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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
5A.2/2007 /frs 
 
Arrêt du 15 juin 2007 
IIe Cour de droit civil 
 
Composition 
MM. les Juges Raselli, Président, 
Meyer et Marazzi. 
Greffière: Mme Rey-Mermet. 
 
Parties 
Office fédéral de la Justice, Division principale du droit privé, 
recourant, 
 
contre 
 
A.________, 
intimé, représenté par Me Pierre Gabus, avocat, 
Tribunal administratif du canton de Genève, case postale 1956, 1211 Genève 1. 
 
Objet 
droit foncier rural, autorisation de morcellement, 
 
recours de droit administratif contre l'arrêt du Tribunal administratif du canton de Genève du 28 novembre 2006. 
 
Faits : 
A. 
A.________, B.________, C.________ et D.________ sont copropriétaires, sur le territoire de la commune de X.________, de la parcelle n° 1, feuille 25, d'une superficie de 16'179 m2. Située en zone agricole, cette parcelle comporte deux habitations, un dépôt, un bâtiment à caractère industriel qui abrite une entreprise de serrurerie et de construction de machines agricoles ou industrielles ainsi qu'un hangar. Ce dernier bâtiment est utilisé en partie comme couvert à machines par l'entreprise de serrurerie. Pour le reste, il est loué à des tiers qui l'emploient, pour l'un, comme dépôt et pour l'autre, comme dépôt, bureau, atelier et réfectoire comprenant une cuisine et un WC/douches. 
 
L'immeuble susmentionné fait l'objet d'une poursuite en réalisation de gage dans laquelle la saisie des parts de copropriété a été ordonnée. 
B. 
Le 22 avril 2004, l'Office des poursuites a saisi la Commission foncière agricole du canton de Genève (ci-après : CFA) d'une requête de désassujettissement de la parcelle n° 1 en vue de sa vente aux enchères forcées. 
 
Après transmission du dossier par la CFA conformément à l'art. 4a de l'ordonnance du 4 octobre 1993 sur le droit foncier rural (ODFR; RS 211.412.110), le département cantonal des constructions et des technologies de l'information (ci-après : DCTI) a, le 2 septembre 2004, confirmé la légalité des constructions sises sur la parcelle, en relevant que le hangar avait été autorisé comme hangar agricole. Le 16 novembre 2004, la CFA a invité l'Office des poursuites à présenter un projet de division, la partie sud-est du terrain ainsi que la partie nord comprenant le hangar devant demeurer assujettie à la loi fédérale du 4 octobre 1991 sur le droit foncier rural (LDFR; RS 211.412.11), alors que la seconde parcelle devait comprendre les autres bâtiments. Le 21 février 2005, l'Office des poursuites a adressé à la CFA un dossier de mutation relatif à la division de la parcelle n° 1 selon les indications données par cette autorité. 
Par décision du 30 août 2005, la CFA a prononcé le partage de l'immeuble n° 1 en deux sous-parcelles nos 2 et 3 et le désassujettissement de la parcelle n° 2. Conformément à l'ordonnance du 16 novembre 2004, le hangar était compris dans la parcelle n° 3 qui restait soumise à la LDFR. 
C. 
Sur recours de A.________ qui faisait valoir que le hangar devait également être libéré de l'assujettissement à la LDFR, le Tribunal administratif a, par arrêt du 28 novembre 2006, annulé la décision du 30 août 2005. Il a considéré en substance que le hangar n'était plus approprié à un usage agricole au sens de l'art. 6 LDFR, ce qui justifiait le désassujettissement du terrain sur lequel il se trouvait. 
D. 
Contre cet arrêt, l'Office fédéral de la justice interjette un recours de droit administratif pour violation des art. 6 et 60 LDFR. Il conclut principalement à l'annulation de l'arrêt attaqué et à la confirmation de la décision rendue par la CFA le 30 août 2005 et, subsidiairement, au renvoi de la cause à la CFA pour nouvelle instruction. 
 
L'intimé conclut au rejet du recours, avec suite de frais et dépens. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
1. 
La loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est entrée en vigueur le 1er janvier 2007 (RO 2005 1242). L'arrêt attaqué ayant été rendu avant cette date, la procédure reste régie par l'OJ (art. 132 al. 1 LTF). 
Selon les art. 97 et 98 let. g OJ, en relation avec l'art. 5 PA, la voie du recours de droit administratif est ouverte contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui sont fondées sur le droit fédéral - ou auraient dû l'être -, pour autant qu'aucune des exceptions prévues aux art. 99 à 102 OJ, ou dans la législation spéciale, ne soit réalisée. En matière d'autorisations exceptionnelles à l'interdiction de partage matériel et de morcellement au sens de l'art. 60 LDFR, le recours de droit administratif au Tribunal fédéral contre les décisions prises sur recours par les autorités cantonales de dernière instance est expressément institué par l'art. 89 LDFR (art. 80 al. 1 et 88 al. 1 LDFR; par exemple : ATF 125 III 175; 129 III 583 consid. 1.1). Le recours, interjeté en temps utile (art. 106 al. 1 OJ) et dans les formes requises (art. 108 al. 1 et 2 OJ), est donc recevable. 
2. 
Le département fédéral compétent ou, lorsque le droit fédéral le prévoit, la division compétente de l'administration fédérale a qualité pour exercer un recours de droit administratif contre une décision prise en dernière instance cantonale (art. 103 let. b OJ). 
 
L'art. 89 LDFR, concernant le recours de droit administratif devant le Tribunal fédéral, renvoie aux art. 97 ss OJ et, partant, à l'art. 103 let. b OJ; l'art. 5 al. 1 let. a ODFR attribue expressément à l'Office fédéral de la justice la qualité pour interjeter un recours de droit administratif au Tribunal fédéral contre les décisions sur recours rendues en dernière instance cantonale. Ce droit de recours constitue avant tout un moyen de surveillance destiné à sauvegarder l'intérêt public et à garantir une application correcte du droit fédéral; il est abstrait, en ce sens que la Confédération n'est pas tenue de justifier d'un intérêt public spécifique à recourir contre la décision attaquée (ATF 129 II 1 consid. 1.1, 11 consid. 1.1 et les arrêts cités). Le recours de l'Office fédéral de la justice est ainsi recevable de ce chef. 
3. 
Le Tribunal administratif a constaté que la parcelle n° 1 de la commune de X.________ est un immeuble à usage mixte situé en zone agricole. La question litigieuse consiste à déterminer si la partie du terrain sur laquelle s'élève le hangar n'est plus appropriée à un usage agricole au sens de l'art. 6 al. 1 LDFR, de sorte qu'elle pouvait être soustraite du champ d'application de la LDFR (art. 60 al. 1 let. a LDFR). Le recourant soutient que l'arrêt attaqué viole les art. 6 et 60 al. 1 let. a LDFR car la construction du hangar a été autorisée pour un usage agricole et que son utilisation depuis environ 25 ans à des fins autres viole les dispositions de l'aménagement du territoire. 
3.1 La LDFR s'applique aux immeubles agricoles isolés et aux immeubles agricoles qui font partie d'une entreprise agricole (art. 2 al. 1 LDFR). Elle est en outre applicable notamment aux immeubles à usage mixte, qui ne sont pas partagés en une partie agricole et une partie non agricole (art. 2 al. 2 let. d LDFR). Les parties non agricoles d'un usage mixte (cf. art. 1 al. 1 LDFR) ne restent soumises à la LDFR que jusqu'au jour où elles sont soustraites à l'interdiction de partage matériel et de morcellement (art. 58 LDFR) par une autorisation exceptionnelle en vertu de l'art. 60 al. 1 let. a LDFR
 
En vertu de l'art. 6 al. 1 LDFR, est agricole l'immeuble approprié à un usage agricole ou horticole. La notion du terrain approprié à un usage agricole correspond à celle de l'art. 16 al. 1 let. a de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 22 juin 1979 (LAT; RS 700), selon lequel les zones agricoles comprennent les terrains qui se prêtent à l'exploitation agricole ou horticole et sont nécessaires à l'accomplissement des différentes tâches dévolues à l'agriculture (cf. ATF 125 III 175 consid. 2b). Pour juger si un bâtiment correspond objectivement à un usage agricole, il faut examiner s'il est indispensable à l'exploitation agricole et si l'exploitation agricole à laquelle il sert est économiquement rentable (ATF 125 III 175 consid. 2c). 
3.2 Un usage mixte au sens de la loi résulte souvent du fait que les bâtiments d'habitation et d'économie rurale utilisés à l'origine pour l'agriculture ne sont plus nécessaires à cet usage ou servent à d'autres fins, contrairement aux dispositions de la loi. Ainsi, des bâtiments d'habitation ou d'exploitation dont l'usage était à l'origine agricole peuvent être exclus du champ d'application de la LDFR s'il s'avère qu'ils ne sont plus appropriés à un usage agricole (ATF 125 III 175 consid. 2c). Lorsque de petites exploitations sont remises et que l'exploitation des terres est transférée à une autre entreprise agricole, se pose la question de la nouvelle utilisation des bâtiments d'habitation et d'exploitation de l'entreprise liquidée. Il en va de même dans les régions de montagne avec les mayens dont les bâtiments ne sont plus nécessaires du fait d'une meilleure mise en valeur et de leur exploitation à partir de la vallée (Christoph Bandli, Commentaire de la loi fédérale sur le droit foncier rural du 4 octobre 1991, 1998, n. 6 ad art. 60 LDFR). Pour se prononcer sur l'autorisation de morcellement, l'autorité doit se fonder en premier lieu sur les circonstances objectives du cas concret. Cela suppose d'examiner le caractère indispensable du bâtiment à l'exploitation agricole et la viabilité économique de l'exploitation agricole à laquelle il sert (cf. consid. 3.1 supra). Dans certaines situations, il y a également lieu de tenir compte, à titre secondaire, d'un critère subjectif, à savoir l'utilisation effective durant de longues années (Message du Conseil fédéral à l'appui de la LDFR du 19 octobre 1988, in : FF 1988 III 889, p. 917; Eduard Hofer, op. cit., n. 16 ad art. 6 LDFR; Yves Donzallaz, Pratique et jurisprudence de droit foncier rural 1994-1998, 1999, n. 62 p. 51-52; Idem, Commentaire de la loi fédérale du 4 octobre 1991 sur le nouveau droit foncier rural, 1993, n. 81 p. 44). 
 
En outre, afin d'assurer la coordination des règles sur l'aménagement du territoire et de celles sur le droit foncier rural, il faudra prendre en considération la prise de position de l'autorité cantonale compétente en matière de construction hors de la zone à bâtir (art. 4a ODFR; ATF 125 III 175 consid. 2c). Pour soustraire un bâtiment au champ d'application de la LDFR, il faut donc une autorisation du droit de l'aménagement du territoire attestant que le bâtiment peut subsister comme exception licite hors zone à bâtir (art. 24 à 24d LAT) ou comme étant nouvellement conforme à la zone (art. 16a LAT), et une autorisation de droit foncier rural sur la base de laquelle la soustraction est effectuée (art. 60 al. 1 let. a ou e LDFR; Reinhold Hotz, Les répercussions de la révision partielle de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire [LAT] sur la loi fédérale sur le droit foncier rural [LDFR] in : Territoire et Environnement 2000, p. 1 ss, 17). 
3.3 En l'espèce, le Tribunal administratif a soustrait la partie du terrain sur laquelle s'élève le hangar du champ d'application de la LDFR. Il a considéré que ce bâtiment n'avait pas eu d'affectation agricole depuis de nombreuses années, voire dès sa construction au début des années 1980, mais était utilisé comme installation complémentaire par les entreprises voisines. Le fait qu'il ait été autorisé, en 1981, comme hangar agricole, n'était pas déterminant car les autres bâtiments avaient également une affectation agricole à l'origine. Ainsi, le critère subjectif de son utilisation effective justifiait d'exclure le hangar du champ d'application de la LDFR. Quant à la partie du terrain située devant le hangar, elle n'était pas exploitable au vu de sa dimension restreinte, de la proximité immédiate d'un atelier de réparation de véhicules industriels, de la disposition du chemin qui la sépare d'un secteur à vocation agricole et de la présence de conduites dans le sol. Enfin, la configuration de cette partie du terrain s'apparentait à celle de la parcelle n° 2, qui n'est pas assujettie à la LDFR. Selon l'autorité précédente, l'ensemble de ces éléments justifiaient le désassujettissement du terrain en question. 
3.4 L'autorité précédente n'a pas examiné la requête selon les critères objectifs, qui priment en principe sur le critère subjectif de l'utilisation effective. Elle ne s'est pas prononcée sur le caractère indispensable du hangar à un usage agricole et sur la viabilité économique d'une exploitation agricole à laquelle ce bâtiment pourrait servir, en opérant les constatations de fait nécessaires à cet effet. Le seul fait que le hangar n'a pas été affecté à des fins agricoles depuis plus de vingt ans est insuffisant pour juger de son inaptitude à l'agriculture au sens de l'art. 6 LDFR
 
Par ailleurs, en ce qui concerne la coordination des procédures du droit foncier rural et de l'aménagement du territoire, la position du DCTI sur la légalité de l'affectation du hangar ne ressort pas de l'arrêt attaqué. Selon les juges précédents, le DCTI, tout en relevant que ce bâtiment avait été autorisé en 1981 comme hangar agricole, a constaté la légalité de cette construction. Au vu de cette constatation, on ignore si cette autorité considère que la réglementation de l'aménagement du territoire ne permet qu'une utilisation agricole du hangar ou si l'affectation actuelle de celui-ci est compatible avec ces dispositions. S'il s'avérait que l'utilisation du bâtiment à des fins non agricoles de dépôt, de couvert à machines, d'atelier et de réfectoire ne contrevient pas aux dispositions de la LAT, la soustraction du champ d'application de la LDFR devrait en effet être accordée sans autre condition (ATF 125 III 175 consid. 2c p. 180). Il appartiendra par conséquent au Tribunal administratif de compléter l'état de fait sur ce point après un éventuel complément d'instruction. 
4. 
Vu ce qui précède, le recours doit être admis, l'arrêt attaqué annulé et la cause renvoyée au Tribunal administratif pour nouveau jugement (art. 114 al. 2 OJ) et complément d'instruction dans le sens des considérants. L'intimé, qui a conclu au rejet du recours, supportera les frais de la procédure (art. 159 al. 1 OJ). Il n'y a pas lieu d'allouer des dépens à l'Office fédéral de la justice (art. 159 al. 2 OJ). 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
1. 
Le recours est admis et l'arrêt attaqué est annulé. 
2. 
Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis à la charge de l'intimé. 
3. 
Le présent arrêt est communiqué en copie aux parties et au Tribunal administratif du canton de Genève. 
Lausanne, le 15 juin 2007 
Au nom de la IIe Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
Le président: La greffière: