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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
6B_714/2009 
 
Arrêt du 19 novembre 2009 
Cour de droit pénal 
 
Composition 
MM. les Juges Favre, Président, 
Wiprächtiger et Mathys. 
Greffier: M. Oulevey. 
 
Parties 
X.________, 
recourant, 
 
contre 
 
Ministère public du canton de Vaud, 1014 Lausanne, 
intimé. 
 
Objet 
Refus de la libération conditionnelle d'une mesure thérapeutique institutionnelle, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de cassation pénale, du 3 juillet 2009. 
 
Faits: 
 
A. 
A.a Du 26 mai 2000 au 20 février 2001, X.________ s'est rendu coupable en plusieurs occasions de vol, tentative de vol, crime manqué de vol, dommages à la propriété, utilisation frauduleuse d'un ordinateur, menaces, violation de domicile et contravention à la loi fédérale sur les stupéfiants. Cette activité délictueuse est en rapport avec un trouble mental. À l'époque, les experts psychiatres ont diagnostiqué une schizophrénie paranoïde continue ainsi qu'une dépendance à des substances psycho-actives. 
 
Par jugement du 14 août 2003, le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de Lausanne a condamné X.________ à quatorze mois d'emprisonnement ferme, sous déduction de 385 jours de détention préventive, révoqué les sursis dont étaient assorties diverses peines, d'un total de neuf mois et trois jours d'emprisonnement après déduction de vingt-sept jours de détention préventive, prononcées antérieurement contre X.________ pour des infractions de même nature et suspendu l'exécution de l'ensemble de ces peines au profit d'un internement au sens de l'art. 43 ch. 1 al. 2 aCP. 
A.b Dans un premier temps, X.________ a reçu ses soins psychiatriques en milieu pénitentiaire. Dans un rapport établi en 2007, la Commission interdisciplinaire concernant les délinquants nécessitant une prise en charge psychiatrique (ci-après: CIC) a noté qu'il évoluait favorablement et préconisé son placement dans un établissement médico-social (ci-après: EMS). Le 20 novembre 2007, X.________ a été placé à l'EMS Sylvabelle, où il réside toujours actuellement. 
A.c Le 26 novembre 2007, procédant à l'examen prescrit à l'art. VI ch. 2 al. 2 de la loi fédérale du 13 décembre 2002 modifiant la partie générale du code pénal (RO 2006 3459 3535), telle que modifiée par la loi fédérale du 24 mars 2006 (RO 2006 3539 3544), le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de Lausanne a ordonné le placement institutionnel de X.________, en application de l'art. 59 CP, en lieu et place de l'internement au sens de l'art. 43 ch. 1 al. 2 aCP. 
A.d Le 1er décembre 2008, l'Office d'exécution des peines a requis le Juge d'application des peines du canton de Vaud de statuer sur une éventuelle libération conditionnelle de X.________, en recommandant un refus. Le ministère public a préavisé dans le même sens. 
 
Par jugement du 12 juin 2009, le juge d'application des peines a refusé la libération conditionnelle à X.________. 
 
B. 
Par arrêt du 3 juillet 2009, la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud a confirmé ce refus. 
 
C. 
Par mémoire personnel du 27 août 2009, X.________ recourt au Tribunal fédéral contre cet arrêt, en concluant à sa réforme en ce sens qu'il soit d'une manière ou d'une autre remis en liberté. Il fait notamment valoir qu'il est privé de liberté depuis plus de sept ans. Il craint que son placement en institution ne se transforme en "internement à vie". 
 
À titre préalable, il demande à être pourvu d'un avocat d'office. 
 
Le Ministère public du canton de Vaud conclut au rejet du recours. La cour cantonale se réfère aux motifs de son arrêt. 
 
Considérant en droit: 
 
1. 
Aux termes de l'art. 62d al. 1 CP, qui s'applique lorsque le juge a ordonné une mesure thérapeutique institutionnelle, l'autorité compétente examine, d'office ou sur demande, si l'auteur peut être libéré conditionnellement ou si la mesure doit être levée; elle prend une décision à ce sujet au moins une fois par année; au préalable, elle entend l'auteur et demande un rapport à la direction de l'établissement chargé de l'exécution de la mesure. 
 
1.1 Sous l'empire des anciennes dispositions générales du code pénal, l'art. 45 ch. 1 al. 3 aCP exigeait aussi qu'à l'occasion de l'examen annuel de la libération conditionnelle ou à l'essai des mesures ordonnées en application des art. 42, 43 ou 44 aCP, un rapport soit requis "de la direction de l'établissement". Dans le cadre de mesures thérapeutiques, il fallait entendre par là un rapport du médecin traitant, expliquant le déroulement et les résultats du traitement (ATF 128 IV 241 consid. 3.2 p. 245 et les arrêts cités). Il n'y a pas de raison de comprendre autrement l'art. 62d al. 1, 3ème phrase, CP (cf. HEER, Commentaire bâlois, 2ème éd. 2007, n° 8 ad art. 62d CP; ROTH/THALMANN, Commentaire romand, n° 6 ad art. 62d CP). Le rapport exigé par cette dernière disposition doit donc également émaner du médecin traitant, dresser un bilan du traitement, comporter les éléments d'appréciation médicaux utiles à l'évaluation de la dangerosité actuelle de l'auteur et se prononcer sur l'évolution probable de ces éléments en cas de poursuite du traitement selon les modalités les plus indiquées. 
 
1.2 Conformément à l'art. 62 al. 1 CP, l'auteur doit être libéré conditionnellement de l'exécution institutionnelle de la mesure dès que son état justifie qu'on lui donne l'occasion de faire ses preuves en liberté. La loi n'exige pas sa guérison, mais une évolution ayant eu pour effet d'éliminer ou de réduire dans une mesure suffisante le risque de nouvelles infractions. Il n'est donc pas nécessaire que l'auteur soit mentalement normal; il suffit qu'il ait appris à vivre avec ses déficits, de manière que l'on puisse poser un pronostic favorable quant à son comportement futur (HEER, op. cit., nos 6 avant l'art. 56 CP et 21 ad art. 62 CP; DUPUIS ET AL., Code pénal I, 2008, n° 21 ad art. 62 CP). 
 
Ce pronostic doit être posé en tenant compte du principe de la proportionnalité (art. 5 al. 2 Cst. et 56 al. 2 CP). D'une part, il doit prendre en considération l'imminence et la gravité du danger, ainsi que la nature et l'importance du bien juridique menacé. Si l'auteur met en péril exclusivement des biens tels que la propriété ou le patrimoine, l'imminence et la gravité de la lésion qu'il risque de causer n'ont pas besoin d'être aussi faibles que s'il mettait en danger des biens juridiques de grande valeur, tels que la vie ou l'intégrité corporelle (cf. ATF 127 IV 1 consid. 2a p. 4 s. et les arrêts cités). D'autre part, le pronostic doit tenir compte de la durée de la privation de liberté déjà subie par l'auteur (en ce sens: ROTH/THALMANN, op. cit., n° 26 ad art. 62 CP). Certes, cette circonstance est sans pertinence lorsque la dangerosité actuelle de l'auteur atteint le degré requis pour justifier l'internement chez un individu inaccessible à un traitement médical. En effet, la loi ne limite pas l'internement dans le temps et n'autorise la libération conditionnelle d'un interné que s'il est hautement vraisemblable que celui-ci se comportera correctement en liberté (cf. art. 64a al. 1 CP; HEER, op. cit., n° 13 ad art. 64a CP). Il est ainsi manifeste que, dans la pesée des intérêts opérée par le législateur, le droit à la liberté personnelle d'un auteur qui présente une dangerosité susceptible de justifier un internement ne l'emporte jamais sur l'intérêt public à la sécurité des personnes. La durée de la privation de liberté déjà subie par l'auteur ne saurait davantage être prise en considération tant qu'elle ne dépasse pas celle de la peine privative de liberté avec laquelle, conformément à l'art. 57 CP, la mesure thérapeutique institutionnelle a été prononcée. En effet, condamné à une peine privative de liberté, l'auteur ne peut pas, pendant la durée de sa peine, opposer à la société un droit à la liberté. Mais, lorsque l'auteur ne présente pas une dangerosité susceptible de justifier un internement et qu'il a déjà été privé de liberté pendant un temps supérieur à la durée de sa peine, son droit à la liberté entre en ligne de compte. En pareille situation, plus la durée de la privation de liberté que l'auteur a déjà subie dépasse celle de sa peine, plus la probabilité et la gravité de nouveaux crimes ou délits doivent être élevées pour que l'on puisse refuser à l'intéressé l'occasion de faire ses preuves en liberté. 
 
