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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
                 
 
 
6B_610/2017  
 
 
Arrêt du 23 mars 2018  
 
Cour de droit pénal  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Denys, Président, Jacquemoud-Rossari et Rüedi. 
Greffière : Mme Musy. 
 
Participants à la procédure 
X.________, 
représentée par Me Laura Emonet, avocate, 
recourante, 
 
contre  
 
Ministère public central du canton de Vaud, 
intimé. 
 
Objet 
Infraction à la LStup, surveillance téléphonique, 
 
recours contre le jugement de la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 20 mars 2017 (135 [PE15.000265-CDT/VBA]). 
 
 
Faits :  
 
A.   
Par jugement du 17 novembre 2016, le Tribunal de police de l'arrondissement de Lausanne a constaté que X.________ s'était rendue coupable d'infraction et de contravention à la Loi fédérale du 3 octobre 1951 sur les stupéfiants et les substances psychotropes (LStup; RS 812.121) et l'a condamnée à une peine privative de liberté de trois mois sous déduction de 18 jours de détention préventive et à une amende de 300 fr. convertible en une peine privative de liberté de substitution de 3 jours en cas de non-paiement fautif. 
 
B.   
Statuant sur l'appel de X.________, la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal vaudois l'a rejeté par jugement du 20 mars 2017. En substance, la Cour d'appel pénale a constaté qu'entre le 7 janvier 2013, les faits antérieurs étant prescrits, et le 8 janvier 2015, date de son interpellation, X.________ avait consommé des pilules thaïes, à raison de dix à vingt pilules par mois, durant quatre à huit mois par année. Entre août ou septembre 2014 et le 8 janvier 2015, X.________ avait également consommé occasionnellement de la marijuana. Par ailleurs, entre janvier 2013 et le 8 janvier 2015, X.________ s'était livrée à un trafic de pilules thaïes et de cristal, achetant notamment à A.________ et à B.________ pour le compte de plusieurs personnes. Il était ainsi établi que l'intéressée avait vendu ou remis plus de quinze pilules thaïes et plus de quarante-deux grammes de cristal. 
 
C.   
X.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre ce jugement. Elle conclut, avec suite de frais et dépens, à la réforme du jugement entrepris en ce sens qu'elle est libérée de toute infraction, subsidiairement à l'annulation du jugement entrepris et au renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision. Elle sollicite par ailleurs le bénéfice de l'assistance judiciaire. 
 
D.   
Invités à se déterminer sur le recours, le Ministère public et la cour cantonale n'ont pas présenté d'observations. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
La recourante remet en cause sa condamnation en invoquant l'illicéité de la mesure de surveillance téléphonique en temps réel dont elle a été l'objet, et fait valoir, partant, l'inexploitabilité des preuves du dossier en découlant. 
 
1.1. Selon l'art. 269 al. 1 CPP, le ministère public peut ordonner la surveillance de la correspondance par poste et télécommunication aux conditions suivantes: de graves soupçons laissent présumer que l'une des infractions visées à l'alinéa 2 a été commise (let. a; ci-après consid. 2.2); cette mesure se justifie au regard de la gravité de l'infraction (let. b); les mesures prises jusqu'alors dans le cadre de l'instruction sont restées sans succès ou les recherches n'auraient aucune chance d'aboutir ou seraient excessivement difficiles en l'absence de surveillance (let. c). Seules les infractions visées par le catalogue exhaustif de l'art. 269 al. 2 CPP peuvent justifier une surveillance; parmi celles-ci figurent les infractions réprimées à l'art. 19 al. 2 LStup (art. 269 al. 2 let. f CPP).  
La surveillance de la correspondance par poste et télécommunication est soumise à l'autorisation du tribunal des mesures de contrainte (art. 272 al. 1 CPP). L orsque la procédure d'autorisation des mesures de surveillance a abouti à une décision du tribunal des mesures de contrainte (art. 272 al. 1 CPP en lien avec l'art. 274 CPP) et que celle-ci a été valablement communiquée à l'intéressé (art. 279 al. 1 CPP), le prononcé qui confirme - ou infirme - la réalisation des conditions matérielles ( art. 269 CPP) est une décision incidente susceptible de causer un préjudice irréparable (art. 93 al. 1 let. a LTF). En effet, la question de l'exploitabilité des informations - objet d'un éventuel recours cantonal en vertu des art. 279 al. 3 et 393 al. 1 let. c CPP - ne peut en principe plus être examinée par le juge du fond (ATF 140 IV 40 consid. 1.1 p. 42; arrêt 1B_366/2017 du 13 décembre 2017 consid. 1.2.2 non destiné à la publication). 
 
1.2. En l'espèce, il ressort du dossier cantonal que, par décision du 22 décembre 2014, le tribunal des mesures de contrainte a statué sur la demande du ministère public et autorisé la surveillance en temps réel du raccordement téléphonique utilisé par la recourante.  
Rien n'est dit, dans la décision attaquée, sur la recevabilité du grief tiré de l'illicéité de la surveillance secrète soulevé à l'encontre de la décision de condamnation de première instance, la cour cantonale examinant d'emblée le grief sur le fond. Les faits établis par l'autorité précédente ne permettent en particulier pas de déterminer si la recourante avait été informée, à l'issue de la procédure préliminaire, de la surveillance et de son droit de faire recours (cf. art. 279 CPP), ou si cette communication avait été omise, ce qui pourrait expliquer qu'il n'y ait pas eu de recours formé immédiatement conformément aux art. 298 al. 3 et 393 ss CPP. Dans ces circonstances, il n'est pas certain que la recourante soit recevable à attaquer sa condamnation en se prévalant d'un vice affectant la procédure préliminaire, qui n'est en principe plus revu avec le fond. La question peut cependant demeurer ouverte, car le recours est en tous les cas infondé pour les motifs qui suivent. 
 
2.   
La recourante soutient que la mesure de surveillance téléphonique ordonnée ne reposait pas sur de " graves soupçons " au sens de l'art. 269 al. 1 let. a CPP. Elle invoque une violation des principes de proportionnalité et de subsidiarité. 
 
2.1. En vertu du principe de proportionnalité (art. 197 al. 1 let. c et d et 269 al. 1 let. b CPP), la mesure de surveillance doit être adéquate et poursuivre un intérêt public; elle doit ainsi être susceptible d'obtenir des résultats concrets. Les circonstances d'espèce sont dès lors déterminantes pour examiner la gravité de l'infraction; à cet égard, il n'est pas en soi suffisant que celle-ci figure dans le catalogue de l'art. 269 al. 2 CPP. La surveillance est ainsi admissible si, objectivement et subjectivement, elle se justifie au regard de la nature du bien juridiquement protégé atteint par l'acte punissable, la mise en danger de ce dernier, la gravité de la lésion, le mode opératoire utilisé, l'énergie criminelle déployée et/ou les mobiles de l'auteur (ATF 142 IV 289 consid. 3.1 p. 295; 141 IV 459 consid. 4.1 p. 461 s.).  
Une surveillance ne peut être autorisée que si elle respecte le principe de subsidiarité (art. 269 al. 1 let. c CPP). Celui-ci présuppose notamment que l'autorité examine d'abord si une autre mesure moins incisive peut atteindre le résultat recherché (ultima ratio; ATF 142 IV 289 consid. 3.1 p. 295 s.; 141 IV 459 consid. 4.1 p. 462). 
Dans le cadre particulier d'un recours contre une décision relative à une mesure secrète, l'autorité de recours doit fonder son appréciation sur les circonstances qui prévalaient au moment où l'autorité d'autorisation a statué (ATF 141 IV 459 consid. 4.3 p. 465; 140 IV 40 consid. 4.2 p. 43). 
 
2.2. Selon un rapport du 16 décembre 2014 (pièce 4), les services de police ont fait état de ce que, de source confidentielle, ils avaient appris qu'un surnommé C.________ s'adonnait à la vente de pilules thaïes et avait ainsi vendu, entre les mois d'octobre et novembre 2014, au moins 400 pilules de cette drogue pour un montant de 10'000 francs. Les recherches effectuées par la police avaient permis d'identifier cet individu. La police indiquait également que l'amie de ce dernier, qui n'avait pas encore été identifiée, était également active dans ce trafic. Fondé sur ce rapport, le ministère public a ordonné la surveillance en temps réel des raccordements téléphoniques utilisés par C.________ et par la recourante pour des soupçons de la commission d'infractions visées à l'art. 269 al. 2 CP.  
 
2.2.1. Les soupçons de la commission d'une infraction se fondent ainsi sur les constatations émises dans un rapport de police. A ce sujet, le Tribunal fédéral a déjà eu l'occasion d'observer que le statut particulier de la police ne la dispensait pas de manière générale d'expliquer, même brièvement, l'origine de ses soupçons (indicateur, pièce et/ou propres observations effectuées). Toutefois, au regard du stade précoce de l'enquête et sans autre indication permettant en l'état d'étayer la thèse d'une violation des art. 140 al. 1 CPP ou 282 al. 2 CPP, le ministère public doit pouvoir partir du principe que les éléments figurant dans les rapports de la police dénonçant une infraction ont été récoltés de manière conforme aux obligations incombant aux services de police. Ces rapports - qui résument généralement les investigations menées - ne sont ainsi prima facie pas dénués de toute valeur probante. En outre, si les auteurs du rapport devaient être entendus au cours de la procédure, ils comparaîtraient en tant que témoins, soumis alors aux droits et obligations liés à cette qualité. Il en découle que les constatations émises par la police dans ses rapports sont en principe suffisantes, même en l'absence d'autres pièces, pour justifier l'ouverture d'une instruction formelle; c'est en effet dans ce cadre que ceux-ci pourront être confirmés ou infirmés (ATF 142 IV 289 consid. 3.1 p. 296 s. et les références citées).  
Pour déterminer ensuite si ces mêmes indices permettent une surveillance secrète ou s'ils devraient être étayés préalablement, le stade de la procédure au moment où une telle mesure est sollicitée ne peut être ignoré. Pour respecter le principe de proportionnalité, il convient également de prendre en compte la nature de l'infraction dénoncée. Il est en particulier notoire que les enquêtes relatives à des trafics de stupéfiants touchent un grand nombre de personnes (acheteurs, vendeurs, "mules", etc.) et que celles-ci communiquent principalement par le biais de téléphones portables. L'interpellation de ces personnes - respectivement leur maintien, peut-être temporaire, en liberté - peut permettre d'identifier d'autres membres du réseau, voire de le démanteler. Ce genre d'enquêtes peut aussi impliquer l'ouverture de différentes procédures pénales et l'avancée de celles-ci a lieu souvent par le biais de recoupement d'informations. Afin de réduire le risque de collusion pouvant en découler, il se justifie, le cas échéant, de ne pas divulguer immédiatement les origines de certaines informations, notamment au début d'une instruction (ATF 142 IV 289 consid. 3.1-3.2 p. 298 et les références citées). 
 
2.2.2. Au vu du stade précoce de l'enquête visant la recourante, le ministère public pouvait fonder de " graves soupçons " au sens de l'art. 269 al. 1 let. a CPP sur la base des indications du rapport de police mentionnant une " source sûre et confidentielle ", à tout le moins pour une courte période (cf. ATF 142 IV 289 consid. 3.3 p. 299). La surveillance a été mise en place dès le 17 décembre 2014 et la police a rendu un rapport sur les résultats de la mesure le 8 janvier 2015, duquel il ressortait que la recourante était effectivement active dans le trafic de produits stupéfiants, même si elle n'avait pas de contact avec le dénommé C.________ (pièce 11/1). Les soupçons d'une activité délictueuse en lien avec l'achat et la vente de stupéfiants ont donc été confirmés rapidement. La mesure de surveillance litigieuse était par ailleurs appropriée eu égard à la gravité de l'infraction sur laquelle portaient les soupçons, à savoir l'implication de la recourante dans un important trafic de stupéfiants, et apte à faire progresser l'enquête sur ledit trafic. La mesure respecte donc le principe de proportionnalité.  
 
2.3. En ce qui concerne le principe de subsidiarité, à teneur de la demande d'autorisation du ministère public adressé au tribunal des mesures de contrainte, seule la mise en place de cette mesure permettait d'identifier l'inconnue, de déterminer son implication dans ce trafic, de la localiser et ainsi de pouvoir l'interpeller, d'identifier ses éventuels comparses ainsi que ses clients et donc de déterminer l'étendue de son activité délictueuse (pièce 8). La cour cantonale a retenu qu'il était notoire que les membres d'un réseau de trafiquants évitent de se téléphoner, changent fréquemment d'appareil, de carte SIM etc., de sorte qu'un contrôle des relations téléphoniques entre la recourante et C.________ n'aurait pas été suffisant pour détecter des contacts.  
A cela s'ajoute que le but de la mesure n'était pas uniquement de vérifier l'existence de contacts entre C.________ et la recourante, mais d'identifier celle-ci - sachant qu'elle utilisait un raccordement téléphonique au nom d'un tiers -, ainsi que les autres membres du réseau et ses clients, et de déterminer l'étendue de son activité délictueuse. De plus, dans la mesure où elle était soupçonnée d'organiser des livraisons, la surveillance téléphonique en temps réel pouvait également permettre de déterminer quand et où pourrait avoir lieu une future livraison (cf. ATF 142 IV 289 consid. 3.2 p. 199), contrairement à un contrôle rétroactif. 
En ce sens, il apparaît que les investigations nécessaires à confondre la suspecte, à déterminer l'ampleur du trafic déployé et à identifier ses comparses et ses clients auraient été excessivement difficiles à mener à défaut de la mesure de surveillance ordonnée, de sorte que le principe de subsidiarité est satisfait. 
 
2.4. Au regard de ce qui précède, la cour cantonale pouvait retenir que la mesure de surveillance avait été ordonnée en conformité avec les exigences de l'art. 269 al. 1 CPP.  
 
3.   
La recourante se plaint de la violation de son droit d'être entendue au motif qu'aucune information au sujet de l'enquête diligentée contre le dénommé C.________ ne lui a été fournie et que celui-ci n'a pas été entendu. 
Il ne ressort pas du jugement attaqué que la recourante se serait plainte d'une violation de son droit d'être entendue, et elle n'invoque pas à cet égard un déni de justice formel. Elle n'a pas non plus requis l'administration de moyens de preuve complémentaires devant la cour cantonale. La recevabilité du grief, soulevé pour la première fois devant le Tribunal fédéral, paraît d'ores et déjà douteuse sous l'angle de la bonne foi (cf. ATF 142 I 155 consid. 4.4.6). 
Au demeurant, la recourante ne dit pas en quoi des informations sur l'enquête dirigée contre C.________ et l'audition de celui-ci pourraient servir sa propre cause. Même à supposer que les soupçons élevés contre lui se soient révélés infondés, cela est sans influence sur la question de savoir si, au moment où l'autorisation de surveillance du téléphone de la recourante a été donnée (cf. consid. 2.1), des soupçons graves au sens de l'art. 269 al. 1 let. a CPP pesaient sur elle, ce qui ressort du reste suffisamment de ce qui précède (consid. 2.2 supra). Les moyens de preuve que la recourante aurait souhaité voir administrés sont ainsi sans pertinence, de sorte que le grief de violation du droit d'être entendu est de toute façon infondé. 
Pour le surplus, la recourante ne formule aucune critique quant à la matérialité des faits ou leur qualification juridique. 
 
4.   
Sur le vu de ce qui précède, il y a lieu de rejeter le recours dans la mesure où il est recevable. Il était d'emblée dénué de chances de succès. L'assistance judiciaire doit être refusée (art. 64 al. 1 LTF). La recourante supporte les frais de la cause, qui seront fixés en tenant compte de sa situation économique, qui n'apparaît pas favorable (art. 65 al. 2 et 66 al. 1 LTF). 
 
 
 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.   
La demande d'assistance judiciaire est rejetée. 
 
3.   
Les frais judiciaires, arrêtés à 1'200 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
4.   
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
 
 
Lausanne, le 23 mars 2018 
 
Au nom de la Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Denys 
 
La Greffière : Musy