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[AZA] 
I 41/00 Co 
 
IIIe Chambre  
 
composée des Juges fédéraux Schön, Spira et Widmer; 
Frésard, Greffier 
 
Arrêt du 23 mars 2000  
 
dans la cause 
 
C.________, recourant, 
 
contre 
 
Office cantonal AI Genève, boulevard du Pont-d'Arve 28, 
Genève, intimé, 
 
et 
 
Commission cantonale de recours en matière d'AVS/AI, Genève 
 
    A.- C.________ a travaillé comme chauffeur dans le 
transport de béton au service de V.________ SA, du 
1er janvier 1985 au 10 mai 1993. Il réalisait alors un 
salaire mensuel de 4480 fr. Le 22 septembre 1993, il a 
présenté une demande visant à un reclassement profes- 
sionnel. 
 
    Dans un rapport du 28 septembre 1993, le docteur 
S.________ a posé le diagnostic de dorso-lombalgies sur 
polyinsertionnite, d'état dépressif et d'excès pondéral. Il 
a attesté une incapacité de travail de 100 pour cent à 
partir du 11 mai 1993. Le docteur R.________, médecin-as- 
sistant au service des Institutions universitaires de 
psychiatrie a pour sa part posé le diagnostic de dépression 
majeure avec trouble somatoforme douloureux sur trouble de 
la personnalité non spécifié; il a attesté une incapacité 
de travail de 30 pour cent "pour ce qui concerne les fac- 
teurs psychologiques". 
    L'Office régional de réadaptation professionnelle de 
l'assurance-invalidité a proposé un stage d'observation à 
la Fondation PRO, mesure qui a été ordonnée par décision du 
7 mars 1994. Compte tenu de l'attitude négative de l'assu- 
ré, les responsables de cette fondation ont refusé d'assu- 
rer l'exécution de cette mesure. 
    La Commission de l'assurance-invalidité du canton de 
Genève a alors confié une expertise au docteur X.________, 
spécialiste FMH en psychiatrie et en psychothérapie. Dans 
un rapport du 30 septembre 1994, l'expert a posé le diag- 
nostic de sinistrose ou névrose de compensation et il a 
conclu à une pleine capacité de travail. 
    Par décision du 14 mars 1995, l'Office de l'assurance- 
invalidité du canton de Genève a rejeté la demande de pres- 
tations, notamment une rente, au motif que le requérant ne 
présentait pas d'incapacité de travail. 
    L'assuré a recouru contre cette décision. Par jugement 
du 25 août 1995, la Commission cantonale genevoise de re- 
cours en matière d'AVS/AI a admis le recours et elle a ren- 
voyé la cause à l'administration "pour nouvel examen au 
sens des considérants". L'administration était invitée à 
déterminer si une reprise de l'activité de chauffeur par 
l'assuré, dans les conditions où elle était exercée, était 
possible. Dans la négative, l'éventualité de mesures de ré- 
adaptation devait être réexaminée. 
    B.- A la suite de ce jugement, l'office de l'assuran- 
ce-invalidité a rendu une nouvelle décision, le 4 septembre 
1997, par laquelle il a derechef rejeté la demande de pres- 
tations de l'assuré. Il a estimé que, sur le vu des pièces 
médicales, l'assuré était apte à exercer une activité de 
chauffeur. 
 
    C.- C.________ a recouru contre cette décision. 
    En cours de procédure, la commission de recours a re- 
cueilli des avis médicaux du docteur S.________ (rapport du 
2 juillet 1998) et du docteur E.________ (rapports des 
7 sep- tembre 1998 et 20 janvier 1999), qui suit le patient 
depuis le mois d'avril 1997. Le médecin de l'office de 
l'assurance-invalidité, le docteur Y.________, s'est 
également exprimé, en particulier dans une note du 29 mars 
1999 
    Statuant le 12 novembre 1999, la commission cantonale 
a rejeté le recours. 
 
    D.- Contre ce second jugement, C.________ interjette 
un recours de droit administratif en demandant que son 
"problème médical soit reconnu en terme d'invalidité". 
    L'office de l'assurance-invalidité s'en remet à jus- 
tice en ce qui concerne la recevabilité du recours et con- 
clut, en tout état de cause, à son rejet. Quant à l'Office 
fédéral des assurances sociales, il ne s'est pas déterminé 
au sujet du recours. 
 
