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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
                 
 
 
8C_124/2019  
 
 
Arrêt du 23 avril 2019  
 
Ire Cour de droit social  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Maillard, Président, Frésard et Viscione. 
Greffière : Mme Castella. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Robert Hensler, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (CNA), Fluhmattstrasse 1, 6004 Lucerne, 
intimée. 
 
Objet 
Assurance-accidents (procédure de première instance; condition de recevabilité), 
 
recours contre le jugement de la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice de la République et canton de Genève du 7 janvier 2019 (A/3643/2018 ATAS/10/2019). 
 
 
Faits :  
 
A.   
Le 10 janvier 2011, A.________, né en 1973, s'est blessé au genou droit lors d'une chute. La Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (ci après: CNA), auprès de laquelle il était assuré obligatoirement contre le risque d'accident, a pris en charge le cas. 
Par décision du 2 mars 2018, la CNA a nié le droit de A.________ à une rente d'invalidité pour les suites de l'accident susmentionné et a alloué à celui-ci une indemnité pour atteinte à l'intégrité fondée sur un taux de 20 %. Saisie d'une opposition, elle l'a rejetée par décision du 14 septembre 2018, communiquée par courrier A plus au mandataire de l'assuré. 
 
B.   
Le 17 octobre 2018, A.________ a déposé un recours contre la décision sur opposition du 14 septembre 2018. Par arrêt du 7 janvier 2019, la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice de la République et canton de Genève a déclaré le recours irrecevable pour cause de tardiveté. 
 
C.   
A.________ interjette un recours en matière de droit public en concluant à l'annulation du jugement attaqué, à la constatation de la recevabilité de son recours cantonal et au renvoi de la cause à la cour cantonale pour nouvelle décision. Préalablement, il demande à ce qu'il soit ordonné à la CNA de produire les statistiques des envois de ses décisions sur les trois dernières années en distinguant pour chaque jour les envois en courrier A, A Plus et recommandé. 
Il n'a pas été ordonné d'échange d'écritures. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
Le recours est dirigé contre un arrêt final (art. 90 LTF) rendu en matière de droit public (art. 82 ss LTF) par une autorité cantonale de dernière instance (art. 86 al. 1 let. d LTF). Il a été déposé dans le délai (art. 100 LTF) et la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi. Il est donc recevable. 
 
2.   
Le litige porte sur le respect du délai de recours devant la juridiction cantonale, singulièrement sur le point de départ de ce délai. Il ne concerne donc pas l'octroi ou le refus de prestations en espèces de l'assurance-accidents, de sorte que la règle de l'art. 105 al. 3 LTF (en relation avec l'art. 97 al. 2 LTF) n'est pas applicable à la présente procédure (cf. ATF 140 V 136 consid. 1.2.2 p. 138 s.; 135 V 412 consid. 1.2.2 p. 414 s. et les références; arrêt 8C_872/2017 du 3 septembre 2018 consid. 2.1, non publié in ATF 144 V 313). 
Par conséquent, contrairement à ce que soutient le recourant, le Tribunal fédéral est lié par les faits constatés par la juridiction précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte - notion qui correspond à celle d'arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 143 I 310 consid. 2.2 p. 313) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF), et pour autant que la correction du vice soit susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF). Il appartient au recourant de démontrer le caractère arbitraire par une argumentation répondant aux exigences des art. 42 al. 2 et 106 al. 2 LTF (ATF 137 I 58 consid. 4.1.2 p. 62). 
 
3.   
Aux termes de l'art. 60 al. 1 LPGA (RS 830.1), le recours doit être déposé dans les trente jours suivant la notification de la décision sujette à recours. L'art. 38 al. 1 LPGA, applicable par analogie en vertu de l'art. 60 al. 2 LPGA, dispose que si le délai, compté par jours ou par mois, doit être communiqué aux parties, il commence à courir le lendemain de la communication. 
 
4.   
Se fondant sur l'attestation de suivi des envois de la poste (relevé "Track & Trace"), la cour cantonale a constaté que la décision sur opposition du 14 septembre 2018 avait été distribuée le samedi 15 septembre 2018, via la case postale de l'étude du mandataire du recourant. Aussi, le délai de recours avait-il commencé à courir le dimanche 16 septembre 2018 pour arriver à échéance le lundi 15 octobre 2018. Par conséquent, le recours, interjeté le 17 octobre 2018, ne l'avait pas été en temps utile. 
 
5.   
Le recourant se plaint d'une constatation incomplète des faits. Il reproche à l'autorité précédente de n'avoir pas pris en considération plusieurs pièces produites en instance cantonale. Bien qu'il l'affirme, il n'explique toutefois pas en quoi ces pièces auraient pu influer sur l'issue du litige. Son grief ne répond pas aux exigences de motivation de l'art. 106 al. 2 LTF et n'est pas de nature à démontrer une constatation manifestement inexacte des faits ou une appréciation arbitraire des preuves. 
 
6.   
 
6.1. Invoquant la violation du droit à la preuve (art. 29 al. 2 Cst.), le recourant reproche aux premiers juges de n'avoir pas donné suite à sa requête tendant à la production par l'intimée des statistiques des envois de ses décisions sur opposition sur trois ans, en distinguant les jours et la méthode d'envoi. Il entendait ainsi démontrer que l'intimée envoie volontairement ses décisions par courrier A Plus le vendredi.  
 
6.2. Le droit d'être entendu garanti par l'art. 29 al. 2 Cst. comprend notamment le droit pour l'intéressé d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l'administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s'exprimer sur son résultat lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 p. 299; 135 II 286 consid. 5.1 p. 293 et les arrêts cités). Toutefois, il est possible de renoncer à l'administration de certaines preuves offertes, lorsque le fait dont les parties veulent rapporter l'authenticité n'est pas important pour la solution du cas, lorsque les preuves résultent déjà de constatations versées au dossier ou lorsque le juge parvient à la conclusion qu'elles ne sont pas décisives pour la solution du litige ou qu'elles ne pourraient l'amener à modifier son opinion (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 précité et les arrêts cités; 136 I 229 consid. 5.3 p. 236).  
 
6.3. Comme l'ont relevé les premiers juges, en droit des assurances sociales, il n'existe pas de disposition légale obligeant les assureurs sociaux à notifier leurs décisions selon un mode particulier. Dès lors, la jurisprudence admet que les assureurs sont libres de décider de la manière dont ils souhaitent notifier leurs décisions. Ils peuvent en particulier choisir de les envoyer par courrier A Plus (ATF 142 III 599 consid. 2.4.1 p. 603; voir également, parmi d'autres, arrêt 8C_559/2018 du 26 novembre 2018 consid. 4.3.1). Rien ne les empêche non plus d'envoyer leurs décisions un vendredi. Dans ces conditions, l'acte d'instruction sollicité par le recourant n'apparaissait pas pertinent et les premiers juges pouvaient refuser d'y donner suite. Pour les mêmes raisons, il n'y a pas lieu d'accéder à la requête formulée une nouvelle fois devant la Cour de céans.  
 
7.  
 
7.1. Le recourant se plaint d'un déni de justice (art. 29 al. 1 Cst.) et de la violation de son droit d'être entendu (art. 29 al. 2 Cst. et 6 CEDH), du fait que la juridiction cantonale n'a pas répondu à son argumentation relative à l'existence d'une lacune proprement dite de la LPGA ainsi qu'à ses griefs tirés de l'interdiction du formalisme excessif et du principe de la bonne foi.  
 
7.2. La jurisprudence a déduit du droit d'être entendu le devoir pour le juge de motiver sa décision, afin que le destinataire puisse en saisir la portée, le cas échéant, l'attaquer en connaissance de cause et que l'autorité de recours puisse exercer son contrôle (ATF 138 I 232 consid. 5.1 p. 238 et les arrêts cités). Pour répondre à ces exigences, il suffit que le juge mentionne, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidé et sur lesquels il a fondé sa décision; il n'est pas tenu de discuter tous les arguments soulevés par les parties, mais peut se limiter à ceux qui lui apparaissent pertinents (ATF 142 III 433 consid. 4.3.2 p. 436 et les arrêts cités).  
 
7.3. En l'espèce, les premiers juges ont appliqué la jurisprudence du Tribunal fédéral, selon laquelle un envoi expédié par courrier A Plus se trouve dans la sphère de puissance du destinataire dès la date de dépôt dans la boîte aux lettres ou la case postale de celui-ci, fût-elle un samedi. Dans cette mesure, ils ont rejeté, à tout le moins implicitement, les griefs du recourant tendant à démontrer que la notification par courrier A Plus ne pouvait pas intervenir le samedi en cas de dépôt dans une case postale. La cour cantonale a également exposé que ce mode de notification ne violait pas la garantie d'un procès équitable ni de l'accès au juge. Cela étant, elle n'a pas violé son devoir de motivation en renonçant à s'exprimer davantage sur les arguments du recourant, lesquels ne sont pas fondés comme on le verra (infra consid. 9).  
 
8.   
 
8.1. Invoquant la violation du droit à un procès équitable et à l'accès au juge (art. 29 al. 1, 29a Cst. et 6 CEDH), le recourant fait valoir, en substance, que l'envoi par courrier A Plus offre une protection moins importante que l'envoi par recommandé ou courrier A, qu'il ampute de deux jours le délai de recours et crée des incertitudes en fonction du destinataire.  
 
8.2.   
 
8.2.1. Les critiques formulées par le recourant sont mal fondées.  
En effet, selon le mode d'expédition A Plus, la lettre est numérotée et envoyée par courrier A de la même manière qu'une lettre recommandée. Toutefois, contrairement au courrier recommandé, le destinataire n'a pas à en accuser réception. En cas d'absence, celui-ci ne reçoit donc pas d'invitation à retirer le pli. La livraison est néanmoins enregistrée électroniquement au moment du dépôt de l'envoi dans la boîte aux lettres ou la case postale du destinataire. Grâce au système électronique "Track & Trace" de la poste, il est ainsi possible de suivre l'envoi jusqu'à la zone de réception du destinataire (ATF 142 III 599 précité consid. 2.2 p. 601 s. et les arrêts cités; arrêts 8C_586/2018 du 6 décembre 2018 consid. 5; 8C_53/2017 du 2 mars 2017 consid. 4.1; 8C_573/2014 du 26 novembre 2014 consid. 2.2). 
 
8.2.2. En outre, le délai de recours est le même pour toutes les formes de notification. Il commence à courir lorsque l'envoi entre dans la sphère de puissance du destinataire et que ce dernier peut prendre connaissance du contenu de l'envoi. En présence d'un courrier sans signature (A Plus comme A), c'est le cas au moment du dépôt dans la boîte aux lettres ou la case postale. Si l'envoi est distribué un samedi, le délai de recours commence à courir le dimanche. En présence d'un courrier recommandé, l'envoi entre dans la sphère de puissance du destinataire lorsqu'il est retiré au guichet. A cet égard, la notification par lettre recommandée n'offre pas un avantage significatif puisqu'au stade de l'avis de retrait, le destinataire ne connaît ni le contenu ni la motivation de la décision qui lui est adressée (arrêts 8C_754/2018 précité consid. 7.2.3; 2C_1126/2014 du 20 février 2015 consid. 2.4).  
 
8.2.3. Par ailleurs, l'accès aux cases postales est en principe garanti en tout temps et le fait de ne pas vider la case postale le samedi relève de la responsabilité du destinataire (privé ou commercial). Celui-ci ne saurait s'en prévaloir pour reporter le dies a quo du délai de recours, alors que la date de distribution d'un courrier A Plus est facilement déterminable au moyen du numéro apposé sur l'enveloppe. Contrairement à ce que soutient le recourant, un tel procédé ne présente aucune difficulté particulière, surtout pour un cabinet d'avocats, et permet précisément de lever les éventuelles incertitudes liées à l'envoi sans signature.  
 
9.   
 
9.1. Le recourant se plaint de la violation du principe de la bonne foi de l'administration (art. 5 al. 3 et 9 Cst.) en reprochant à l'intimée d'induire en erreur les assurés en transmettant ses décisions sur opposition par courrier A Plus. Il invoque également l'interdiction du formalisme excessif (art. 29 al. 1 Cst.), soutenant que ce mode d'envoi met en péril les droits des assurés.  
 
