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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
6P.141/2005 
6S.450/2005 /viz 
 
Arrêt du 24 janvier 2006 
Cour de cassation pénale 
 
Composition 
MM. les Juges Schneider, Président, 
Kolly et Karlen. 
Greffière: Mme Bendani. 
 
Parties 
A.________, 
recourant, représenté par Maîtres Jacques Barillon 
et Jacques Michod, avocats, 
 
contre 
 
Ministère public du canton de Vaud, 
case postale, 1014 Lausanne, 
Tribunal cantonal du canton de Vaud, Chambre des révisions civiles et pénales, route du Signal 8, 
1014 Lausanne. 
 
Objet 
6P.141/2005 
Demande de révision (art. 9, 29 al. 2 et 32 al. 1 Cst., 
art. 6 CEDH (procédure pénale; arbitraire, violation du droit d'être entendu), 
 
6S.450/2005 
Demande de révision, 
 
recours de droit public (6P.141/2005) et pourvoi en nullité (6S.450/2005) contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Chambre des révisions civiles et pénales, du 25 octobre 2005. 
 
Faits: 
A. 
Par jugement du 1er avril 2004, le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de l'Est vaudois a condamné A.________ pour banqueroute frauduleuse, diminution effective de l'actif au préjudice des créanciers, abus de confiance, escroquerie, faux dans les titres et infraction à la loi fédérale sur l'acquisition d'immeubles par des personnes à l'étranger, à trois ans d'emprisonnement et a ordonné son expulsion pour une durée de neuf ans avec sursis pendant cinq ans. 
Par arrêt du 22 novembre 2004, la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal vaudois a rejeté le recours de A.________. 
Cette condamnation repose notamment sur les faits suivants. 
A.a B.________ a fait divers investissements, dans des buts précis, auprès de la société X.________ SA, dirigée par A.________. Toutefois, dès la fin 1997, A.________ et C.________, qui avaient besoin de liquidités, ont puisé dans les investissements de B.________ pour les affecter à des buts étrangers à ceux convenus avec l'intéressé, de sorte que la société lui était débitrice d'un montant de 448'438 fr. 20. 
A.________ et C.________ ont prétendu avoir remboursé 300'000 US $ à leur créancier en septembre 1999 par l'intermédiaire d'un dénommé D.________. Ils ont produit une quittance qui s'est révélée être un faux grossier, puisque B.________ se trouvait aux Etats-Unis lorsqu'il était censé avoir signé ce document. A.________ s'est en outre prévalu d'un témoignage écrit de D.________ daté du 18 mai 2001. 
A.b Le Tribunal correctionnel n'a pas jugé crédible ce dernier témoignage qui devait attester du versement et a considéré que D.________ était instrumentalisé par A.________. La Cour de cassation a également souligné l'invraisemblance de ce témoignage. 
B. 
Le 27 juillet 2005, A.________ a déposé une demande de révision du jugement du 1er avril 2004. A l'appui de sa requête, il a produit une déclaration écrite du 27 avril 2005 signée de D.________. 
Par arrêt du 25 octobre 2005, la Chambre des révisions civiles et pénales du Tribunal cantonal vaudois a rejeté cette demande, la déclaration produite n'étant pas crédible et donc impropre à modifier les faits retenus. 
C. 
A.________ dépose un recours de droit public pour arbitraire, violation de la présomption d'innocence, du droit d'être entendu et de l'art. 455 CPP/VD, ainsi qu'un pourvoi en nullité pour violation de l'art. 397 CP. Dans ses deux mémoires, il conclut à l'annulation de l'arrêt cantonal et requiert l'effet suspensif. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
1. 
1.1 L'art. 397 CP impose aux cantons de prévoir un recours en révision en faveur du condamné contre les jugements rendus en vertu du code pénal ou d'une autre loi fédérale, quand des faits ou des moyens de preuve sérieux et dont le juge n'avait pas eu connaissance lors du premier procès viennent à être invoqués. Le législateur vaudois s'est plié à cette injonction en adoptant l'art. 455 CPP/VD, aux termes duquel la révision d'un jugement ou d'une ordonnance de condamnation, ainsi que celle d'un arrêt de la cour de cassation, peut être demandée quand des faits ou des moyens de preuve sérieux et dont le juge n'avait pas eu connaissance lors du premier procès viennent à être invoqués. 
La loi prévoit ainsi une double exigence: les faits ou moyens de preuve invoqués doivent être, d'une part, nouveaux et, d'autre part, sérieux. Les faits ou moyens de preuve sont nouveaux lorsque le juge n'en a pas eu connaissance au moment où il s'est prononcé, c'est-à-dire qu'ils ne lui ont pas été soumis sous quelque forme que ce soit. Ils sont sérieux lorsqu'ils sont propres à ébranler les constatations de fait sur lesquelles se fonde la condamnation et qu'un état de fait ainsi modifié rend possible un jugement sensiblement plus favorable au condamné (ATF 130 IV 72 consid. 1 p. 73). 
1.2 Savoir si l'autorité cantonale s'est fondée sur une juste conception de faits ou de moyens de preuve nouveaux ou sérieux au sens de l'art. 397 CP est une question de droit, qui doit être invoquée dans un pourvoi en nullité. C'est en revanche une question de fait de savoir si un fait ou un moyen de preuve nouveau est propre à modifier l'état de fait retenu, puisqu'il s'agit alors d'une question d'appréciation des preuves, étant rappelé qu'une vraisemblance suffit au stade du rescindant. C'est à nouveau une question de droit de savoir si la modification de l'état de fait est juridiquement pertinente, c'est-à-dire de nature, en fonction des règles de droit de fond applicables, à entraîner une décision plus favorable au condamné en ce qui concerne la culpabilité, la peine ou les mesures (ATF 130 IV 72 consid. 1 p. 73 et les références citées). 
I. Recours de droit public 
2. 
Invoquant une violation de l'art. 9 Cst. et une application arbitraire de l'art. 455 CPP/VD, le recourant reproche à la Chambre cantonale de n'avoir accordé aucun crédit à la nouvelle déclaration de D.________. 
2.1 La notion d'arbitraire a été rappelée dans divers arrêts récents, auxquels on peut donc se référer. En bref, il ne suffit pas, pour qu'il y ait arbitraire, que la décision attaquée apparaisse discutable ou même critiquable; il faut qu'elle soit manifestement insoutenable et cela non seulement dans sa motivation mais dans son résultat (ATF 129 I 8 consid. 2.1 p. 9). L'arbitraire allégué doit par ailleurs être suffisamment démontré, sous peine d'irrecevabilité (art. 90 al. 1 let. b OJ; ATF 125 I 492 consid. 1b p. 495). 
2.2 Dans le témoignage écrit du 18 mai 2001, D.________ a confirmé à l'administrateur de X.________ SA avoir remis, à sa demande, à B.________, la somme de 330'000 US $ en espèces à titre de vente des produits de pétrole selon convention entre les parties. Il a ajouté que B.________ était seul au rendez-vous et avait présenté, avant la réception de la somme, un reçu imprimé dont la copie avait été envoyée à la société mais dont l'original n'avait pas été conservé. Il a encore déclaré ne pas avoir prêté attention à la date de la remise de la somme qui figurait sur le reçu et ne pas se souvenir de la date exacte de son rendez-vous en 1999 avec B.________. 
Dans sa nouvelle déclaration du 27 avril 2005, D.________ a expliqué qu'en raison d'une opération du coeur, il n'avait pas pu aller remettre lui-même l'argent à B.________ et qu'il avait chargé de cette mission un de ses partenaires financiers, qui lui aurait dit en septembre 1999 que le versement avait été effectué et que la quittance, signée par le créancier, avait été envoyée par fax à X.________ SA. Il n'aurait appris la falsification de la signature figurant sur le reçu qu'en 2004. L'argent aurait été volé par son partenaire ou par un employé. A.________ n'aurait pas été au courant du fait que la signature sur la quittance confirmant le transfert des 330'000 US $ en septembre 1999 était fausse. D.________ a encore déclaré qu'il verserait la somme de 330'000 US $ au conseil de B.________ dans les prochains mois. La signature apposée sur cette déclaration a été certifiée authentique par un notaire. 
2.3 La Chambre cantonale a jugé que l'ensemble des déclarations de D.________ n'était pas crédible. Cette appréciation est dûment motivée et dénuée de tout arbitraire au vu des contradictions et imprécisions relevées dans les documents précités et de l'instrumentalisation du témoin par le recourant. En effet, l'autorité cantonale a tout d'abord constaté que, dans sa dernière déclaration, D.________ donnait une version des faits totalement incompatible avec celle qu'il avait fournie dans son témoignage du 18 mai 2001, que, dans sa première déclaration, il laissait entendre qu'il avait été présent au moment de la remise des 330'000 US $, qu'il ne mentionnait pas l'intervention d'un intermédiaire et qu'il n'évoquait aucune maladie cardiaque qui l'aurait empêché d'intervenir personnellement. Elle a ensuite retenu que le document du 27 avril 2005 était entaché d'approximations, qu'il apparaissait improbable que D.________ eut tout ignoré du prétendu vol des 330'000 US $ durant aussi longtemps qu'il le prétend, qu'il n'indiquait même pas qu'il aurait engagé des poursuites pénales contre le prétendu auteur du vol et que tout laissait penser que ses déclarations étaient de pures circonstances, dans la seule optique d'apporter un soutien au recourant. Elle a encore souligné que, selon le jugement du 1er avril 2004, l'instrumentalisation de D.________ ne faisait aucun doute, que celui-ci avait sans doute rempli sa déclaration du 18 mai 2001 en fonction des besoins de l'enquête et que l'acompte de 160'000 fr. qu'il avait versé le 22 juillet 2005 au lésé s'inscrivait dans le cadre de cette instrumentalisation par le recourant. Enfin, le fait que D.________ ait reconnu la fausseté de son premier témoignage n'est pas de nature à modifier l'appréciation de la crédibilité de ce témoin, dont les différentes versions ne peuvent s'expliquer que par l'instrumentalisation dont il est l'objet. Le grief invoqué doit donc être rejeté. 
3. 
Invoquant une violation du droit d'être entendu, le recourant reproche à la Chambre cantonale de l'avoir privé de son droit fondamental d'établir que le second témoignage de D.________ était conforme à la vérité en jugeant, sans autre mesure d'instruction, que la déclaration du 27 avril 2005 n'était pas crédible. 
Cette critique est irrecevable, le recourant n'alléguant, ni ne démontrant, conformément aux exigences de l'art. 90 al. 1 let. b OJ, avoir fait valoir des moyens de preuves pertinents qui auraient été écartés par l'autorité cantonale en violation de ses droits constitutionnels. 
4. 
Le recourant soutient que la Chambre des révisions a violé la présomption d'innocence en écartant un témoignage favorable sans la moindre mesure d'instruction et sans étayer sa décision par des éléments objectifs et concrets. 
4.1 La présomption d'innocence, garantie par l'art. 32 al. 1 Cst. et par les art. 6 ch. 2 CEDH et 14 ch. 2 du Pacte ONU II, ainsi que son corollaire, le principe "in dubio pro reo", concernent tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves. En tant que règles sur le fardeau de la preuve, ces principes signifient, au stade du jugement, que le fardeau de la preuve incombe à l'accusation et que le doute doit profiter à l'accusé. Comme règles de l'appréciation des preuves, ils sont violés lorsque le juge, qui s'est déclaré convaincu, aurait dû éprouver des doutes quant à la culpabilité de l'accusé au vu des éléments de preuve qui lui étaient soumis. Le Tribunal fédéral examine librement si ces principes ont été violés en tant que règle sur le fardeau de la preuve, mais il n'examine que sous l'angle de l'arbitraire la question de savoir si le juge aurait dû éprouver un doute, c'est-à-dire celle de l'appréciation des preuves (ATF 120 Ia 31 consid. 2a à 2e p. 33 ss). 
4.2 Le recourant ne saurait se prévaloir de la violation de la présomption d'innocence dans le cadre de la procédure de révision, ce principe ne sortant ses effets que jusqu'à l'entrée en force du jugement de condamnation (ATF 114 IV 138 consid. 2b p. 141). Du reste, le grief invoqué est vain, dans la mesure où il se confond avec celui d'arbitraire examiné ci-dessus (cf. supra consid. 2). 
5. 
Le recours de droit public est rejeté dans la mesure où il est recevable. Le recourant, qui succombe, supportera les frais (art. 156 al. 1 OJ). 
La cause étant ainsi tranchée, la requête d'effet suspensif devient sans objet. 
 
II. Pourvoi en nullité 
6. 
Le recourant affirme que les faits invoqués, ou à tout le moins les moyens de preuve proposés, sont sérieux au sens de l'art. 397 CP
6.1 L'argumentation principale du recourant consiste à expliquer que les dernières déclarations de son témoin sont crédibles et de nature à influer de manière significative sur la quotité de la peine qui lui a été infligée. En réalité, il s'agit là d'apprécier la force probante de ce nouveau document, question qui relève de l'appréciation des preuves et de l'établissement des faits et qui ne peut par conséquent faire l'objet d'un pourvoi (cf. supra consid. 1.2). 
6.2 Pour le reste, la Chambre des révisions a correctement défini la notion de fait sérieux et n'a pas ignoré que la vraisemblance suffisait. Elle a admis, sans arbitraire (cf. supra consid. 2), que les nouvelles déclarations de D.________ n'étaient pas crédibles, de sorte qu'elle n'a pas violé le droit fédéral en concluant qu'elles n'étaient pas sérieuses au sens de l'art. 397 CP
7. 
Le pourvoi est rejeté dans la mesure où il est recevable. Le recourant, qui succombe, supportera les frais (art. 278 al. 1 PPF). 
La cause étant ainsi tranchée, la requête d'effet suspensif devient sans objet. 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
1. 
Le recours de droit public est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
2. 
Le pourvoi en nullité est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
3. 
Un émolument judiciaire de 4'000 fr. est mis à la charge du recourant. 
4. 
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires du recourant, au Ministère public du canton de Vaud et au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Chambre des révisions civiles et pénales. 
Lausanne, le 24 janvier 2006 
Au nom de la Cour de cassation pénale 
du Tribunal fédéral suisse 
Le président: La greffière: