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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
                 
 
 
1B_419/2017  
 
 
Arrêt du 7 février 2018  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Merkli, Président, 
Fonjallaz et Chaix. 
Greffière : Mme Kropf. 
 
Participants à la procédure 
 A.________, représenté par Me Florian Baier, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Ministère public de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy. 
 
Objet 
Procédure pénale; refus de nomination d'avocat d'office, 
 
recours contre l'arrêt de la Chambre pénale de recours de la Cour de justice de la République et canton de Genève du 1er septembre 2017 (ACPR/592/2017). 
 
 
Faits :  
 
A.   
A.________ a été mis en prévention et placé en détention provisoire du 8 au 23 juin 2017. Il lui est reproché d'avoir participé à un cambriolage fictif du kiosque exploité par son cousin, dans le but que ce dernier déclare à la police qu'il avait été victime d'un cambriolage, puis induise astucieusement en erreur son assurance pour percevoir une indemnisation. 
Le prévenu a été entendu le 9 juin 2017 par le Ministère public de la République et canton de Genève et a sollicité, sans indiquer le nom d'un avocat, la désignation d'un défenseur d'office. Ce même jour, le Procureur a constaté l'indigence de A.________ et la nécessité d'un défenseur pour sauvegarder ses intérêts vu la gravité, ainsi que la complexité de la cause; le magistrat a désigné Me B.________ en qualité de défenseur d'office. 
Le 14 juin 2017, Me Florian Baier a transmis une procuration établie par A.________ en sa faveur et a sollicité, au nom et pour le compte de ce dernier, le bénéfice de l'assistance judiciaire. Le 14 toujours, le Ministère public a informé les deux avocats concernés que le prévenu disposait d'un défenseur d'office et qu'il n'existait aucun motif de révocation ou de remplacement de ce dernier; seule l'avocate d'office serait dès lors rémunérée par l'Etat et une co-constitution ou une nouvelle constitution serait à la charge du prévenu; un délai de cinq jours leur était imparti pour se déterminer. Le lendemain, Me Florian Baier a maintenu sa constitution, relevant notamment que les souhaits du prévenu devaient être pris en compte lors de la désignation d'un défenseur d'office et que lui-même avait pris contact avec le Ministère public dès qu'il avait eu connaissance de l'existence d'une telle nomination. Me B.________ a déclaré, le 16 juin 2017, que A.________ souhaitait se faire représenter par Me Florian Baier, constitution à laquelle elle ne s'opposait pas. 
Par ordonnance du 20 juin 2017, le Ministère public a révoqué la défense d'office de A.________. Par décision séparée du même jour, le Procureur a refusé de nommer Me Florian Baier en tant qu'avocat d'office du prévenu. Selon ce prononcé, la défense d'office était subsidiaire à la défense de choix et le prévenu qui "révoqu[ait]" son défenseur d'office [était] ainsi présumé renoncer au bénéfice de l'assistance judiciaire", ne pouvant "donc désigner son défenseur de choix en réclamant à l'Etat le paiement des frais de défense". Le Procureur a dès lors considéré que A.________ disposait d'un avocat de choix qu'il avait préféré à celle qui lui avait été désignée d'office, de sorte qu'il n'était pas possible que son conseil privé soit à son tour désigné comme défenseur d'office. 
 
B.   
Le 1er septembre 2017, la Chambre pénale de recours de la Cour de justice de la République et canton de Genève a rejeté le recours intenté par A.________ contre cette décision. 
 
C.   
Par acte du 2 octobre 2017, A.________ forme un recours en matière pénale contre cet arrêt, concluant à son annulation et à la désignation, par le Ministère public, de Me Florian Baier en tant que défenseur d'office pour la procédure P1. Le recourant demande également l'octroi de l'assistance judiciaire pour la procédure fédérale. 
Invitée à se déterminer, la cour cantonale s'est référée aux considérants de sa décision. Quant au Ministère public, il a conclu au rejet du recours, se ralliant aux motifs retenus dans l'arrêt entrepris. Le recourant n'a pas déposé de déterminations supplémentaires. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
Conformément à l'art. 78 LTF, une décision relative à la défense d'office dans une cause pénale peut faire l'objet d'un recours en matière pénale. Le recourant, prévenu et auteur de la demande de désignation d'un défenseur d'office, a qualité pour recourir (art. 81 al. 1 LTF). Le refus de désigner un avocat d'office au prévenu est susceptible de lui causer un préjudice irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF (ATF 140 IV 202 consid. 2.2 p. 205; 133 IV 335 consid. 4 p. 338 et les références). Pour le surplus, le recours a été formé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) contre une décision rendue en dernière instance cantonale (art. 80 LTF) et les conclusions présentées sont recevables au regard de l'art. 107 al. 2 LTF
Partant, il y a lieu d'entrer en matière. 
 
2.   
Invoquant les art. 130, 131, 132 al. 1, 133 CPP, 29 Cst. et 6 par. 3 let. c CEDH, le recourant soutient tout d'abord qu'au regard du refus de désigner son nouvel avocat en tant que mandataire d'office, il n'aurait plus pu bénéficier de l'assistance d'un défenseur alors qu'il se trouverait dans un cas de défense obligatoire (art. 130 let. a et b CPP). Il prétend également qu'il n'existerait aucun motif objectif justifiant de le priver de son droit d'émettre un souhait quant à la personne de son conseil; tel ne serait en tout pas le cas de la brève intervention, de plus dans l'urgence, d'un autre mandataire. 
 
2.1. Selon l'art. 133 CPP, le défenseur d'office est désigné par la direction de la procédure compétente au stade considéré (al. 1); lorsqu'elle nomme le défenseur d'office, la direction de la procédure prend en considération les souhaits du prévenu dans la mesure du possible (al. 2).  
Cette disposition concrétise la jurisprudence du Tribunal fédéral et de la Cour européenne des droits de l'homme relative aux art. 29 al. 3 Cst. et 6 par. 3 let. c CEDH. L'art. 133 al. 2 CPP ne garantit pas au détenu le droit de choisir librement son défenseur d'office. Il n'en va pas davantage de l'art. 6 par. 3 let. c CEDH. Le droit du prévenu de proposer un avocat d'office ne fonde en effet pas d'obligation pour la direction de la procédure de désigner l'avocat proposé. Celle-ci ne peut toutefois s'écarter de la proposition du prévenu que pour des raisons objectives, par exemple un conflit d'intérêts, une surcharge de travail, un refus du mandat par le défenseur de choix, l'absence de qualification ou d'expérience professionnelle suffisante, ou d'autres obstacles objectifs (ATF 139 IV 113 consid. 4.3 p. 119). En cas de refus de suivre les souhaits du prévenu, l'autorité doit motiver au moins sommairement sa décision (cf. art. 29 al. 2 Cst. et. 3 al. 2 let. c CPP; arrêt 1B_212/2013 du 20 août 2013 consid. 2). Le droit de proposition selon l'art. 133 al. 2 CPP ne doit en principe pouvoir être exercé qu'une seule fois au début de la procédure afin notamment que l'avancement de l'instruction ne soit par retardé (arrêts 1B_198/2017 du 12 juin 2017 consid. 2; 1B_103/2017 du 27 avril 2017 consid. 2.2; 1B_178/2013 du 11 juillet 2013 consid. 2.2). 
 
2.2. Si la relation de confiance entre le prévenu et le défenseur d'office est gravement perturbée ou si une défense efficace n'est plus assurée pour d'autres raisons, la direction de la procédure confie la défense d'office à une autre personne (art. 134 al. 2 CPP).  
Si cet article permet de tenir compte d'une détérioration objective du rapport de confiance entre le prévenu et son défenseur, le simple fait que la partie assistée n'a pas confiance dans son conseil d'office ne lui donne pas le droit d'en demander le remplacement lorsque cette perte de confiance repose sur des motifs purement subjectifs et qu'il n'apparaît pas de manière patente que l'attitude de l'avocat d'office est gravement préjudiciable aux intérêts de la partie (ATF 138 IV 161 consid. 2.4 p. 164 ss). 
L'art. 134 al. 2 CPP n'empêche toutefois pas le prévenu, à n'importe quel stade de la procédure, moyennant une procuration écrite ou une déclaration consignée au procès-verbal, de charger de sa défense un conseil juridique au sens de l'art. 127 al. 5 CPP (art. 129 CPP; arrêt 1B_394/2014 du 27 janvier 2015 consid. 2.2.1). 
 
2.3. En tout état de cause, le fait de se trouver dans un cas de défense obligatoire ne permet pas d'utiliser les droits conférés à la défense d'une façon constitutive d'un abus de droit (ATF 131 I 185 consid. 3.2.3 p. 192).  
 
2.4. La cour cantonale a estimé que le cas de défense obligatoire en raison d'une détention provisoire supérieure à dix jours (art. 130 let. a CPP) avait disparu au regard de la libération du prévenu intervenue le 23 juin 2017. Elle a ensuite estimé que, lors de la désignation du défenseur d'office, le Ministère public n'avait pas à demander préalablement son avis au recourant; cela valait d'autant plus que ce dernier, lorsqu'il avait requis une défense d'office, n'avait émis aucun souhait quant à la désignation d'un avocat en particulier et n'avait pas sollicité de délai pour y réfléchir. Selon la juridiction précédente, le recourant avait exprimé le souhait d'être assisté par un avocat de choix le 14 juin 2017, ainsi que d'être mis au bénéfice de l'assistance judiciaire; il avait été averti spécifiquement, par le biais des deux avocats, des conséquences - notamment financières - que sa décision entraînerait, à savoir que la désignation d'un avocat de choix impliquerait la renonciation à la défense d'office pour laquelle il bénéficiait d'une pleine assistance judiciaire. Les juges cantonaux ont par conséquent considéré que c'était en étant dûment informé que le recourant avait décidé de maintenir à ses côtés un avocat de choix.  
 
2.5. Ce raisonnement ne prête pas le flanc à la critique et le recourant ne développe aucune argumentation propre à le remettre en cause.  
En particulier, l'éventuel défaut de connaissance de la possibilité offerte par l'art. 133 al. 2 CPP au moment de sa requête le 9 juin 2017 pour une défense d'office - ce qui peut constituer une violation de ses droits de partie - ne lui a cependant pas limité ses droits de défense. En effet, il a tout d'abord bénéficié de l'assistance de sa mandataire d'office, puis de celle de son avocat de choix (arrêt 6B_500/2012 du 4 avril 2013 consid. 1.2.3 et 1.3.3). Certes, ce dernier a résilié son mandat le 30 juin 2017 (art. 105 al. 2 LTF). Toutefois à cette date, le recourant ne se trouvait plus dans un cas de défense obligatoire au sens de l'art. 130 let. a CPP puisqu'il avait été libéré le 23 juin 2017 (VIKTOR LIEBER, in DONATSCH/HANSJAKOB/LIEBER, Kommentar zur Schweizerischen Strafprozessordnung (StPO), 2e éd. 2014, n° 14a ad art. 130 CPP). S'il se prévaut, pour la suite de la procédure, de l'art. 130 let. b CPP en raison du chef de prévention retenu à son encontre (art. 146 CP), la motivation de l'ordonnance du 9 juin 2017 désignant Me B.________ - fondée sur l'art. 132 al. 1 let. b, al. 2 et 3 CPP - ne permet pas de considérer que tel serait nécessairement le cas. Cette question peut d'ailleurs rester indécise, car il n'appartient pas au Tribunal fédéral, mais à la direction de la procédure - soit le Ministère public en l'occurrence (art. 133 al. 1 CPP) - de statuer en tant qu'autorité de première instance sur l'existence d'un cas de défense obligatoire et de désigner, le cas échéant, un défenseur d'office au recourant (art. 132 al. 1 let. a CPP). 
A cela s'ajoute encore le fait que les éléments figurant au dossier ne permettent pas de considérer, même sous l'angle de la vraisemblance, que le recourant aurait demandé la nomination spécifique de Me Florian Baier le 9 juin 2017 ou d'ailleurs de tout autre avocat. En effet, Me Florian Baier s'est annoncé après avoir été consulté par le père du recourant (cf. son courrier du 13 juin 2017; art. 105 al. 2 LTF). Il a de plus expliqué que son mandant n'aurait pas pu se déterminer sur un "Conseil recommandé par sa famille avant de l'avoir rencontré" (cf. l'écriture du 15 juin 2017), ce qui n'est arrivé a priori que le 14 juin 2017. Le recourant et son mandataire ne font pas non plus état d'autres éléments permettant de considérer que le second connaissait, antérieurement à la décision du 9 juin 2017, le dossier du prévenu - respectivement a priori le prévenu lui-même - ou qu'un lien de confiance, même ténu, aurait existé préalablement à leur rencontre du 14 juin 2017 (MOREILLON/PAREIN-REYMOND, Petit commentaire, Code de procédure pénale, 2e éd. 2016, n° 8 ad art. 133 CPP). Le placement en détention provisoire du recourant ne peut pas non plus être ignoré; cette situation particulière peut imposer, notamment si le requérant entend être assisté devant le Tribunal des mesures de contrainte, de désigner rapidement un mandataire d'office, sans par exemple pouvoir alors impartir un délai au prévenu pour s'informer et proposer un avocat (dans le sens d'une telle possibilité, HARARI/ALIBERTI, in Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, 2011, n° 21 ad art. 133 CPP). 
Au regard de ces circonstances, le recourant ne saurait donc plus se prévaloir de l'art. 133 al. 2 CPP pour demander la désignation d'un avocat dont il semble avoir fait la connaissance ultérieurement à la décision de nomination de son avocate d'office; admettre cette manière de procéder permettrait - même en début d'instruction - de contourner la procédure prévue à l'art. 134 al. 2 CPP pour obtenir le changement de l'avocat désigné en tant que défenseur d'office. En tout état de cause, le recourant reconnaît, devant le Tribunal fédéral, que sa démarche tendait à obtenir un "changement de l'avocat d'office" (cf. p. 7 de son mémoire). Il lui appartenait en conséquence de démontrer que les conditions y relatives étaient réunies, ayant d'ailleurs été invité formellement à le faire par le Ministère public le 14 juin 2017. 
Partant, dès lors que le recourant, par l'intermédiaire de son mandataire, a maintenu la constitution du second sans démontrer la réalisation des conditions de l'art. 134 al. 2 CPP, la cour cantonale pouvait, sans violer le droit fédéral, retenir que le premier avait opté pour une défense de choix (art. 129 al. 1 CPP) et, en conséquence, confirmer le refus du Ministère public de désigner Me Florian Baier en tant que défenseur d'office. 
 
3.   
Il s'ensuit que le recours est rejeté. 
Le recourant a demandé l'octroi de l'assistance judiciaire (art. 64 al. 1 LTF). Vu l'art. 133 al. 2 CPP et le stade encore initial de la procédure, son recours n'était pas d'emblée dénué de chances de succès. Partant, les conditions posées à l'art. 64 al. 1 LTF étant réunies, il convient de mettre le recourant au bénéfice de l'assistance judiciaire, de lui désigner Me Florian Baier en tant qu'avocat d'office pour la procédure fédérale et de lui allouer une indemnité à titre d'honoraires, qui seront supportés par la caisse du tribunal. Il n'est pas perçu de frais judiciaires (art. 64 al. 1 LTF), ni alloué de dépens (art. 68 al. 3 LTF). 
 
 
 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est rejeté. 
 
2.   
La demande d'assistance judiciaire est admise. Me Florian Baier est désigné comme avocat d'office du recourant et une indemnité de 1'500 fr. lui est allouée à titre d'honoraires, à payer par la caisse du Tribunal fédéral. Il n'est pas perçu de frais judiciaires. 
 
3.   
Le présent arrêt est communiqué au mandataire du recourant, au Ministère public de la République et canton de Genève et à la Chambre pénale de recours de la Cour de justice de la République et canton de Genève. 
 
 
Lausanne, le 7 février 2018 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Merkli 
 
La Greffière : Kropf