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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
6B_952/2016, 6B_962/2016  
   
   
 
 
 
Arrêt du 29 août 2017  
 
Cour de droit pénal  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Denys, Président, Jacquemoud-Rossari et Oberholzer. 
Greffière : Mme Musy. 
 
Participants à la procédure 
6B_952/2016 
X.________, 
représenté par Me Alexandre Emery, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Ministère public de l'Etat de Fribourg, 
intimé. 
 
et 
 
6B_962/2016 
Ministère public de l'Etat de Fribourg, 
recourant, 
 
contre  
 
X.________, 
représenté par Me Alexandre Emery, avocat, 
intimé. 
 
Objet 
Fixation de la peine (peine complémentaire, peine combinée), 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal de l'Etat de Fribourg, Cour d'appel pénal, du 2 août 2016. 
 
 
Faits :  
 
A.   
Par ordonnance pénale du 24 janvier 2013, X.________ a été reconnu coupable de blanchiment d'argent (art. 305bis ch. 1 CP) et condamné à une peine pécuniaire de 90 jours-amende à 60 fr., avec sursis pendant deux ans, ainsi qu'à une amende de 800 fr., peine complémentaire à celle prononcée le 13 novembre 2012 par le Tribunal pénal économique du canton de Fribourg. 
Statuant sur l'ordonnance pénale du 24 janvier 2013, le Juge de police de l'arrondissement de la Broye a, par jugement du 17 septembre 2013, acquitté X.________ du chef de prévention de blanchiment d'argent. 
Par arrêt du 27 avril 2015, la Cour d'appel pénal du Tribunal cantonal du canton de Fribourg a admis le recours du Ministère public, a reconnu X.________ coupable de blanchiment d'argent et l'a condamné à une peine privative de liberté de 9 mois, avec sursis pendant trois ans. 
X.________ a formé un recours en matière au Tribunal fédéral qui l'a partiellement admis. Il a annulé l'arrêt attaqué et renvoyé la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision (arrêt 6B_649/2015 du 4 mai 2016). 
 
B.   
Statuant sur renvoi le 2 août 2016, la Cour d'appel pénal du Tribunal cantonal du canton de Fribourg a condamné X.________ à une peine pécuniaire de 40 jours-amende à 60 fr., avec sursis pendant deux ans, et au paiement d'une amende de 1000 fr. avec peine privative de liberté de substitution de 10 jours en cas de non-paiement. 
 
C.   
Contre cet arrêt, X.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral (6B_952/2016). Il conclut, avec suite de frais et dépens, à la réforme de l'arrêt du 2 août 2016 de la Cour d'appel pénal du Tribunal cantonal de Fribourg en ce sens qu'il est condamné à 40 jours-amende à 60 fr. avec sursis pendant deux ans, subsidiairement, à 40 jours-amende à 60 fr. avec sursis pendant deux ans et au paiement d'une amende de 480 francs. 
 
Le Ministère public de l'Etat de Fribourg dépose également un recours en matière pénale devant le Tribunal fédéral (6B_962/2016). Il conclut à l'annulation de l'arrêt entrepris et au renvoi de la cause, avec suite de frais, à l'autorité précédente pour nouvelle décision. 
 
D.   
Invités à se déterminer sur le recours du Ministère public, X.________ et la cour cantonale ont présenté des observations. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
Les deux recours, dirigés contre le même jugement, concernent le même complexe de faits et soulèvent des questions connexes. Il se justifie de les joindre et de statuer par une seule décision (art. 71 LTF et 24 PCF). 
 
2.   
Les deux recourants critiquent la peine prononcée. 
 
2.1. La cour cantonale a considéré qu'une peine de 120 unités pénales était appropriée à la culpabilité de X.________ pour l'infraction de blanchiment d'argent (art. 305bis CP). Il fallait cependant tenir compte du fait que celui-ci avait été condamné le 13 novembre 2012 par le Tribunal pénal économique du canton de Fribourg à une peine de 270 jours-amende à 60 fr. avec sursis pendant deux ans, ainsi qu'à une amende de 4000 fr., la peine privative de liberté de substitution en cas de non-paiement étant de 40 jours, pour faux dans les titres (art. 251 CP) et obtention frauduleuse d'une constatation fausse (art. 253 CP). La condamnation de ce jour à une peine pécuniaire devait donc constituer une peine complémentaire à la peine prononcée le 13 novembre 2012.  
L'autorité précédente a estimé que la peine de base, résultant de la condamnation du 13 novembre 2012, correspondait à 310 unités pénales. Or, dès lors que la quotité maximale prévue par l'art. 34 al. 1 CP était de 360 jours-amende, c'était cette quotité qui pouvait, au maximum, être retenue pour l'ensemble des infractions, bien que l'infraction qu'il s'agissait de sanctionner ce jour et la culpabilité du prévenu y relative auraient dû conduire à une peine supérieure. Dans ces conditions, X.________ devait être condamné à une peine de 50 unités pénales, peine complémentaire à celle infligée le 13 novembre 2012. Considérant que le pronostic était plutôt favorable, l'autorité précédente a assorti la peine pécuniaire d'un sursis pendant deux ans. Elle a par ailleurs jugé nécessaire de prononcer une peine immédiatement perceptible afin que le prévenu prenne pleinement conscience de l'inadéquation de son comportement. La peine pécuniaire avec sursis devait par conséquent être assortie d'une amende ferme. Partant, elle a infligé au prévenu, en plus de la peine pécuniaire de 40 jours-amende à 60 fr. avec sursis pendant deux ans, une amende de 1000 fr., avec peine privative de liberté de 10 jours en cas de non-paiement. 
 
2.2. Dans ses déterminations devant le Tribunal fédéral, la cour cantonale a détaillé son raisonnement. Elle a expliqué que la peine de base était constituée d'une peine combinée (peine pécuniaire et amende) et que l'art. 42 al. 4 CP commandait que la peine encourue et l'amende cumulée à celle-ci correspondent, dans leur globalité, à la culpabilité. Elle se devait dès lors de prendre en considération la sanction globale prononcée par le Tribunal pénal économique, soit 310 unités pénales (270 jours-amende et une amende de 4000 fr. correspondant à 40 unités pénales). Étant par ailleurs limitée à une sanction globale de 360 jours-amende en vertu de l'art. 34 al. 1 CP, sa marge de manoeuvre était réduite d'autant.  
 
3.   
Il y a tout d'abord lieu d'examiner la quotité de la peine sanctionnant le comportement à juger, soit l'infraction de blanchiment d'argent (art. 305bis CP), au regard de la culpabilité de X.________. Sous cet angle, X.________ affirme que les conditions de l'art. 42 al. 4 CP relatives à la peine accessoire ne sont pas remplies en l'espèce. 
 
3.1. En vertu de l'art. 42 al. 4 CP, le juge peut, lorsqu'il assortit une peine du sursis, prononcer en plus une peine pécuniaire sans sursis ou une amende selon l'art. 106 CP. Cette combinaison se justifie lorsque le sursis peut être octroyé, mais que, pour des motifs de prévention spéciale, une sanction ferme accompagnant la sanction avec sursis paraît mieux à même d'amener l'auteur à s'amender. Elle doit contribuer, dans l'optique de la prévention tant générale que spéciale, à renforcer le potentiel coercitif de la peine avec sursis. Cette forme d'admonestation adressée au condamné doit attirer son attention sur le sérieux de la situation en le sensibilisant à ce qui l'attend s'il ne s'amende pas (ATF 134 IV 60 consid. 7.3.1 p. 75). La combinaison prévue à l'art. 42 al. 4 CP constitue un "sursis qualitativement partiel" (ATF 134 IV 1 consid. 4.5.2 p. 8).  
La peine prononcée avec sursis reste prépondérante, alors que la peine pécuniaire sans sursis ou l'amende est d'importance secondaire. Cette combinaison de peines ne doit pas conduire à une aggravation de la peine globale ou permettre une peine supplémentaire. Elle permet uniquement, dans le cadre de la peine adaptée à la culpabilité, une sanction correspondant à la gravité des faits et à la personnalité de l'auteur. Les peines combinées, dans leur somme totale, doivent être adaptées à la faute (ATF 134 IV 53 consid. 5.2 p. 55; arrêt 6B_61/2010 du 27 juillet 2010 consid. 5.1). L'adéquation entre la culpabilité et la sanction peut justifier d'adapter la peine principale en considération de la peine accessoire (cf. arrêt 6B_61/2010 précité consid. 5.2). 
Pour tenir compte du caractère accessoire des peines cumulées, il se justifie en principe d'en fixer la limite supérieure à un cinquième de la peine principale. Des exceptions sont possibles en cas de peines de faible importance pour éviter que la peine cumulée n'ait qu'une portée symbolique (ATF 135 IV 188 consid. 3.4.4 p. 191; arrêt 6B_220/2015 du 10 février 2016 consid. 4.). 
 
3.2. En ce qui concerne les motifs du prononcé d'une peine accessoire, la cour cantonale s'est limitée à constater qu'à l'instar de l'appréciation du Ministère public, une peine immédiatement perceptible était nécessaire "  afin que le prévenu prenne pleinement conscience de l'inadéquation de son comportement " (arrêt attaqué, consid. 3d p. 6-7). La cour cantonale ne dit pourtant pas en quoi la prise de conscience de X.________ ne serait pas entière, étant rappelé par ailleurs qu'elle a retenu la circonstance atténuante du repentir sincère (art. 48 let. d CP). X.________ souligne qu'il a déjà été durement atteint dans son patrimoine, de surcroît de façon immédiate, puisqu'il a remboursé spontanément de ses propres deniers la somme de 58'000 euros au lésé. La cour cantonale n'évoque pas ce point, n'expliquant en particulier pas en quoi le fait que X.________ ait déjà été atteint dans son patrimoine n'est pas encore suffisant, en plus du prononcé d'une peine pécuniaire avec sursis, pour inciter l'intéressé à s'amender.  
Force est de conclure que l'autorité précédente n'invoque aucun motif de prévention spéciale susceptible de justifier le prononcé de la peine accessoire. En l'absence de motivation suffisante, le Tribunal fédéral ne peut pas contrôler la correcte application du droit fédéral. Ainsi, l'arrêt cantonal doit être annulé et la cause renvoyée à l'autorité cantonale afin qu'elle motive le prononcé d'une peine accessoire (art. 112 al. 3 LTF). Au regard de la nature procédurale du vice examiné et dès lors que le Tribunal fédéral n'a pas traité la cause sur le fond, ne préjugeant ainsi pas de l'issue de la cause, il peut être procédé au renvoi sans ordonner préalablement un échange d'écritures (cf. arrêts 6B_259/2016 du 21 mars 2017 consid. 11; 6B_432/2015 du 1er février 2016 consid. 4). 
Au vu du sort du recours, les autres griefs de X.________ deviennent sans objet. 
 
4.   
Le Ministère public soutient qu'en additionnant l'amende de 4000 fr. prononcée le 13 novembre 2012 à la peine pécuniaire de 270 jours-amende, en la convertissant en unités pénales et en additionnant ce chiffre au nombre de jours-amende prononcés pour la présente affaire, la cour cantonale a mélangé deux genres de peine, violant ainsi l'art. 49 al. 1 CP
 
4.1. Selon l'art. 49 al. 1 CP, si, en raison d'un ou de plusieurs actes, l'auteur remplit les conditions de plusieurs peines de même genre, le juge le condamne à la peine de l'infraction la plus grave et l'augmente dans une juste proportion. En vertu de cette disposition, le principe d'aggravation (Asperationsprinzip) est applicable si l'auteur remplit les conditions de plusieurs peines de même genre. En revanche, lorsque la loi pénale ne prévoit pas le même genre de peine pour toutes les infractions, les peines doivent être prononcées de manière cumulative. (ATF 142 IV 265 consid. 2.3.1-2.3.2 p. 267 s.; 137 IV 57 consid. 4.3.1 p. 58).  
Si le juge doit prononcer une condamnation pour une infraction que l'auteur a commise avant d'avoir été condamné pour une autre infraction, il fixe la peine complémentaire, de sorte que l'auteur ne soit pas puni plus sévèrement que si les diverses infractions avaient fait l'objet d'un seul jugement (art. 49 al. 2 CP). Cette disposition permet de garantir le principe de l'aggravation également en cas de concours réel rétrospectif (ATF 142 IV 329 consid. 1.4.1 p. 331; ATF 142 IV 265 consid. 2.3.3 p. 268). L'auteur qui encourt plusieurs peines du même genre, par exemple plusieurs peines privatives de liberté, doit pouvoir bénéficier du principe de l'aggravation, indépendamment du fait que la procédure s'est ou non déroulée en deux temps. Concrètement, le juge se demande d'abord quelle peine d'ensemble aurait été prononcée si toutes les infractions avaient été jugées simultanément. La peine complémentaire est constituée de la différence entre cette peine d'ensemble et la peine de base, à savoir celle prononcée précédemment (ATF 142 IV 265 consid. 2.3.3 p. 268; 141 IV 61 consid. 6.1.2 p. 67). 
L'art. 34 al. 1 CP prévoit que sauf disposition contraire de la loi, la peine pécuniaire ne peut excéder 360 jours-amende. 
 
4.2. Le grief du Ministère public est fondé. Le juge est lié par le maximum légal de chaque genre de peine lorsqu'il applique le principe d'absorption (art. 49 al. 1 CP). Or, la peine pécuniaire et l'amende, de genre différent, ne sont pas soumises au principe d'absorption, mais à celui de cumul (cf. arrêt 6B_335/2016 du 24 janvier 2017 consid. 3.3.2 et les références citées; JÜRG-BEAT ACKERMANN, in Basler Kommentar, Strafrecht I, 3ème éd. 2013, n° 104 ad art. 49 CP). En l'espèce, il ressort de la motivation de l'arrêt attaqué que la cour cantonale n'a pas réduit la quotité de la peine pécuniaire parce qu'elle a estimé qu'une peine pécuniaire de 50 jours-amende (ramenée à 40 jours-amende après avoir pris en considération l'amende) était proportionnée à la culpabilité en vertu du principe d'absorption - contrairement à ce que soutient X.________; elle l'a réduite parce qu'elle a tenu compte du plafond de la peine pécuniaire à 360 jours-amende, alors même qu'elle considérait que la culpabilité de l'intéressé correspondait à une peine de 120 unités pénales pour la présente affaire. Il ne fait toutefois pas de sens de prendre en compte la limite supérieure légale de la peine pécuniaire selon l'art. 34 al. 1 CP pour fixer une peine d'ensemble comprenant une peine de base composée de deux genres de peine différents - peine pécuniaire de 270 jours et amende de 4000 fr. - et une peine complémentaire composée elle aussi d'une peine pécuniaire et d'une amende.  
Conformément à la jurisprudence (cf. ATF 142 IV 265 consid. 2.4 p. 268 s.), ce n'est qu'après avoir fixé la peine pour le cas à juger en rapport avec la culpabilité de l'auteur, puis avoir déterminé - lorsque les infractions déjà jugées sont les plus graves - dans quelle mesure cette nouvelle peine doit être absorbée par la peine déjà infligée, qu'il convient de s'assurer que la peine d'ensemble respecte le plafond de chaque genre de peine. Dans le cas d'espèce, compte tenu de la peine pécuniaire de 270 jours-amende prononcée en 2012, la cour cantonale pouvait prononcer une peine pécuniaire complémentaire de 90 jours-amende au plus dans le respect du maximum du genre de la peine (art. 34 CP en lien avec l'art. 49 al. 1 CP). Se croyant faussement limitée à un maximum de 50 jours-amende pour la peine complémentaire, la cour cantonale a restreint son pouvoir d'appréciation en violation du droit fédéral. Le recours du Ministère public est dès lors bien-fondé sur ce point. 
 
5.   
Sur le vu de ce qui précède, la cause est renvoyée à la cour cantonale. Si celle-ci estime adéquat de prononcer une peine accessoire en plus de la peine principale, elle devra motiver ce choix conformément aux exigences de l'art. 112 LTF. Cela fait, la cour cantonale devra fixer une nouvelle peine complémentaire en tenant compte qu'elle dispose d'une marge d'appréciation de 90 jours-amende dans le respect du plafond de la peine pécuniaire. Le cas échéant, elle devra également appliquer les principes du calcul rétrospectif développés ci-dessus à l'amende prononcée à titre accessoire. 
 
6.   
Le Ministère public fribourgeois, qui obtient gain de cause sur son propre recours, n'a pas droit à des dépens (art. 68 al. 3 LTF). X.________ obtient gain de cause sur son propre recours et peut prétendre à des dépens (art. 68 al. 1 LTF). Il est statué sans frais. 
 
 
 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Les causes 6B_952/2016 et 6B_962/2016 sont jointes. 
 
2.   
Le recours de X.________ est admis (6B_952/2016). 
 
3.   
Le recours du Ministère public est admis (6B_962/2016). 
 
4.   
La décision entreprise est annulée et la cause est renvoyée à la cour cantonale pour nouvelle décision. 
 
5.   
Le canton de Fribourg versera au conseil de X.________ une indemnité de 3'000 fr. à titre de dépens pour la procédure devant le Tribunal fédéral. 
 
6.   
Il n'est pas perçu de frais judiciaires. 
 
7.   
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal de l'Etat de Fribourg, Cour d'appel pénal. 
 
 
Lausanne, le 29 août 2017 
 
Au nom de la Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Denys 
 
La Greffière : Musy