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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
4A_542/2008 
 
Arrêt du 3 mars 2009 
Ire Cour de droit civil 
 
Composition 
Mmes et MM. les Juges Klett, Présidente, Corboz, Rottenberg Liatowitsch, Kolly et Kiss. 
Greffière: Mme Godat Zimmermann. 
 
Parties 
Hôpitaux Universitaires de Genève, 
recourants, représentés par Me Michel Bergmann, 
 
contre 
 
X.________, 
intimé, représenté par Me Patrick Blaser et Me Rolf P. Steinegger. 
 
Objet 
décision incidente; frais et dépens d'appel; recevabilité du recours, 
 
recours contre l'arrêt de la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève du 17 octobre 2008. 
 
Faits: 
 
A. 
Le 18 décembre 2002, X.________, né le 10 mai 2002, a subi une greffe du foie aux Hôpitaux Universitaires de Genève (ci-après: les HUG). Un problème survenu lors de l'anesthésie a provoqué chez l'enfant des lésions neurologiques graves et irréversibles. 
 
Représenté par ses parents, X.________ a ouvert action contre les HUG en paiement de 17'004'267 fr. 
 
Par jugement du 29 novembre 2007, le Tribunal de première instance du canton de Genève a débouté les HUG de leurs incidents d'irrecevabilité et, au fond, a rejeté la demande de X.________. 
 
Statuant le 17 octobre 2008 sur appel du demandeur et appel incident des défendeurs, la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève a confirmé le jugement déféré «en tant qu'il a[vait] statué sur incident», l'a annulé pour le surplus et a renvoyé la cause au Tribunal de première instance pour instruction et nouvelle décision au sens des considérants; en outre, elle a condamné les HUG «en tous les dépens d'appel comprenant une indemnité de procédure de 4'000 fr., valant participation aux honoraires d'avocat de X.________». 
 
B. 
Les HUG interjettent un recours constitutionnel subsidiaire. Ils demandent au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt cantonal en tant qu'il les a condamnés «aux dépens, et plus particulièrement aux émoluments d'appel mis à charge de X.________, qui sont compris dans les dépens et qui s'élèvent à 96'003 fr.». Ils concluent ensuite, à titre principal, à ce qu'il soit dit et jugé que les dépens à verser par les HUG ne peuvent pas comprendre un émolument de justice que X.________ n'a pas payé; à titre subsidiaire, ils demandent que le sort des dépens d'appel soit réservé jusqu'au jugement au fond, ou que l'émolument de justice que les HUG peuvent être condamnés à payer n'excède pas 800 fr., ou encore que la cause soit renvoyée à l'autorité cantonale pour qu'elle statue à nouveau sur ledit émolument. Le montant de 96'003 fr. ne ressort pas de l'arrêt attaqué. Selon les recourants, il s'agit de l'émolument de mise au rôle requis de X.________ pour la procédure d'appel et versé par le Service de l'assistance judiciaire. En substance, les recourants font valoir que cet émolument est trop élevé et qu'il n'est pas dû à l'intimé dès lors que ce dernier n'a pas versé l'avance. 
Par ordonnance présidentielle du 15 décembre 2008, l'effet suspensif a été accordé au recours. 
 
L'intimé conclut, principalement, à l'irrecevabilité du recours et, subsidiairement, à son rejet. 
 
Parallèlement à la procédure devant le Tribunal fédéral, les HUG ont déposé une «opposition à taxe». Par arrêt du 30 janvier 2009, la Cour de justice a suspendu la procédure jusqu'au prononcé de l'arrêt du Tribunal fédéral. 
 
Considérant en droit: 
 
1. 
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 135 III 1 consid. 1.1 p. 3; 134 III 235 consid. 1 p. 236, 379 consid. 1 p. 381). 
 
1.1 Au fond, l'affaire mettant aux prises les parties a trait à la responsabilité de l'État pour des activités médicales, fondée sur le droit public cantonal; sa valeur litigieuse atteint 17'000'000 fr. Les décisions rendues dans le cadre d'un litige de cette nature peuvent, le cas échéant, faire l'objet d'un recours en matière civile, ce qui exclut le recours constitutionnel subsidiaire (art. 72 al. 2 let. b, art. 74 al. 1 let. b et art. 113 LTF; ATF 133 III 462 consid. 2.1; 133 III 446 consid. 3.1 p. 448). 
 
Se fiant à l'indication des voies de recours figurant dans l'arrêt attaqué, les recourants ont interjeté un recours constitutionnel subsidiaire. Rien n'empêche toutefois de convertir cette écriture en un recours en matière civile. 
 
1.2 Par l'arrêt attaqué, la cour cantonale a renvoyé la cause au juge de première instance pour instruction et nouvelle décision au fond. Il s'agit là d'une décision incidente qui ne porte ni sur la compétence, ni sur une demande de récusation (cf. art. 92 et 93 al. 1 LTF). Lorsque l'autorité de recours, comme en l'espèce, statue simultanément sur les dépens de la procédure suivie devant elle, ce prononcé accessoire est également une décision incidente, alors même qu'il porte sur des prétentions qui ne seront plus en cause par la suite (cf. ATF 117 Ia 251 consid. 1a p. 253; 122 I 39 consid. 1a/aa p. 42; 131 III 404 consid. 3.3 p. 407). 
 
Dans le cas présent, les recourants ne critiquent pas le renvoi de la cause au juge de première instance. Ils s'en prennent exclusivement au prononcé accessoire par lequel la Chambre civile les a condamnés à tous les dépens d'appel, étant précisé que ceux-ci comprennent à la fois les frais exposés dans la cause et une indemnité de procédure (art. 181 al. 1 de la loi de procédure civile du canton de Genève). Il convient dès lors d'examiner si cette décision incidente peut faire l'objet d'un recours immédiat sur la base de l'art. 93 al. 1 LTF, soit parce qu'elle peut causer un préjudice irréparable (let. a), soit parce que l'admission du recours peut conduire immédiatement à une décision finale permettant d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse (let. b). 
1.2.1 L'exigence du préjudice irréparable correspond à celle que posait l'art. 87 al. 2 OJ pour le recours de droit public contre une décision incidente, alors que la seconde condition alternative reprend celle qui figurait à l'art. 50 al. 1 OJ pour le recours en réforme contre une décision incidente (ATF 133 III 629 consid. 2.3 p. 632 et consid. 2.4 p. 633). 
 
Sous l'empire de l'ancien droit de procédure, le Tribunal fédéral a jugé que le prononcé sur les frais et dépens figurant dans le dispositif d'une décision incidente n'était pas de nature à causer un préjudice irréparable à la partie qui avait succombé sur ce point. En effet, si le juge du fond rendait une décision défavorable pour l'intéressé, celui-ci pouvait attaquer devant le Tribunal fédéral la décision incidente touchant les frais et dépens en même temps que la décision finale sur le fond. En outre, si cette partie n'avait plus d'intérêt à recourir sur le fond, parce qu'elle avait obtenu gain de cause au terme de la procédure, elle pouvait malgré tout s'en prendre au prononcé sur les frais et dépens par un recours de droit public formé contre ce prononcé, une fois la décision finale rendue (ATF 122 I 39 consid. 1 a/bb p. 42/43; 117 Ia 251 consid. 1b p. 254/255). La partie condamnée aux frais et dépens d'une procédure incidente n'en subissait pas de désavantage. En effet, les décisions préjudicielles et incidentes, dont celles sur les frais et dépens, contre lesquelles un recours immédiat était exclu ou n'avait pas été utilisé, n'entraient en force qu'avec la décision finale au fond; jusqu'à ce moment-là, elles ne valaient pas titre de mainlevée définitive (ATF 131 III 404 consid. 3.3 p. 407). Un recours de droit public immédiat contre le prononcé sur les frais et dépens contenu dans une décision incidente était ainsi exclu, faute de préjudice irréparable. 
 
Toujours sous l'ancien droit, lorsque, dans une contestation civile susceptible de recours en réforme, une décision incidente de renvoi était rendue et que le dispositif contenait une répartition des frais et dépens, le prononcé accessoire sur ce dernier point ne pouvait à lui seul faire l'objet d'un recours immédiat; les frais et dépens ne pouvaient être contestés immédiatement que dans le cadre d'un recours en réforme contre la décision incidente sur le point principal, lorsque cette voie de droit était exceptionnellement recevable aux conditions de l'art. 50 al. 1 OJ (ATF 131 III 404 consid. 3.2 p. 406/407). 
1.2.2 La LTF a repris, pour l'essentiel, la réglementation restrictive de l'ancien droit en matière de recours contre les décisions préjudicielles et incidentes. Cependant, si une décision préjudicielle ou incidente peut, comme par le passé, être attaquée par un recours contre la décision finale lorsque le recours immédiat n'est pas ouvert ou qu'un tel recours n'a pas été déposé, l'art. 93 al. 3 LTF limite désormais cette possibilité aux cas où la décision préjudicielle ou incidente influe sur le contenu de la décision finale. 
 
A cet égard, la nouvelle réglementation correspond en substance à celle de l'ancien droit. Pour ce qui concerne la limitation aux décisions influant sur le contenu de la décision finale, il est simplement relevé, dans le Message, que la condition sera remplie lorsque la décision incidente concerne l'admission d'un moyen de preuve, mais non lorsqu'une mesure provisionnelle est ordonnée (Message du 28 février 2001 concernant la révision totale de l'organisation judiciaire fédérale, FF 2001 4132 ch. 4.1.4.1). Selon la doctrine, la règle correspond à l'exigence d'un intérêt actuel et pratique à statuer, telle que l'ancien droit la connaissait déjà (Yves Donzallaz, Loi sur le Tribunal fédéral, Commentaire, 2008, n° 3404 p. 1265; Felix Uhlmann, in Basler Kommentar, Bundesgerichtsgesetz, 2008, n° 12 ad art. 93; Bernard Corboz, Introduction à la nouvelle loi sur le Tribunal fédéral, SJ 2006 II p. 326). 
Le législateur n'a manifestement pas voulu modifier l'ancienne réglementation et ouvrir une possibilité de recours immédiat que l'ancien droit excluait. Au demeurant, introduire une telle modification, pour laquelle aucune nécessité n'apparaît, irait à l'encontre de l'un des buts principaux de la nouvelle loi, soit la décharge du Tribunal fédéral. En outre, en matière de décision incidente ou préjudicielle, il ne serait pas judicieux d'autoriser un recours immédiat contre le prononcé accessoire sur les frais et dépens, alors qu'une telle voie de droit n'existe pas contre le prononcé principal ou n'a pas été utilisée contre celui-ci. Nonobstant le libellé de la réserve formulée à l'art. 93 al. 3 LTF, il y a lieu d'admettre que la décision sur les frais et dépens d'une procédure de recours incidente peut être attaquée avec le jugement final ou, si ce dernier n'est pas remis en cause, dès le moment où il a été prononcé. La jurisprudence rendue en la matière sous l'ancien droit conserve dès lors toute sa portée. 
 
En conclusion, le prononcé accessoire sur les frais et dépens, contenu dans une décision incidente, n'est pas susceptible de causer un préjudice irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF. Il peut faire l'objet d'un recours immédiat au Tribunal fédéral uniquement dans le cadre d'un recours contre la décision incidente sur le point principal, à supposer qu'une telle voie de droit soit ouverte selon l'art. 93 al. 1 LTF. A défaut, il n'est possible de contester la répartition des frais et dépens que dans un recours dirigé contre la décision finale. 
 
En l'espèce, les recourants n'ont pas recouru contre la décision incidente sur le renvoi de la cause au juge précédent, dont il n'est du reste pas établi qu'elle pouvait faire l'objet d'un recours immédiat. Il s'ensuit que le recours dirigé contre le prononcé accessoire sur les dépens est irrecevable. 
 
2. 
Les recourants, qui succombent, prendront à leur charge les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF) et verseront des dépens à l'intimé (art. 68 al. 1 et 2 LTF). 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
 
1. 
Le recours est irrecevable. 
 
2. 
Les frais judiciaires, arrêtés à 5'000 fr., sont mis à la charge des recourants. 
 
3. 
Une indemnité de 6'000 fr., à payer à titre de dépens à l'intimé, est mise à la charge des recourants. 
 
4. 
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties et à la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève. 
 
Lausanne, le 3 mars 2009 
 
Au nom de la Ire Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
La Présidente: La Greffière: 
 
Klett Godat Zimmermann