'agissait, là encore, exclusivement d'un séjour régulier. 
2.2 Le recourant n'a séjourné régulièrement en Suisse que du printemps 1997 au mois d'août 1999, puis dès octobre 2004, mais alors au bénéfice d'une simple tolérance. Il ne peut donc se prévaloir d'un séjour régulier particulièrement long. 
Il n'est pas contesté, et le Département ne l'a nullement ignoré, que le recourant est bien intégré professionnellement et socialement. Il ressort du dossier qu'il a toujours assuré sa propre indépendance financière, sans émarger à l'aide sociale, et qu'il n'a fait l'objet d'aucune poursuite. Son comportement, abstraction faite de l'illégalité de son séjour, n'a donné lieu à aucune plainte. Toutefois, aucun élément du dossier ne permet de retenir que cette intégration serait à ce point exceptionnelle qu'elle justifierait à elle seule une exemption des mesures de limitation. Le recourant a certes réalisé une ascension professionnelle appréciable puisque, simple aide de cuisine au départ, il exerce chez son employeur actuel d'importantes responsabilités. On ne saurait toutefois pour autant parler d'une carrière se situant tout à fait hors du commun: comme l'a justement relevé le Département, le recourant a su faire preuve de qualités qui lui ont valu la confiance de son employeur; or, on ne voit pas que le recourant ne puisse pas mettre à profit ces mêmes qualités et l'expérience acquise en cas de retour dans son pays d'origine. Au demeurant, le fait que le recourant, dans le cadre de ses activités sportives, se soit occupé de la formation de jeunes et qu'il l'ait fait à titre bénévole, si louable que soit ce comportement, ne saurait non plus justifier une exception aux mesures de limitation. 
Par ailleurs, rien ne permet de penser que le recourant aurait perdu tout contact avec son pays d'origine, au point qu'un retour dans celui-ci représenterait pour lui un véritable déracinement. Il est au contraire constant qu'il y a encore ses parents, son frère et sa soeur et y a vécu les années décisives de sa jeunesse et jusqu'à l'âge adulte. Il est certes probable qu'il se trouvera alors dans une situation économique sensiblement inférieure à ce qu'elle est dans notre pays, mais rien ne permet cependant de penser que cette situation serait sans commune mesure avec celle que connaissent ses compatriotes. On rappelle à cet égard que l'art. 13 lettre OLE n'a pas pour but de soustraire des étrangers aux conditions générales de leur pays d'origine. 
Pour le surplus, il peut être renvoyé aux considérants convaincants de la décision attaquée. 
3. 
Il résulte de ce qui précède que le recours, infondé, doit être rejeté. Succombant, le recourant doit supporter un émolument judiciaire (art. 156 al. 1 OJ). Il n'y a pas lieu d'allouer de dépens (art. 159 al. 1 OJ). 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
1. 
Le recours est rejeté. 
2. 
Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis à la charge du recourant. 
3. 
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant, au Département fédéral de justice et police ainsi qu'au Service de la population du canton de Vaud. 
Lausanne, le 6 décembre 2006 
Au nom de la IIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
Le président: Le greffier: