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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
8C_89/2010 
 
Arrêt du 4 octobre 2010 
Ire Cour de droit social 
 
Composition 
Mmes et M. les Juges Leuzinger, Juge présidant, Frésard et Niquille. 
Greffier: M. Métral. 
 
Participants à la procédure 
Office fédéral des assurances sociales, Effingerstrasse 20, 3003 Berne, 
recourant, 
 
contre 
 
K.________, 
représenté par Me Christian Bruchez, avocat, 
intimé, 
 
Caisse de compensation Gastrosocial, 
Heinerich Wirri-Strasse 3, 5001 Aarau. 
 
Objet 
Allocation familiale, 
 
recours contre le jugement du Tribunal des assurances sociales du canton de Genève du 19 novembre 2009. 
 
Faits: 
 
A. 
K.________, de nationalité turque, domicilié à N.________, est père de six enfants domiciliés quant à eux en Turquie. Il travaille comme salarié au sein du restaurant X.________. Son employeur est affilié à la caisse de compensation Gastrosocial (ci-après : la Caisse). 
Par décision du 2 mars 2009 et décision sur opposition du 6 avril 2009, la Caisse a refusé d'allouer à K.________ des allocations familiales pour la période courant dès le 1er janvier 2009. Elle s'est référée à la loi fédérale sur les allocations familiales, du 24 mars 2006 (LAFam; RS 836.2), ainsi qu'à l'ordonnance sur les allocations familiales, du 31 octobre 2007 (OAFam; RS 836.21), entrées en vigueur le 1er janvier 2009, en précisant qu'elles ne prévoyaient le versement d'allocations familiales pour des enfants domiciliés à l'étranger que si une Convention entre la Suisse et l'Etat de domicile le prévoyait. Une telle convention n'existait pas entre la Suisse et la Turquie. 
 
B. 
K.________ a déféré la cause au Tribunal des assurances sociales du canton de Genève. Par jugement du 19 novembre 2009, celui-ci a admis le recours, annulé la décision sur opposition du 6 avril 2009 et renvoyé la cause à la Caisse pour nouvelle décision au sens des considérants. En substance, la Caisse était invitée à vérifier si les conditions posées par l'art. 7 al. 1 let. a à d OAFam étaient remplies et, dans l'affirmative, à verser les allocations familiales requises malgré l'absence de convention internationale ad hoc avec la Turquie. 
 
C. 
L'Office fédéral des assurances sociales interjette un recours en matière de droit public contre ce jugement. Il conclut, en substance, à l'annulation du jugement entrepris et au refus des prestations litigieuses. L'intimé conclut, sous suite de dépens, à l'irrecevabilité du recours pour défaut de motivation; à titre subsidiaire, il en demande le rejet. 
La Caisse a également recouru contre le jugement entrepris. Son recours fait l'objet d'un arrêt séparé, dans la cause 8C_93/2010. 
 
Considérant en droit: 
 
1. 
Le Tribunal fédéral examine d'office si les conditions de recevabilité des recours qui lui sont soumis sont remplies (ATF 134 V 443 consid. 1 p. 444; 133 II 249 consid. 1.1 p. 251). 
 
2. 
D'après l'art. 89 al. 2 let. a LTF, ont notamment qualité pour interjeter un recours de droit public au Tribunal fédéral la Chancellerie fédérale, les départements fédéraux ou, pour autant que le droit fédéral le prévoie, les unités qui leur sont subordonnées, si l'acte attaqué est susceptible de violer la législation fédérale dans leur domaine d'attributions. En l'occurrence, l'Office fédéral des assurances sociales peut se prévaloir de la qualité pour recourir devant le Tribunal fédéral contre les jugements rendus par les tribunaux cantonaux des assurances, que lui confère l'art. 19 al. 1, 1ère phrase OAFam dans le domaine des allocations familiales. 
 
3. 
3.1 Aux termes de l'art. 90 LTF, le recours en matière de droit public est recevable contre les décisions qui mettent fin à la procédure. Il est notamment recevable contre toute décision qui statue sur un objet dont le sort est indépendant de celui qui reste en cause ou qui met fin à la procédure à l'égard d'une partie des consorts (décision partielle; art. 91 let. a et b LTF). Le recours est également recevable contre les décisions préjudicielles et incidentes qui sont notifiées séparément et qui portent sur la compétence ou sur une demande de récusation (art. 92 al. 1 LTF). Les autres décisions préjudicielles ou incidentes notifiées séparément peuvent faire l'objet d'un recours si elles peuvent causer un préjudice irréparable ou si l'admission du recours peut conduire immédiatement à une décision finale qui permet d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse (art. 93 al. 1 let. a et b LTF). 
 
3.2 Un jugement qui ne tranche que certains aspects d'un rapport juridique litigieux n'est en principe pas un jugement partiel, mais un jugement incident qui ne peut faire l'objet d'un recours qu'aux conditions des art. 92 et 93 LTF. Tel sera généralement le cas, par exemple, d'un jugement par lequel un tribunal renvoie la cause à un assureur social pour nouvelle décision, en lui donnant des instructions sur la manière de trancher certains aspects du rapport de droit litigieux (ATF 133 V 477 consid. 4 p. 480 ss). Il n'en va différemment que si le jugement de renvoi contient des instructions très précises à l'intention de l'autorité inférieure, au point que cette dernière ne dispose plus d'aucune latitude pour statuer et qu'il ne lui reste finalement qu'à exécuter le jugement. Dans une telle hypothèse, le jugement de renvoi doit être qualifié de final (ATF 135 V 141 consid. 1.1 p. 143). 
 
3.3 Les premiers juges ont interprété l'art. 7 al. 1 let. a à d OAFam en ce sens que pour les enfants ayant leur domicile à l'étranger, les allocations familiales devaient être versées lorsqu'une convention internationale le prévoyait ou lorsque les conditions prévues aux let. a à d étaient remplies. Ils se sont écartés d'une interprétation littérale de cette disposition, au motif notamment qu'une telle interprétation serait incompatible avec l'art. 4 al. 3 LAFam. Les premiers juges ont ensuite constaté qu'aucune convention internationale entre la Suisse et la Turquie n'imposait aux autorités le versement d'allocations familiales pour les enfants domiciliés à l'étranger. Ils ont renvoyé la cause à la Caisse pour qu'elle vérifie si les conditions posées aux lettres a à d de l'art. 7 al. 1 OAFam étaient remplies et, le cas échéant, qu'elle alloue les prestations litigieuses. Il s'agit d'une décision incidente, par laquelle les premiers juges n'ont tranché qu'un aspect du rapport juridique litigieux. Le recours n'est donc recevable qu'aux conditions posées par l'art. 93 al. 1 let. a ou b LTF, l'art. 92 LTF n'entrant pas en considération en l'espèce. 
 
4. 
4.1 La jurisprudence a admis que l'autorité qui voit sa décision initiale annulée et doit statuer à nouveau encourt un risque de préjudice irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF lorsque le jugement incident lui donne des instructions, qu'elle entend contester, sur la manière de statuer sur certains aspects du rapport juridique litigieux. En effet, l'autorité ne pourra plus recourir contre sa propre décision après avoir suivi les instructions du jugement de renvoi avec lesquelles elle n'est pas d'accord. Elle doit donc pouvoir recourir immédiatement contre ce jugement (ATF 133 V 477 consid. 5.2 p. 483). 
Dans le consid. 1.3 non publié de l'ATF 134 II 287 (arrêt 2C_76/2008 du 2 juillet 2008), le Tribunal fédéral a considéré que si une autre autorité que celle qui est invitée à statuer à nouveau dispose de la qualité pour recourir devant le Tribunal fédéral, elle peut elle aussi contester immédiatement le jugement de renvoi sans attendre la décision finale à rendre conformément à ce jugement. Selon cette jurisprudence, il n'y aurait aucun sens à exiger de cette autorité qu'elle suive à nouveau toutes les voies de recours successives contre la décision finale, alors que l'admission du recours contre la décision incidente pourrait mettre fin immédiatement au litige. Dans une telle situation, le Tribunal fédéral a admis, à l'époque, qu'il existait un risque de préjudice irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF, justifiant d'entrer en matière sur le recours. Depuis lors, toutefois, il a fortement limité la portée de cette jurisprudence. Il a notamment refusé d'en faire bénéficier une autorité qui n'avait pas, préalablement, participé à la procédure ayant conduit au jugement de renvoi (cf. arrêts 2C_258/2008 du 27 mars 2009 consid. 3.5 ss, in StE 2009 B 96.21 no 14, 2C_420/2008 du 3 février 2009 consid. 4.4 ss, in StE 2010 A 23.21 no 2). Dans le domaine de l'assurance-chômage, le Tribunal fédéral a ainsi régulièrement nié la recevabilité de recours du Secrétariat d'Etat à l'économie contre des jugements cantonaux incidents de renvoi (arrêts 8C_227/2010 du 7 avril 2010, 8C_607/2009 du 25 août 2009, 8C_817/2008 du 19 juin 2009 consid. 4.2.1 sv.). 
 
4.2 En l'espèce, l'Office fédéral des assurances sociales ne soutient pas qu'il subirait un préjudice irréparable si le jugement entrepris ne devait pas être susceptible de recours immédiat. Par ailleurs, il n'a pas participé à la procédure devant la juridiction cantonale et pourra s'opposer à la décision à rendre par la Caisse à la suite du jugement litigieux ainsi que, le cas échéant, attaquer la décision sur opposition devant le Tribunal cantonal, conformément à l'art. 111 al. 2 LTF et au principe d'unité de la procédure (cf. ATF 134 V 306 consid. 3.3.1 p. 311; 133 V 188 consid. 4.2 p. 191). Dans ces conditions, il n'y a pas lieu d'admettre que la condition posée par l'art. 93 al. 1 let. a LTF à la recevabilité du recours contre une décision incidente serait remplie en l'espèce. 
 
4.3 La condition alternative posée par l'art. 93 al. 1 let. b LTF à la recevabilité d'un tel recours n'est pas davantage remplie en l'espèce. En effet, rien n'indique - et le recourant ne l'allègue pas - que l'exécution du jugement entrepris impliquerait la mise en oeuvre d'une procédure probatoire longue et coûteuse. 
 
5. 
Vu ce qui précède, le recours interjeté par l'Office fédéral des assurances sociales contre le jugement incident du 19 novembre 2009 n'est pas recevable, sans qu'il soit nécessaire de se prononcer sur l'argumentation de l'intimé relative au défaut de motivation du mémoire de recours. 
Il n'y a pas lieu de percevoir de frais de justice (art. 66 al. 1 et 4 LTF), mais l'intimé peut prétendre une indemnité de dépens à la charge du recourant (art. 68 al. 1 LTF). Il sera toutefois tenu compte, pour fixer le montant des dépens, du fait que l'intimé a pu produire une même réponse aux recours interjetés par l'Office fédéral des assurances sociales dans la présente cause, d'une part, et par la Caisse, dans la cause 8C_93/2010, d'autre part. 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
 
1. 
Le recours est irrecevable. 
 
2. 
Il n'est pas perçu de frais judiciaires. 
 
3. 
Le recourant versera à l'intimé la somme de 1400 fr. à titre de dépens pour la dernière instance. 
 
4. 
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à la Caisse de compensation Gastrosocial et au Tribunal des assurances sociales du canton de Genève. 
 
Lucerne, le 4 octobre 2010 
Au nom de la Ire Cour de droit social 
du Tribunal fédéral suisse 
La Juge présidant: Le Greffier: 
 
Leuzinger Métral