9.2. Ces griefs, dont la motivation rejoint en substance celle développée au point précédent, ne sont pas davantage fondés. On ne saurait en effet reprocher à l'intimée un comportement déloyal et la mise en péril des droits des assurés pour avoir choisi un mode de notification expressément admis par le Tribunal fédéral. En outre, il n'y a pas lieu de remettre en cause le principe de la réception auquel sont soumises les communications des autorités et dont il ressort que la prise de connaissance effective de l'envoi ne joue pas de rôle sur la détermination du dies a quo du délai de recours (cf. ATF 144 IV 57 consid. 2.3.2 p. 62; 142 III 599 déjà cité consid. 2.4.1; 122 I 139 consid. 1 p. 143; 115 Ia 12 consid. 3b p. 17). On peut d'ailleurs attendre d'un avocat qu'il tienne compte de ce principe bien établi et recoure en temps utile.  
 
10.  
 
10.1. Le recourant invoque enfin la violation de l'art. 60 al. 1 LPGA. Selon lui, il appartiendrait au Tribunal fédéral de combler une lacune de la LPGA, en énonçant clairement les modes de notification acceptables ou, tout au moins, des règles claires sur l'utilisation du courrier A Plus. Se référant aux règles sur le comblement des lacunes, en relation notamment avec l'art. 29 al. 7 de l'Ordonnance du 29 août 2012 sur la poste (OPO; RS 783.01) et le ch. 2.5.3 des conditions générales de la poste ("Prestations du service postal" pour les clients commerciaux), il considère qu'une distribution le samedi doit être exclue.  
 
10.2. Le grief est mal fondé. En effet, au risque de se répéter, dans le domaine des assurances sociales, le dépôt dans la boîte aux lettres ou la case postale d'un envoi, par courrier A Plus, constitue le point de départ pour le calcul du délai de recours, quand bien même la livraison a lieu un samedi et que le pli n'est récupéré qu'à une date ultérieure, comme le lundi suivant. Il n'y a pas lieu de revenir sur cette jurisprudence que le Tribunal fédéral a confirmée à maintes reprises (cf. notamment arrêts 8C_754/2018 consid. 7.2.3 déjà cité; 9C_655/2018 du 28 janvier 2019 consid. 4.4; 8C_559/2018 déjà cité consid. 3.4; 9C_90/2015 du 2 juin 2015 consid. 3.4; 8C_198/2015 du 30 avril 2015 consid. 3.2; 8C_573/2014 déjà cité consid. 3.1). Le recourant ne prétend d'ailleurs pas que les conditions d'un changement de jurisprudence seraient remplies (à ce sujet cf. ATF 144 IV 265 consid. 2.2 p. 269; 142 V 212 consid. 4.4 p. 117; 139 V 307 consid. 6.1 p. 313). Au demeurant, le fait que le samedi n'est pas mentionné comme jour "ouvrable et de dépôt" à l'art. 29 al. 7 OPO ne signifie pas pour autant que les envois ne peuvent pas être distribués ce jour-là. Quant au ch. 2.5.3 "Dimanche et jours fériés" des conditions générales susmentionnées, il prévoit que "si la date de distribution (= échéance) tombe un dimanche ou un autre jour férié reconnu, au niveau étatique ou par l'usage local, au lieu de la prestation, le premier jour ouvrable qui suit ce dimanche ou jour férié est considéré date de distribution". On ne peut pas en déduire que le samedi est un jour férié au sens de cette disposition, auquel cas il serait mentionné au même titre que le dimanche. Par ailleurs et comme l'ont indiqué les premiers juges, la référence à l'art. 1 de la loi fédérale du 21 juin 1963 sur la supputation des délais (RS 73.110.3) n'est pas davantage pertinente, car cette disposition ne concerne que la fin du délai de recours et non son commencement. Enfin, la fermeture des bureaux de l'administration, et à plus forte raison des cabinets d'avocats, ne suffit pas en soi pour reconnaître au samedi le caractère de jour férié (cf. arrêts 6B_730/2013 du 10 décembre 2013 consid. 1.3.2 et les arrêts cités; 1P.322/2006 du 25 juillet 2006 consid. 2.5).  
 
11.   
Il s'ensuit que le recours est en tous points mal fondé et doit être rejeté. 
Le recourant, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est rejeté. 
 
2.   
Les frais judiciaires, arrêtés à 800 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
3.   
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice de la République et canton de Genève et à l'Office fédéral de la santé publique. 
 
 
Lucerne, le 23 avril 2019 
 
Au nom de la Ire Cour de droit social 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Maillard 
 
La Greffière : Castella