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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
{T 0/2} 
 
6B_291/2015  
   
   
 
 
 
Arrêt du 18 janvier 2016  
 
Cour de droit pénal  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Denys, Président, Jacquemoud-Rossari et Oberholzer. 
Greffière : Mme Mabillard. 
 
Participants à la procédure 
X.________, représenté par Me José Coret, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
1. Ministère public central du canton de Vaud, avenue de Longemalle 1, 1020 Renens VD, 
2. A.________, représenté par Me Nader Ghosn, avocat, 
3. B.________, représentée par Me Alexa Landert, avocate, 
intimés. 
 
Objet 
Lésions corporelles graves par négligence, violation des règles de la circulation; arbitraire, 
 
recours contre le jugement de la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 14 janvier 2015. 
 
 
Faits :  
 
A.   
Par jugement du 12 septembre 2014, le Tribunal de police de l'arrondissement de la Broye et du Nord vaudois a notamment libéré B.________ des chefs d'accusation de lésions corporelles graves par négligence et de violation simple des règles de la circulation routière, libéré A.________ du chef d'accusation de violation grave des règles de la circulation routière et constaté que A.________ s'était rendu coupable de lésions corporelles graves par négligence et de violation simple des règles de la circulation routière. 
 
Statuant le 14 janvier 2015, la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud a admis l'appel de A.________ et rejeté celui de X.________. Elle a modifié le jugement attaqué du Tribunal de police, libérant A.________ des chefs d'accusation de lésions corporelles graves par négligence et de violation simple et grave des règles de la circulation routière. 
 
En bref, les faits retenus par la Cour d'appel sont les suivants. Le vendredi 3 février 2012 vers 0h20, A.________ circulait de Lausanne à Neuchâtel au volant d'un car, véhiculant une dizaine de passagers, dont X.________. Ce dernier avait consommé de l'alcool et du cannabis durant la soirée. Les conditions météorologiques étaient mauvaises: il neigeait faiblement, la température était négative et une forte bise soufflait avec des rafales proches de 100 km/h. Durant le trajet, X.________ s'est tout d'abord disputé avec son ancienne amie; il s'est mis en colère et était très énervé. Il a crié dans le bus, fait des allers-retours, proféré des injures à l'égard de son ex-amie et s'en est pris au matériel. Plusieurs passagers ont tenté de le raisonner, mais sans succès. Peu avant la jonction de Grandson, il s'est adressé au conducteur en lui demandant d'arrêter son bus pour le laisser sortir. A.________ a adressé des avertissements à X.________. Après au moins deux refus, ce dernier a dit au chauffeur que, s'il ne s'arrêtait pas, il casserait tout dans son car. A.________ s'est dès lors arrêté sur une surlargeur de la bande d'arrêt d'urgence, peu avant le tunnel de Concise, et a ouvert la porte arrière du bus. L'ancienne amie de X.________ a encore tenté de le raisonner, toujours en vain. Un autre passager a essayé de le retenir par le bras, mais également sans succès. X.________ est sorti du bus et, après le départ de celui-ci, a déambulé sur la chaussée, le plus souvent sur la bande d'arrêt d'urgence et partiellement sur la voie de circulation. Pour une raison indéterminée, il s'est ensuite couché en travers de l'autoroute, à cheval entre la voie de droite et la bande d'arrêt d'urgence. C'est dans ces circonstances que, quelques instants plus tard, B.________ l'a heurté, alors qu'elle circulait à une vitesse d'environ 70 km/h. X.________ a, du fait de cette collision, subi un polytraumatisme avec fracture complexe du bassin, plaie délabrante périnéale, contusion pulmonaire droite, fracture des arcs postérieurs des côtes 9-11 droites, fracture de l'apophyse traverse droite de L5, contusion hépatique et rénale droite, fracture dentaire et plexopathie lombo-sacrée droite. 
 
B.   
Agissant par la voie du recours en matière pénale auprès du Tribunal fédéral, X.________ conclut à la réforme du jugement de la Cour d'appel du 14 janvier 2015, en ce sens que le tribunal constate que B.________ s'est rendue coupable de lésions corporelles graves par négligence et de violations simples des règles de la circulation routière (I), constate que A.________ s'est rendu coupable de lésions corporelles graves par négligence et de violation des règles de la circulation routière (II), condamne A.________ à une peine pécuniaire de 30 jours-amende, le montant du jour-amende étant fixé à 100 fr. (III), dit que l'exécution de la peine de A.________ est suspendue dans un délai d'épreuve de deux ans (IV), condamne A.________ à une amende de 3'000 fr. (V), admet dans son principe que B.________ et A.________ sont les débiteurs de X.________, solidairement entre eux, d'un montant à titre de dommages et intérêts, X.________ étant renvoyé pour le surplus à agir par la voie civile (VI), condamne B.________ et A.________, solidairement entre eux, à verser à X.________ la somme de 50'000 fr. à titre de tort moral (VII) et condamne B.________ et A.________, solidairement entre eux, à régler les frais de défense de première instance de X.________ par 4'959 fr. 90 ainsi que les frais de défense relatifs à la procédure d'appel par 3'700 fr., TVA en sus. Subsidiairement, il conclut à l'annulation du jugement attaqué et au renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision dans le sens des considérants. Il requiert en outre l'assistance judiciaire. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
Dans la mesure où le recourant se prononce sur la peine à infliger à l'intimé, ses conclusions sont irrecevables, faute d'intérêt juridique à une modification de l'arrêt attaqué dans ce sens (cf. art. 81 al. 1 let. b LTF). 
 
2.   
S'agissant de l'acquittement de B.________, le recourant se plaint d'arbitraire dans l'appréciation des faits et de violation de l'art. 125 CP. Il fait valoir que B.________ a violé son devoir de prudence puisqu'elle n'a pas pu s'arrêter à temps ou, du moins, l'éviter. 
 
2.1. L'art. 125 CP réprime le comportement de celui qui, par négligence, aura causé une atteinte à l'intégrité corporelle ou à la santé d'une personne. La réalisation de cette infraction suppose ainsi la réunion de trois conditions: l'existence de lésions corporelles, une négligence et un lien de causalité entre la négligence et les lésions. La première condition, qui n'est pas contestée, est réalisée, le recourant ayant été gravement blessé dans l'accident.  
 
Conformément à l'art. 12 al. 3 CP, il y a négligence si, par une imprévoyance coupable, l'auteur a agi sans se rendre compte ou sans tenir compte des conséquences de son acte. La négligence suppose, tout d'abord, que l'auteur ait violé les règles de prudence que les circonstances lui imposaient pour ne pas excéder les limites du risque admissible. En second lieu, la violation du devoir de prudence doit être fautive, c'est-à-dire qu'il faut pouvoir reprocher à l'auteur une inattention ou un manque d'effort blâmable (ATF 135 IV 56 consid. 2.1 p. 64; 134 IV 255 consid. 4.2.3 p. 262 et les références). Pour déterminer plus précisément les devoirs imposés par la prudence, on peut se référer à des normes édictées par l'ordre juridique pour assurer la sécurité et éviter les accidents. S'agissant d'un accident de la route, il convient de se référer aux règles de la circulation routière (ATF 122 IV 133 consid. 2a p. 135). 
 
Selon l'art. 32 al. 1 de la loi fédérale du 19 décembre 1958 sur la circulation routière (RS 741.01; LCR), la vitesse doit toujours être adaptée aux circonstances, notamment aux particularités du véhicule et du chargement, ainsi qu'aux conditions de la route, de la circulation et de la visibilité. L'art. 4 al. 1 de l'ordonnance du 13 novembre 1962 sur les règles de la circulation routière (OCR; RS 741.11) précise notamment que le conducteur ne doit pas circuler à une vitesse qui l'empêcherait de s'arrêter sur la distance à laquelle porte sa visibilité. Cette règle de prudence procède du constat que, la nuit, le risque pour l'automobiliste de rencontrer sur son chemin un obstacle non éclairé n'est pas si minime qu'il puisse en faire abstraction (ATF 126 IV 91 consid. 4a/cc p. 92 ss et les références). On peut en déduire, dans une appréciation objective, que le non-respect de la règle de prudence précitée, qui tend précisément à prévenir les conséquences de telles situations, est propre à entraîner une collision, respectivement des lésions corporelles ou le décès du piéton qui n'a pu être vu à temps (arrêt 6B_873/2014 du 5 janvier 2015 consid. 2.1 et les références). 
 
2.2. En l'espèce la cour cantonale a confirmé l'appréciation du premier juge, selon lequel aucun comportement fautif ne pouvait être imputé à l'intimée. Le jugement attaqué a relevé que la nuit en question, la météo était glaciale et venteuse; à l'endroit de l'accident, la chaussée, en parfait état d'entretien, était mouillée et partiellement recouverte d'une fine couche de neige sur la bande d'arrêt d'urgence et au centre des voies de circulation. La température avoisinait les -9° et une forte bise soufflait avec des rafales proches de 100 km/h. La conductrice roulait à une vitesse réduite estimée à 70 km/h, compte tenu des conditions atmosphériques. Dans ces circonstances, la cour cantonale pouvait, sans arbitraire, retenir que cette vitesse n'était pas excessive, étant rappelé que l'intéressée circulait sur l'autoroute.  
 
A un moment donné, la conductrice a aperçu, dans le faisceau de ses phares, une tache noire posée sur le bord droit de la voie droite. Elle a pensé à un pare-choc, perdu à la suite d'un accident, et a donné simultanément un coup de volant à gauche et freiné afin d'éviter l'objet, sans toutefois pouvoir esquiver le choc. Contrairement à ce que soutient le recourant, on ne peut reprocher à l'intimée une inattention fautive, même si elle l'a finalement percuté. En effet, il n'est pas contesté que la conductrice était concentrée sur sa conduite au moment des faits et que sa vitesse était adaptée aux conditions; elle a vu l'obstacle et a immédiatement réagi. Elle ne pouvait apercevoir le recourant plus tôt, dès lors que celui-ci, tout de noir vêtu et couché sur la chaussée, n'était que difficilement perceptible. 
 
Il résulte de ce qui précède que la cour cantonale n'a pas apprécié les faits de façon arbitraire ni violé le droit fédéral en renonçant à imputer à l'intimée une violation fautive de son devoir de prudence, à savoir une inattention, une perte de maîtrise ou une vitesse inadaptée. Il s'ensuit que le recourant conteste en vain l'acquittement de l'intimée et que son grief doit être rejeté. 
 
3.   
Le recourant reproche également à la cour cantonale d'avoir acquitté A.________ de lésions corporelles graves par négligence. Il fait valoir que l'intimé a violé une norme de prudence et n'a pas déployé l'attention et les efforts que l'on pouvait attendre de lui pour se conformer à son devoir; son comportement était en outre la cause naturelle et adéquate des lésions qu'il avait subies. 
 
3.1. Un comportement est la cause naturelle d'un résultat s'il en constitue l'une des conditions sine qua non, c'est-à-dire si, sans lui, le résultat ne se serait pas produit. La constatation du rapport de causalité naturelle relève du fait (ATF 138 IV 57 consid. 4.1.3 p. 61). Il y a toutefois violation du droit fédéral si l'autorité cantonale méconnaît le concept même de causalité naturelle (ATF 122 IV 17 consid. 2c/aa p. 23).  
 
Le rapport de causalité peut être qualifié d'adéquat si, d'après le cours ordinaire des choses et l'expérience de la vie, le comportement était propre à entraîner un résultat du genre de celui qui s'est produit (ATF 138 IV 57 consid. 4.1.3 p. 61). La causalité adéquate sera admise même si le comportement de l'auteur n'est pas la cause directe ou unique du résultat. Peu importe que le résultat soit dû à d'autres causes, notamment à l'état de la victime, à son comportement ou à celui de tiers (ATF 131 IV 145 consid. 5.2 p. 148). 
 
La causalité adéquate peut toutefois être exclue si une autre cause concomitante, par exemple une force naturelle, le comportement de la victime ou d'un tiers, constitue une circonstance tout à fait exceptionnelle ou apparaît si extraordinaire que l'on ne pouvait s'y attendre. L'imprévisibilité d'un acte concurrent ne suffit pas en soi à interrompre le rapport de causalité adéquate. Il faut encore que cet acte revête une importance telle qu'il s'impose comme la cause la plus probable et la plus immédiate de l'événement considéré, reléguant à l'arrière-plan tous les autres facteurs qui ont contribué à l'amener et notamment le comportement de l'auteur (ATF 134 IV 255 consid. 4.4.2 p. 265 s. et les arrêts cités). Il s'agit là d'une question de droit que la Cour de céans revoit librement (ATF 138 IV 57 consid. 4.1.3 p. 61). 
 
3.2. En l'espèce, le recourant ne saurait être suivi lorsqu'il allègue que le fait qu'il ait été allongé sur l'autoroute au moment de la collision ne constitue pas, au regard du cas d'espèce, une circonstance extraordinaire et exceptionnelle reléguant en arrière-plan la faute de l'intimé. En effet, comme l'a souligné la cour cantonale, le comportement consistant pour un piéton, habillé de noir, en pleine nuit et alors que les conditions météorologiques sont défavorables, à se coucher sans aucune raison et sans d'ailleurs qu'on puisse comprendre un tel comportement, sur les voies d'autoroute constitue une circonstance tout à fait exceptionnelle et, partant, imprévisible, à laquelle ni le chauffeur de bus, ni un autre automobiliste ne pouvait à l'évidence s'attendre. Le recourant oublie qu'il ne s'agit pas ici du cas d'un piéton qui déambule de manière inconsciente ou qui fait du stop sur l'autoroute, mais d'un individu qui se couche sur la voie, soit d'un comportement intrinsèquement irrationnel.  
 
Le lien de causalité adéquate étant rompu en l'occurrence, il n'est pas nécessaire d'examiner dans quelle mesure l'intimé aurait fait preuve d'une négligence fautive en s'arrêtant sur la bande d'arrêt d'urgence et en laissant sortir le recourant. A cet égard, la cour cantonale, à la suite du premier juge, a retenu à juste titre que l'éventuelle violation de l'art. 90 LCR était absorbée par l'art. 125 CP pour considérer que le concours idéal entre ces deux infractions était exclu, s'agissant de la mise en danger du recourant. 
 
Par conséquent, l'acquittement de l'intimé du chef d'accusation de lésions corporelles par négligence doit également être confirmé et le recours rejeté sur ce point. 
 
4.   
Le recourant reproche à la cour cantonale d'avoir acquitté A.________ de violation simple et grave des règles de la circulation routière. Il fait valoir qu'en ouvrant la porte de son véhicule pour le laisser sortir puis en quittant les lieux immédiatement, l'intimé a adopté un comportement qui ne relevait pas d'une absolue nécessité. 
 
4.1. Comme il a été vu au consid. 3.2 ci-dessus, l'éventuelle violation des règles de la LCR est absorbée par l'art. 125 CP en ce qui concerne la mise en danger du recourant. Point n'est dès lors besoin d'entrer en matière sur le grief spécifique du recourant, celui-ci ne remettant d'ailleurs pas en cause l'inexistence d'un concours idéal.  
 
4.2. L'intimé avait néanmoins été condamné en première instance pour violation simple de l'art. 90 LCR, en relation avec l'art. 36 al. 3 OCR, pour s'être arrêté sur la bande d'arrêt d'urgence. Cette infraction, dont la cour cantonale l'a acquitté, avait cependant été retenue en lien avec la mise en danger créée au préjudice de la conductrice B.________. Le recourant ne peut démontrer aucun intérêt juridique à une modification du jugement attaqué sur ce point. Son grief est par conséquent irrecevable.  
 
5.   
Le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
Comme les conclusions du recourant étaient vouées à l'échec, l'assistance judiciaire ne peut lui être accordée (art. 64 al. 1 LTF). Le recourant, qui succombe, supporte donc les frais de justice (art. 66 al. 1 LTF), dont le montant sera toutefois fixé en tenant compte de sa situation financière. 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.   
La requête d'assistance judiciaire est rejetée. 
 
3.   
Les frais judiciaires, arrêtés à 1600 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
4.   
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
 
 
Lausanne, le 18 janvier 2016 
 
Au nom de la Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Denys 
 
La Greffière : Mabillard