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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
7B_96/2023  
 
 
Arrêt du 27 novembre 2023  
 
IIe Cour de droit pénal  
 
Composition 
Mme et MM. les Juges fédéraux Koch, Juge présidant, 
Kölz et Hofmann. 
Greffière : Mme Nasel. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Baptiste Viredaz, avocat, alinéa Avocats, 
recourant, 
 
contre  
 
Ministère public de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 
1213 Petit-Lancy, 
intimé. 
 
Objet 
Traitement thérapeutique institutionnel; arbitraire, 
 
recours contre l'arrêt de la Chambre pénale de recours de la Cour de justice de la République et canton de Genève du 13 mars 2023 
(PM/841/2022 - ACPR/181/2023). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. Le 3 novembre 1998, la Cour d'assises de Genève a condamné A.________, né en 1954, pour tentative de viol avec cruauté et rupture de ban, à une peine de 5 ans de réclusion. Cette peine a été suspendue au profit d'un internement en application de l'ancien art. 43 CP. Il lui était notamment reproché, alors qu'il avait pris à bord de son véhicule une femme faisant du stop, de l'avoir embrassée et d'avoir sorti un couteau qu'il avait dans sa boîte à gants. Elle avait réussi à actionner le klaxon avec ses pieds et un véhicule s'était arrêté. En se débattant, la victime avait été blessée par le couteau. Il l'avait finalement laissée partir.  
Hormis cette condamnation, l'extrait du casier judiciaire de A.________, dans sa teneur au 2 août 2022, fait état d'une condamnation en 1994 par la Cour d'assises de Genève à huit ans de réclusion pour viol commis à réitérées reprises en 1987. 
 
A.b. L'internement initialement prononcé a été transformé en internement au sens de l'art. 64 CP par jugement du Tribunal d'application des peines et des mesures genevois (ci-après: le TAPEM) du 5 décembre 2008.  
 
A.c. L'état de santé psychique de A.________ a été examiné à plusieurs reprises en 1977, 1987, 1998, 2006 (expertise privée) ainsi que les 3 octobre 2008 et 15 novembre 2012.  
Dans le cadre de la présente cause, A.________ a été soumis à une nouvelle expertise réalisée par la Dre B.________ et le Dr C.________, qui ont rendu leur rapport le 30 avril 2021. Ces experts ont posé le diagnostic de trouble mixte de la personnalité avec des traits paranoïaques et narcissiques. Selon les experts, le fonctionnement de l'expertisé semblait enkysté, probablement favorisé par les longues années de détention sans travail psychothérapeutique actif; sur le plan sexuel, un trouble du développement psychosexuel, avec un exhibitionnisme et un intérêt pédophile a été retenu; le risque de récidive de violence sexuelle était considéré comme étant élevé. L'expertisé présentait en outre des traits psychopathiques francs, s'exprimant par son manque d'empathie, ses difficultés d'introspection, ses traits narcissiques et ses antécédents judiciaires. Les principaux facteurs présents étaient en particulier son trouble de la personnalité - bien ancré - et le trouble du développement psychosexuel, avec de nombreuses distorsions cognitives en matière de relation avec les femmes, de sexualité et de violence. 
Lors de son audition par le TAPEM le 14 octobre 2021, Giuliano Maddalazzo a déclaré poursuivre la psychothérapie initiée en février 2020, relevant qu'il avait passablement progressé. Par jugement du même jour, le TAPEM, qui s'est basé sur l'expertise réalisée le 30 avril 2021, a ordonné la poursuite de l'internement de A.________ jusqu'au prochain contrôle annuel. 
 
A.d. Plusieurs rapports et préavis ont par la suite été établis dans le cadre du contrôle de l'internement de A.________, en particulier:  
 
- deux rapports déposés les 24 février et 12 juillet 2022 par le Centre neuchâtelois de psychiatrie (ci-après: le CNP); 
- un courriel et un rapport rédigés les 14 février et 12 juillet 2022 par l'Etablissement de Bellevue; 
- un préavis émis le 11 août 2022 par le Service de l'application des peines et mesures genevois (ci-après: le SAPEM). 
Le Ministère public s'est en outre déterminé le 16 août 2022. 
 
A.e. Après avoir entendu A.________ le 10 novembre 2022, audience durant laquelle le prénommé a sollicité de passer à une mesure institutionnelle fermée, le TAPEM a ordonné, par jugement du même jour, la poursuite de son internement, jusqu'au prochain contrôle annuel de la mesure.  
 
A.f. Par arrêt du 13 mars 2023, la Chambre pénale de recours de la Cour de justice de la République et canton de Genève (ci-après: la cour cantonale ou l'autorité précédente) a rejeté le recours interjeté par A.________ contre le jugement rendu le 10 novembre 2022.  
 
B.  
Par acte du 28 avril 2023 A.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre l'arrêt du 13 mars 2023. Il conclut principalement à sa réforme en ce sens que la cause soit transmise au juge de la condamnation pour qu'il statue sur le changement de mesure de l'internement (art. 64 CP) vers le traitement thérapeutique institutionnel (art. 59 CP). Subsidiairement, il conclut à ce que l'arrêt entrepris soit annulé et la cause retournée à l'autorité précédente pour nouvelle instruction et nouvelle décision dans le sens des considérants. Il sollicite par ailleurs le bénéfice de l'assistance judiciaire et la désignation de son avocat en qualité de conseil d'office. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Aux termes de l'art. 78 al. 2 let. b LTF, sont notamment sujettes au recours en matière pénale les décisions sur l'exécution des peines et des mesures rendues par une autorité cantonale de dernière instance (cf. art. 80 al. 1 LTF; arrêts 7B_502/2023 du 6 septembre 2023 consid. 1; 6B_161/2021 du 8 avril 2021 consid. 1). Le recourant, qui s'oppose à la poursuite de son internement, dispose d'un intérêt juridique à obtenir l'annulation ou la modification de la décision attaquée (cf. art. 81 al. 1 let. a et b LTF), laquelle met un terme au litige (cf. art. 90 LTF). Pour le surplus, le recours a été formé en temps utile (cf. art. 46 al. 1 let. a et 100 al. 1 LTF). Partant, il y a lieu d'entrer en matière. 
 
2.  
La pièce nouvelle produite par le recourant datée du 31 mars 2023 est irrecevable, car postérieure à l'arrêt entrepris, à l'instar des faits mentionnés en relation avec celle-ci (cf. art. 99 al. 1 LTF; ATF 144 V 35 consid. 5.2.4; 143 V 19 consid. 1.2; 139 III 120 consid. 3.1.2). 
 
3.  
Le recourant se plaint d'arbitraire dans l'établissement des faits. 
 
3.1. Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sous réserve des cas prévus à l'art. 105 al. 2 LTF. La partie recourante ne peut critiquer les constatations de fait ressortant de la décision attaquée que si celles-ci ont été effectuées en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF ou de manière manifestement inexacte, c'est-à-dire arbitraire, et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF; ATF 145 V 188 consid. 2; 142 II 355 consid. 6). En matière d'appréciation des preuves et d'établissement des faits, il n'y a arbitraire que lorsque l'autorité ne prend pas en compte, sans aucune raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore lorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle en tire des constatations insoutenables. Le Tribunal fédéral n'entre en matière sur les moyens fondés sur la violation de droits fondamentaux, dont l'interdiction de l'arbitraire, que s'ils ont été invoqués et motivés de manière précise (art. 106 al. 2 LTF; ATF 146 IV 88 consid. 1.3.1; 143 IV 500 consid. 1.1; arrêt 7B_678/2023 du 27 octobre 2023 consid. 2.2.1). Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 147 IV 73 consid. 4.1.2; 146 IV 114 consid. 2.1).  
 
3.2. Selon le recourant, l'autorité précédente aurait arbitrairement omis de reprendre des éléments de l'expertise du 30 avril 2021 et certaines déclarations de l'expert C.________ lors de son audition devant le TAPEM le 14 octobre 2021. Elle aurait en outre dû tenir compte du rapport rendu le 4 juin 2020 par la criminologue D.________ concluant qu'un "changement de mesure permettra (au recourant) de progresser pour autant, il va de soi, que l'intéressé s'inscrive activement dans un parcours thérapeutique". La cour cantonale aurait enfin passé sous silence certains éléments "cruciaux" contenus dans le rapport rendu le 4 août 2020 par le Service de probation et d'insertion du canton de Genève, alors qu'ils attesteraient l'engagement récent du recourant dans un suivi psychothérapeutique, respectivement l'évolution favorable de sa situation. Certains faits omis seraient destinés notamment à démontrer que le suivi psychothérapeutique entrepris en février 2020 se serait intensifié depuis l'expertise du 30 avril 2021 et qu'une mesure thérapeutique institutionnelle serait parfaitement possible.  
Contrairement à ce que soutient le recourant, et comme cela résulte des considérants ci-dessous (cf. consid. 4 et 5 infra), les éléments de fait que le prénommé demande de compléter et/ou de corriger ne sont pas susceptibles d'influer sur le sort de la cause. S'agissant en particulier de l'évolution du recourant en lien avec le travail thérapeutique effectué, l'autorité précédente l'a relevée, considérant toutefois que ces changements survenus n'étaient pas suffisamment significatifs pour rendre obsolètes les conclusions de l'expertise du 30 avril 2021, respectivement que cette évolution positive ne permettait pas en l'état de considérer que les conditions d'un changement de mesure en une mesure institutionnelle fermée étaient en l'espèce réalisées. Savoir si l'autorité précédente pouvait parvenir à cette conclusion est une question de droit qui sera examinée plus loin. Dans ce qui suit, le Tribunal fédéral se fondera dès lors exclusivement sur les faits de l'arrêt entrepris (art. 105 al. 1 LTF).  
Par conséquent, le grief d'arbitraire dans l'établissement des faits doit être écarté. 
 
4.  
Le recourant soutient que la cour cantonale aurait violé les art. 189 CPP, 9 Cst. et 5 par. 1 CEDH en ne demandant pas de nouvelle expertise ou de complément d'expertise. Il fait valoir que cette autorité se serait fondée sur une expertise obsolète qui ne tiendrait pas compte de son évolution intervenue postérieurement, en particulier le travail psychothérapeutique effectué. 
 
4.1.  
 
4.1.1. Aux termes de l'art. 65 al. 1 CP, si, avant ou pendant l'exécution d'une peine privative de liberté ou d'un internement au sens de l'art. 64 al. 1, le condamné réunit les conditions d'une mesure thérapeutique institutionnelle prévues aux art. 59 à 61, le juge peut ordonner cette mesure ultérieurement.  
Selon l'art. 64b al. 1 let. b CP, l'autorité compétente examine, d'office ou sur demande, au moins une fois tous les deux ans et pour la première fois avant le début de l'internement, si les conditions d'un traitement thérapeutique institutionnel sont réunies et qu'une demande en ce sens doit être faite auprès du juge compétent. Elle prend la décision selon l'al. 1 en se fondant notamment sur une expertise indépendante au sens de l'art. 56 al. 4 (art. 64b al. 2 let. b). L'expertise doit se déterminer sur la nécessité et les chances de succès d'un traitement, la vraisemblance que l'auteur commette d'autres infractions, la nature de celles-ci et les possibilités de faire exécuter la mesure (art. 56 al. 3 CP). 
 
4.1.2. Selon l'art. 189 CPP, la direction de la procédure fait, d'office ou à la demande d'une partie, compléter ou clarifier une expertise par le même expert ou désigne un nouvel expert, si l'expertise est incomplète ou peu claire (let. a), plusieurs experts divergent notablement dans leurs conclusions (let. b) ou si l'exactitude de l'expertise est mise en doute (let. c).  
Comme tous les autres moyens de preuve, l'expertise est soumise à la libre appréciation du juge. Ce dernier ne peut cependant pas s'écarter d'une expertise sans motifs pertinents. Il doit examiner, en se fondant sur les autres moyens de preuve administrés et sur les arguments des parties, si de sérieuses objections font obstacle au caractère probant des conclusions de l'expertise. En se fondant sur une expertise non concluante, le juge peut tomber dans l'arbitraire (ATF 145 II 70 consid. 5; 142 IV 49 consid. 2.1.3; 138 III 193 consid. 4.3.1; arrêt 6B_971/2023 du 19 octobre 2023 consid. 1.2). 
Selon la jurisprudence, le juge peut se fonder sur une expertise qui figure déjà au dossier si celle-ci est encore suffisamment actuelle. L'élément déterminant n'est pas le temps qui s'est écoulé depuis le moment où l'expertise a été établie, mais plutôt l'évolution qui s'est produite dans l'intervalle. Il est ainsi parfaitement concevable de se fonder sur une expertise relativement ancienne si la situation ne s'est pas modifiée entre-temps (ATF 134 IV 246 consid. 4.3; 128 IV 241 consid. 3.4; plus récemment arrêts 6B_1167/2021 du 27 juillet 2022 consid. 3.2.1; 6B_435/2021 du 21 juin 2021 consid. 1.3). Savoir si les circonstances se sont modifiées depuis la première expertise relève du fait (ATF 106 IV 236 consid. 2a; arrêt 6B_360/2023 du 15 mai 2023 consid. 1.2). Déterminer si les circonstances nouvelles dûment constatées imposent de réitérer l'expertise est une question d'appréciation, soit de droit (ATF 105 IV 161 consid. 2; arrêts 1355/2022 du 22 mars 2023 consid. 4.2; 6B_1065/2021 du 22 février 2023 consid. 1.3). 
 
4.2. Comme le relève le recourant, les rapports du CNP et les procès-verbaux du colloque d'exécution des peines établis postérieurement à l'expertise réalisée le 30 avril 2021 font état d'une évolution positive de celui-ci, lequel est désormais impliqué et investi dans le processus thérapeutique. Cette progression ne fait pas pour autant apparaître l'expertise comme étant obsolète. En effet, lors de son établissement, dite expertise précisait déjà qu'un suivi de soutien avait débuté en février 2020, mais que celui-ci n'avait pas particulièrement contribué à améliorer les traits de la personnalité du recourant ni sa problématique sexuelle; son discours par rapport à ses actes avait peu changé depuis la précédente expertise et la prise de conscience de la gravité des faits était partielle. Selon les experts, les objectifs exprimés, en lien avec ce suivi, paraissaient en décalage avec la réalité des faits et son trouble de la personnalité; une éventuelle ouverture du cadre, comme dans le contexte d'une libération conditionnelle, le mettrait à risque d'un envahissement pulsionnel qu'il ne serait pas capable de gérer car il ne l'envisageait aucunement et n'avait pas travaillé ce sujet en thérapie. Les experts ont conclu que la poursuite de la mesure d'internement était nécessaire et qu'un changement de mesure, en particulier une ouverture, n'était en l'état pas souhaitable, ce d'autant que les perspectives et projets du recourant ne paraissaient pas réalistes; le fait qu'il ne soit pas parvenu à travailler et réfléchir sur les éléments ayant pu contribuer aux précédents passages à l'acte dans le but d'y remédier était inquiétant et l'exposait, en cas d'ouverture, à ce qu'il se retrouve dans un contexte et un environnement sans soins, sans suivi propice à une récidive sexuelle. Les experts ont en outre recommandé la poursuite du suivi psychothérapeutique, soulignant qu'il existait néanmoins de nombreux obstacles à ce que ledit suivi puisse permettre une baisse du risque de récidive, au vu de la personnalité pathologique du recourant avec des traits et un fonctionnement bien ancré, des distorsions cognitives fortes et anciennes et le maintien ancien du positionnement vis-à-vis des condamnations.  
Le courriel et le rapport de l'Etablissement de Bellevue des 14 février et 12 juillet 2022, s'ils précisent que le recourant se montre très impliqué dans le suivi thérapeutique - lequel porte désormais aussi sur les infractions commises et la sexualité -, et qu'il reconnaît désormais les infractions pour lesquelles il a été condamné, relèvent toutefois que son discours semblait "appris": il ajoutait en effet être conscient que, dans le cas contraire, cela constituait un élément en sa défaveur; il regrettait en outre l'absence de caméras lors des faits, lesquelles auraient permis de "rétablir la vérité", à savoir qu'il était tombé par hasard sur cette personne et avait profité de cette opportunité pour tenter d'abuser d'elle; il n'avait pas réalisé l'absence de consentement de la victime, et ce malgré le fait qu'il était porteur d'un couteau, qu'il avait utilisé "juste pour lui faire peur" et éviter qu'elle lui résiste. D'après ces mêmes documents, le recourant minimisait les infractions commises, précisant que d'autres personnes incarcérées pour des délits plus graves avaient passé moins de temps en détention que lui. Quant à l'audition du recourant le 10 novembre 2022 par le TAPEM, la cour cantonale a relevé qu'elle ne faisait que conforter les facteurs déjà identifiés par les experts, à savoir sa persistance à considérer qu'il n'avait pas adopté le comportement violent lors de la commission des infractions ainsi que sa tendance à minimiser les faits et à ne pas parvenir à expliquer - et donc à comprendre - les raisons de ses passages à l'acte. Il avait en effet indiqué, en particulier s'agissant du premier viol qui avait eu lieu en 1987, que la "personne [avait] été surprise de nuit. [Il] n'[avait] fait que mettre son bras autour de son cou et elle s'[était] déshabillée toute seule. Cela étant, cela [restait] un viol", car elle avait eu peur, même s'il ne savait pas de quoi. C'était "le choix qu'elle [avait] fait. Mais cela [restait] un viol car elle n'était pas consentante". La prise de conscience du recourant concernant les infractions commises apparaît, dans ce contexte, très relative. 
Ainsi, si une progression favorable du recourant peut être constatée, elle n'est pas telle qu'elle serait propre à mettre en doute, au moment de l'arrêt entrepris, l'actualité de l'expertise. L'écoulement du temps entre cette expertise et le prononcé de l'arrêt attaqué, soit un peu moins de deux ans, ne permet pas non plus de faire apparaître celle-ci comme n'étant plus d'actualité, ce d'autant que de nombreux autres éléments viennent conforter l'appréciation de l'autorité précédente qui a considéré que l'internement du recourant devait être confirmé. Dès lors, la référence du recourant à l'affaire Herz c. Allemagne notamment (du 12 juin 2003, req. no 44672/98, par. 50), dans le cadre de laquelle la CourEDH a précisé qu'une expertise psychiatrique datant d'un an et demi ne suffisait pas à elle seule pour justifier une mesure privative de liberté, n'est pas pertinente en l'espèce. La jurisprudence bien établie de la CourEDH montre en effet que la question de savoir si une expertise médicale est suffisamment récente ne peut recevoir de réponse statique, mais dépend des circonstances particulières de l'affaire, en particulier du point de savoir si la situation de l'intéressé a pu évoluer de manière importante depuis son dernier examen par un expert (D.J. c. Allemagne du 7 septembre 2017, req. no 45953/10, par. 60, et la référence citée). Comme on l'a vu, tel n'est pas le cas en l'espèce. La CourEDH avait d'ailleurs accepté une décision de maintenir une personne en détention de sûreté alors que la dernière expertise médicale sur laquelle se fondait cette décision datait de six ans, dans la mesure où les troubles relevés dans cette expertise avaient été confirmés par le psychologue de l'établissement au sein duquel la personne était internée (Dörr c. Allemagne du 22 janvier 2013, req. no 2894/08).  
 
4.3. En définitive, c'est sans violer le droit conventionnel et fédéral ni l'interdiction de l'arbitraire, que l'autorité précédente a refusé d'ordonner une nouvelle expertise, respectivement un complément d'expertise. Toutefois, il appartiendra à l'autorité compétente d'examiner avec attention la nécessité d'une nouvelle expertise ou d'un complément lors du prochain examen de la mesure d'internement au sens de l'art. 64b al. 1 CP, les différentes démarches du recourant pouvant éventuellement avoir conduit à une évolution de sa situation. L'écoulement du temps depuis la dernière expertise devra aussi être pris en compte.  
 
5.  
Le recourant fait valoir que l'autorité précédente aurait violé le droit en ne renvoyant pas la cause au juge de la condamnation pour qu'il statue sur le changement de mesure. 
 
5.1. Selon l'art. 59 al. 1 CP, lorsque l'auteur souffre d'un grave trouble mental, le juge peut ordonner un traitement institutionnel lorsque celui-ci a commis un crime ou un délit en relation avec ce trouble (let. a) et qu'il est à prévoir que cette mesure le détournera de nouvelles infractions en relation avec ce trouble (let. b).  
 
5.2. En présence d'un trouble psychiatrique, l'internement constitue une mesure subsidiaire par rapport à une mesure institutionnelle au sens de l'art. 59 CP. En tant qu'ultima ratio, en raison de la gravité de l'atteinte à la liberté personnelle qu'il représente (cf. ATF 148 IV 398 consid. 4.6; 140 IV 1 consid. 3.2.4), l'internement n'entre pas en considération tant qu'une mesure institutionnelle apparaît utile (ATF 137 IV 59 consid. 6.2; arrêt 6B_188/2023 du 28 juin 2023 consid. 2.1.3).  
Le seul fait que l'intéressé soit désireux et apte à suivre un traitement institutionnel ne suffit toutefois pas à éviter l'internement ou son maintien. Selon la jurisprudence, la condition posée par l'art. 59 al. 1 let. b CP - qu'il soit à prévoir que la mesure détournera l'intéressé de nouvelles infractions en relation avec son trouble - est réalisée lorsque, au moment de la décision, il est suffisamment vraisemblable qu'un traitement institutionnel entraînera dans les cinq ans de sa durée normale une réduction nette du risque de récidive (ATF 140 IV 1 consid. 3.2.4; 134 IV 315 consid. 3.4.1). La possibilité vague d'une diminution du risque ou l'espoir d'une diminution seulement minimale de ce risque ne sont pas suffisants (cf. ATF 140 IV 1 consid. 3.2.4; 134 IV 315 consid. 3.4.1; plus récemment arrêt 6B_188/2023 précité consid. 2.1.3). 
L'exigence du pronostic découlant de l'art. 59 al. 1 let. b CP ne signifie pas qu'un condamné souffrant de trouble mental ne pourra pas recevoir l'assistance nécessaire, mais seulement que la mesure préconisée par l'art. 59 CP n'est pas adéquate, tout au moins dans l'état des choses au moment où la décision est rendue. La personne soumise à l'internement peut du reste bénéficier d'un traitement psychiatrique (art. 64 al. 4 CP; arrêts 6B_188/2023 précité consid. 2.1.3; 6B_716/2022 du 11 octobre 2022 consid. 4.2; 6B_817/2021 du 30 mars 2022 consid. 2.1). Plus généralement, même si elles ne visent pas prioritairement l'amélioration du pronostic, respectivement si elles ne sont pas aptes à l'améliorer nettement à cinq ans de vue, des possibilités thérapeutiques doivent être offertes, tout au moins dans la perspective, même éloignée, de la fin de l'internement (arrêts 6B_188/2023 précité consid. 2.1.3; 6B_716/2022 précité consid. 4.2; 6B_1483/2021 du 3 octobre 2022 consid. 3.1). 
 
5.3. En l'espèce, il n'est pas contesté ni contestable que le recourant souffre d'un grave trouble mental ainsi que d'un trouble du développement psychosexuel en lien avec la tentative de viol avec cruauté pour lequel il a été condamné le 3 novembre 1998. Reste donc à déterminer s'il était suffisamment vraisemblable, au moment où la décision attaquée a été rendue, qu'un traitement institutionnel entraînerait, dans les cinq ans de sa durée normale, une réduction nette du risque que l'intéressé commette de nouvelles infractions en lien avec ce trouble.  
Comme déjà relevé (cf. consid. 4.2 supra), les experts ont, en substance, retenu que le discours du recourant par rapport à ses actes avait peu changé depuis la précédente expertise, que la prise de conscience de la gravité des faits était partielle, qu'il était toujours dans une position de victime et que le suivi de soutien, débuté en février 2020, n'avait pas particulièrement contribué à améliorer les traits de sa personnalité ni sa problématique sexuelle. Ils en ont conclu qu'une mesure d'internement était nécessaire. Entendu devant le TAPEM le 14 octobre 2021, l'expert C.________ a confirmé que la prise de conscience limitée, voire faible, du recourant et son absence d'évolution ne militaient pas en faveur d'un changement de mesure; la poursuite du suivi avec la psychologue était un élément positif, sans toutefois modifier les conclusions de l'expertise, dès lors que celui-ci concernait la dynamique familiale et non les faits pour lesquels il était interné; ces soins étaient utiles mais insuffisants pour traiter l'affection du recourant, car ils n'abordaient pas les infractions poursuivies et pour lesquelles il avait été condamné ainsi que les liens entre son histoire personnelle et les infractions. L'expert a ajouté que bien que lesdits soins puissent faire partie du processus pour aboutir au traitement des questions "centrales", la thérapie, débutée un an et demi auparavant, n'avait pas encore permis l'évocation des thématiques "principales". 
De telles conclusions ne permettent pas de prévoir qu'un traitement institutionnel serait susceptible de détourner le recourant de nouvelles infractions au sens de l'art. 59 al. 1 let. b CP. Le fait que l'expertise indique que c'est en raison du niveau de risque de récidive que le maintien du recourant doit se faire dans un établissement fermé, respectivement le fait que l'expert C.________ ait ajouté lors de son audition le 14 octobre 2021 qu'il ne lui appartenait pas en tant qu'expert de prendre position sur des questions sécuritaires, ne permettent pas d'en déduire, comme le fait le recourant, qu'une mesure thérapeutique institutionnelle devrait être ordonnée. En effet, l'expertise conclut clairement que le changement de mesure, en particulier une ouverture, n'est en l'état pas souhaitable, ce d'autant que les perspectives et projets du recourant ne paraissaient pas réalistes. Certes, le recourant s'est désormais engagé dans un travail thérapeutique portant sur ses troubles psychiques et sexuels ainsi que sur les infractions commises. Si cette évolution doit être saluée, force est de constater, avec l'autorité précédente, que l'amorce de ce travail date du 24 février 2022, soit plus de vingt ans après son incarcération, et ce malgré les nombreux suivis ponctuels entrepris, puis arrêtés, durant sa détention (cf. arrêt entrepris p. 11). De plus, à la lecture des déclarations du recourant lors de son audition du 10 novembre 2022 devant le TAPEM, on ne saurait reprocher à l'autorité précédente d'avoir considéré qu'elles ne faisaient que conforter les facteurs déjà identifiés par les experts. 
Dès lors, au vu de ces éléments et de ceux déjà évoqués (cf. consid. 4.2 supra), l'évolution favorable du recourant constatée postérieurement à l'expertise réalisée en avril 2021, n'apparaît pas suffisante pour modifier, au moment de l'arrêt attaqué en mars 2023, les conclusions de dite expertise quant aux troubles graves dont le recourant souffre, au risque de récidive élevé constaté et à l'existence de nombreux obstacles à ce que le suivi thérapeutique - même s'il demeure nécessaire - puisse permettre une baisse du risque de récidive. Il en va de même de l'âge du recourant; on ne distingue pas, avec la cour cantonale, en quoi cette circonstance diminuerait le risque de récidive, dans la mesure notamment où il n'a pas hésité, par le passé, à utiliser un couteau pour parvenir à ses fins (cf. arrêt entrepris, p. 4 et 12). 
A ces éléments s'ajoute le préavis négatif du 11 août 2022 du SAPEM quant au remplacement de l'internement par une mesure thérapeutique institutionnelle. En outre, ni les rapports du CNP des 24 février et 12 juillet 2022 ni celui de l'Etablissement de Bellevue du 12 juillet 2022 ni les procès-verbaux du colloque d'exécution des peines des 25 octobre 2021 et 25 avril 2022 n'ont conclu qu'il était suffisamment vraisemblable qu'un traitement thérapeutique institutionnel entraînerait, dans les cinq ans, une réduction nette du risque que le recourant ne commette en raison de son trouble mental un crime prévu à l'art. 64 CP. Le Ministère public a également conclu au maintien de la mesure d'internement, considérant que le pronostic pénal du recourant demeurait défavorable et que les conditions d'un changement de mesure n'étaient pas réalisées. 
 
5.4. En définitive, si une évolution favorable a certes pu être constatée au moment de l'arrêt attaqué, la cour cantonale n'a cependant pas versé dans l'arbitraire ni violé le droit fédéral en considérant que les conditions d'une mesure thérapeutique institutionnelle n'étaient en l'état pas réunies et qu'il était prématuré de mettre en oeuvre une telle mesure en lieu et place de l'internement prononcé.  
 
6.  
Le recourant a demandé l'octroi de l'assistance judiciaire (art. 64 al. 1 LTF). Les conditions y relatives étant réunies, il y a lieu d'admettre cette requête et de désigner Me Baptiste Viredaz en tant qu'avocat d'office pour la procédure fédérale et de lui allouer une indemnité à titre d'honoraires, qui sera supportée par la caisse du Tribunal fédéral (art. 64 al. 2 LTF). Le recourant est toutefois rendu attentif à son obligation de rembourser la caisse du Tribunal fédéral s'il retrouve ultérieurement une situation financière lui permettant de le faire (cf. art. 64 al. 4 LTF). Il ne sera pas perçu de frais judiciaires (art. 64 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
La demande d'assistance judiciaire est admise. 
 
2.1.  
Me Baptiste Viredaz est désigné comme avocat d'office du recourant et une indemnité de 2'00 fr. lui est allouée à titre d'honoraires, à payer par la caisse du Tribunal fédéral. 
 
2.2.  
Il n'est pas perçu de frais judiciaires. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué au mandataire du recourant, au Ministère public de la République et canton de Genève et à la Chambre pénale de recours de la Cour de justice de la République et canton de Genève. 
 
 
Lausanne, le 27 novembre 2023 
Au nom de la IIe Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Juge présidant : Koch 
 
La Greffière : Nasel