Wichtiger Hinweis:
Diese Website wird in älteren Versionen von Netscape ohne graphische Elemente dargestellt. Die Funktionalität der Website ist aber trotzdem gewährleistet. Wenn Sie diese Website regelmässig benutzen, empfehlen wir Ihnen, auf Ihrem Computer einen aktuellen Browser zu installieren.
Zurück zur Einstiegsseite Drucken
Grössere Schrift
 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
4C.321/2005 /fzc 
 
Arrêt du 27 février 2006 
Ire Cour civile 
 
Composition 
MM. et Mme les Juges Corboz, Président, Favre et Kiss. 
Greffière: Mme Godat Zimmermann. 
 
Parties 
X.________, 
défendeur et recourant principal, représenté par Me Marc Bonnant, avocat, 
 
contre 
 
Y.________, 
demanderesse et recourante par voie de jonction, représentée par Me Joanna Bürgisser, avocate, 
 
Objet 
contrat de travail de longue durée; licenciement immédiat, 
 
recours en réforme et recours joint contre l'arrêt de la Cour d'appel de la juridiction des prud'hommes du canton de Genève du 18 juillet 2005. 
 
Faits: 
A. 
Licenciée en lettres, Y.________, née en 1946, a travaillé dans le domaine de l'édition, puis dans des musées, en qualité de conservatrice ou de responsable de collections et de bibliothèques historiques. X.________ est un collectionneur d'objets et d'oeuvres d'art; il est régulièrement appelé à prêter des pièces de sa collection pour des expositions en Suisse et à l'étranger, voire à organiser des expositions complètes. Dès les années 1980, l'importance des aspects administratifs liés à la gestion de ses biens artistiques l'a amené à s'attacher les services d'une personne à plein temps. C'est ainsi qu'en février 1987, X.________ a engagé Y.________ comme collaboratrice scientifique. Celle-ci a notamment effectué des recherches et des traductions; elle s'est également occupée de la coordination des prêts de la collection X.________, à l'entière satisfaction de son employeur. Elle a quitté son emploi le 31 décembre 1995 pour rejoindre le musée A.________, où elle travaillera comme collaboratrice des commissions d'exposition chargée de l'organisation et de la coordination des projets et des catalogues. 
 
A la fin de l'année 1999, X.________ a proposé à Y.________ de collaborer à nouveau avec lui. Le 30 novembre 1999, les parties ont conclu un contrat de travail de durée déterminée, allant du 1er mars 2000 au 31 août 2011; le salaire brut annuel s'élevait à 130'000 fr. et le droit au salaire en cas d'empêchement non fautif de travailler était fixé à six mois. Ayant collaboré avec X.________ pendant huit ans, Y.________ connaissait les avantages et les inconvénients liés à cet emploi. Il n'était ainsi pas toujours facile de travailler pour le collectionneur, doté d'un caractère passionné et exigeant, mais également nerveux au point de rendre l'ambiance de travail tendue. Par ailleurs, l'activité demandée, qui s'exerçait essentiellement au domicile de l'employeur, supposait une implication personnelle accrue dans la vie privée de X.________. 
 
Dès le 11 juin 2003, Y.________ s'est trouvée, pour une durée indéterminée, en incapacité totale de travailler en raison d'un cancer. En septembre 2003, l'épouse de X.________ a écrit à Y.________, en particulier pour lui adresser des voeux de meilleure santé; son mari a ajouté quelques mots à la main. En novembre 2003, X.________ a téléphoné à sa collaboratrice pour prendre de ses nouvelles. A cette occasion, il lui a confirmé que son salaire serait versé intégralement jusqu'à la fin décembre 2003, conformément au contrat; il lui a également fait savoir qu'un montant de 4'000 fr. par mois lui serait payé à bien plaire jusqu'au 30 juin 2004. 
 
Par courrier de son conseil du 15 décembre 2003, Y.________ a élevé divers griefs à l'encontre de X.________; elle demandait ainsi à son employeur de lui fournir, avant qu'elle ne reprenne le travail, un certain nombre de garanties liées à la protection de sa personnalité (art. 328 CO). Elle exigeait également le paiement de vingt-trois jours de vacances non pris en 2003, pour un montant total de 11'705 fr. L'employée a joint à cette lettre une «attestation médicale» établie le 4 décembre 2003 par son gynécologue. Selon ce document, l'état de santé de Y.________, en particulier sa résistance immunitaire, se sont affaiblis «en relation directe avec son travail», source de stress; en conclusion, le médecin déconseille à sa patiente de reprendre son activité chez le même employeur. 
 
Le 30 décembre 2003, X.________ a versé à Y.________ le montant qu'elle réclamait au titre des vacances non prises. Le même jour, il a annulé l'ordre de virement de 4'000 fr. par mois. 
 
Par lettre du 8 janvier 2004, le conseil de X.________ a résilié le contrat de travail avec effet immédiat. A son sens, le courrier du 15 décembre 2003 était de nature à rompre le rapport de confiance entre les parties et à fonder ainsi un licenciement immédiat pour justes motifs au sens de l'art. 337 CO. Néanmoins, eu égard notamment à l'état de santé de l'employée, l'avocat du collectionneur préférait invoquer l'art. 119 CO, Y.________ se trouvant dans l'incapacité de fournir sa prestation de travail pour une période durable. 
B. 
Par demande déposée le 19 janvier 2004, Y.________ a assigné X.________ en paiement de 1'076'213 fr. plus intérêts, soit: 
 
- 985'834 fr. à titre de salaire jusqu'au terme du contrat; 
- 65'000 fr. à titre d'indemnité pour licenciement immédiat injustifié; 
- 20'000 fr. à titre d'indemnité pour tort moral; 
- 5'379 fr. à titre d'indemnité au sens de l'art. 5 al. 3 de la loi fédérale sur l'égalité entre femmes et hommes (LEg; RS 151.1). 
 
Le chargé accompagnant la demande comportait un certificat médical daté du 12 janvier 2004, par lequel un médecin du département de radio-oncologie des Hôpitaux Universitaires de Genève attestait de la capacité de travail totale de Y.________ à partir du 1er février 2004. 
 
Par courrier du 26 janvier 2004, le conseil de X.________ a pris acte de ce fait et invité Y.________ à se présenter sur son lieu de travail le 1er février. Cette lettre a été suivie des mises en demeure des 28 (recte: 27) et 30 janvier 2004, auxquelles Y.________ n'a pas donné suite. Considérant que l'employée n'entendait pas assumer ses obligations, X.________, toujours par l'intermédiaire de son conseil, lui a fait savoir, par courrier du 3 février 2004, qu'il résiliait le contrat de travail avec effet immédiat pour justes motifs au sens de l'art. 337 CO
 
Lors de l'audience du 26 avril 2004 devant le Tribunal des prud'hommes du canton de Genève, X.________ a renouvelé, en vain, son offre de reprendre Y.________ à son service. 
 
La caisse cantonale genevoise de chômage est intervenue à la procédure en vertu de sa subrogation dans les droits de Y.________ à hauteur de 3'735 fr.95 pour février 2004, 5'825 fr.20 pour mars 2004, 5'563 fr.75 pour avril 2004, 5'301 fr.65 pour mai 2004, 5'563 fr.75 pour juin 2004 et 5'563 fr.75 pour juillet 2004. 
 
Depuis le 1er août 2004, Y.________ travaille comme responsable des relations publiques et de la coordination pour la Fondation B.________ de la société F. Hoffmann-La Roche. Sa rémunération annuelle est de 112'000 fr. 
 
Par jugement du 10 janvier 2005, le Tribunal des prud'hommes a débouté Y.________ et la caisse de chômage de toutes leurs conclusions. 
 
Statuant le 18 juillet 2005 sur appel de l'employée, la Cour d'appel de la juridiction des prud'hommes a annulé le jugement de première instance. Elle a condamné X.________ à payer à Y.________ à titre de salaire le montant brut de 174'500 fr., plus intérêts à 5% dès le 19 janvier 2004, sous déduction des sommes dues à la caisse cantonale genevoise de chômage, soit: 
 
- 3'735 fr.95 plus intérêts à 5% dès le 9 avril 2004; 
- 5'825 fr.20 plus intérêts à 5% dès le 19 avril 2004; 
- 5'563 fr.75 plus intérêts à 5% dès le 4 mai 2004; 
- 5'301 fr.65 plus intérêts à 5% dès le 4 juin 2004; 
- 5'563 fr.75 plus intérêts à 5% dès le 2 juillet 2004; 
- 5'563 fr.75 plus intérêts à 5% dès le 27 juillet 2004. 
 
En outre, X.________ a été condamné à payer à Y.________ le montant de 10'000 fr., plus intérêts à 5% dès le 19 janvier 2004, à titre d'indemnité pour résiliation immédiate injustifiée. La cour cantonale a mis l'émolument judiciaire de 8'000 fr. à concurrence de 6'000 fr. à la charge de la demanderesse et à concurrence de 2'000 fr. à la charge du défendeur. 
C. 
X.________ interjette un recours en réforme. Il conclut principalement à l'annulation de l'arrêt attaqué et au rejet des conclusions en paiement de Y.________. A titre subsidiaire, il demande le renvoi du dossier à l'autorité cantonale pour compléter l'état de fait. 
 
Y.________ propose le rejet du recours. Par ailleurs, elle forme un recours joint. Elle conclut principalement à l'annulation de l'arrêt attaqué et à la condamnation de X.________ à lui payer, d'une part, le montant brut de 434'500 fr.60 plus intérêts à 5% dès le 19 janvier 2004, sous déduction des sommes dues à la caisse cantonale genevoise de chômage et, d'autre part, le montant net de 65'000 fr. plus intérêts à 5% dès le 19 janvier 2004. A titre subsidiaire, elle demande à prouver par toutes voies de droit utiles les faits allégués dans ses écritures. 
 
X.________ propose le rejet du recours joint. 
 
La caisse cantonale genevoise de chômage n'a pas été invitée à se déterminer. 
 
Par arrêt de ce jour, la cour de céans a rejeté dans la mesure de sa recevabilité le recours de droit public déposé par X.________ contre la même décision. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
1. 
1.1 Interjeté par la partie qui a succombé partiellement dans ses conclusions libératoires, et dirigé contre une décision finale rendue en dernière instance cantonale par un tribunal supérieur (art. 48 al. 1 OJ) sur une contestation civile dont la valeur litigieuse dépasse le seuil de 8'000 fr. (art. 46 OJ), le recours principal est en principe recevable, puisqu'il a été déposé en temps utile (art. 54 al. 1 OJ) et dans les formes requises (art. 55 OJ). Il en va de même du recours joint (art. 59 al. 3 et 4 OJ). 
1.2 Le recours en réforme est ouvert pour violation du droit fédéral (art. 43 al. 1 OJ). Il ne permet en revanche pas d'invoquer la violation directe d'un droit de rang constitutionnel (art. 43 al. 1 2e phrase OJ), ni la violation du droit cantonal (ATF 127 III 248 consid. 2c et les arrêts cités). 
 
Saisi d'un tel recours, le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des faits contenus dans la décision attaquée, à moins que des dispositions fédérales en matière de preuve n'aient été violées, qu'il faille rectifier des constatations reposant sur une inadvertance manifeste (art. 63 al. 2 OJ) ou compléter les constatations de l'autorité cantonale parce que celle-ci n'a pas tenu compte de faits pertinents, régulièrement allégués et clairement établis (art. 64 OJ; ATF 130 III 102 consid. 2.2. p. 106, 136 consid. 1.4. p. 140; 127 III 248 consid. 2c). 
 
Dans la mesure où la partie recourante présente un état de fait qui s'écarte de celui contenu dans la décision attaquée, sans se prévaloir avec précision de l'une des exceptions qui viennent d'être rappelées, il n'est pas possible d'en tenir compte (ATF 127 III 248 consid. 2c). Il ne peut être présenté de griefs contre les constatations de fait, ni de faits ou de moyens de preuve nouveaux (art. 55 al. 1 let. c OJ). Le recours en réforme n'est donc pas ouvert pour remettre en cause l'appréciation des preuves et les constatations de fait qui en découlent (ATF 130 III 136 consid. 1.4 p. 140; 128 III 271 consid. 2b/aa p. 277; 127 III 247 consid. 2c p. 252). Par conséquent, le recours joint est irrecevable dans la mesure où il tend à permettre à la demanderesse de compléter les faits. 
1.3 Au surplus, la juridiction de réforme ne peut aller au-delà des conclusions des parties; en revanche, elle n'est liée ni par les motifs développés dans les écritures (art. 63 al. 1 OJ; ATF 128 III 411 consid. 3.2.2 p. 415), ni par l'argumentation juridique suivie par la cour cantonale (art. 63 al. 3 OJ; ATF 130 III 136 consid. 1.4 p. 140; 128 III 22 consid. 2e/cc; 127 III 248 consid. 2c; 126 III 59 consid. 2a). 
 
Sur le recours principal: 
2. 
Le défendeur reproche tout d'abord à la cour cantonale d'avoir violé l'art. 8 CC relatif au fardeau de la preuve en écartant, sans les examiner, les allégués et certaines offres de preuve propres à établir la volonté commune des parties de mettre fin au contrat de travail. 
2.1 L'art. 8 CC répartit le fardeau de la preuve pour toutes les prétentions fondées sur le droit fédéral et détermine, sur cette base, laquelle des parties doit assumer les conséquences de l'échec de la preuve (ATF 130 III 321 consid. 3.1 p. 323; 127 III 519 consid. 2a p. 522; 126 III 189 consid. 2b, 315 consid. 4a). On déduit également de l'art. 8 CC un droit à la preuve et à la contre-preuve (ATF 129 III 18 consid. 2.6 et les arrêts cités). En particulier, le juge enfreint cette disposition s'il tient pour exactes les allégations non prouvées d'une partie, nonobstant leur contestation par la partie adverse, ou s'il refuse toute administration de preuve sur des faits pertinents en droit (ATF 130 III 591 consid. 5.4 p. 601/602 et l'arrêt cité). 
 
En revanche, l'art. 8 CC ne prescrit pas quelles sont les mesures probatoires qui doivent être ordonnées (ATF 127 III 519 consid. 2a), ni ne dicte au juge comment forger sa conviction (ATF 128 III 22 consid. 2d p. 25; 127 III 248 consid. 3a, 519 consid. 2a). Il n'exclut ni l'appréciation anticipée des preuves, ni la preuve par indices (ATF 129 III 18 consid. 2.6 p. 25; 127 III 520 consid. 2a; 126 III 315 consid. 4a). Au demeurant, lorsque l'appréciation des preuves convainc le juge qu'un fait est établi à satisfaction de droit ou réfuté, la question de la répartition du fardeau de la preuve ne se pose plus et le grief tiré de de la violation de l'art. 8 CC devient sans objet. Il s'agit alors d'une question d'appréciation des preuves, qui ne peut être soumise au Tribunal fédéral que par la voie du recours de droit public pour arbitraire (ATF 127 III 519 consid. 2a; 122 III 219 consid. 3c). 
2.2 En l'espèce, sous le couvert de l'art. 8 CC, le défendeur cherche à remettre en cause l'appréciation des preuves à laquelle la cour cantonale s'est livrée. En effet, les juges genevois ont considéré que le défendeur n'avait pas démontré que la demanderesse «ne désirait plus travailler à son service», soit que la volonté interne de l'employée était de résilier le contrat. Le défendeur n'a pas été empêché de faire administrer des preuves à ce sujet. Les moyens auxquels il se réfère dans son recours ont été soumis aux juges cantonaux. Le gynécologue et la soeur de la demanderesse ont été entendus au cours de la procédure; l'employée elle-même a été interrogée. Que ces moyens n'aient pas convaincu la Cour d'appel est une question d'appréciation des preuves qui ne peut être revue dans le cadre d'un recours en réforme, conformément aux principes rappelés ci-dessus. Le moyen tiré d'une violation de l'art. 8 CC est dès lors mal fondé. 
3. 
En deuxième lieu, le défendeur critique le résultat de l'interprétation objective donnée par la cour cantonale à la lettre de la demanderesse du 15 décembre 2003. Contrairement aux principes dégagés sur la base de la théorie de la confiance, les juges genevois n'auraient pas tenu compte des circonstances entourant l'envoi dudit courrier, en particulier de l'attestation médicale du 4 décembre 2003 qui l'accompagnait. D'après le défendeur, il pouvait de bonne foi comprendre, à la lecture de la lettre contenant des griefs infondés et de son annexe, que la demanderesse ne reviendrait pas travailler à son service. En outre, la cour cantonale aurait dû prendre en compte des faits intervenus postérieurement à la réception de la lettre du 15 décembre 2003, comme le dépôt très rapide de la demande de paiement ou le refus de la demanderesse de réintégrer son emploi. 
3.1 Selon le principe de la confiance, le juge doit rechercher comment une déclaration ou une attitude pouvait être comprise de bonne foi en fonction de l'ensemble des circonstances (interprétation dite objective; ATF 131 III 606 consid. 4.1 p. 611; 131 V 27 consid. 2.2 p. 29; 130 III 417 consid. 3.2 p. 424/425; 129 III 118 consid. 2.5, 702 consid. 2.4 p. 707). Les circonstances déterminantes sont celles qui ont précédé ou accompagné la manifestation de volonté (ATF 131 III 377 consid. 4.2. p. 382 et l'arrêt cité), à l'exclusion des événements postérieurs (Bernard Corboz, Le contrat et le juge, in Le contrat dans tous ses états, Berne 2004, p. 275/276). L'application du principe de la confiance est une question de droit que le Tribunal fédéral, saisi d'un recours en réforme, peut examiner librement (ATF 131 III 377 consid. 4.2.1 p. 382, 606 consid. 4.1 p. 611; 130 III 417 consid. 3.2 p. 425). Pour trancher cette question de droit, il faut cependant se fonder sur le contenu de la manifestation de volonté et sur les circonstances, lesquels relèvent du fait (ATF 130 III 417 consid. 3.2 p. 425; 129 III 118 consid. 2.5; 128 III 419 consid. 2.2). 
3.2 Le défendeur n'a jamais prétendu que la demanderesse aurait résilié le contrat de travail unilatéralement. Il s'agit donc d'examiner en l'espèce si la lettre du 15 décembre 2003 pouvait être comprise de bonne foi par l'employeur comme une offre de mettre fin aux rapports de travail. 
Au préalable, il convient de rappeler que les circonstances postérieures à l'envoi de la lettre, auxquelles le défendeur se réfère, sont dénuées de pertinence dans le cadre d'une interprétation fondée sur le principe de la confiance (cf. consid. 3.1 ci-dessus). 
 
Cela étant, le destinataire du courrier litigieux ne pouvait manifestement pas conclure de bonne foi qu'en écrivant ces lignes, la demanderesse proposait de résilier conventionnellement le contrat. Après une description, certes subjective, de la relation de travail et des difficultés rencontrées avec son employeur, l'employée conclut sa lettre par une demande précise: obtenir des garanties sur le respect de sa personnalité et de son cahier des charges, avant la reprise du travail qui adviendra à une date indéterminée. Dans ce contexte, l'attestation du gynécologue, déconseillant à sa patiente de travailler à nouveau pour le défendeur, tend à faire comprendre à celui-ci l'état de tension ressenti par la demanderesse en relation avec son emploi et, par conséquent, l'importance des garanties demandées. Même si elle est rédigée de manière maladroite en faisant du rapport de travail la cause de l'état de santé dégradé de l'employée, cette pièce ne permet en aucun cas de déduire un sens différent de celui qui ressort expressément du courrier litigieux. 
 
La cour cantonale n'a ainsi pas violé le droit fédéral en refusant de voir dans la lettre du 15 décembre 2003 autre chose qu'une demande de mise au point de l'employée avant la reprise du travail. Le deuxième grief doit être écarté. 
4. 
4.1 Le défendeur se plaint également d'une violation de l'art. 119 CO. La cour cantonale aurait méconnu la jurisprudence consacrée à l'ATF 126 III 75 en niant la faculté pour l'employeur de résilier le contrat de travail en raison de l'impossibilité de l'employée de fournir sa prestation. 
4.2 En matière de contrat de travail, les effets de l'impossibilité non fautive du travailleur de fournir sa prestation sont réglés par les art. 324a et 324b CO, pour autant que le contrat de travail ait duré plus de trois mois ou ait été conclu pour plus de trois mois (ATF 126 III 75 consid. 2d p. 78/79). Il s'agit là d'un cas spécial de l'impossibilité (art. 119 CO; Pierre Tercier, Les contrats spéciaux, 3e éd., n. 3175, p. 458). Dans l'arrêt invoqué par le défendeur, la collaboratrice - une cantatrice - avait été engagée pour moins de trois mois, de sorte qu'elle ne pouvait prétendre à être payée en cas d'empêchement non fautif de travailler; c'est donc la règle générale de l'art. 119 al. 2 CO qui s'appliquait dans ce cas, le cocontractant étant libéré de l'obligation de fournir la contrepartie de la prestation impossible dans un contrat bilatéral (ATF 126 III 75 consid. 2c p. 78 et consid. 2d p. 79 in fine). La problématique soumise au Tribunal fédéral consistait ainsi à déterminer ce qu'il en était des obligations respectives des parties en cas d'empêchement non fautif d'une travailleuse engagée pour moins de trois mois. Il ne s'agissait nullement de se prononcer sur une résiliation du contrat (cf. ATF 126 III 75 consid. 2f p. 80). En effet, l'art. 119 CO relatif à l'impossibilité de l'exécution régit le sort des obligations de chaque partie, mais non la fin du contrat lui-même. Contrairement à ce que le défendeur soutient, la jurisprudence précitée n'a donc pas consacré un droit de l'employeur de résilier de manière anticipée le contrat de durée déterminée le liant à un employé empêché sans sa faute de travailler. 
 