Considérant en droit  
:  
 
    1.- Invoquant l'art. 108 al. 2 OJ, l'office intimé met 
en doute la recevabilité du recours, qui ne satisferait pas 
aux exigences prescrites par cette disposition. 
    Selon l'art. 108 al. 2 OJ, le recours de droit admi- 
nistratif doit indiquer notamment les conclusions et les 
motifs du recourant. Cette exigence a pour but de fixer le 
juge sur la nature et l'objet du litige. La jurisprudence 
admet que les conclusions et les motifs résultent implici- 
tement du mémoire de recours; il faut cependant pouvoir 
déduire de ce dernier, considéré dans son ensemble, à tout 
le moins ce que le recourant demande d'une part, et quels 
sont les faits sur lesquels il se fonde d'autre part. Il 
n'est pas nécessaire que la motivation soit pertinente, 
mais elle doit se rapporter au litige en question. Le sim- 
ple renvoi à des écritures antérieures ou à l'acte attaqué 
ne suffit pas. S'il manque soit des conclusions soit des 
motifs, même implicites, le recours de droit administratif 
est irrecevable d'entrée de cause, sans que le recourant 
ait la faculté de remédier à cette irrégularité 
(ATF 123 V 336 consid. 1a et les références). 
    En l'espèce, il apparaît que le recourant conteste les 
conclusions du rapport d'expertise du docteur X.________ 
sur lequel se fonde en partie le jugement cantonal. En 
outre, le recourant soutient qu'il n'est plus en mesure, en 
raison de son état physique, de reprendre une activité de 
chauffeur. Cette motivation, quoique très sommaire, 
satisfait néanmoins aux exigences de l'art. 108 al. 2 OJ
Quant aux conclusions, elles peuvent être déduites des 
motifs, dans la mesure où le recourant, implicitement, 
demande à être mis au bénéfice de prestations de 
l'assurance-invalidité, que ce soit des mesures de reclas- 
sement ou une rente. Le recours est donc recevable au 
regard de l'art. 108 al. 2 OJ (cf. aussi ATF 109 Ib 249 
consid. 3c). 
 
    2.- Plusieurs rapports médicaux ont été versés au dos- 
sier de la procédure cantonale, à la demande de la commis- 
sion de recours. Tout d'abord, dans son rapport du 
2 juillet 1998, le docteur S.________ déclare que l'assuré 
ne peut plus soulever des sacs de ciment. Mais le patient, 
titulaire d'un permis de poids lourds, pourrait travailler 
dans une activité légère, n'impliquant pas le port de char- 
ges (conduite de bus, de minibus ou de taxis, par exemple, 
ou encore un travail assis, une activité de gardiennage). 
Quant au docteur E.________, il qualifie de grave la situa- 
tion "bio-psycho-sociale" de l'assuré : dans le contexte de 
la pathologie présentée depuis dix ans par l'intéressé et 
d'un très long arrêt de travail, une réinsertion profes- 
sionnelle paraît impossible (rapport du 7 septembre 1998). 
Ultérieurement, dans son rapport du 20 janvier 1999, ce mé- 
decin précise que l'incapacité de travail, totale, résulte 
d'un problème psychosomatique dans le cadre d'un trouble 
somatoforme douloureux ou syndrome douloureux chronique. 
    Dans sa note du 29 mars 1999, le médecin de l'office 
de l'assurance-invalidité estime que le docteur d'Espine 
n'apporte pas d'élément nouveau qui permettrait d'admettre 
que l'état de santé de l'assuré s'est modifié depuis le 
moment où l'expertise du docteur X.________ a été établie. 
L'assuré souffre d'une névrose de revendication qui n'a pas 
valeur de maladie invalidante et l'incapacité de travail 
alléguée résulte de considérations médicales générales, 
d'ordre "bio-psycho-social", et non d'une maladie au sens 
de la loi. 
    Les premiers juges se sont ralliés à cette dernière 
appréciation : d'une part, sur le plan somatique, l'assuré 
peut exercer une activité ne demandant pas de gros efforts 
physiques et, d'autre part, aucune atteinte à sa santé psy- 
chique ne l'empêche d'exercer une semblable activité, 
compte tenu des conclusions du docteur Rosatti. 
 
    a) En l'espèce, on peut admettre que, sur un plan 
strictement somatique, le recourant serait apte à exercer 
une activité de chauffeur ou une autre activité légère. Ce 
point n'est pas contesté médicalement. 
    En ce qui concerne d'autre part l'éventualité d'une 
affection psychique, on ne saurait sans plus s'en tenir aux 
conclusions de l'expertise du docteur X.________. Le doc- 
teur E.________ signale l'existence de troubles somatofor- 
mes douloureux sur lesquels le docteur Rosatti n'a pas - en 
 
tout cas pas explicitement - émis d'appréciation. Du reste, 
le rapport de cet expert (établi en septembre 1994) appa- 
raît trop ancien pour autoriser un jugement en toute 
connaissance de cause sur la situation qui existait au 
moment - déterminant en l'espèce (cf. ATF 121 V 366 
consid. 1b) - où la décision litigieuse a été rendue 
(4 septembre 1997). 
 
    b) Dans un arrêt non publié K. du 19 janvier 2000 
(I 554/98), le Tribunal fédéral des assurances, se fondant 
principalement sur une étude de Mosimann (Somatoforme Stö- 
rungen: Gerichte und (psychiatrische) Gutachten, RSAS 1999, 
p. 1 ss et 105 ss) a défini la tâche du médecin ou de l'ex- 
pert, lorsque celui-ci doit se prononcer sur le caractère 
invalidant de troubles somatoformes. Sur le plan psychia- 
trique, l'expert doit poser un diagnostic dans le cadre 
d'une classification reconnue et se prononcer sur le degré 
de gravité de l'affection. Il doit évaluer le caractère 
exigible de la reprise par l'assuré d'une activité lucrati- 
ve. Ce pronostic tiendra compte de divers critères, tels 
une structure de la personnalité présentant des traits pré- 
morbides, une comorbidité psychiatrique, des affections 
corporelles chroniques, une perte d'intégration sociale, un 
éventuel profit tiré de la maladie, le caractère chronique 
de celle-ci sans rémission durable, une durée de plusieurs 
années de la maladie avec des symptômes stables ou en évo- 
lution, l'échec de traitements conformes aux règles de 
l'art. Le cumul des critères précités fonde un pronostic 
défavorable. Enfin, le médecin ou l'expert doit s'exprimer 
sur le cadre psychosocial de la personne examinée. Au de- 
meurant, la recommandation de refus d'une rente doit égale- 
ment reposer sur différents critères. Au nombre de ceux-ci 
figurent la divergence entre les douleurs décrites et le 
comportement observé, l'allégation d'intenses douleurs dont 
les caractéristiques demeurent vagues, l'absence de demande 
de soins, les grandes divergences entre les informations 
fournies par le patient et celles ressortant de l'anamnèse, 
le fait que des plaintes très démonstratives laissent in- 
sensible l'expert, ainsi que l'allégation de lourds handi- 
caps malgré un environnement psychosocial intact. 
 
    c) Dans le cas particulier, on ne dispose pas d'élé- 
ments suffisants pour se prononcer, au regard de ces critè- 
res, sur le point de savoir si les troubles somatoformes 
attestés médicalement ont ou non un caractère invalidant. 
Il convient, en conséquence, de renvoyer la cause à l'offi- 
ce de l'assurance-invalidité pour qu'il complète l'instruc- 
tion par une nouvelle expertise. 
    Pour le cas où les troubles somatoformes n'auraient 
pas d'incidence sur la capacité de travail du recourant, il 
appartiendra à l'administration de déterminer quelle (s) 
profession (s) l'assuré serait à même d'exercer et d'exami- 
ner si et le cas échéant dans quelle mesure il en résulte- 
rait une diminution de sa capacité de gain. 
    Ensuite, l'office statuera à nouveau sur les presta- 
tions susceptibles d'entrer en ligne de compte dans le cas 
concret (mesures de réadaptation professionnelle; rente). 
 
    Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances 
 
p r o n o n c e  
:  
 
I. Le recours est partiellement admis et le jugement de  
    la Commission cantonale genevoise de recours en ma- 
    tière d'assurance-vieillesse, survivants et invali- 
    dité, du 12 novembre 1999, ainsi que la décision de 
    l'Office de l'assurance-invalidité du canton de Genève 
    du 4 septembre 1997, sont annulés. 
 
II. La cause est renvoyée audit office pour complément  
    d'instruction et nouvelle décision au sens des motifs. 
 
III. Il n'est pas perçu de frais de justice.  
 
VI. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, à la  
    Commission cantonale genevoise de recours en matière 
    d'assurance-vieillesse, survivants et invalidité et à 
    l'Office fédéral des assurances sociales. 
 
 
Lucerne, le 23 mars 2000 
 
Au nom du 
Tribunal fédéral des assurances 
p. le Président de la IIIe Chambre : 
 
Le Greffier :