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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
1C_423/2017  
   
   
 
 
 
Arrêt du 30 octobre 2017  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Merkli, Président, 
Fonjallaz et Eusebio. 
Greffier : M. Kurz. 
 
Participants à la procédure 
 A.________, représentée par Me Olivier Peter, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
Ministère public de la Confédération, Taubenstrasse 16, 3003 Berne. 
 
Objet 
Entraide judiciaire internationale en matière pénale à l'Espagne, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal pénal fédéral, Cour des plaintes, du 27 juillet 2017 (RR.2017.52 - B 246'245). 
 
 
Faits :  
 
A.   
Le 6 avril 2016, A.________, ressortissante espagnole née en 1973, a été arrêtée dans le canton de Zurich sur la base d'une demande d'extradition présentée en mai 2015 par le Ministère espagnol de la justice pour l'exécution d'une peine d'emprisonnement de 11 ans et 11 mois pour appartenance à une organisation terroriste (ETA). La peine a finalement été ramenée à trois ans et six mois. Le 8 avril 2016, l'Office fédéral de la justice (OFJ) a émis un mandat d'arrêt en vue d'extradition. Lors de l'arrestation, le téléphone portable et les documents d'identité ont été saisis. 
 
B.   
Par demande d'entraide judiciaire du 12 juillet 2016, les autorités espagnoles ont requis la remise des papiers d'identité et des données extraites du téléphone portable. Par décision de clôture du 27 janvier 2017, le Ministère public de la Confédération (MPC) a ordonné la transmission de ces documents. 
Le 22 mars 2017, l'OFJ a accordé l'extradition de A.________. Le même jour, l'OFJ a requis du Tribunal pénal fédéral (TPF) la levée de l'objection de délit politique. Par décision du 24 mars 2017, le SEM a rejeté la demande d'asile formée par A.________. Par arrêt du 30 juin 2017, la Cour des plaintes du TPF a rejeté le recours formé par A.________ contre la décision d'extradition et a rejeté l'objection de délit politique. L'intéressée a saisi le Tribunal fédéral (cause 1C_385/2017). Les autorités espagnoles ont par la suite retiré leur demande d'extradition, la peine prononcée étant prescrite. 
Par arrêt du 27 juillet 2017, la Cour des plaintes a rejeté le recours formé contre l'ordonnance de clôture du 27 janvier 2017. Les griefs de violation du droit d'être entendu (en rapport avec une transmission spontanée préalable, avec l'objection du délit politique et avec l'existence d'une enquête pénale en Suisse) ont été écartés. La condition de la double incrimination était satisfaite, s'agissant d'infractions de faux et de participation à une organisation criminelle, quand bien même l'ETA n'avait plus perpétré d'attentats depuis 2009. Le principe de la proportionnalité était également respecté puisque les documents transmis devaient permettre de vérifier l'authenticité des documents d'identité ainsi qu'une éventuelle activité de la recourante au sein de l'ETA pendant son séjour en Suisse. 
 
C.   
Par acte du 21 août 2017, A.________ forme un recours en matière de droit public par lequel elle demande préalablement un délai de vingt jours pour compléter son mémoire et requiert l'assistance judiciaire. Sur le fond, elle demande l'annulation de l'arrêt attaqué, l'admission de l'objection du délit politique et l'irrecevabilité de la demande d'entraide, subsidiairement le renvoi de la cause au TPF pour nouvelle décision dans le sens des considérants. 
La Cour des plaintes persiste dans les termes de son arrêt et renonce à formuler des observations. Le MPC conclut à l'irrecevabilité du recours et l'OFJ à son rejet en tant qu'il est recevable. Invitée à présenter des observations complémentaires, la recourante y a renoncé. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
Selon l'art. 84 LTF, le recours en matière de droit public est recevable à l'encontre d'un arrêt du Tribunal pénal fédéral en matière d'entraide judiciaire internationale si celui-ci a pour objet la transmission de renseignements concernant le domaine secret. Il doit toutefois s'agir d'un cas particulièrement important (al. 1). Un cas est particulièrement important notamment lorsqu'il y a des raisons de supposer que la procédure à l'étranger viole des principes fondamentaux ou comporte d'autres vices graves (al. 2). Ces motifs d'entrée en matière ne sont toutefois pas exhaustifs et le Tribunal fédéral peut être appelé à intervenir lorsqu'il s'agit de trancher une question juridique de principe ou lorsque l'instance précédente s'est écartée de la jurisprudence suivie jusque-là (ATF 133 IV 215 consid. 1.2 p. 218). En vertu de l'art. 42 al. 2 LTF, il incombe au recourant de démontrer que les conditions d'entrée en matière posées à l'art. 84 LTF sont réunies (ATF 133 IV 131 consid. 3 p. 132). 
 
1.1. En l'occurrence, la transmission litigieuse porte sur des documents d'identité et les données d'un téléphone portable. Il s'agit de renseignements concernant le domaine secret, de sorte que la première condition posée à l'art. 84 al. 1 LTF est réalisée.  
 
1.2. S'agissant de l'importance particulière du cas, la recourante se plaint d'une violation du droit à un tribunal indépendant et impartial, en relevant que la Cour des plaintes, dans la même composition, avait déjà rejeté l'objection de délit politique dans l'arrêt relatif à son extradition. Le grief est manifestement mal fondé: l'exigence d'impartialité n'empêche pas un magistrat de statuer successivement, dans des procédures distinctes - en l'occurrence d'extradition et d'entraide judiciaire - sur la même question juridique, le cas échéant en défaveur d'une même partie (ATF 129 III 445 consid. 4.2.2.2 p. 466; 114 Ia 278 consid. 1 p. 279; arrêts 6B_621/2011 du 19 décembre 2011 consid. 2.3.2; 4A_151/2012 du 4 juin 2012 consid. 2.2). Le simple fait qu'une même question se pose dans un nouveau recours ne suffit donc pas à justifier une récusation.  
 
1.3. La recourante reproche également à la Cour des plaintes de ne pas avoir sérieusement examiné l'objection tirée du délit politique, en se référant simplement à son précédent arrêt sur l'extradition et sans tenir compte des dispositions de la Convention européenne pour la répression du terrorisme (CERT, RS 0. 353.3) qui impose de tenir compte des actes concrètement reprochés à l'intéressé. En l'occurrence, il est reproché à la recourante d'avoir possédé de faux documents fabriqués par l'ETA. Aucun acte de violence ne lui serait reproché.  
Point n'est besoin de s'interroger sur l'existence d'une question de principe à ce propos. En effet, supposé recevable sur ce point, le grief devrait de toute manière être écarté. 
 
1.3.1. Est un délit politique au sens de l'art. 3 al. 1 EIMP l'acte dirigé exclusivement contre l'organisation de l'Etat; il s'agit typiquement des actes tendant au renversement de l'Etat. Constitue un délit politique relatif l'infraction de droit commun qui revêt néanmoins un caractère politique prépondérant: il doit avoir été commis dans le cadre d'une lutte pour ou contre le pouvoir. Enfin, par fait connexe à une infraction politique, on entend l'acte punissable selon le droit commun, mais qui bénéficie aussi d'une certaine immunité parce qu'il a été accompli parallèlement à un délit politique, généralement pour préparer, faciliter, assurer ou masquer la commission de celui-ci, voire en procurer ultérieurement l'immunité (ATF 130 II 337 consid. 3.2 et les arrêts cités). Les infractions violentes, tels les homicides, ne sauraient en principe être considérées comme des délits politiques (ATF 133 IV 76 consid. 3.8 p. 84). Il en va de même des actes "particulièrement répréhensibles" au sens de l'art. 3 al. 2 EIMP, tels les actes terroristes ou les violations du droit international humanitaire. Les art. 1 et 2 CERT énumèrent une série d'infractions pour lesquelles l'objection de délit politique ne peut être admise. Il s'agit notamment des actes de violence qui, tout en n'étant pas énumérés à l'art. 1 de la convention, visent la vie, l'intégrité ou la liberté des personnes ou causent un danger collectif (art. 2 par. e et 2 CERT). La complicité et la tentative sont également visées (art. 2 par. 3 CERT). La convention réduit ainsi la possibilité de se prévaloir de l'exception de délit politique et tend ainsi à "dépolitiser" l'extradition (ATF 142 IV 175 consid. 4.4-4.5 p. 180). On ne saurait toutefois soutenir, comme le fait la recourante, que les dispositions précitées ne s'appliquent qu'aux personnes ayant directement participé aux actes de violence qui sont reprochés à l'organisation. Il suffit en effet que la personne extradée ait fait partie de l'organisation en question ou l'ait soutenue d'une quelconque manière (ATF 142 IV 175 consid. 4.10.2 p. 87).  
 
1.3.2. En l'occurrence, la recourante a été condamnée en première instance en Espagne pour avoir fait partie de l'ETA. Cette dernière est reconnue comme organisation criminelle, au même titre, par exemple, que les bridages rouges en Italie (arrêt 1A.174/2002 du 21 octobre 2002 consid. 4.3). Jusqu'en 2009, elle figurait sur la liste des organisations considérées comme terroristes du Conseil de l'Union européenne. L'ETA avait en effet commis de nombreux attentats ayant causé la mort de plus de 800 personnes, parmi lesquelles des enfants. En seconde instance, la recourante a été acquittée de l'accusation de participation à une entreprise terroriste, seule la collaboration étant retenue; la recourante avait accepté de collaborer avec l'ETA en fonctionnant comme intermédiaire et en créant l'infrastructure nécessaire à l'organisation dans plusieurs villes européennes. Elle avait participé à des rencontres, transporté du matériel qualifié d'"important" et procédé à des réservations de véhicules et d'hébergement afin de garantir l'anonymat des membres de l'organisation. La possession de faux documents s'inscrit manifestement dans cette collaboration. Dès lors, même si la recourante n'a pas elle-même pris part à des actes de violence, sa collaboration active et délibérée à une organisation connue pour s'être livrée régulièrement à des actes de violence, en particulier des attentats, permettait d'exclure l'objection de délit politique.  
 
2.   
Dans la mesure où il est recevable, le recours doit être rejeté. La recourante a demandé l'assistance judiciaire et celle-ci peut lui être accordée. Me Olivier Peter est désigné comme avocat d'office, rétribué par la caisse du Tribunal fédéral. Il n'est pas perçu de frais judiciaires. 
 
 
 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable 
 
2.   
La demande d'assistance judiciaire est admise; Me Olivier Peter est désigné comme avocat d'office de la recourante et une indemnité de 2'000 fr. lui est allouée à titre d'honoraires, à verser par la caisse du Tribunal fédéral. Il n'est pas perçu de frais judiciaires. 
 
3.   
Le présent arrêt est communiqué au mandataire de la recourante, au Ministère public de la Confédération, au Tribunal pénal fédéral, Cour des plaintes, et à l'Office fédéral de la justice, Unité Entraide judiciaire. 
 
 
Lausanne, le 30 octobre 2017 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Merkli 
 
Le Greffier : Kurz