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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
                 
 
 
5A_1013/2020  
 
 
Arrêt du 28 avril 2021  
 
IIe Cour de droit civil  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Herrmann, Président, 
Marazzi et von Werdt. 
Greffière : Mme de Poret Bortolaso. 
 
Participants à la procédure 
1. A.________, 
2. B.________, 
3. C.________, 
4. D.________, 
5. E.________, 
tous représentés par Me Olivier Nicod, avocat, 
recourants, 
 
contre  
 
F.________, 
représentée par Me Pierre-André Béguin, avocat, 
intimée. 
 
Objet 
fourniture de sûretés (partage successoral), 
 
recours contre l'arrêt de la Chambre des recours civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 6 octobre 2020 (JO14.044018-201126 231). 
 
 
Faits :  
 
A.   
A la suite du décès de G.________ le 1er octobre 2010 à Lausanne, A.________, B.________, C.________, D.________ et E.________ (ci-après: les demandeurs) ont ouvert contre F.________ (ci-après: la défenderesse) un " procès " en partage successoral le 29 octobre 2014 devant le président du Tribunal civil de l'arrondissement de Lausanne (ci-après: le président). 
La défenderesse a formé une demande reconventionnelle (art. 105 al. 2 LTF; premier jugement, p. 2). 
 
A.a. Dans le contexte d'une action ouverte le 1er mars 2017 par H.________, avocat au Royaume-Uni, et visant à faire interdiction aux demandeurs d'utiliser certains documents en procédure, notamment en Suisse, la défenderesse a été astreinte par décisions de la Cour royale de Jersey des 25 septembre 2018 et 1er mars 2019 à verser au précité les montants de 5'507,09 GBP et 100'679,67 GBP (dépens pour la modification de l'acte introductif d'instance, respectivement les frais d'avocat relatifs à une décision incidente limitée à la compétence).  
La défenderesse n'a pas versé le montant requis - au total 106'851,93 GBP plus intérêts - dans le délai imparti au 24 mai 2019. 
 
A.b. Par ordonnances des 22 mars et 6 septembre 2019, le Tribunal de première instance de Bruxelles a prononcé l'exequatur des décisions précitées de la Cour royale de Jersey ainsi que d'une lettre du greffe de la Cour royale de Jersey astreignant la défenderesse au paiement des sommes précitées en faveur de H.________.  
Les 3 et 31 octobre 2019, la défenderesse a saisi le Tribunal de première instance de Bruxelles par citations en tierce opposition, aux termes desquelles elle a conclu à l'annulation des ordonnances des 22 mars et 6 septembre 2019 et au rejet des requêtes d'exequatur déposées par H.________. 
Le 3 mars 2020, H.________ a procédé au séquestre conservatoire de l'immeuble du domicile de la défenderesse en Belgique. 
Le 29 juin 2020, la défenderesse a cantonné un montant de 148'107,71 EUR en mains de Me I.________, huissier de justice à Bruxelles, aux fins de suspendre l'exécution forcée des ordonnances d'exequatur du Tribunal de première instance de Bruxelles des 22 mars et 6 septembre 2019, du jugement de la Cour royale de Jersey du 25 septembre 2018 et d'une ordonnance d'exequatur rendue entre elle-même et H.________. 
Dit montant a été consigné le 1er juillet 2020 auprès de la Caisse des Dépôts et Consignation de Bruxelles. 
 
B.   
Par requête de sûretés du 12 août 2019 déposée devant le président, les demandeurs ont conclu en substance à ce que la défenderesse soit astreinte à fournir des sûretés d'un montant minimum de 900'000 fr. pour leurs dépens et débours prévisibles dans le cadre du procès en partage successoral. 
La défenderesse a préalablement conclu à la suspension du prononcé d'une décision jusqu'au jugement définitif des juridictions belges sur la reconnaissance et le caractère exécutoire des décisions dont se prévalaient les demandeurs à l'appui de leur requête de sûretés en garantie de dépens; principalement, elle a conclu au rejet de la requête du 12 août 2019. 
Dite requête a été rejetée par prononcé du 22 juillet 2020. 
Par arrêt du 6 octobre 2020, la Chambre des recours civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud a rejeté le recours formé par les demandeurs contre cette décision et confirmé celle-ci. 
 
C.   
Agissant le 4 décembre 2020 par la voie du recours en matière civile au Tribunal fédéral, A.________, B.________, C.________, D.________ et E.________ (ci-après: les recourants) concluent à l'annulation de l'arrêt cantonal et principalement à sa réforme en ce sens que F.________ (ci-après: l'intimée) est astreinte à fournir des sûretés d'un montant de 900'000 fr. afin de garantir leurs dépens et débours prévisibles; subsidiairement, ils réclament le renvoi de la cause au président, plus subsidiairement encore à la cour cantonale, pour nouvelle décision dans le sens des considérants. 
Des déterminations n'ont pas été demandées. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
 
1.1. L'autorité précédente a rejeté une demande de sûretés en garantie des dépens (  cautio judicatum solvi), rendant ainsi une décision incidente dont les conditions de recours sont déterminées par la nature du litige principal: le différend est ici de nature civile (art. 72 al. 1 LTF); d'ordre pécuniaire, il excède le seuil de 30'000 fr. prescrit par la loi (art. 51 al. 1 let. c LTF en lien avec l'art. 74 al. 1 let. b LTF) selon les indications de la cour cantonale, autorité cantonale supérieure ayant statué sur recours (art. 75 LTF). Les recourants, qui ont qualité pour recourir (art. 76 al. 1 LTF), ont agi à temps (art. 100 al. 1 LTF).  
 
1.2. La décision incidente attaquée doit être de nature à causer un préjudice irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF. Selon la jurisprudence, tel est le cas lorsque la partie recourante s'expose à un dommage de nature juridique qu'une décision ultérieure qui lui serait favorable ne fera pas disparaître complètement; un inconvénient seulement matériel, résultant par exemple d'un accroissement de la durée et des frais de la procédure, est insuffisant. La partie recourante doit démontrer en quoi elle se trouve menacée d'un préjudice juridique irréparable (sauf s'il est manifeste); à ce défaut, son recours est irrecevable (ATF 144 III 475 consid. 1.2; arrêt 4A_269/2020 du 18 août 2020 consid. 1 et les références citées).  
Le Tribunal fédéral a déjà eu l'occasion de juger que le refus (total ou partiel) d'ordonner des sûretés en garantie des dépens prévue par les art. 99 à 101 CPC, lequel prive la partie attraite en justice d'une protection légalement prévue, est susceptible de constituer un préjudice d'ordre juridique irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF (parmi plusieurs: arrêts 5A_244/2020 du 27 août 2020 consid. 1.2.1; 4A_121/2018 du 10 septembre 2018 consid. 5 et les arrêts cités). Il s'ensuit que, devant le Tribunal fédéral, cette décision incidente est en principe susceptible d'un recours séparé conformément à cette disposition légale. 
 
2.  
 
2.1. Le recours en matière civile peut être formé pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 s. LTF. Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Cela étant, eu égard à l'exigence de motivation contenue à l'art. 42 al. 1 et 2 LTF, il n'examine en principe que les griefs soulevés (ATF 142 III 364 consid. 2.4 et les références). Le recourant doit par conséquent discuter les motifs de la décision entreprise et indiquer précisément en quoi il estime que l'autorité précédente a méconnu le droit (ATF 142 I 99 consid. 1.7.1; 142 III 364 consid. 2.4 et la référence).  
 
2.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF); le recourant ne peut critiquer les constatations de fait que si elles ont été établies de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF, et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF). Le recourant qui entend se plaindre d'un établissement manifestement inexact - c'est-à-dire arbitraire (art. 9 Cst.; ATF 144 II 246 consid. 6.7; 143 I 310 consid. 2.2 et la référence) - des faits doit se conformer au principe d'allégation, ce qui implique d'invoquer expressément et de motiver de façon claire et détaillée un tel grief (art. 106 al. 2 LTF; ATF 146 IV 114 consid. 2.1; 142 II 369 consid. 2.1; 142 III 364 consid. 2.4).  
 
3.   
Il s'agit avant tout de préciser que l'obligation de fournir des sûretés en garantie des dépens incombe au demandeur exclusivement. Le défendeur qui agit reconventionnellement, comme ici l'intimée (art. 105 al. 2 LTF), doit néanmoins y être assimilé (parmi plusieurs: TAPPY, in Commentaire romand, CPC, 2e éd. 2019, n° 7 ad art. 99 CPC et les références; STOUDMANN, in Petit commentaire Code de procédure civile, 2020, n° 3 ad art. 99 CPC; RÜEGG/RÜEGG, in Basler Kommentar, 3e éd. 2017, n° 4 ad art. 99 CPC; URWYLER/GRÜTTER, in Brunner et al. (éd.), Schweizerische Zivilprozessordnung Kommentar, 2e éd. 2016, n° 3 ad art. 99 CPC; TREZZINI, in Commentario pratico al Codice di diritto processuale civile svizzeo, Volume I, 2e éd. 2017, n° 3 ad art. 99 CPC). 
 
4.   
Les recourants invoquent l'arbitraire dans l'établissement des faits et reprochent à la cour cantonale d'avoir mal appliqué l'art. 99 al. 1 let. c CPC. 
 
4.1. Dans une première motivation, la cour cantonale a relevé que la créance de dépens sur laquelle s'appuyaient les demandeurs pour requérir de la défenderesse la fourniture de sûretés en garantie des dépens était fondée sur des décisions étrangères. Une procédure de reconnaissance et d'exécution était toujours en cours en Belgique et aucune procédure similaire n'avait été introduite en Suisse. L'on ne pouvait ainsi considérer que dite créance était exigible, condition requise par l'art. 99 al. 1 let. c CPC pour obtenir la fourniture des sûretés.  
 
4.1.1. Les recourants reprochent d'abord à l'autorité cantonale de s'être arbitrairement écartée de l'état de fait retenu par le premier juge en refusant de retenir le caractère exigible de la créance de dépens sur laquelle ils fondent leur requête de sûretés. Ils estiment ensuite que la reconnaissance en Suisse des décisions étrangères ne saurait être un préalable nécessaire à cette exigibilité, précisant au demeurant que les décisions, rendues à Jersey étaient parfaitement valables et reconnaissables en Suisse.  
 
4.1.2. Les sûretés en garantie des dépens doivent être fournies lorsque le demandeur est débiteur de frais d'une procédure antérieure (art. 99 al. 1 let. c CPC); peu importe que ceux-ci soient dus au défendeur ou à un tiers (cf. parmi plusieurs: TAPPY, op. cit., n° 36 ad art. 99 CPC; STOUDMANN, op. cit., n° 29 ad art. 99 CPC; SUTER/VON HOLZEN, in Sutter-Somm et al. (éd.), Kommentar zur Schweizerischen Zivilprozessordnung (ZPO), 3e éd. 2016, n° 32 ad art. 99 CPC; URWYLER/GRÜTER, op. cit., n° 12 ad art. 99 CPC).  
La procédure antérieure au sens de l'art. 99 al. 1 let. c CPC doit être close (arrêt 5A_506/2016 du 6 février 2017 consid. 2.1.2 et les références citées;  contra  STAEHELIN, in Staehelin et al. (éd.), Zivilprozessrecht, Unter Einbezug des Anwaltsrechts und des internationalen Zivilprozessrechts, éd. 2019, § 16 n. 26c), la décision rendue étant ainsi définitive et exécutoire et les frais qu'elle arrête exigibles (STERCHI, in Berner Kommentar, ZPO, 2012, n° 26 ad art. 99 CPC; RÜEGG/RÜEGG, op. cit., n° 16 ad art. 99 CPC; URWYLER/GRÜTER, op. cit., n° 12 ad art. 99 PC; SCHMID, Kurzkommentar Schweizerische Zivilprozessordnung, 2e éd. 2014, n° 7 ad art. 99 CPC; ZOTSANG DHEDEN, Prozesskosten nach der Schweizerischen Zivilprozessordnung, 2015, p. 134). La procédure peut s'être déroulée en Suisse ou à l'étranger (parmi plusieurs auteurs: STOUDMANN, op. cit., n° 29 ad art. 99 CPC; STAEHELIN, op. cit., ibid.; RÜEGG/RÜEGG, op. cit., n° 16 ad art. 99 CPC; SCHMID, op. cit., n° 11 ad art. 99 CPC). Dans cette dernière hypothèse, le jugement étranger doit néanmoins être exécutoire et pouvoir être reconnu en Suisse (STOUDMANN, op. cit., ibid.; SCHMID, op. cit., ibid.).  
 
4.1.3. Contrairement à ce qu'affirment les recourants, l'exigibilité de la créance litigieuse ne ressort ni du premier jugement - dite décision relevant expressément que ladite créance faisait actuellement l'objet d'une procédure en Belgique (premier jugement, p. 8) -, ni des faits de l'arrêt attaqué. Aucune contradiction entre ceux-ci et le raisonnement cantonal n'est d'ailleurs à relever: l'état de fait de la décision querellée indique uniquement que la défenderesse a été " condamnée à payer à H.________ les montants de GBP 5'507,09 et GBP 100'679,67 " et que " la Cour royale de Jersey a imparti à la défenderesse un délai au 24 mai 2019 pour verser le montant total de GBP 106'851,93 plus intérêts ". L'exigibilité de dite créance ne saurait se déduire de ces seules constatations factuelles, si bien que la question du caractère reconnaissable et exécutoire en Suisse des décisions de la Cour royale de Jersey ne se pose même pas.  
 
4.2. Dans une seconde motivation, l'autorité précédente a estimé que le cantonnement effectué par la défenderesse dans le cadre de la procédure belge avait valeur de sursis, en sorte que les frais en question ne pouvaient plus être considérés comme exigibles au sens de cette dernière disposition.  
Il n'y a pas lieu d'examiner le bien-fondé de cette motivation, également critiquée par les recourants (ATF 142 III 364 consid. 2.4 et les références; 139 II 233 consid. 3.2), dès lors que la première, conforme au droit, suffit à sceller le sort du litige. 
 
5.   
La cour cantonale a par ailleurs jugé qu'il n'y avait pas d'indices permettant de considérer qu'il existait un risque considérable que les dépens ne soient pas versés au sens de l'art. 99 al. 1 let. d CPC et refusé d'ordonner la garantie requise sur ce dernier fondement. Les recourants n'invoquent toutefois aucune violation de cette disposition; il n'est donc pas nécessaire de s'y arrêter. 
 
6.   
Le recours est rejeté aux frais de ses auteurs, solidairement entre eux (art. 66 al. 1 et 5 LTF). Il n'y a pas lieu d'attribuer une indemnité de dépens en faveur de l'intimée dès lors que celle-ci n'a pas été invitée à se déterminer. 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est rejeté. 
 
2.   
Les frais judiciaires, arrêtés à 9'000 fr., sont mis à la charge des recourants solidairement entre eux. 
 
3.   
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Chambre des recours civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
 
 
Lausanne, le 28 avril 2021 
 
Au nom de la IIe Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Herrmann 
 
La Greffière : de Poret Bortolaso