1.3 Si l'autorité compétente parvient à la conclusion que l'auteur ne peut pas être libéré conditionnellement, elle doit examiner s'il y a lieu de lever la mesure thérapeutique institutionnelle. 
 
Conformément à l'art. 56 al. 6 CP, une mesure dont les conditions ne sont plus remplies doit être levée. Comme son prononcé suppose qu'elle soit propre à détourner l'auteur de la commission de nouvelles infractions en relation avec son grave trouble mental (cf. art. 59 al. 1 let. b CP), une mesure thérapeutique institutionnelle ne peut dès lors être maintenue que si elle conserve une chance de succès, ainsi que le prévoit du reste l'art. 62c al. 1 let. a CP. Au contraire de l'internement, qui consiste principalement à neutraliser l'auteur, la mesure thérapeutique institutionnelle cherche à réduire le risque de récidive par une amélioration des facteurs inhérents à l'intéressé (cf. BAECHTOLD, Exécution des peines, 2008, p. 316). Il s'ensuit que, pour qu'une mesure thérapeutique institutionnelle puisse être maintenue, c'est le traitement médical, non la privation de liberté qui lui est associée, qui doit conserver une chance de succès du point de vue de la prévention spéciale. Une mesure thérapeutique institutionnelle ne saurait être maintenue au seul motif que la privation de liberté qu'elle comporte a pour effet d'empêcher l'auteur de commettre de nouvelles infractions. Sinon, ne cherchant plus à réduire le risque de récidive par le traitement de l'auteur, mais uniquement par la neutralisation de celui-ci, elle ne se différentierait plus de l'internement, mesure qui n'est admissible qu'aux conditions prévues à l'art. 64 CP. Certes, la notion de traitement médical doit être entendue largement. Même la simple prise en charge de l'auteur dans un milieu structuré et surveillé accompagnée d'un suivi psychothérapeutique relativement lointain constitue un traitement, si elle a pour effet prévisible d'améliorer l'état de l'intéressé de manière à permettre, à terme, sa réinsertion dans la société (cf. HEER, op. cit., n° 66 ad art. 59 CP). Mais, lorsqu'il n'y a plus lieu de s'attendre à une amélioration de l'état de l'auteur, l'autorité compétente doit lever la mesure, en prenant au besoin une ou plusieurs des dispositions prévues à l'art. 62c al. 3 à 6 CP. 
 
1.4 En l'espèce, le recourant, qui a été condamné à un total de deux ans de privation de liberté, est détenu ou placé en milieu institutionnel depuis plus de sept ans. Certes, il ressort du dossier qu'il lui est arrivé, à l'époque où il consommait massivement des stupéfiants, de se montrer agressif envers des personnes, notamment en mordant un agent de sécurité, et de se comporter de manière dangereuse pour les tiers, en lançant des objets par la fenêtre de son appartement. En une occasion, il a même proféré, sans intention de les mettre à exécution, des menaces de mort contre des médecins. Mais l'essentiel des infractions qui lui ont été reprochées consiste en des crimes et délits contre le patrimoine. Pour intolérables qu'ils soient, ses actes délictueux sont donc d'une gravité modérée. Il s'ensuit, eu égard à la durée de son placement en milieu pénitentiaire ou institutionnel, que l'on ne saurait lui refuser l'occasion de faire ses preuves en liberté au motif qu'il ne présente pas les mêmes garanties de non réitération que celles généralement exigées. 
 
Les infractions que le recourant a commises par le passé sont toutes liées à sa toxicomanie, les unes parce qu'il les a commises sous l'emprise de stupéfiants, les autres parce qu'il les a perpétrées dans le but de financer sa consommation. Il est dès lors raisonnable de prévoir que, libéré conditionnellement, le recourant se comportera bien s'il s'abstient de toute consommation de drogue. Il est vrai que certaines des déclarations qu'il a faites lors de son audition par le juge d'application des peines le 5 mars 2009, ainsi que sa fugue du 12 avril 2008, au cours de laquelle il a consommé de l'héroïne, de la cocaïne et du cannabis, incitent à penser que le recourant présente un risque de récidive relativement élevé s'agissant de la consommation de stupéfiants. Mais ni les rapports des médecins traitants, ni l'arrêt attaqué, ne donnent de précisions sur la nature des actes que pourrait commettre le recourant s'il consommait à nouveau des stupéfiants. En particulier, ils ne permettent pas de déterminer si, dans l'hypothèse d'une récidive de contraventions à la loi fédérale sur les stupéfiants, il est à prévoir que le recourant recommencerait rapidement à perpétrer des crimes et délits contre le patrimoine, voire des actes susceptibles de mettre en danger des personnes - tel n'a pas été le cas au cours de la fugue du 12 avril 2008, qui s'est achevée par le retour volontaire de l'intéressé à l'EMS La Sylvabelle - ou si, au contraire, il est à prévoir que la réintégration du recourant en milieu institutionnel pourrait, au besoin, être ordonnée avant que la situation n'évolue jusque là. Or, s'il apparaissait que cette dernière hypothèse correspond à ce qui est raisonnablement prévisible, il y aurait alors lieu, compte tenu de la durée de la privation de liberté que le recourant a déjà subie, de donner à celui-ci la possibilité de faire ses preuves en liberté, en lui accordant, éventuellement pour prendre effet après un temps de préparation adapté, une liberté conditionnelle assortie de l'obligation de suivre un traitement ambulatoire, de règles de conduites et d'une assistance de probation. 
 
Aussi convient-il d'admettre le recours, d'annuler l'arrêt attaqué et de renvoyer la cause à la cour cantonale pour complément d'instruction et nouvelle décision sur la possibilité d'une libération conditionnelle. Si la cour cantonale parvient à la conclusion que celle-ci ne peut être accordée au recourant, elle examinera si le traitement en cours peut encore apporter un bénéfice pour la réinsertion future du recourant et, sur cette base, elle statuera expressément sur une éventuelle levée de la mesure. 
 
2. 
Le présent arrêt sera rendu sans frais (art. 66 al. 4 LTF). La demande d'assistance judiciaire n'a dès lors plus d'objet. 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
 
1. 
Le recours est admis, l'arrêt entrepris annulé et la cause renvoyée à la cour cantonale pour nouvelle décision. 
 
2. 
Il n'est pas prélevé de frais judiciaires. 
 
3. 
La demande d'assistance judiciaire n'a plus d'objet. 
 
4. 
Le présent arrêt est communiqué aux parties, ainsi qu'au Juge d'application des peines et à la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
 
Lausanne, le 19 novembre 2009 
 
Au nom de la Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
Le Président: Le Greffier: 
 
Favre Oulevey