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[AZA 0/2] 
4C.13/2001 
 
Ie COUR CIVILE 
**************************** 
 
9 janvier 2002 
 
Composition de la Cour: MM. Walter, président, Corboz, juge, 
et Aubert, juge suppléant. Greffier: M. Ramelet. 
 
__________ 
 
Dans la cause civile pendante 
entre 
A.________, demandeur et recourant principal, représenté par Me Jean-Bernard Waeber, avocat à Genève, 
 
et 
la Commission X.________, à Genève, défenderesse et recourante par voie de jonction, représentée par Me Raeto Zarn, avocat à Genève; 
 
(contrat de travail; congé abusif; tort moral) 
Vu les pièces du dossier d'où ressortent 
les faits suivants: 
 
A.- A.________, né le 10 mars 1938, a été engagé par la Commission X.________ le 13 mars 1991 comme directeur de la production. En dernier lieu, il revêtait la fonction de directeur de la logistique, service occupant une quarantaine de personnes et regroupant l'informatique ainsi que la gestion d'immeubles, de l'imprimerie, du service des ventes et du service d'expédition. Par ailleurs, A.________ était chargé de la gestion du personnel (120 personnes environ). 
 
Le contrat de travail signé par les deux parties prévoyait, après le temps d'essai, un délai de congé de trois mois pour la fin d'un mois; il ne renvoyait pas à un règlement du personnel. 
 
Le 1er janvier 1993 est entré en vigueur au sein de la Commission X.________ un nouveau règlement du personnel. 
 
L'art. 1 avait la teneur suivante: 
 
"1.1 Champ d'application 
 
Le présent règlement régit les rapports entre le 
collaborateur et la Commission X.________; il 
constitue partie intégrante du contrat ou de la 
lettre d'engagement individuelle. 
 
1.2 Règlement du personnel et contrat d'engagement 
 
Les conditions d'engagement, telles que la défini- tion du poste occupé dans l'entreprise et le trai- tement, sont stipulées dans le contratd'engagement 
 
 
individuel. Les dispositions du présent règlement 
sont applicables en règle générale, le contrat 
d'engagement individuel pouvant régler autrement 
certains points particuliers. 
 
1.3 
 
(...)". 
 
L'art. 5.4 du même règlement disposait ce qui suit: 
 
"Assurance maladie perte de gain 
 
En cas d'incapacité de travail pour cause de mala- die, le collaborateur touche son salaire intégral 
sur un maximum de 720 jours dans une période de 
 
900 jours consécutifs. La prime est à la charge de 
la Commission X.________. 
 
La fin du contrat entraîne l'arrêt des prestations". 
 
L'art. 8 du règlement était libellé comme il suit: 
 
"Résiliation normale des rapports de service 
 
Les rapports de service peuvent être résiliés comme 
suit, tant par la Commission X.________ que par le 
collaborateur: 
. durant la période d'essai, moyennant un préavis de 
7 jours net, 
. durant la première année de service, moyennant un 
préavis d'un mois donné pour la fin d'un mois, 
. après une année de service, moyennant un préavis 
de deux mois donné pour la fin d'un mois, 
. dès la dixième année de service, moyennant un 
préavis de trois mois donné pour la fin d'un mois. 
Des dispositions particulières peuvent être 
précisées dans le contrat d'engagement". 
 
L'art. 9 dudit règlement avait la teneur suivante: 
 
"Rupture des rapports de service 
Le collaborateur qui ne s'acquitte pas de ses fonc- tions de manière satisfaisante sera averti de la 
façon suivante: 
 
. un premier avertissement du chef direct, confirmé 
par écrit; 
. un deuxième avertissement du chef direct en 
présence du chef du département, confirmé par 
écrit; 
. un dernier avertissement en présence des deux 
chefs ci-dessus et du responsable des ressources 
humaines, confirmé par écrit; 
. le licenciement, qui sera communiqué par courrier 
recommandé. 
 
Demeure réservée la résiliation immédiate pour de 
justes motifs, conformément à l'article 337 du Code 
des obligations". 
 
Ce règlement du personnel a été élaboré essentiellement par A.________. Il n'est pas établi que la défenderesse a signé ce règlement. 
 
En février 1997, le secrétaire général de la Commission X.________ a retiré à A.________ la direction du service informatique. 
 
Le 11 avril 1997, A.________ a eu un entretien avec le secrétaire général de la Commission X.________, qui lui a annoncé son licenciement, motivé par le fait que certains de ses subordonnés s'étaient plaints de son autoritarisme. Par pli recommandé du même jour, la Commission X.________ a résilié le contrat de A.________ pour le 31 juillet 1997; elle y précisait que, pour tenir compte du poste important que l'intéressé avait occupé pendant de longues années au sein de l'entreprise, ainsi que de ses "contributions professionnelles honnêtes et compétentes", elle accordait à A.________ son salaire intégral jusqu'au 31 décembre 1997, comprenant toutes les contributions sociales dues par la Commission X.________. 
En outre, la Commission X.________ libérait A.________ avec effet immédiat de son obligation de travailler. 
 
Selon divers certificats médicaux, A.________ a été totalement incapable de travailler pour cause de maladie du 23 juillet 1997 au 29 mars 1998. De ce fait, la Commission X.________ a versé le salaire de A.________ jusqu'à fin février 1998. 
 
B.- Le 3 octobre 1997, A.________ a ouvert action contre la Commission X.________, concluant au paiement du montant total de 1 249 750 fr. 20, qui se décomposait en une indemnité pour licenciement abusif, par 94 000 fr. 20, en des dommages-intérêts à titre de dommage supplémentaire, par 1 140 750 fr., et en une indemnité pour tort moral, par 15 000 fr. Il a précisé que l'indemnité qu'il réclamait à titre de dommages-intérêts supplémentaires correspondait à ses salaires bruts, indemnités de transport et prestations sociales, qu'il aurait touchés de la Commission X.________ jusqu'à l'âge de la retraite, soit jusqu'à fin mars 2003, s'il n'avait pas été licencié. 
 
Par jugement du 22 décembre 1999, le Tribunal des prud'hommes du canton de Genève a débouté le demandeur de toutes ses conclusions. 
 
Saisie d'un appel du demandeur, la Cour d'appel de la juridiction des prud'hommes de Genève, par arrêt du 13 septembre 2000, a annulé ce jugement et condamné la défenderesse à payer au demandeur les sommes brutes suivantes (salaires de mars à juin 1998): 
15 666 fr.70 avec intérêts à 5% dès le 25 mars 1998, 15 666 fr.70 avec intérêts à 5% dès le 25 avril 1998, 15 666 fr.70 avec intérêts à 5% dès le 25 mai 1998, 15 666 fr.70 avec intérêts à 5% dès le 25 juin 1998, sous déduction des charges sociales et légales usuelles. La Cour d'appel a encore déclaré la défenderesse débitrice du demandeur de la somme nette de 15 000 fr. avec intérêts à 5% dès le 1er juillet 1998, représentant une indemnité pour tort moral. 
C.- A.________ exerce un recours en réforme au Tribunal fédéral. Il conclut, à titre principal, à la confirmation de l'arrêt attaqué en tant qu'il a condamné la défenderesse à lui verser les salaires afférents aux mois de mars à juin 1998. Il requiert en outre le Tribunal fédéral de condamner la défenderesse à lui payer 1 048 846 fr.65 avec intérêts à 5% dès le 1er juillet 1998, à titre de dommages-intérêts pour violation du règlement de la Commission X.________. 
Subsidiairement, il substitue à cette dernière conclusion la condamnation de la défenderesse à lui payer 109 000 fr.20, soit l'équivalent de six mois de salaire plus une indemnité de 15 000 fr. pour tort moral. 
 
La défenderesse propose le rejet du recours. Elle forme également un recours joint, en concluant au rejet de toutes les prétentions du demandeur. 
 
Le recourant principal conclut au rejet du recours joint dans la mesure de sa recevabilité. 
 
Considérantendroit : 
 
1.- Le recours en réforme est ouvert pour violation du droit fédéral (art. 43 al. 1 OJ). Il ne permet en revanche pas d'invoquer la violation directe d'un droit de rang constitutionnel (art. 43 al. 1 2e phrase OJ) ou la violation du droit cantonal (ATF 127 III 248 consid. 2c et les arrêts cités). 
 
Saisi d'un recours en réforme, le Tribunal fédéral doit conduire son raisonnement sur la base des faits contenus dans la décision attaquée, à moins que des dispositions fédérales en matière de preuve n'aient été violées, qu'il y ait lieu à rectification de constatations reposant sur une inadvertance manifeste (art. 63 al. 2 OJ) ou qu'il faille compléter les constatations de l'autorité cantonale parce que celle-ci n'a pas tenu compte de faits pertinents et régulièrement allégués (art. 64 OJ; ATF 127 III 248 ibidem). Dans la mesure où un recourant présente un état de fait qui s'écarte de celui contenu dans la décision attaquée, sans se prévaloir avec précision de l'une des exceptions qui viennent d'être rappelées, il n'y a pas lieu d'en tenir compte. Il ne peut être présenté de griefs contre les constatations de fait, ni de faits ou de moyens de preuve nouveaux (art. 55 al. 1 let. c OJ). Les prescriptions de forme applicables au recours principal s'appliquent par analogie au recours joint (art. 59 al. 3 OJ). L'appréciation des preuves à laquelle s'est livrée l'autorité cantonale ne peut être remise en cause (ATF 126 III 189 consid. 2a; 125 III 78 consid. 3a). 
 
Si le Tribunal fédéral ne saurait aller au-delà des conclusions des parties, lesquelles ne peuvent en prendre de nouvelles (art. 55 al. 1 let. b in fine OJ), il n'est lié ni par les motifs qu'elles invoquent (art. 63 al. 1 OJ), ni par ceux de la décision cantonale, de sorte qu'il peut apprécier librement la qualification juridique des faits constatés (art. 63 al. 3 OJ; ATF 127 III 248 consid. 2c; 126 III 59 consid. 2a). 
 
2.- a) La cour cantonale a jugé que la défenderesse a violé les dispositions de son règlement du personnel concernant la procédure de licenciement. Il ne s'ensuivait toutefois pas que le congé donné au demandeur fût abusif au sens de l'art. 336 CO ou de l'art. 2 CC en raison des motifs qui le sous-tendaient. Le demandeur ayant des relations difficiles, voire carrément conflictuelles, avec certains collaborateurs de la défenderesse, celle-ci a décidé de le licencier afin d'assurer un fonctionnement plus harmonieux de son organisation. 
Une notable amélioration de l'ambiance de travail dans les départements concernés de la défenderesse a d'ailleurs suivi le départ du demandeur. 
 
L'autorité cantonale a considéré, en revanche, que la violation de la procédure de licenciement par la défenderesse constituait une atteinte aux droits de la personnalité du demandeur. Mais cette violation n'a pas entraîné de préjudice matériel pour le travailleur, vu l'absence de tout lien de causalité entre la transgression du règlement et le manque à gagner du demandeur jusqu'à l'âge de la retraite. 
 
b) Le recourant principal fait grief à la cour cantonale de n'avoir pas admis qu'en choisissant de prononcer immédiatement son licenciement sans le mettre au bénéfice de la protection spéciale contre les congés instaurée par le règlement du personnel, la défenderesse a abusivement résilié son contrat de travail au sens de l'art. 336 al. 1 let. c CO. 
Le dommage que le demandeur aurait subi en raison de la violation du règlement précité correspondrait à l'entier du gain qu'il aurait retiré de son emploi jusqu'à l'âge de 65 ans. Il conviendrait, aux yeux du recourant principal, d'appliquer les mêmes règles de responsabilité à l'employeur qui enfreint le devoir contractuel de suivre une procédure disciplinaire avant de donner le congé qu'à l'employeur qui, au mépris d'une norme contractuelle, omet d'assurer son salarié contre la perte de gain en cas de maladie; or, selon la jurisprudence, ce dernier employeur est tenu de verser lui-même un montant équivalant aux indemnités d'assurance dont le travailleur n'a pas bénéficié (cf. ATF 124 III 126 consid. 4). 
 
La défenderesse nie avoir eu l'obligation de suivre une procédure disciplinaire envers le demandeur avant de le licencier. A l'en croire, le règlement invoqué par le recourant principal ne lui était pas applicable. En outre, la défenderesse soutient n'avoir pas maltraité le demandeur, puisque, tout en le libérant de l'obligation de travailler pendant le délai de congé de trois mois, échéant à la fin juillet 1997, elle a spontanément indiqué, lors du licenciement, qu'elle lui verserait à bien plaire son salaire pendant cinq mois supplémentaires, soit jusqu'au 31 décembre 1997. De plus, la recourante par voie de jonction affirme avoir alloué au demandeur diverses autres prestations complémentaires sans y être obligée, notamment un outplacement. 
 
c) aa) L'art. 9 du règlement du personnel litigieux institue une procédure comportant trois entretiens successifs avant tout licenciement fondé sur l'insuffisance des prestations du salarié. Le premier entretien réunit le salarié et le supérieur direct. Le second entretien a lieu entre le salarié, d'une part, et, d'autre part, le supérieur direct et le chef de département. Le troisième entretien réunit le salarié, le supérieur direct, le chef du département et le responsable des ressources humaines. 
 
La question se pose de savoir si le recourant principal peut se prévaloir de cette disposition. 
 
Selon son art. 1.1, le règlement du personnel s'applique certes indistinctement aux collaborateurs de la Commission X.________. Toutefois, selon sa lettre même, le mécanisme institué par l'art. 9 du règlement en cause ne peut s'appliquer qu'à des salariés subordonnés à un chef de département. 
En effet, il suppose, avant tout licenciement motivé par l'insuffisance des prestations, deux entretiens en présence du chef du département du salarié concerné. Or, il ne ressort pas de l'arrêt attaqué que le demandeur, exerçant des fonctions de directeur, ait été subordonné à un chef de département. 
 
En outre, la procédure instituée par l'art. 9 dudit règlement prévoit, avant tout congé dû à des prestations insuffisantes, un dernier entretien en présence du responsable des ressources humaines. Une telle procédure ne saurait évidemment s'appliquer au responsable des ressources humaines, qui doit y intervenir en cette qualité. Le demandeur, qui était le chef du personnel de toute la Commission X.________, ne saurait donc s'en prévaloir. 
 
Ainsi, l'art. 9 du règlement du personnel n'est pas conçu pour s'appliquer aux salariés ayant rang de chef de département ou de responsable des ressources humaines. 
 
Si la procédure disciplinaire avait dû s'appliquer à de tels employés, le règlement l'aurait sans doute aménagée de façon qu'elle puisse fonctionner effectivement dans une pareille hypothèse. Le demandeur, auteur principal du règlement, aurait sans doute adopté ou fait adopter un libellé différent s'il avait considéré que la procédure disciplinaire était applicable erga omnes au sein de l'entreprise. 
 
Enfin, on peut comprendre que, vu les rapports de confiance nécessaires entre l'employeur et les cadres dirigeants d'une entreprise, le règlement du personnel ne les mette pas au bénéfice d'une protection accrue contre le licenciement. 
 
Partant, dès l'instant où l'art. 9 du règlement du personnel n'est pas partie intégrante du contrat de travail du demandeur, cette disposition ne saurait avoir été violée. 
 
Dans ces conditions, la jurisprudence invoquée par le recourant principal, qui a trait à la réparation de l'intérêt qu'a le travailleur à l'existence d'une assurance conforme aux termes du contrat de travail (c'est le Tribunal fédéral qui souligne), ne lui est d'aucun secours. 
 
Le licenciement du recourant principal n'est donc pas abusif au sens de l'art. 336 CO, de sorte que les conclusions du demandeur en réparation du préjudice matériel occasionné par le congé sont totalement infondées. 
 
bb) L'art. 9 du règlement du personnel est inapplicable au demandeur pour une autre raison. 
 
D'après l'art. 335c CO, le contrat peut être résilié pour la fin d'un mois moyennant un délai de congé d'un mois pendant la première année de service, de deux mois de la deuxième à la neuvième année de service et de trois mois ultérieurement (al. 1). Ces délais peuvent être modifiés par accord écrit, par contrat-type de travail ou convention collective (al. 2). 
 
Comme l'a relevé le Tribunal fédéral, un accord portant sur une dérogation à l'art. 335c al. 1 CO est nul s'il n'est pas muni de la signature des parties, quand bien même la dérogation est stipulée en faveur du travailleur (arrêt du 16 novembre 1993, consid. 4, publié in SJ 1995 p. 794-795). En effet, selon la lettre de la loi, l'exigence de forme s'applique à toute dérogation. 
 
Or, l'art. 9 du règlement a pour effet de prolonger tout délai de congé, en le faisant précéder de la durée de la procédure disciplinaire. Une telle prolongation du délai de congé, qui est importante puisqu'elle prévoit trois entretiens au terme desquels un avertissement écrit doit être notifié au travailleur, constitue une dérogation à l'art. 335c CO, qui n'est valable que si elle respecte la forme écrite. 
 
 
Selon les constatations souveraines de la cour cantonale, le demandeur n'est pas parvenu à établir que le règlement du personnel, qu'il a établi lui-même en sa qualité de responsable des ressources humaines, ait été valablement signé par la défenderesse. Force est dès lors de conclure que cette dérogation à l'art. 335c CO est nulle, si bien qu'elle n'obligeait pas la recourante par voie de jonction. 
 
3.- a) Selon la cour cantonale, la défenderesse doit réparer le tort moral qu'elle a causé au demandeur en violant l'art. 328 CO et l'art. 9 du règlement du personnel; en effet, en vertu de ces dispositions, la défenderesse était tenue d'entendre le demandeur avant de le licencier. Du moment que le travailleur a souffert d'un profond sentiment d'injustice par la façon dont il a été congédié et qu'il a dû suivre un traitement médical, la Cour d'appel a jugé qu'il convenait de lui allouer 15 000 fr. à titre d'indemnité satisfactoire. 
 
La recourante par voie de jonction prétend que, dès l'instant où elle a accordé au demandeur des prestations financières importantes auxquelles elle n'était nullement tenue, l'allocation d'une indemnité pour tort moral ne serait pas justifiable. 
 
b) Il a été montré plus haut que l'art. 9 du règlement du personnel n'était pas applicable au demandeur. 
 
En outre, on ne saurait tirer de l'art. 328 CO une obligation, à la charge de l'employeur, d'entendre le salarié avant de le licencier. L'art. 335 al. 2 CO impose en effet à l'employeur l'obligation de motiver par écrit le congé sur demande du salarié, mais non pas celle de motiver ce congé, oralement ou par écrit, avant le prononcé du licenciement. 
 
La cour cantonale s'appuie sur l'ATF 110 II 172, dans lequel le Tribunal fédéral a dit que l'employeur viole les droits de la personnalité d'une salariée si, pendant son hospitalisation, il modifie unilatéralement et sans délai son poste de travail et la place ainsi devant le fait accompli. 
Il faut d'emblée relever que, dans cette affaire, la violation des droits de la personnalité a été considérée comme peu grave, puisqu'elle n'a pas constitué un motif justifié de résiliation qui eût permis à la travailleuse, en démissionnant, de se délier de sa clause d'interdiction de concurrence (art. 340c al. 2 CO). Au demeurant, le cas du demandeur n'est pas comparable à celui de cette salariée. En effet, l'employeur n'a pas modifié unilatéralement et abruptement le poste du recourant principal pendant la durée de validité du contrat. 
Il a résilié le contrat en respectant le délai contractuel de congé et en versant au travailleur une indemnité supplémentaire de départ correspondant à cinq mois de salaire. La jurisprudence précitée n'est pas transposable au cas du demandeur. 
 
 
On ne saurait suivre la cour cantonale lorsqu'elle est d'avis que la défenderesse a traité le demandeur de façon cavalière. De fait, la recourante par voie de jonction a alloué au demandeur, lors du licenciement, une prolongation de son délai de congé de cinq mois, s'ajoutant au délai de congé de trois mois, pour l'aider à trouver un nouvel emploi, tout en le libérant de l'obligation de travailler. En outre, le demandeur a bénéficié des services d'outplacement, à la charge de l'employeur, plus un budget de 5000 fr. pour des frais de recherche d'emploi, auxquels s'ajoutaient des frais de transport (art. 64 al. 2 OJ). La défenderesse a donc versé au travailleur davantage que l'équivalent de cinq mois de salaire en sus du traitement pendant le délai de congé. 
 
Dans ces circonstances, on ne voit pas quelle violation des droits de la personnalité du demandeur pourrait justifier le versement de l'indemnité pour tort moral accordée par les juges cantonaux. 
 
Le grief de la recourante par voie de jonction doit ainsi être admis. 
 
4.- a) La Cour d'appel a retenu que, dès l'instant où le demandeur s'était trouvé en incapacité de travail du 23 juillet 1997 au 29 mars 1998, les rapports de travail entre les parties avaient cessé le 30 juin 1998, compte tenu du délai de protection de 180 jours prévu par l'art. 336c al. 1 let. b CO. Comme il est établi que le demandeur n'a touché son salaire que jusqu'à fin février 1998, l'autorité cantonale, en se fondant sur l'art. 5.4 du règlement du personnel, lui a octroyé les salaires afférents à la période du 1er mars 1998 au 30 juin 1998. 
 
La recourante par voie de jonction fait valoir que le demandeur a été non seulement indemnisé par une assurance perte de gain de mars à juin 1998, mais encore "assuré royalement en LPP" par l'employeur. Quant au règlement du personnel, il n'existait pas lors de l'engagement du demandeur et ne comportait aucun effet rétroactif. Partant, à suivre la défenderesse, il n'y aurait aucune raison de verser au demandeur les salaires litigieux. 
 
b) La défenderesse produit, devant le Tribunal fédéral, la copie d'une lettre de "La Suisse Assurances" au demandeur, du 31 août 1998, indiquant que ce dernier aurait reçu des indemnités journalières de l'assurance du 1er mars 1998 au 31 juillet 1998. Il s'agit d'une pièce nouvelle, qui est irrecevable (art. 55 al. 1 let. c OJ). 
 
Selon l'art. 5.4 du règlement du personnel, en cas d'incapacité de travail pour cause de maladie, le collaborateur touchait son salaire intégral sur un maximum de 720 jours dans une période de 900 jours consécutifs; la fin du contrat de travail entraînait l'arrêt des prestations. 
 