Ceci posé, le licenciement immédiat signifié à la demanderesse le 8 janvier 2004 est manifestement injustifié, dès lors que la loi interdit expressément de considérer comme un juste motif de résiliation immédiate la raison invoquée par le défendeur, soit l'incapacité durable de l'employée pour raisons de santé (art. 337 al. 3 CO). 
 
En conclusion, la cour cantonale n'a violé ni l'art. 119 CO, ni l'art. 337 CO en reconnaissant le caractère injustifié de la résiliation du 8 janvier 2004. 
5. 
5.1 Le défendeur reproche ensuite à la cour cantonale une violation des art. 23 ss CO. La résiliation du 8 janvier 2004 serait entachée d'une erreur essentielle puisque, contrairement à ce que l'employeur croyait, la demanderesse n'était alors pas dans une incapacité durable de travailler. Selon le défendeur, il a invalidé sa déclaration de résiliation dès qu'il a eu connaissance du certificat médical du 12 janvier 2004, en invitant la demanderesse à se présenter sur son lieu de travail début février 2004. 
5.2 La résiliation est un droit formateur qui s'exerce par un acte juridique unilatéral (ATF 128 III 129 consid. 2a et les références). Afin d'assurer une situation juridique claire dans l'intérêt de la partie adverse, l'exercice d'un droit formateur est en principe inconditionnel et irrévocable (ATF 128 III 70 consid. 2 p. 75 et les références, 129 consid. 2a p. 135 pour la résiliation). Le principe d'irrévocabilité souffre toutefois quelques exceptions. Une déclaration unilatérale d'invalidation peut ainsi être affectée d'un vice de la volonté (ATF 128 III 70 consid. 2 p. 75). Il est également admis qu'une résiliation est susceptible d'être invalidée pour cause d'erreur (Streiff/von Kaenel, Arbeitsvertrag, 6e éd., n. 2 ad art. 335 CO, p. 593; Bruno Schmidlin, Commentaire romand, n. 65 ad art. 23-24 CO; Rehbinder/Portmann, Basler Kommentar, 3e éd., n. 10 ad art. 335 CO). Encore faut-il que l'erreur soit essentielle au sens des art. 23 ss CO; on peut ainsi imaginer qu'un licenciement immédiat adressé à la mauvaise personne soit invalidé pour cause d'erreur sur la personne (art. 24 al. 1 ch. 2 CO). En revanche, l'erreur qui porte uniquement sur les motifs n'est en principe pas essentielle (art. 24 al. 2 CO). Fait exception l'erreur de base au sens de l'art. 24 al. 1 ch. 4. 
5.3 En l'espèce, l'erreur dont le défendeur se prévaut porte sur le caractère durable de l'incapacité de travail de la demanderesse: lors de l'envoi de l'avis de résiliation du 8 janvier 2004, l'employeur aurait cru que la collaboratrice ne pourrait reprendre son emploi avant longtemps, ce qui n'était pas le cas sur le vu du certificat médical du 12 janvier 2004. Il s'agit là d'une simple erreur sur les motifs. Elle ne concerne pas un fait important, dès lors que l'état de santé de l'employée n'est pas un élément qui revêt une quelconque pertinence en cas de résiliation avec effet immédiat. L'erreur invoquée n'apparaît ainsi pas comme essentielle. 
 
Il n'est dès lors pas nécessaire de trancher la question de savoir si la lettre du 26 janvier 2004 doit être considérée comme une déclaration d'invalidation tacite. Le moyen tiré d'une violation des art. 23 ss CO sera rejeté. 
6. 
6.1 En dernier lieu, le défendeur se plaint d'une violation de l'art. 337c al. 2 in fine CO. Selon lui, la demanderesse aurait dû accepter de reprendre son ancien poste lorsque le conseil de l'employeur l'a invitée à le faire dans son courrier du 26 janvier 2004. En refusant de réintégrer son emploi chez le défendeur, la demanderesse a renoncé intentionnellement à un revenu correspondant à celui qu'elle réclame à titre de dommages-intérêts. La cour cantonale aurait dû admettre que l'employée ne subissait aucun dommage, puisque le revenu auquel elle a renoncé est équivalent à ses prétentions fondées sur l'art. 337c al. 1 CO, desquelles il doit être déduit. 
6.2 Le travailleur licencié immédiatement de manière injustifiée a droit à ce qu'il aurait gagné si les rapports de travail avaient pris fin à l'échéance du délai de congé ou à la cessation du contrat conclu pour une durée déterminée (art. 337c al. 1 CO). On impute sur ce montant ce que le travailleur a épargné par suite de la cessation du contrat de travail ainsi que le revenu qu'il a tiré d'un autre travail ou le revenu auquel il a intentionnellement renoncé (art. 337c al. 2 CO). Cette déduction est une expression du principe général imposant à celui qui subit un dommage de faire tout ce que l'on peut raisonnablement exiger de lui pour le réduire (art. 44 al. 1 CO). Pour déterminer si le travailleur a renoncé intentionnellement à un revenu, il faut tenir compte de toutes les circonstances du cas (arrêt 4C.293/2004 du 15 juillet 2005, consid. 2.3; arrêt 4C.100/2001 du 12 juin 2001, consid. 6a et les références). Il s'agira en particulier d'examiner si l'on peut exiger du travailleur qu'il accepte un poste donné («zumutbare Arbeit»; Duc/Subilia, Commentaire du contrat individuel de travail, n. 11 ad art. 337c CO, p. 491; Jürg Brühwiler, Kommentar zum Einzelarbeitsvertrag, 2e éd., n. 9 ad art. 337c CO, p. 386; Rehbinder, Berner Kommentar, n. 5 ad art. 337c CO). Peu d'auteurs se sont penchés sur la question d'une éventuelle réintégration dans l'emploi occupé jusqu'au licenciement. Selon Gabriel Aubert, le travailleur n'est en principe pas tenu de reprendre son ancien poste; on pourra néanmoins exiger qu'il accepte une telle proposition s'il n'en résulte aucune atteinte à sa personnalité, compte tenu de l'attitude de l'employeur, qui aura, par exemple, reconnu d'emblée une erreur manifeste et se sera excusé (Commentaire romand, n. 11 ad art. 337c CO). Pour Streiff/von Kaenel, un tel retour n'est envisageable que si l'animosité provoquée par le licenciement immédiat a complètement disparu (op. cit., n. 7 ad art. 337c CO, p. 774/775). 
6.3 En l'espèce, la lettre du 26 janvier 2004, au ton extrêmement sec, se présente comme une convocation pour le 1er février 2004, date à laquelle la demanderesse aura recouvré sa capacité de travail. Le conseil du défendeur commence par reprocher à l'ex-collaboratrice de son mandant de ne pas lui avoir communiqué directement le certificat médical du 12 janvier 2004, feignant ainsi d'ignorer qu'une résiliation immédiate, justifiée ou non, met fin sur-le-champ au contrat en droit (ATF 117 II 270 consid. 3b) et, par conséquent, aux obligations contractuelles, dont celle d'aviser l'employeur de son rétablissement. Le courrier en cause ne contient d'ailleurs aucune allusion au licenciement immédiat signifié moins de trois semaines plus tôt, le représentant du défendeur agissant comme si cette résiliation n'avait jamais existé. Des excuses de la part du défendeur pour ce fait n'entrent donc pas en ligne de compte. Pour le reste, l'auteur de la lettre en question ne se prononce ni sur les griefs élevés dans le courrier du 15 décembre 2003, ni sur les garanties demandées à cette occasion, mais se borne à assurer que la personnalité de l'employée «sera, comme par le passé, totalement respectée.» En résumé, la lettre du 24 janvier 2004 procède plus de l'ordre de marche que d'une volonté de réconciliation. Cette attitude rigide sera confirmée par la suite, puisque le défendeur n'hésitera pas à résilier derechef le contrat de travail avec effet immédiat au motif que la demanderesse ne s'est pas présentée chez lui le lundi 2 février 2004. Le comportement adopté par l'ex-employeur ne dénote ainsi aucune recherche d'apaisement dans un contexte litigieux, alors que le licenciement immédiat avait inévitablement envenimé des relations qui n'étaient déjà pas au beau fixe avant le 8 janvier 2004. Dans ces conditions, on ne pouvait attendre de la demanderesse qu'elle acceptât de travailler à nouveau pour le défendeur. Contrairement à ce que ce dernier soutient, la cour cantonale n'avait donc pas à imputer, sur le montant dû en vertu de l'art. 337c al. 1 CO, un revenu auquel la demanderesse avait intentionnellement renoncé. Le grief fondé sur une violation de l'art. 337c al. 2 CO doit être écarté. 
7. 
Sur le vu de ce qui précède, tous les moyens soulevés par le défendeur se révèlent mal fondés de sorte que le recours principal sera rejeté. 
 
Sur le recours joint: 
8. 
Invoquant l'art. 337c al. 1 et 2 CO, la demanderesse critique sur trois points le calcul des dommages-intérêts tel qu'effectué par la cour cantonale. Premièrement, elle estime être en droit de prétendre au paiement du salaire jusqu'au 31 août 2011, correspondant à l'échéance du contrat à durée déterminée, et non jusqu'au 31 août 2010 comme les juges genevois l'ont admis. Deuxièmement, elle fait valoir que le revenu provenant de son nouvel emploi cessera au plus tard le 31 août 2010, lorsqu'elle aura atteint l'âge de 64 ans; aucune imputation ne devrait ainsi être opérée pour la période du 31 août 2010 au 31 août 2011. Enfin, la demanderesse est d'avis que la Cour d'appel aurait dû l'indemniser à raison de 130'000 fr. pour la perte de la sécurité de l'emploi que représentait un contrat de longue durée. 
8.1 Sur le premier point, la cour cantonale a jugé que le défendeur aurait fait usage de la faculté offerte par l'art. 334 al. 3 CO de résilier après dix ans un contrat conclu pour plus de dix ans, moyennant un avis de résiliation signifié six mois plus tôt pour la fin d'un mois. Elle a ainsi admis que le contrat liant les parties aurait de toute manière pris fin le 31 août 2010. 
 
L'intention supposée du défendeur de faire usage de la possibilité de résilier le contrat après dix ans relève de la pure hypothèse et ne peut être considérée comme pertinente en droit. Cela étant, l'art. 334 al. 3 CO prescrit que le contrat conclu pour plus de dix ans peut être résilié après dix ans par chacune des parties pour la fin d'un mois, moyennant un délai de congé de six mois. En adoptant une telle disposition, le législateur est parti de l'idée qu'un contrat de travail conclu pour plus de dix ans est un engagement excessif du point de vue de la liberté personnelle au sens de l'art. 27 al. 2 CC (ATF 130 III 495 consid. 5 p. 503/504). En conséquence, un tel contrat n'est plus, après la période de dix ans, un contrat de durée déterminée à proprement parler puisque, s'il prend fin automatiquement au terme prévu, il peut néanmoins être résilié avant son échéance moyennant le respect d'un délai de six mois. La durée admissible d'un engagement de durée déterminée est en fait de 10 ans et demi, l'art. 334 al. 3 CO prévoyant expressément la possibilité de résilier «après dix ans» («nach Ablauf von zehn Jahren»; Streiff/von Kaenel, op. cit., n. 9 ad art. 334 CO, p. 591). Ainsi, dans le cadre de l'art. 337c al. 1 CO, c'est l'échéance du délai de congé de six mois, et non la fin de la durée prévue du contrat, qui est déterminante pour les contrats conclus pour plus de dix ans. Toute autre solution serait contraire à l'art. 27 al. 2 CC
 
En l'espèce, le contrat de travail était conclu pour onze ans et demi, soit du 1er mars 2000 au 31 août 2011. Or, sa durée admissible était de 10 ans et demi, soit jusqu'au 31 août 2010. Abstraction faite de l'imputation prévue à l'art. 337c al. 2 CO, la demanderesse peut donc prétendre à ce qu'elle aurait gagné si les rapports de travail avaient pris fin à cette date-là. Il est à noter que l'employée ne saurait se prévaloir de l'engagement pris par l'employeur, sous chiffre 1 du contrat de travail, de lui verser l'équivalent des salaires relatifs à la période allant de la fin du contrat au 31 août 2011 au cas où il ferait usage de la faculté offerte de résilier le contrat de manière anticipée après dix ans. Un tel engagement est en effet contraire à l'art. 334 al. 3 CO, dont le caractère absolument impératif est consacré à l'art. 361 al. 1 CO
 
Par un raisonnement différent, la cour de céans aboutit au même résultat que la cour cantonale. Il s'ensuit que celle-ci n'a pas violé le droit fédéral en calculant le montant fondé sur l'art. 337c al. 1 CO jusqu'au 31 août 2010. 
8.2 Le deuxième argument de la demanderesse perd son objet dès l'instant où le calcul de la prétention en dommages-intérêts est de toute manière limité au 31 août 2010. 
8.3 Sur la troisième question, il convient de rappeler les points suivants. La prétention du travailleur fondée sur l'art. 337c al. 1 CO est une créance en dommages-intérêts qui inclut non seulement le salaire, y compris en nature, mais également la compensation des autres avantages résultant du contrat de travail, tels que les gratifications ou les indemnités de départ (arrêt 4C.127/2002 du 3 septembre 2002, consid. 4.1 et les références). Cette créance est immédiatement exigible, ce qui ne va pas sans poser des difficultés procédurales et matérielles, en particulier lorsque, comme en l'espèce, le contrat a été conclu pour une longue durée et que le jugement fixant les dommages-intérêts est rendu avant le moment auquel le contrat aurait dû normalement prendre fin. Cette situation d'incertitude a toutefois été envisagée par le législateur, qui a prévu, à l'art. 42 al. 2 CO, que lorsque le montant exact du dommage ne peut être établi, le juge le détermine équitablement en considération du cours ordinaire des choses et des mesures prises par la partie lésée (arrêt précité du 12 juin 2001, consid. 6d). 
 
Selon l'arrêt attaqué, les dommages-intérêts dus sur la base de l'art. 337c al. 1 et 2 CO correspondent à la différence entre le salaire convenu entre les parties et le revenu réalisé par la demanderesse dans son nouvel emploi. La cour cantonale a estimé au surplus que sur le vu de ses compétences, l'intéressée conservera son poste actuel et son salaire. Une telle conclusion n'apparaît pas contraire au cours ordinaire des choses. En effet, l'employée exerce son activité dans un domaine spécialisé et ses qualités professionnelles sont reconnues. En outre, aucun élément de l'arrêt attaqué ne laisse supposer que la demanderesse risque de perdre son emploi dans les cinq prochaines années pour des motifs d'ordre économique. Dans ces conditions, force est de reconnaître que ni l'art. 337c al. 1, ni l'art. 42 al. 2 CO n'imposaient en l'occurrence d'amplifier le montant des dommages-intérêts en raison de la perte de la garantie de l'emploi liée à un contrat de durée déterminée. Le grief ne peut donc qu'être rejeté. 
9. 
Invoquant l'art. 337c al. 3 CO, la demanderesse s'en prend également au montant de 10'000 fr. alloué par la cour cantonale à titre d'indemnité pour licenciement immédiat injustifié. Elle souligne à cet égard que le défendeur n'a pas hésité à renvoyer séance tenante une collaboratrice de longue date relevant d'une grave maladie, au seul motif que celle-ci demandait le respect de ses droits protégés par la loi. Pareil comportement justifierait l'octroi de l'indemnité maximale prévue à l'art. 337c al. 3 CO, soit 65'000 fr. correspondant à six mois de salaire. 
9.1 Aux termes de l'art. 337c al. 3 CO, le juge peut allouer au travailleur victime d'un licenciement immédiat injustifié une indemnité dont il fixe librement le montant, en tenant compte de toutes les circonstances; cette indemnité peut atteindre six mois de salaire au plus. En principe, l'indemnité est due dans tous les cas de résiliation immédiate et injustifiée du contrat de travail. Son montant est fixé d'après la gravité de l'atteinte portée aux droits de la personnalité du travailleur; d'autres critères tels que la durée des rapports de travail, l'âge du lésé, sa situation sociale, une éventuelle faute concomitante (ATF 121 III 64 consid. 3c p. 69) et les effets économiques du licenciement (ATF 123 III 391 consid. 3c p. 394) entrent aussi en considération. 
 
Statuant selon les règles du droit et de l'équité (art. 4 CC), le juge dispose d'un large pouvoir d'appréciation. Le Tribunal fédéral ne substitue qu'avec retenue sa propre appréciation à celle de la juridiction cantonale. Il n'intervient que si la décision s'écarte sans raison des règles établies par la doctrine et la jurisprudence en matière de libre appréciation, ou lorsqu'elle repose sur des faits qui, dans le cas particulier, ne devaient jouer aucune rôle, ou encore lorsqu'elle n'a pas tenu compte d'éléments qui auraient dû absolument être pris en considération; il sanctionnera en outre les décisions rendues en vertu d'un pouvoir d'appréciation lorsqu'elles aboutissent à un résultat manifestement injuste ou à une iniquité choquante (ATF 130 III 28 consid. 4.1 p. 32, 213 consid. 3.1 p. 220; 129 III 380 consid. 2 p. 382). 
9.2 En l'espèce, la Cour d'appel a fixé à 10'000 fr. l'indemnité due à l'employée en application de l'art. 337c al. 3 CO. Ce montant correspond grosso modo à un mois de salaire. Selon l'arrêt attaqué, la demanderesse est une employée compétente, qui oeuvre dans un domaine ne souffrant pas d'une concurrence effrénée, de sorte que son avenir professionnel paraît peu touché par le licenciement. Les juges genevois estiment par ailleurs que, même si elle ne constituait pas un juste motif de licenciement immédiat, la lettre du 15 décembre 2003, par son ton péjoratif, non conciliant et son manque de tact, doit être considérée comme une faute concomitante de la demanderesse. La cour cantonale voit un autre motif de réduction de l'indemnité dans le montant important des dommages-intérêts alloués. 
La fixation à 10'000 fr. de l'indemnité due en vertu de l'art. 337c al. 3 CO ne résulte pas en l'espèce d'un abus du pouvoir d'appréciation des juges genevois. Les éléments pris en compte par la cour cantonale sont pertinents. On peut se demander toutefois si la lettre du 15 décembre 2003 doit être qualifiée de faute concomitante dès lors que, selon ses propres termes, le défendeur a renoncé à s'en prévaloir comme juste motif de licenciement et a expressément invoqué la maladie de la demanderesse comme raison de la résiliation immédiate du contrat de travail. Il n'en demeure pas moins que le courrier en question est révélateur de l'état d'esprit dans lequel la demanderesse se trouvait alors par rapport à son employeur. Vu le nombre et la gravité des reproches adressés au défendeur, l'employée ne devait pas être trop affectée de voir son contrat de travail résilié. L'atteinte portée aux droits de la personnalité de la demanderesse est ainsi relativement limitée. Elle l'est d'autant plus que l'intéressée a retrouvé assez rapidement un bon emploi, qu'elle n'est pas dans une situation économique précaire et qu'elle a obtenu des dommages-intérêts considérables. En conclusion, aucune violation de l'art. 337c al. 3 CO ne peut être imputée à la Cour d'appel. 
10. 
10.1 La demanderesse se plaint enfin d'une violation de l'art. 12 al. 2 LEg, lequel, en liaison avec l'art. 343 al. 3 CO, prescrit notamment la gratuité de la procédure dans les litiges portant sur une discrimination à raison du sexe dans les rapports de travail. A lire le recours joint, la Cour d'appel n'aurait pas dû percevoir des frais de justice dans le cas présent. Au surplus, la demanderesse critique la répartition de l'émolument telle qu'opérée par les juges genevois. 
10.2 La cour cantonale a fixé le montant de l'émolument dû par les parties en faisant abstraction de la valeur litigieuse des prétentions fondées sur la LEg, soit 5'379 fr. On ne voit pas en quoi cette manière de procéder violerait l'art. 12 al. 2 LEg. Contrairement à ce que la demanderesse prétend, il ne suffit pas d'élever une prétention liée à un soi-disant harcèlement sexuel pour obtenir la gratuité de toute une procédure visant essentiellement à l'octroi de dommages-intérêts et autres indemnités dans une contestation de droit du travail d'une valeur litigieuse supérieure à 30'000 fr. Pour le reste, le Tribunal fédéral saisi d'un recours en réforme n'a pas à revoir la fixation et la répartition des frais judiciaires par les juges précédents, cette question relevant exclusivement du droit de procédure cantonal. Le moyen se révèle mal fondé pour autant qu'il soit recevable. 
11. 
En définitive, le recours joint doit être rejeté. 
 
Sur les frais et dépens: 
12. 
Comme la valeur litigieuse, selon les prétentions de la demanderesse à l'ouverture de l'action (ATF 115 II 30 consid. 5b p. 41), dépasse 30'000 fr., la procédure n'est pas gratuite (art. 343 al. 2 et 3 CO). Les deux parties succombent dans leurs recours respectifs. Dans ces conditions, il se justifie de partager les frais judiciaires par moitié entre défendeur et demanderesse (art. 156 al. 3 OJ); les dépens seront compensés (art. 159 al. 3 OJ). 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
1. 
Le recours principal est rejeté. 
2. 
Le recours joint est rejeté. 
3. 
Un émolument judiciaire de 6'500 fr. est mis par moitié à la charge de chaque partie. 
4. 
Il n'est pas alloué de dépens. 
5. 
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties, à la caisse cantonale genevoise de chômage et à la Cour d'appel de la juridiction des prud'hommes du canton de Genève. 
Lausanne, le 27 février 2006 
Au nom de la Ire Cour civile 
du Tribunal fédéral suisse 
Le Président: La Greffière: