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Eidgenössisches Versicherungsgericht 
Tribunale federale delle assicurazioni 
Tribunal federal d'assicuranzas 
 
Cour des assurances sociales 
du Tribunal fédéral 
 
Cause 
{T 7} 
P 49/04 
 
Arrêt du 6 février 2006 
IIIe Chambre 
 
Composition 
MM. les Juges Ferrari, Président, Meyer et Lustenberger. Greffier : M. Berthoud 
 
Parties 
Office cantonal des personnes âgées, route de Chêne 54, 1208 Genève, recourant, 
 
contre 
 
A.________, intimé, représenté par Me Jean-Marie Faivre, avocat, rue de la Rôtisserie 2, 1204 Genève 
 
Instance précédente 
Tribunal cantonal des assurances sociales, Genève 
 
(Jugement du 28 septembre 2004) 
 
Faits: 
A. 
A.________, né en 1942, bénéficie d'une rente entière de l'assurance-invalidité depuis le 1er février 1994, ainsi que d'une prestation complémentaire à cette assurance à compter du 1er décembre 1995. Il est père d'un fils né en 1978, d'un premier mariage, qui est invalide et dont il s'occupe. L'assuré et son épouse N.________, née en 1968, ont six enfants, qui sont nés entre 1995 et 2003. 
 
Par décision du 28 janvier 1999, l'Office cantonal des personnes âgées du canton de Genève (l'OCPA) a fixé le montant des prestations complémentaires à l'AI auxquelles A.________ avait droit à partir du 1er février 1999, soit 738 fr. pour la prestation relevant de la LPC et 1'303 fr. pour les prestations de droit cantonal. Dans son calcul, l'administration a tenu compte d'un gain potentiel de l'épouse de 32'920 fr. par an, qu'elle a imputé jusqu'à concurrence de 20'946 fr. Par ailleurs, une somme mensuelle de 500 fr. a été retenue en compensation de prestations perçues à tort. L'assuré a formé une réclamation contre cette décision, en alléguant qu'il ne pouvait s'occuper du foyer et que son épouse, née en 1968 et mère de plusieurs enfants en bas âge, n'était pas en mesure d'exercer une activité lucrative. 
 
Par la suite, l'OCPA a rendu d'autres décisions portant sur le droit de l'assuré aux prestations complémentaires de l'AI. Dans celles-ci (singulièrement les 14 juillet et 14 août 2000, 3 janvier et 13 mars 2001), l'OCPA a tenu compte d'un gain annuel potentiel de l'épouse de 20'946 fr. (de mars à mai 1999, puis de mai à décembre 2000) et de 21'506 fr (depuis janvier 2001). L'administration n'a pas pris de gains potentiels en considération durant les mois où l'épouse de l'assuré était enceinte ni durant les deux mois qui ont suivi la naissance de son quatrième enfant (le 22 février 2000). 
 
Par décision sur réclamation du 30 mars 2001, l'OCPA a confirmé sa décision du 2 février 1999 (recte : 28 janvier 1999). 
B. 
A.________ a déféré cette décision à la Commission cantonale genevoise de recours en matière d'AVS/AI (aujourd'hui : Tribunal cantonal des assurances sociales du canton de Genève), en concluant à ce qu'aucun gain hypothétique ne fût pris en considération pour son épouse. Il a par ailleurs demandé que les mensualités de 500 fr., retenues du 1er avril 1999 au 1er août 2000 en compensation de prestations versées à tort, lui fussent restituées. 
 
Le 1er avril 2003, N.________ a déposé une demande de prestations de l'AI. Par lettre du 10 septembre 2003, l'OCPA a invité la juridiction cantonale de recours à suspendre l'instruction de la cause qui l'oppose à A.________ jusqu'à droit connu sur la demande du 1er avril 2003. 
 
Le Tribunal cantonal des assurances sociales a rendu un jugement le 25 septembre 2003, qui a toutefois été annulé pour composition irrégulière de l'autorité (arrêt du Tribunal fédéral des assurances du 30 avril 2004, P 4/04). 
 
Par jugement du 28 septembre 2004, la juridiction cantonale a refusé de suspendre l'instance. Elle a admis partiellement le recours en ce sens qu'aucun gain potentiel pour l'épouse ne devait être pris en considération (ch. 1 du dispositif). Par ailleurs, elle a rejeté la demande tendant à obtenir la restitution des sommes retenues mensuellement (500 fr.) du 1er avril 1999 au 31 juillet 2000 (ch. 2 du dispositif) et alloué une indemnité de dépens de 1'500 fr. (ch. 3 du dispositif). 
C. 
L'OCPA interjette recours de droit administratif contre ce jugement dont il demande l'annulation. Il conclut principalement à ce que la cause soit renvoyée au Tribunal cantonal afin qu'il suspende l'instance jusqu'à l'issue de la demande de prestations AI déposée par N.________. Subsidiairement, il conclut à l'annulation du jugement cantonal dans la mesure où celui-ci ne prend aucun gain hypothétique de l'épouse en compte dans le calcul de la prestation complémentaire de l'assuré. 
 
Ce dernier conclut au rejet du recours avec suite de dépens. Il sollicite le bénéfice de l'assistance judiciaire pour la procédure fédérale. L'Office fédéral des assurances sociales a renoncé à des observations. 
 
Considérant en droit: 
1. 
Selon l'art. 128 OJ, le Tribunal fédéral des assurances connaît en dernière instance des recours de droit administratif contre des décisions au sens des art. 97, 98 let. b à h et 98a OJ, en matière d'assurances sociales. 
 
Quant à la notion de décision pouvant faire l'objet d'un recours de droit administratif, l'art. 97 OJ renvoie à l'art. 5 PA. Selon le premier alinéa de cette disposition, sont considérées comme décisions les mesures prises par les autorités dans des cas d'espèce, fondées sur le droit public fédéral (et qui remplissent encore d'autres conditions, définies plus précisément par rapport à leur objet). L'allocation ou la restitution des prestations complémentaires n'est donc pas soumise aux mêmes voies de recours selon qu'elle est régie par le droit cantonal ou par le droit fédéral (cf. ATF 125 V 184 consid. 2a). 
 
Cela étant, la Cour de céans ne peut entrer en matière sur le recours de droit administratif que dans la mesure où il concerne des prestations complémentaires de droit fédéral. 
2. 
2.1 Le présent litige est issu de la décision du 30 mars 2001 qui confirme, sur réclamation, la décision du 28 janvier 1999. Il porte sur la prise en compte, dans le calcul de la prestation complémentaire à l'AI de l'intimé, d'un gain hypothétique de son épouse de 20'946 fr. par an depuis mars 1999 et de 21'506 fr depuis janvier 2001, à l'exception des périodes où elle était enceinte et durant celles qui correspondent au congé maternité de deux mois (lettre de l'OCPA du 28 juillet 2000). 
2.2 En premier lieu, il convient d'examiner si les premiers juges auraient dû suspendre le procès jusqu'à ce que l'office AI ait statué sur la demande de prestations que N.________ avait déposée le 1er avril 2003. 
 
Selon une jurisprudence constante, le juge des assurances sociales apprécie la légalité des décisions attaquées, en règle générale, d'après l'état de fait existant au moment où la décision litigieuse a été rendue (ATF 121 V 366 consid. 1b et les arrêts cités). Pour ce motif, la demande de prestations que N.________ a présentée le 1er avril 2003 ne saurait être prise en considération pour apprécier la légalité de la décision du 30 mars 2001, rendue deux ans plus tôt. Ses troubles de santé n'ont été documentés pour la première fois qu'à partir du 19 juillet 2002 par le docteur H.________ (qui attestait que sa patiente était actuellement en traitement et qu'elle était empêchée d'effectuer son travail ménager) et l'on ne dispose d'aucun avis médical qui eût clairement permis d'admettre rétrospectivement que N.________ était déjà incapable de travailler de mars 1999 à mars 2001. 
 
Les premiers juges ont donc renoncé à juste titre à suspendre l'instance, si bien que les conclusions du recourant sont à cet égard mal fondées. 
3. 
La question du remboursement de sommes perçues indûment, par mensualités de 500 fr., n'est plus litigieuse en procédure fédérale. En effet, à défaut d'un recours interjeté en temps utile, le ch. 2 du dispositif du jugement attaqué est entré en force. 
4. 
4.1 Les premiers juges ont considéré que l'exercice d'une activité lucrative n'était pas exigible de la part de l'épouse de l'intimé, parce qu'elle était mère de trois enfants très jeunes dès 1998, puis de quatre dès 2000, qu'elle n'a aucune formation professionnelle, qu'elle ne parle pas bien le français, et que son époux, en raison de son état de santé, ne peut l'aider. Ils ont revanche estimé qu'une révision du dossier devrait être prévue par l'OCPA lorsque le plus jeune des enfants aura atteint l'âge de la scolarité. 
4.2 Selon l'art. 3c al. 1 let. g LPC, les revenus déterminants comprennent les ressources et parts de fortune dont un ayant droit s'est dessaisi. Cette disposition est directement applicable lorsque l'épouse d'un assuré s'abstient de mettre en valeur sa capacité de gain, alors qu'elle pourrait se voir obligée d'exercer une activité lucrative en vertu de l'art. 163 CC (ATF 117 V 291 s. consid. 3b; VSI 2001 p. 127 s. consid. 1b). Il appartient à l'administration ou, en cas de recours, au juge des assurances sociales d'examiner si l'on peut exiger de l'intéressée qu'elle exerce une activité lucrative et, le cas échéant, de fixer le salaire qu'elle pourrait en retirer en faisant preuve de bonne volonté. Pour ce faire, il y a lieu d'appliquer à titre préalable les principes du droit de la famille, compte tenu des circonstances du cas d'espèce (ATF 117 V 292 consid. 3c). Les critères décisifs auront notamment trait à l'âge de la personne, à son état de santé, à ses connaissances linguistiques, à sa formation professionnelle, à l'activité exercée jusqu'ici, au marché de l'emploi, et le cas échéant, au temps plus ou moins long pendant lequel elle aura été éloignée de la vie professionnelle (ATF 117 V 290 consid. 3a; VSI 2001 p. 128 consid. 1b; consid. 2 de l'arrêt T. du 9 février 2005, P 40/03, résumé in RDT 60/2005 p. 127). 
 
L'exercice d'une activité lucrative, par l'épouse, s'impose en particulier lorsque son mari n'est pas en mesure de le faire à raison de son invalidité, car il incombe à chacun de contribuer à l'entretien et aux charges du ménage. A l'inverse, l'époux peut être appelé à fournir sa contribution d'entretien sous la forme de la tenue du ménage (consid. 2b de l'arrêt VSI 2001 p. 130). En pareilles circonstances, si l'épouse renonce à exercer une activité lucrative exigible de sa part, il y a lieu de prendre en compte un revenu hypothétique après une période dite d'adaptation (consid. 4.2 de l'arrêt T., précité). 
4.3 Eu égard à ces critères, on ne saurait suivre le raisonnement des juges cantonaux. En effet, bien que l'épouse de l'intimé n'ait aucune formation professionnelle, son jeune âge (elle est née 1968) et ses connaissances de la langue française (qui sont correctes, selon un procès-verbal du 28 septembre 2000) lui permettent assurément de mettre sa capacité de gain à profit dans une activité ne requérant pas de qualifications particulières, au moins à temps partiel, durant les périodes où elle n'en est pas empêchée pour cause de maternité. 
 
La situation serait certes différente si l'intimé n'était pas en mesure de s'occuper de ses enfants, pour la plupart en bas âge. Pareille éventualité n'est toutefois pas réalisée, car l'intimé, qui n'exerce pas d'activité lucrative, reconnaît expressément qu'il prend soin de son fils majeur qui est invalide. Par-là, il démontre que son état de santé ne l'empêcherait pas d'exercer la surveillance de ses autres enfants en l'absence momentanée de son épouse, contrairement à ce qu'il allègue. 
 
Quant aux revenus que N.________ pourrait retirer annuellement d'une activité lucrative (20'946 fr. depuis mars 1999; 21'506 fr depuis janvier 2001), ils ne sont pas contestables. On observera que ces montants (environ 1'750 fr. par mois) correspondent à peu près à la moitié de ceux qui ressortent des statistiques salariales de l'enquête suisse sur la structure des salaires publiée par l'Office fédéral de la statistique, soit 3'505 fr. par mois (valeur standardisée) pour des travaux simples et répétitifs (niveau 4) exercés à plein temps par une femme, toutes activités confondues dans le secteur privé en 1998 (cf. table TA1, p. 25), respectivement 3'658 fr. pour l'année 2000 (cf. table TA1, p. 31). En d'autres termes, en tenant compte des sommes de 20'946 fr. et 21'506 fr., respectivement, à titre de gain potentiel annuel de l'épouse, le recourant n'a pas abusé de son pouvoir d'appréciation. 
 
On ajoutera que le recourant avait déjà tenu compte d'un gain potentiel de l'épouse dans une précédente décision du 19 octobre 1998, si bien que la période d'adaptation dont il est question au consid. 4.2 de l'arrêt T., précité, était écoulée le 1er mars 1999, date à partir de laquelle la prise en considération d'un tel gain est litigieuse. 
4.4 Dans plusieurs décisions postérieures à celles du 28 janvier 1999 (14 juillet et 14 août 2000, 3 janvier et 13 mars 2001), le recourant a tenu compte d'un gain d'activité potentiel de l'épouse dans le calcul des prestations complémentaires afférentes à la période s'étendant du 1er mars au 31 mai 1999, puis à partir du 1er mai 2000. L'intimé n'a pas contesté formellement chacune de ces décisions (voir ses explications du 6 septembre 2000). Le recourant a toutefois confirmé, dans sa décision sur réclamation litigieuse du 30 mars 2001, le principe de la prise en compte de gains d'activité potentiel de l'épouse jusqu'à cette date-là, si bien que ce point est soumis à l'examen du juge. 
 
Eu égard aux naissances des enfants M.________, le 15 décembre 1998, puis R.________, le 22 février 2000, le recourant a tenu compte à juste titre d'un gain potentiel de l'épouse de mars à mai 1999, puis à nouveau à partir de mai 2000. Comme N.________ a mis au monde un cinquième enfant, D.________ le 11 juillet 2001, le calcul de la prestation complémentaire de l'intimé devra être revu de ce chef, le gain potentiel de l'épouse en étant supprimé à partir de novembre 2000. Il s'ensuit que la décision litigieuse du 30 mars 2001 doit être réformée dans cette mesure. 
5. 
Le recourant, qui succombe partiellement, est redevable d'une indemnité réduite de dépens à l'intimé (art. 159 al. 1 OJ). 
 
Quant aux conditions d'octroi de l'assistance judiciaire (art. 152 al. 1 OJ), elles sont réalisées pour la part des honoraires d'avocat qui excèdent l'indemnité de dépens réduite. L'attention de l'intimé est cependant attirée sur le fait qu'il devra rembourser la caisse du Tribunal, s'il devient ultérieurement en mesure de le faire (art. 152 al. 3 OJ). 
 
Le jugement attaqué du 28 septembre 2004, de même que le recours de droit administratif de l'OCPA du 29 octobre 2004, constituent une simple répétition des actes de procédure qui figurent au dossier de la cause P 4/04. L'intimé, qui avait répondu sur le fond dans cette précédente affaire, avait obtenu gain de cause pour un motif formel et s'était vu allouer une indemnité de dépens de 2'000 fr. Il convient d'en tenir compte pour fixer les honoraires du mandataire qui le représente à nouveau. 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce: 
1. 
Dans la mesure où il est recevable, le recours est partiellement admis en ce sens que le ch. 1 du dispositif du jugement du Tribunal cantonal des assurances sociales du canton de Genève du 28 septembre 2004 est réformé comme suit : 
 
« Le recours est partiellement admis et la décision de l'Office cantonal des personnes âgées du canton de Genève du 30 mars 2001 est réformée en ce sens qu'aucun gain potentiel pour Madame N.________ ne doit être pris en considération à partir du 1er novembre 2000, le recours étant rejeté pour le surplus. La cause est renvoyée audit office afin qu'il fixe à nouveau le montant de la prestation complémentaire à laquelle Monsieur N.________ a droit à partir du 1er novembre 2000 ». 
2. 
Il n'est pas perçu de frais de justice. 
3. 
Le recourant versera à l'intimé la somme de 500 fr. (y compris la taxe sur la valeur ajoutée) à titre de dépens pour la procédure fédérale. 
4. 
L'assistance judiciaire est accordée. Les honoraires de Me Jean-Marie Faivre, non couverts par les dépens, sont fixés à 1'000 fr. (y compris la taxe sur la valeur ajoutée) pour la procédure fédérale et seront supportés par la caisse du Tribunal. 
5. 
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal cantonal des assurances sociales du canton de Genève ainsi qu'à l'Office fédéral des assurances sociales. 
Lucerne, le 6 février 2006 
Au nom du Tribunal fédéral des assurances 
 
Le Président de la IIIe Chambre: Le Greffier: