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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
                 
 
 
1C_439/2017  
 
 
Arrêt du 6 août 2018  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Merkli, Président, 
Fonjallaz et Eusebio. 
Greffier : M. Kurz. 
 
Participants à la procédure 
1. A.________, 
2. Office des poursuites et faillites du district de Sierre, avenue du Rothorn 2, 3960 Sierre, 
tous les deux représentés par Me Paul Hanna, avocat, 
recourants, 
 
contre  
 
Commune d'Anniviers, Administration communale, case postale 46, 3961 Vissoie, 
Conseil d'Etat du canton du Valais, place de la Planta, Palais du Gouvernement, 1950 Sion. 
 
Objet 
Résidences secondaires, refus de prolonger la durée de validité de deux permis de bâtir, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton du Valais, Cour de droit public, du 23 juin 2017 (A1 17 56). 
 
 
Faits :  
 
A.   
Par deux décisions du 31 décembre 2012, le Conseil communal d'Anniviers a autorisé la construction de cinq chalets à Grimentz sur les parcelles n° 197, 1598, 1600, 1601 et 1602 du cadastre communal. Ces décisions mentionnent notamment que leur durée de validité est limitée à trois ans. 
Le 25 novembre 2015, le Préposé de l'Office des poursuites et faillites du district de Sierre (OPF) a demandé la prolongation des permis de construire en expliquant que les parcelles allaient être vendues aux enchères publiques à la demande de créanciers gagistes et saisissants, et qu'il y avait lieu d'en préserver la valeur. Par décisions du 3 et (sur demande de reconsidération) du 16 décembre 2015, le Conseil communal a rejeté cette requête. 
Par décision du 8 février 2017, le Conseil d'Etat du canton du Valais a rejeté le recours formé par l'OPF et par A.________ (créancier ayant requis la réalisation de gage), reconnaissant à ceux-ci la qualité pour recourir mais considérant sur le fond que la prolongation, après le 31 décembre 2012, d'une autorisation délivrée avant le 11 mars 2012 - et a fortiori après cette date - était nulle selon la jurisprudence cantonale. 
 
B.   
Par arrêt du 23 juin 2017, la Cour de droit public du Tribunal cantonal valaisan a rejeté le recours formé par l'OPF et A.________, laissant indécise la question de leur qualité pour recourir. Selon l'art. 25 al. 5 de la loi fédérale sur les résidences secondaires (LRS, RS 702), les autorisations entrées en force, comme en l'espèce, après le 1er janvier 2013, restaient valables pour autant qu'elles aient été accordées sur la base de l'ordonnance d'exécution, ce qui n'était pas le cas. Selon l'art. 53 al. 1 de l'ordonnance cantonale sur les constructions, du 2 octobre 1996 (OC, RS/VS 705.100), une prolongation était exclue en cas de changement dans la situation de fait ou de droit; l'entrée en vigueur de l'art. 25 LRS constituait une telle circonstance nouvelle. 
 
C.   
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, l'OPF et A.________ demandent au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt attaqué et de prolonger pour deux ans la durée des autorisations de construire, subsidiairement de renvoyer la cause à la cour cantonale afin qu'elle statue conformément aux art. 197 ch. 9 al. 2 Cst. et 53 al. 4 OC, ou pour nouvelle décision dans le sens des considérants. 
La cour cantonale a renoncé à se déterminer. La commune d'Anniviers et le Conseil d'Etat (qui relève que les motifs retenus dans l'arrêt attaqué sont différents des siens) concluent au rejet du recours. Invité à présenter des observations, l'Office fédéral du développement territorial conclut lui aussi au rejet du recours. Dans leurs dernières écritures, les recourants persistent dans leurs conclusions. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
Dirigé contre une décision prise en dernière instance cantonale dans le domaine du droit public des constructions, le recours est recevable comme recours en matière de droit public conformément aux art. 82 ss LTF, aucune des exceptions prévues à l'art. 83 LTF n'étant réalisée. 
Les recourants ont pris part à la procédure de recours devant le Tribunal cantonal, mais celui-ci a laissé indécise leur qualité pour recourir. Ceux-ci n'agissent pas en tant que propriétaires de la parcelle ou bénéficiaires directs des autorisations de construire, mais prétendent disposer d'un intérêt digne de protection à préserver la valeur des biens-fonds en vue de leur vente aux enchères publiques après poursuite en réalisation de gage. La question peut également demeurer indécise à ce stade dès lors que le recours doit de toute manière être rejeté sur le fond. 
 
2.   
Invoquant leur droit d'être entendus, les recourants reprochent à la cour cantonale d'avoir fondé son raisonnement sur l'art. 25 LRS sans les entendre au préalable sur ce point, alors que les décisions précédentes ainsi que l'argumentation des parties reposaient exclusivement sur les dispositions de la Constitution fédérale (art. 75b et 197 ch. 9 al. 2) et de l'ordonnance cantonale sur les constructions (art. 53 al. 4). 
 
2.1. Le droit d'être entendu implique notamment, lorsqu'une autorité envisage de fonder sa décision sur une norme ou un motif juridique non évoqué dans la procédure antérieure et dont aucune des parties en présence ne s'est prévalue et ne pouvait supputer la pertinence, de donner au justiciable la possibilité de se déterminer à ce sujet (ATF 130 III 35 consid. 5 p. 39; 128 V 272 consid. 5b/bb p. 278).  
 
2.2. Le litige a dès l'origine pour objet la prolongation d'autorisations de construire et l'application de la réglementation sur les résidences secondaires, les permis de bâtir ayant été délivrés le 31 décembre 2012 alors que l'art. 75b Cst. avait été adopté le 11 mars 2012 et était applicable dès cette date. Les décisions communales et celle du Conseil d'Etat sont certes uniquement fondées sur l'ordonnance cantonale et les dispositions constitutionnelles, en particulier la disposition transitoire de l'art. 197 ch. 9 al. 2 Cst. Toutefois dans ce contexte, l'application par la cour cantonale des dispositions transitoires de la loi adoptée conformément à l'al. 1 de cette même disposition n'avait rien d'insolite ou même d'inattendu, quand bien même les instances précédentes n'y avaient pas fait référence. Il n'y a donc pas de violation du droit d'être entendu.  
 
3.   
Sur le fond, les recourants estiment que l'interprétation faite par la cour cantonale de l'art. 25 al. 5 LRS violerait le principe de non-rétroactivité ainsi que la jurisprudence relative à l'art. 197 ch. 9 al. 2 Cst. Selon eux, les permis de construire délivrés entre le 11 mars et le 31 décembre 2012 - et non annulés sur recours - resteraient valables (ATF 139 II 243). Les recourants considèrent que les dispositions transitoires de la LRS (art. 25 al. 4 et 5) ne régleraient pas le cas des permis délivrés en 2012 mais entré en force en 2013 et qui n'ont pas fait l'objet d'un recours. Face à cette lacune, il y aurait lieu de s'en tenir au principe selon lequel les autorisations  délivrées avant le 1er janvier 2013 sont valables si elles n'ont pas été annulées.  
 
3.1. L'art. 75b Cst. - qui interdit toute construction de résidences secondaires dans les communes où la proportion de 20% est déjà atteinte - est entré en vigueur le 11 mars 2012, jour de son acceptation en votation populaire (RO 2012 3627 s.). Dans deux arrêts de principe du 22 mai 2013, le Tribunal fédéral a considéré que cette disposition constitutionnelle s'appliquait à toutes les autorisations de construire délivrées en première instance après le 11 mars 2012 (ATF 139 II 243 consid. 11.1 p. 260; 139 II 263 consid. 7 p. 268). Elle était également applicable aux permis de construire qui, après le 11 mars 2012, étaient modifiés dans une mesure importante dans le cadre d'une procédure de recours (ATF 139 II 263 consid. 7 p. 268). En revanche, le nouveau droit ne s'appliquait pas aux autorisations délivrées avant le 11 mars 2012, lesquelles restaient valables même si, en raison d'une procédure de recours, elles n'entraient en force qu'après cette date (ATF 139 II 243 consid. 11.6 p. 263; 139 II 263 consid. 3 p. 265).  
 
3.2. Concrétisant l'art. 75b Cst., la LRS est entrée en vigueur le 1 er janvier 2016. Ses dispositions transitoires figurent à l'art. 25 LRS. Elles prévoient notamment que les autorisations de construire entrées en force avant le 31 décembre 2012 conformément au droit cantonal en matière de procédure restent valables (al. 4). Sur ce point, la loi vient concrétiser la pratique du Tribunal fédéral qui tenait pour acquises les autorisations entrées en force avant l'entrée en vigueur de l'article constitutionnel, et seulement annulables (et dès lors valables faute de recours) celles dont l'entrée en force intervenait avant le 1er janvier 2013 (ATF 139 II 243 consid. 11.6 p. 262). Le législateur a ainsi entendu protéger, pour des motifs de sécurité du droit, les situations acquises avant 2013 (WOLF/PFAMMATTER, Zweitwohnungsgesetz (ZWG - unter Einbezug der Zweitwohnungsverordnung (ZWV), Berne 2017, n° 30 ss ad art. 25). L'art. 25 al. 5 LRS précise que les autorisations entrées en force après cette date et jusqu'à l'entrée en vigueur de la présente loi restent valables, pour autant qu'elles aient été accordées sur la base de l'ordonnance du 22 août 2012 sur les résidences secondaires (al. 5).  
 
3.3. La position des recourants se trouve ainsi contredite par le texte clair des dispositions précitées qui font de la date d'entrée en force de l'autorisation de construire le critère déterminant, sans faire de distinction entre les autorisations frappées d'un recours ou celles qui, comme en l'espèce, ont été délivrées peu avant la date déterminante et sont entrées en force après celle-ci sans avoir fait l'objet d'un recours. Le critère de l'entrée en force est également repris à l'art. 25 al. 1 LRS, quand bien même cette disposition s'écarte de la solution qui avait été développée par le Tribunal fédéral avant l'entrée en vigueur de la loi (arrêt 1C_238/2017 du 24 mai 2018 consid. 2.4).  
Ces dispositions ne comportent aucune lacune sur ce point. Même si la disposition transitoire de l'art. 197 ch. 9 al. 2 Cst. frappe de nullité les seuls permis  délivrés après le 31 décembre 2012, rien n'empêchait le législateur de définir strictement la protection de la situation acquise pour les permis délivrés auparavant. Quant aux instances judiciaires, elles sont tenues d'appliquer les dispositions législatives en question, conformément à l'art. 190 Cst. et en dépit des doutes de la doctrine quant à la conformité de cette solution avec la disposition constitutionnelle (WOLF/PFAMMATTER, op. cit. n° 33 ad art. 25; BIANCHI, La loi sur les résidences secondaires, une première approche, in: Revue suisse du notariat et du registre foncier 96 (2015) n° 5, p. 293-316, 298).  
 
3.4. En l'occurrence, les permis de construire ont été délivrés le 31 décembre 2012 et ne sont donc entrés en force qu'au début de l'année 2013. Il n'est au demeurant pas allégué que ceux-ci fussent conformes à l'ordonnance du 22 août 2012 sur les résidences secondaires (art. 25 al. 5 in fine LRS). Ils ne sauraient dès lors bénéficier de la garantie de la situation acquise telle que définie par le législateur dans cette dernière norme. Le grief de violation du droit fédéral doit être écarté.  
 
3.5. Les considérations qui précèdent conduisent également au rejet du grief d'arbitraire dans l'application de l'art. 53 al. 4 OC, puisque les recourants partent de la prémisse - erronée - que l'art. 25 al. 5 LRS ne pourrait s'appliquer aux deux permis de bâtir. Il faut dès lors constater que les demandes de prolongation ont été faites à un moment où le droit fédéral pertinent avait changé et que, dès lors, l'art. 53 al. 4 OC faisait obstacle auxdites prolongations.  
 
4.   
Sur le vu de ce qui précède, le recours est rejeté. Les frais judiciaires sont mis à la charge des recourants, conformément à l'art. 66 al. 1 LTF
 
 
 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est rejeté. 
 
2.   
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge des recourants. 
 
3.   
Le présent arrêt est communiqué au mandataire des recourants, à la Commune d'Anniviers, au Conseil d'Etat du canton du Valais, au Tribunal cantonal du canton du Valais, Cour de droit public, et à l'Office fédéral du développement territorial. 
 
 
Lausanne, le 6 août 2018 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Merkli 
 
Le Greffier : Kurz