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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
{T 0/2} 
 
1B_379/2016  
   
   
 
 
 
Arrêt du 19 décembre 2016  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Fonjallaz, Président, 
Chaix et Kneubühler. 
Greffière : Mme Kropf. 
 
Participants à la procédure 
 A.________, représenté par Me Fabien Mingard, avocat, 
 
recourant, 
 
contre  
 
B.________, 
intimé. 
 
Objet 
Procédure pénale, demande de récusation d'un inspecteur de police, 
 
recours contre la décision du Ministère public de l'arrondissement de l'Est vaudois du 4 octobre 2016. 
 
 
Faits :  
 
A.   
Dans le cadre l'instruction menée à son encontre pour infraction grave à la loi fédérale du 3 octobre 1951 sur les stupéfiants et les substances psychotropes (LStup; RS 812.121), A.________ a demandé, le 6 novembre 2015, la récusation du Procureur du Ministère public de l'arrondissement de l'Est vaudois en charge de son dossier, ainsi que celle des inspecteurs C.________, B.________, voire de l'inspectrice D.________, demandes en lien avec les conditions et motifs de son interpellation par la police le 1er juillet 2015. La première de ces requêtes a été admise le 25 février 2016 sur recours par le Tribunal fédéral (cause 1B_435/2015). Quant à la seconde, elle a été rejetée, s'agissant des deux premiers inspecteurs susmentionnés, le 2 juin 2016 par le nouveau Procureur saisi de cette cause. Cette décision a été annulée par le Tribunal fédéral le 27 juillet 2016 dès lors que les déterminations déposées par les policiers au cours de la procédure de récusation n'avaient pas été transmises au requérant (cause 1B_233/2016). 
Donnant suite à l'arrêt fédéral, les observations des policiers ont été adressées à A.________ et celui-ci s'est déterminé le 6 septembre 2016, limitant sa demande de récusation à l'inspecteur B.________. Le 4 octobre 2016, le Ministère public a rejeté cette requête. 
 
B.   
Par acte du 13 octobre 2016, A.________ forme un recours en matière pénale contre cette décision, concluant à son annulation et à la récusation de l'inspecteur B.________. Le recourant sollicite également l'octroi de l'assistance judiciaire. 
Invité à se déterminer, l'intimé n'a pas déposé d'observations. Quant à l'autorité précédente, elle s'est référée à sa décision. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
Conformément aux art. 78 et 92 al. 1 LTF, une décision incidente relative à la récusation dans le cadre d'une procédure pénale peut faire immédiatement l'objet d'un recours en matière pénale. Les décisions rendues par le Ministère public relatives à la récusation de policiers sont susceptibles d'un recours direct auprès du Tribunal fédéral (art. 59 al. 1 let. a, 380 CPP et 80 al. 2 in fine LTF; ATF 138 IV 222 consid. 1 p. 223 s.). L'auteur de la demande de récusation a qualité pour recourir (art. 81 al. 1 LTF). Le recours a en outre été déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) et les conclusions qui y sont prises sont recevables (art. 107 al. 2 LTF). Partant, il y a lieu d'entrer en matière. 
 
2.   
Le recourant reproche à l'autorité précédente d'avoir considéré qu'il n'existerait aucun motif permettant d'envisager une récusation de l'inspecteur intimé. Selon le recourant, la prévention du policier à son encontre serait cependant démontrée vu le défaut d'audition formelle à la suite de son arrestation le 1er juillet 2015 vers 12h20, l'absence en conséquence d'informations sur ses droits et les raisons de son maintien en cellule jusqu'à 14h45 (art. 158 CPP). Le recourant prétend encore que l'inspecteur aurait utilisé, de manière non conforme au but d'une surveillance secrète, des éléments ressortant des écoutes téléphonique mises en place à son encontre. Il soutient à cet égard que le policier aurait ainsi informé le responsable de la Direction prévention et communication de la police cantonale vaudoise de ses contacts avec la presse; l'inspecteur intimé aurait également renseigné son collègue sur les motifs indiqués pour justifier l'interpellation effectuée (contrôle du véhicule), puis aurait demandé à ce qu'il ne soit pas fait état de l'opération en cours, afin de ne pas la mettre en péril. 
 
2.1. Toute personne exerçant une fonction au sein d'une autorité pénale est récusable pour l'un des motifs prévus aux art. 56 let. a à e CPP. Elle l'est également, selon l'art. 56 let. f CPP, "lorsque d'autres motifs, notamment un rapport d'amitié étroit ou d'inimitié avec une partie ou son conseil, sont de nature à le rendre suspect de prévention".  
 
2.1.1. L'art. 56 let. f CPP a la portée d'une clause générale recouvrant tous les motifs de récusation non expressément prévus aux lettres a à e de l'art. 56 CPP. Elle correspond à la garantie d'un tribunal indépendant et impartial instituée par les art. 30 al. 1 Cst. et 6 § 1 CEDH (ATF 141 IV 178 consid. 3.2.1 p. 179; 138 IV 142 consid. 2.1 p. 144). Cet article du CPP concrétise aussi les droits déduits de l'art. 29 al. 1 Cst. garantissant l'équité du procès et assure au justiciable cette protection lorsque d'autres autorités ou organes que des tribunaux sont concernés (ATF 141 IV 178 consid. 3.2.2 p. 179 s.; 138 IV 142 consid. 2.2.1 p. 145; 127 I 196 consid. 2b p. 198; arrêts 1B_343/2016 du 3 octobre 2016 consid. 2, 1B_196/2015 du 17 mai 2016 consid. 3). Une demande de récusation peut donc être déposée à l'encontre d'un fonctionnaire de police, dès lors qu'il est un membre des autorités de poursuite pénale (art. 12 let. a CPP).  
Si les art. 56 let. b à e CPP s'appliquent de manière similaire à celle prévalant pour les membres des autorités judiciaires, une appréciation différenciée peut s'imposer s'agissant de l'application de la clause générale posée à l'art. 56 let. f CPP (MARKUS BOOG, in Basler Kommentar, Art. 1-195 StPO, 2e éd. 2014, n° 9 ad art. 56 CPP; ANDREAS J. KELLER, in DONATSCH/HANSJAKOB/LIEBER, Kommentar zur Schweizerischen Strafprozessordnung (StPO), 2e éd. 2014, n° 6 ad Vorbermerkungen zu Art. 56-60 StPO). En effet, la différence de fonction existant entre une autorité judiciaire (art. 13 CPP) et un membre d'une autorité de poursuite pénale (art. 12 CPP) ne peut pas être ignorée. Les exigences de réserve, d'impartialité et d'indépendance prévalant pour la première catégorie peuvent donc ne pas être les mêmes s'agissant de la seconde (arrêts 1B_405/2014 du 12 mai 2015 consid. 4.2 et 4.3; 1B_69/2013 du 27 juin 2013 consid. 4.1 et 4.2 et les arrêts cités; BOOG, op. cit., n° 9 ad art. 56 CPP; K ELLER, op. cit., n° 6 ad Vorbermerkungen zu Art. 56-60 StPO; FRANZ RICKLIN, S tPO Kommentar, 2e éd. 2014, n° 1 ad Vorbemerkungen zu StPO Art. 56-60 et n° 2 ad art. 56 CPP). 
La jurisprudence a ainsi reconnu que, durant la phase d'instruction, le ministère public peut être amené, provisoirement du moins, à adopter une attitude plus orientée à l'égard du prévenu ou à faire état de ses convictions à un moment donné de l'enquête; tout en disposant, dans le cadre de ses investigations, d'une certaine liberté, le magistrat reste cependant tenu à un devoir de réserve et doit s'abstenir de tout procédé déloyal, instruire tant à charge qu'à décharge et ne point avantager une partie au détriment d'une autre (ATF 141 IV 178 consid. 3.2.2 p. 179 s.; 138 IV 142 consid. 2.2.1 p. 145). En ce qui concerne la police, il n'y a lieu de se distancer de ces principes que dans la mesure où la direction de la procédure et les obligations en découlant ne lui incombent pas (cf. art. 61 let. a CPP). 
 
2.1.2. Selon la jurisprudence, les parties à une procédure ont le droit d'exiger la récusation d'un membre d'une autorité dont la situation ou le comportement sont de nature à faire naître un doute sur son impartialité. Cette garantie tend notamment à éviter que des circonstances extérieures à la cause puissent influencer une appréciation en faveur ou au détriment d'une partie. Elle n'impose pas la récusation seulement lorsqu'une prévention effective est établie, car une disposition interne de l'intéressé ne peut guère être prouvée; il suffit que les circonstances donnent l'apparence de la prévention et fassent redouter une activité partiale. Seules des circonstances constatées objectivement doivent être prises en considération; les impressions individuelles d'une des parties au procès ne sont pas décisives (ATF 141 IV 178 consid. 3.2.1 p. 179; 138 IV 142 consid. 2.1 p. 144).  
Des décisions ou des actes de procédure qui se révèlent par la suite erronés ne fondent pas en soi une apparence objective de prévention; seules des erreurs particulièrement lourdes ou répétées, constitutives de violations graves des devoirs du magistrat, peuvent fonder une suspicion de partialité, pour autant que les circonstances dénotent que la personne en cause est prévenue ou justifient à tout le moins objectivement l'apparence de prévention (ATF 141 IV 178 consid. 3.2.3 p. 180; 138 IV 142 consid. 2.3 p. 146). Il appartient en outre aux juridictions de recours normalement compétentes de constater et de redresser les erreurs éventuellement commises dans ce cadre. La procédure de récusation n'a donc pas pour objet de permettre aux parties de contester la manière dont est menée l'instruction et de remettre en cause les différentes décisions incidentes prises par la direction de la procédure (arrêt 1B_46/2016 du 29 avril 2016 consid. 3.1). 
 
2.2. Dans son arrêt du 25 février 2016, le Tribunal fédéral a constaté que l'intérêt public à la découverte d'un trafic de stupéfiants supposé important et le principe de proportionnalité pouvaient justifier que les autorités pénales aient indiqué que l'arrestation du recourant était intervenue par erreur, alors que tel n'était pas le cas en réalité, ceci afin de préserver temporairement les chances de succès de l'enquête; dans ces circonstances, la communication donnée aux médias par les autorités pénales ne constituait pas une prévention ou une apparence de prévention à l'encontre du recourant (cf. arrêt 1B_435/2015 consid. 2.3 et 2.5). Il a également retenu que la surveillance téléphonique avait été utilisée dans un but étranger à la recherche de la commission d'infractions, ce qui n'était pas admissible (cf. arrêt 1B_435/2015 consid. 2.4).  
 
2.3. En l'occurrence, il est incontesté que le recourant n'a pas été entendu par la police à la suite de son arrestation et n'a pas été informé de ses droits au sens de l'art. 158 CPP (cf. art. 219 al. 1 1ère phrase CPP), ce qui constitue une violation des règles de procédure. Il en va de même de la communication d'informations (contacts du recourant avec la presse) obtenues par le biais d'une surveillance téléphonique secrète, mais sans rapport avec le but justifiant la mise en place de cette mesure, à savoir élucider un trafic de stupéfiants (cf. art. 269 al. 1 et 2 CPP).  
Cela étant, la qualité en laquelle l'intimé est intervenu - inspecteur de la police cantonale vaudoise - et les tâches lui incombant dans ce cadre (cf. en particulier l'art. 15 al. 2 CPP) ne peuvent pas être ignorées lors de l'appréciation de ces manquements. En effet, les exigences en matière d'impartialité pour les policiers sont de par la nature de la fonction moins élevées que celles prévalant pour les représentants du ministère public - auquel la police est d'ailleurs subordonnée en cas d'instruction formelle (cf. art. 15 al. 2 2ème phrase, 307 et 312 CPP; arrêt 1B_90/2016 du 8 septembre 2016 consid. 3.2.1 destiné à la publication) - et, a fortiori, pour les magistrats judiciaires. Vu la jurisprudence susmentionnée et la fonction de l'intimé, les erreurs de procédure qui ont été relevées précédemment ne suffisent pas en l'espèce à démontrer la prévention du policier à l'encontre du recourant. En effet, les actions entreprises - respectivement omises - par l'inspecteur ne découlent pas d'une inimitié personnelle de celui-ci à l'encontre du recourant - ce qui n'est d'ailleurs pas allégué - mais tendaient à sauvegarder pour quelque temps le secret sur l'enquête en cours, notamment en évitant la divulgation immédiate de certaines informations. En tout état de cause, le policier intimé n'a pas participé à la mise en oeuvre de la stratégie de communication décidée par le Procureur et le chargé de presse de la police cantonale vaudoise, notamment quant au choix critiquable de divulguer les antécédents judiciaires du recourant (cf. arrêt 1B_435/2015 consid. 2.5). A toutes fins utiles, le recourant n'est au demeurant n'est pas dénué de tout moyen pour contester les actes d'un policier (cf. art. 393 al. 1 let. a CPP). 
Vu ces considérations, l'autorité précédente n'a pas violé le droit fédéral en rejetant la demande de récusation de l'inspecteur D.________. 
 
3.   
Il s'ensuit que le recours est rejeté. 
Le recourant a demandé l'assistance judiciaire et les conditions en paraissent réunies (art. 64 al. 1 LTF). Il y a lieu de désigner Me Fabien Mingard en qualité d'avocat d'office et de fixer ses honoraires, qui seront supportés par la caisse du Tribunal fédéral (art. 64 al. 2 LTF). Le recourant est en outre dispensé des frais judiciaires (art. 64 al. 1 LTF). Il n'y a pas lieu d'attribuer de dépens (art. 68 al. 3 LTF), l'intimé n'ayant au demeurant pas procédé. 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est rejeté. 
 
2.   
La demande d'assistance judiciaire est admise. Me Fabien Mingard est désigné comme avocat d'office du recourant et une indemnité de 1'500 fr. lui est allouée à titre d'honoraires, à payer par la caisse du Tribunal fédéral. Il n'est pas perçu de frais judiciaires. 
 
3.   
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Ministère public de l'arrondissement de l'Est vaudois. 
 
 
Lausanne, le 19 décembre 2016 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Fonjallaz 
 
La Greffière : Kropf