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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
{T 0/2} 
 
8C_606/2013  
   
   
 
   
   
 
 
 
Arrêt du 24 juin 2014  
 
Ire Cour de droit social  
 
Composition 
Mmes et M. les Juges fédéraux Leuzinger, Présidente, Frésard et Heine. 
Greffière : Mme von Zwehl. 
 
Participants à la procédure 
AXA Assurances SA,  
General Guisan-Strasse 40, 8400 Winterthur, représentée par Me Jean-Claude Schweizer, avocat, Etude Schweizer-Lambert-Burgat, 
recourante, 
 
contre  
 
A.________, France, 
représenté par Me Jean-Daniel Kramer, avocat, 
intimé. 
 
Objet 
Assurance-accidents (lésion corporelle assimilée à un accident), 
 
recours contre le jugement de la Cour de droit public 
du Tribunal cantonal de la République et canton de Neuchâtel du 10 juillet 2013. 
 
 
Faits :  
 
A.   
A.________ travaillait en qualité de magasinier au service de l'entreprise de pose de fenêtres B.________ Sàrl. A ce titre, il était assuré contre les accidents professionnels et non professionnels par AXA Assurances SA (ci-après: AXA). 
Le 22 février 2011, A.________ a trébuché et fait une chute sur son épaule droite, le bras collé au corps. Ce jour-là, le prénommé avait rendez-vous avec son médecin traitant en orthopédie, le docteur C.________, pour un contrôle du genou. Il lui a donc montré son épaule douloureuse. Le docteur C.________ a constaté un défaut complet de l'abduction, posé le diagnostic de probable rupture de la coiffe des rotateurs droite, et attesté une incapacité de travail de 100 % dès la date de l'événement, qu'il a annoncé à AXA par déclaration d'accident du 8 mars 2011. 
Vu l'absence d'amélioration par physiothérapie, le docteur C.________ a fait réaliser une arthro-IRM de l'épaule droite le 22 mars 2011, qui a mis en évidence notamment une rupture avec rétraction du tendon du supra-épineux et une atrophie musculaire discrète à modérée. Le docteur D.________, médecin-conseil de AXA, a exprimé l'opinion que l'événement assuré n'avait probablement que révélé et non pas causé un état pathologique préexistant majeur de l'épaule droite; il a suggéré la mise en oeuvre d'une expertise. Mandaté à cette fin par AXA, le docteur E.________ a déclaré que l'action vulnérante de l'événement lui paraissait certes susceptible de léser un tendon de la coiffe des rotateurs vu la manière dont l'assuré avait chuté et la surcharge pondérale de celui-ci (BMI à 40); d'autres éléments en défaveur de cette hypothèse l'amenaient toutefois à conclure qu'un lien de causalité entre la chute et l'atteinte à l'épaule droite était invraisemblable - il en voulait pour preuve la présence d'une tendinopathie chronique aux deux épaules, plus importante à droite qu'à gauche, ainsi que d'une arthrose acromio-claviculaire, l'existence d'éléments de non organicité, l'âge de l'assuré au moment de la lésion (62 ans) et, enfin, certaines caractéristiques visibles à l'IRM telles qu'une atrophie du corps charnu du sus-épineux, l'étendue de la rétraction tendineuse ainsi que l'aspect scléreux du trochiter (rapport du 28 juin 2011). Dans une lettre du 18 octobre 2011, le docteur C.________ a exposé un avis contraire, en précisant que A.________ ne s'était jamais plaint de ses épaules auparavant. 
Par décision du 28 février 2012, AXA a refusé de prendre en charge les conséquences de l'atteinte à l'épaule droite postérieurement au 31 mai 2011, motivant son refus par les conclusions du docteur E.________. A.________ a formé opposition contre cette décision. Il a produit une expertise privée du professeur F.________, spécialiste en orthopédie au Centre hospitalier G.________, selon lequel il existait un lien vraisemblable entre la chute du 22 février 2011 et la pathologie actuelle de l'assuré qui nécessitait une intervention chirurgicale (rapport du 10 septembre 2012). AXA a soumis ce document à son médecin-conseil qui a considéré l'expertise du docteur E.________ plus convaincante que celle du docteur F.________. Dans une nouvelle décision du 8 octobre 2012, l'assureur-accidents a écarté l'opposition de l'assuré et confirmé sa prise de position initiale. 
 
B.   
Saisie d'un recours de l'assuré, la Cour de droit public du Tribunal cantonal neuchâtelois l'a admis, annulé la décision sur opposition du 8 octobre 2012 et renvoyé la cause à AXA pour nouvelle décision selon les considérants (arrêt du 10 juillet 2013). 
 
C.   
AXA interjette un recours en matière de droit public. Sous suite de frais et dépens, elle conclut à l'annulation de l'arrêt cantonal et à la confirmation de sa décision sur opposition du 8 octobre 2012. 
A.________ conclut au rejet du recours. L'Office fédéral de la santé publique (OFSP) a renoncé à se déterminer. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
Le jugement entrepris constate que AXA doit répondre de la lésion à l'épaule droite au-delà du 31 mai 2011, et lui renvoie la cause pour qu'elle fixe les prestations à allouer à l'assuré et qu'elle examine à nouveau à partir de quand le status quo sine/ante pourrait être considéré comme atteint. Formellement, il s'agit d'une décision de renvoi. En principe, les décisions de renvoi sont des décisions incidentes qui ne peuvent faire l'objet d'un recours au Tribunal fédéral qu'aux conditions de l'art. 93 LTF (ATF 133 V 477 consid. 4.2 et 4.3 p. 481 et les références citées). Dans la mesure où la recourante est tenue, en vertu de ce renvoi, de rendre une décision qui, selon elle, est contraire au droit fédéral, elle subit un préjudice irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF (sur cette notion, voir ATF 134 I 83 consid. 3.1 p. 87). Un recours immédiat au Tribunal fédéral est donc possible dans ce cas. 
 
2.   
Le litige concerne des prestations en nature (traitement médical) aussi bien qu'en espèces (indemnités journalières), de sorte que le Tribunal fédéral dispose d'un pouvoir d'examen étendu en ce qui concerne les faits communs aux deux types de prestations (voir arrêt 8C_584/2009 du 2 juillet 2010 consid. 4). 
 
3.  
 
3.1. Les lésions mentionnées à l'art. 9 al. 2 OLAA, dont font partie les ruptures de la coiffe des rotateurs (let. f), sont assimilées à un accident même si elles ont, pour l'essentiel, une origine vraisemblablement maladive ou dégénérative, pour autant qu'une cause extérieure ait, au moins, déclenché les symptômes dont souffre l'assuré (ATF 139 V 327 consid. 3.1 p. 328; 129 V 466; 123 V 43 consid. 2b p. 44; 116 V 145 consid. 2c p. 147; 114 V 298 consid. 3c p. 301). Si, par contre, une telle lésion est survenue sans avoir été déclenchée par un facteur extérieur soudain et involontaire, elle est manifestement imputable à une maladie ou à des phénomènes dégénératifs et il appartient à l'assurance-maladie d'en prendre en charge les suites.  
 
3.2. Le droit aux prestations pour une lésion assimilée à un accident prend fin lorsque le retour à un statu quo ante ou à un statu quo sine est établi. Toutefois, de telles lésions seront assimilées à un accident aussi longtemps que leur origine maladive ou dégénérative, à l'exclusion d'une origine accidentelle, n'est pas clairement établie. On ne se fondera donc pas simplement sur le degré de vraisemblance prépondérante pour admettre l'évolution d'une telle atteinte vers un statu quo sine (cf. arrêts 8C_347/2013 du 18 février 2014 consid. 3.2, 8C_698/2007 du 27 octobre 2008 consid. 4.2, 8C_551/2007 du 8 août 2008 consid. 4.1.2, et 8C_357/2007 du 31 janvier 2008 consid. 2).  
 
3.3. Ces règles sont également applicables lorsqu'une des lésions mentionnées à l'art. 9 al. 2 OLAA est survenue lors d'un événement répondant à la définition de l'accident au sens de l'art. 6 al. 1 LAA. Il faut néanmoins que la lésion corporelle (assimilée) puisse être rattachée à l'accident en cause car, comme on l'a dit, à défaut d'un événement particulier à l'origine de l'atteinte à la santé, il y a lieu de conclure à une lésion exclusivement maladive ou dégénérative (arrêt 8C_347/2013, déjà cité, consid. 3.2).  
 
4.   
La juridiction cantonale a retenu que AXA était tenue de prendre en charge les suites de l'événement accidentel du 22 février 2011, même si une atteinte dégénérative avait joué un rôle important dans la survenance de la lésion à l'épaule. En effet, il était indiscutable que la chute avait déclenché des symptômes chez l'assuré (douleurs et impotence fonctionnelle) et que les examens pratiqués pour rechercher l'origine de ces symptômes avaient mis en évidence une déchirure du tendon supra-épineux (ou sus-épineux). En ce qui concernait la question du retour à un statu quo ante ou de l'évolution vers un statu quo sine au 31 mai 2011, les juges cantonaux ont relevé que la conclusion du docteur E.________ dans le sens de l'absence d'un rapport de causalité entre la chute et l'atteinte ainsi que d'une simple contusion de l'épaule, était le résultat d'une pondération de plusieurs éléments susceptibles d'intervenir dans le problème de la causalité naturelle. Or c'était justement dans de tels cas de figure, où l'influence d'un facteur extérieur, soudain et involontaire, ne pouvait pas être totalement exclue, que l'art. 9 al. 2 OLAA imposait à l'assureur-accidents d'assimiler les lésions tendineuses à un accident, dans le but d'éviter, au profit de l'assuré, la distinction souvent difficile entre maladie et accident, étant admis qu'un certain nombre de cas, en principe du ressort de l'assureur-maladie, étaient ainsi mis à la charge de l'assurance-accidents. 
 
5.   
La recourante justifie sa position de refus de prise en charge arguant que la chute du 22 février 2011 est un événement extérieur inapproprié à causer la lésion constatée et "même impropre à jouer le rôle de révélateur d'un événement pathologique préexistant", tout en mettant également en doute le fait que l'assuré n'aurait pas souffert de douleurs aux épaules avant la survenance de l'accident. Ce faisant, non seulement elle se met en porte-à-faux avec les déclarations de l'expert qu'elle a nommé - le docteur E.________ ayant expressément reconnu que la chute à hauteur d'homme de l'assuré, présentant de surcroît une importante surcharge pondérale, était susceptible de léser un tendon de la coiffe de rotateurs (rapport d'expertise p. 9) -, mais également avec les informations contenues au dossier. A l'époque des faits, l'assuré était suivi par le docteur C.________ pour une opération du genou. Selon les déclarations de ce médecin, dont rien ne permet de douter de leur crédibilité, l'assuré ne s'était jamais plaint de douleurs au niveau des épaules avant l'accident du 22 février 2011, même lorsqu'il avait dû marcher avec des cannes; en outre, celui-ci avait ressenti des douleurs et présentait une impotence fonctionnelle immédiatement après avoir chuté sur son épaule droite (voir la lettre du docteur C.________ du 18 octobre 2011). Dans ces conditions, c'est à juste titre que les premiers juges ont admis l'existence d'une lésion assimilée à un accident et, partant, la responsabilité de la recourante. Il y a également lieu de confirmer leur point de vue sur l'obligation de celle-ci de prester au-delà du 31 mai 2011, dès lors que l'établissement d'un statu quo sine/ante à cette date repose uniquement sur la conclusion du docteur E.________ selon laquelle il n'y aurait jamais eu de lésion assimilée à un accident mais une simple contusion de l'épaule. Comme on l'a dit (voir consid. 3.2 supra), la vraisemblance prépondérante ne suffit pas pour fonder un statu quo ante/sine. L'origine maladive ou dégénérative des lésions doit être manifeste pour exclure tout cause accidentelle. On ne voit pas qu'une telle situation puisse être tenue pour clairement établie dès le 1er juin 2011 dans les considérations des docteurs D.________ et E.________, quand bien même il est certes probable qu'une atteinte dégénérative ait exercé une influence déterminante. 
Il s'ensuit que le jugement attaqué n'est pas critiquable. Le recours est mal fondé. 
 
6.   
La recourante, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). Elle versera en outre une indemnité de dépens à l'intimé (art. 68 al. 1 et 2 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est rejeté. 
 
2.   
Les frais judiciaires, arrêtés à 800 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.   
La recourante versera à l'intimé une indemnité de dépens de 2'800 fr. pour la procédure devant le Tribunal fédéral. 
 
4.   
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal cantonal de la République et canton de Neuchâtel, Cour de droit public, et à l'Office fédéral de la santé publique. 
 
 
Lucerne, le 24 juin 2014 
Au nom de la Ire Cour de droit social 
du Tribunal fédéral suisse 
La Présidente :       La Greffière : 
 
Leuzinger       von Zwehl