La cour cantonale a jugé que la défenderesse et le demandeur étaient convenus d'appliquer à leurs rapports l'art. 5.4 du règlement susrappelé. Il ressort en effet de l'art. 1.1 de ce règlement que, selon la volonté de la recourante par voie de jonction, celui-ci s'appliquait aux collaborateurs de la défenderesse dès le 1er janvier 1993. Contrairement à ce que soutient la recourante par voie de jonction, aucune exception n'est prévue à propos des salariés devenus collaborateurs de la défenderesse avant l'entrée en vigueur du règlement du personnel. Vu le contenu de l'art. 5.4, rien n'empêche un salarié occupant la position du demandeur de s'en prévaloir. En outre, les parties au contrat de travail peuvent convenir, en cas d'incapacité de travail, de l'octroi de prestations dépassant le minimum légal; à cet égard, un simple accord suffit, la loi (art. 324a al. 2 CO) n'exigeant pas le respect de la forme écrite (Staehelin, Commentaire zurichois, n. 55 ad art. 324a CO, p. 240). 
 
 
Les magistrats cantonaux ont admis que les rapports de travail ont cessé le 30 juin 1998. A bon droit, la défenderesse ne le conteste pas en instance de réforme. La recourante par voie de jonction n'a pas établi qu'elle ait versé ou fait verser les prestations prévues à l'art. 5.4 du règlement du personnel. Devant le Tribunal fédéral, elle ne prétend pas que, à teneur du règlement, la compagnie d'assurance perte de gain était seule débitrice des prestations prévues à cet art. 5.4. Il ne ressort d'ailleurs pas de cette disposition que tel serait le cas. 
 
Dans ces circonstances, on ne voit pas quelle violation du droit fédéral la cour cantonale aurait commise en allouant au demandeur les salaires des mois de mars à juin 1998. 
 
Le grief de la recourante par voie de jonction est dénué de fondement. 
 
5.- Il suit de là que le recours principal doit être rejeté, le recours joint admis partiellement et l'arrêt déféré réformé, en ce sens que la condamnation de la défenderesse à verser 15 000 fr. au demandeur à titre de tort moral est annulée; l'arrêt attaqué est confirmé pour le surplus, la condamnation de la défenderesse à payer au demandeur les salaires de mars à juin 1998 étant ainsi maintenue. 
 
Le demandeur, qui voulait obtenir 1 048 846 fr.65 de plus, succombe entièrement, alors que la défenderesse voit le montant dont elle avait été reconnue débitrice du demandeur réduit d'environ 20%. Tout bien pesé, il convient de mettre l'émolument de justice de 14 000 fr. à raison de 11'000 fr. à la charge du demandeur et à raison de 3000 fr. à la charge de la défenderesse (art. 156 al. 3 OJ). Le recourant principal devra verser des dépens réduits à la recourante par voie de jonction (art. 159 al. 3 OJ). 
 
Vu l'issue de la querelle, il n'est pas nécessaire de renvoyer la cause à la cour cantonale pour nouvelle décision sur les frais d'instance cantonale. 
 
Par ces motifs, 
 
le Tribunal fédéral : 
 
1. Rejette le recours principal, admet partiellement le recours joint et réforme l'arrêt attaqué en ce sens que la défenderesse est condamnée à verser au demandeur les sommes brutes suivantes: 
15 666 fr.70 avec intérêts à 5% dès le 25 mars 1998, 15 666 fr.70 avec intérêts à 5% dès le 25 avril 199815 666 fr.70 avec intérêts à 5% dès le 25 mai 1998, 15 666 fr.70 avec intérêts à 5% dès le 25 juin 1998, 
 
sous déduction des charges sociales, toutes les autres conclusions du demandeur étant rejetées; 
 
2. Met un émolument judiciaire de 14 000 fr. à raison de 11 000 fr. à la charge du demandeur et de 3000 fr. 
à la charge de la défenderesse; 
 
3. Dit que le demandeur versera à la défenderesse une indemnité de 10 000 fr. à titre de dépens réduits; 
 
4. Communique le présent arrêt en copie aux mandataires des parties et à la Cour d'appel de la juridiction des prud'hommes de Genève (Cause n° C/27045/1997-4). 
 
__________ 
Lausanne, le 9 janvier 2002 ECH 
 
Au nom de la Ie Cour civile 
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE: 
Le Président, 
 
Le Greffier,