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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
4A_609/2021  
 
 
Arrêt du 5 juillet 2022  
 
Ire Cour de droit civil  
 
Composition 
Mmes et M. les Juges fédéraux 
Hohl, Présidente, Kiss et Rüedi. 
Greffier : M. Douzals. 
 
Participantes à la procédure 
A.________ Sàrl, 
représentée par Me Alexandre Ayad, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
B.________, 
représentée par Mes Pierre Gabus et Lucile Bonaz, avocats, 
intimée. 
 
Objet 
contrat de bail; annulation du congé (art. 271 al. 1 CO); prolongation du bail (art. 272 et 272b CO), 
 
recours en matière civile contre l'arrêt rendu le 1er novembre 2021 par la Chambre des baux et loyers de la Cour de justice du canton de Genève 
(C/3316/2019; ACJC/1412/2021). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. Le 20 octobre 2016, A.________ Sàrl (ci-après: la locataire, la demanderesse ou la recourante) a pris à bail des locaux affectés à l'usage d'un bar-restaurant situés dans un immeuble dont B.________ (ci-après: la bailleresse, la défenderesse ou l'intimée) est devenue propriétaire le 19 décembre 2018.  
Le contrat de bail a été conclu pour une durée de cinq ans à compter du 1e r janvier 2017 et est renouvelable de cinq ans en cinq ans, sauf résiliation signifiée douze mois avant l'échéance. Le loyer, indexé, s'élève à 144'000 fr. par an, charges non comprises.  
 
A.b. Le 13 mars 2017, la locataire a reçu une autorisation de construire portant sur la rénovation intérieure de la salle du bar-restaurant qu'elle exploite sous l'enseigne " U.________ ". Le coût des travaux et du réaménagement effectués s'est élevé à plus de 700'000 fr.  
 
A.c. Par avis du 15 janvier 2019, la bailleresse a résilié le bail de façon anticipée pour le 30 septembre 2019 en application des art. 261 al. 2 let. a et 266d CO (ci-après: le premier congé) et, si le congé anticipé ne devait pas être déclaré valable, pour le 31 décembre 2020 en application de l'art. 266 al. 1 CO (ci-après: le second congé).  
En substance, la bailleresse a invoqué son besoin propre et urgent de récupérer les locaux afin d'affecter intégralement les surfaces de l'immeuble à ses activités propres et, en particulier, de créer et d'installer une nouvelle agence bancaire au rez-de-chaussée. 
 
B.  
Après que la tentative de conciliation n'a pas abouti, la locataire a déposé sa demande auprès du Tribunal des baux et loyers du canton de Genève le 5 juin 2019. Elle a conclu à l'annulation des congés et, subsidiairement, à la constatation du fait que le second congé ne prenait effet qu'au 31 décembre 2021 et à l'octroi d'une prolongation du bail d'une durée de six ans. 
La bailleresse a produit une plaquette de son projet de réalisation d'un nouvel espace au rez-de-chaussée et au premier étage de l'immeuble concerné, dont il ressort qu'elle souhaite offrir des espaces accessibles au public tout en offrant un lieu innovant à sa clientèle et que sont prévus dans les locaux des espaces de coworking, des salles de réunion et un espace café, ainsi que la création d'un espace extérieur. En dernier lieu, la bailleresse a conclu à ce que le tribunal lui donne acte de ce que le premier congé était devenu sans objet compte tenu de l'écoulement du temps, qu'il déclare valable le second congé pour le 31 décembre 2021 et qu'il refuse la requête de prolongation du bail de la locataire.  
Par jugement du 21 décembre 2020, le tribunal a, en substance, déclaré valable le second congé pour le 31 décembre 2021 et accordé à la locataire une unique prolongation de son bail pour une durée de quatre ans échéant le 31 décembre 2025. 
Sur appels des parties, la Chambre des baux et loyers de la Cour de justice du canton de Genève a, par arrêt du 1er novembre 2021, partiellement réformé le jugement entrepris, en ce sens qu'elle a accordé à la locataire une première prolongation du bail pour une durée de trois ans échéant le 31 décembre 2024 en lieu et place de l'unique prolongation de quatre ans qu'avait octroyée le tribunal. 
 
C.  
Contre cet arrêt, qui lui a été notifié le 3 novembre 2021, la locataire a formé un recours en matière civile auprès du Tribunal fédéral le 3 décembre 2021, concluant à ce que l'arrêt entrepris soit annulé et réformé, en ce sens, principalement, que le second congé (ordinaire) soit annulé, subsidiairement, qu'une prolongation d'une durée de six ans depuis le 1er janvier 2022 ou qu'une première prolongation de quatre ans et demi lui soit octroyée et, plus subsidiairement, que la cause soit renvoyée à la cour cantonale pour nouvelle décision dans le sens des considérants. 
L'intimée conclut, en substance, au rejet du recours. 
Tandis que la recourante a déposé des observations complémentaires, l'intimée a renoncé à dupliquer. 
La cour cantonale se réfère à son arrêt. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Interjeté dans le délai fixé par la loi (art. 100 al. 1 LTF) par la demanderesse, qui a succombé dans ses conclusions (art. 76 al. 1 LTF), et dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF) rendue sur appel par le tribunal supérieur du canton de Genève (art. 75 LTF) dans une affaire civile de droit du bail (art. 72 al. 1 LTF) dont la valeur litigieuse dépasse 15'000 fr. (art. 74 al. 1 let. a LTF; cf. ATF 137 III 389 consid. 1.1), le recours en matière civile est en principe recevable. 
 
2.  
 
2.1. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si ces faits ont été établis de façon manifestement inexacte - ce qui correspond à la notion d'arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 140 III 115 consid. 2; 137 I 58 consid. 4.1.2; 137 II 353 consid. 5.1) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF), et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF).  
Concernant l'appréciation des preuves, le Tribunal fédéral n'intervient, du chef de l'art. 9 Cst., que si le juge du fait n'a manifestement pas compris le sens et la portée d'un moyen de preuve, a omis sans raisons objectives de tenir compte des preuves pertinentes ou a effectué, sur la base des éléments recueillis, des déductions insoutenables (ATF 137 III 226 consid. 4.2; 136 III 552 consid. 4.2; 134 V 53 consid. 4.3; 133 II 249 consid. 1.4.3; 129 I 8 consid. 2.1). 
La critique de l'état de fait retenu est soumise au principe strict de l'allégation énoncé par l'art. 106 al. 2 LTF (ATF 140 III 264 consid. 2.3 et les références citées). La partie qui entend attaquer les faits constatés par l'autorité précédente doit expliquer clairement et de manière circonstanciée en quoi ces conditions seraient réalisées (ATF 140 III 16 consid. 1.3.1 et les références citées). Si elle souhaite obtenir un complètement de l'état de fait, elle doit aussi démontrer, par des renvois précis aux pièces du dossier, qu'elle a présenté aux autorités précédentes, en conformité avec les règles de la procédure, les faits juridiquement pertinents à cet égard et les moyens de preuve adéquats (ATF 140 III 86 consid. 2). Si la critique ne satisfait pas à ces exigences, les allégations relatives à un état de fait qui s'écarterait de celui de la décision attaquée ne pourront pas être prises en considération (ATF 140 III 16 consid. 1.3.1). Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 130 I 258 consid. 1.3). 
 
2.2. Le Tribunal fédéral applique en principe d'office le droit (art. 106 al. 1 LTF) à l'état de fait constaté dans l'arrêt cantonal (ou à l'état de fait qu'il aura rectifié). Cela ne signifie pas que le Tribunal fédéral examine, comme le ferait un juge de première instance, toutes les questions juridiques qui pourraient se poser. Compte tenu de l'obligation de motiver imposée par l'art. 42 al. 2 LTF, il ne traite que les questions qui sont soulevées devant lui par les parties, à moins que la violation du droit ne soit manifeste (ATF 140 III 115 consid. 2, 86 consid. 2). Il n'est en revanche pas lié par l'argumentation juridique développée par les parties ou par l'autorité précédente; il peut admettre le recours, comme il peut le rejeter en procédant à une substitution de motifs (ATF 135 III 397 consid. 1.4).  
Le recours en matière civile peut être formé pour violation du droit fédéral (art. 95 let. a LTF), y compris le droit constitutionnel (ATF 134 III 379 consid. 1.2; 133 III 446 consid. 4.1, 462 consid. 2.3). Il ne peut en revanche pas être interjeté pour violation du droit cantonal ou communal en tant que tel. I l est toutefois possible de faire valoir que la mauvaise application du droit cantonal ou communal constitue une violation du droit fédéral, en particulier qu'elle est arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. ou contraire à d'autres droits constitutionnels (ATF 138 I 1 consid. 2.1; 134 III 379 consid. 1.2; 133 III 462 consid. 2.3). 
 
2.3. La recourante produit plusieurs pièces, soit une brochure explicative, une chronologie, un projet d'arrêté et un rapport de commission, et soutient qu'elles sont recevables, dans la mesure où il s'agirait de " pièces à contenu strictement juridique ". Ces preuves nouvelles sont irrecevables (art. 99 al. 1 LTF).  
 
3.  
La recourante reproche à la cour cantonale d'avoir violé l'art. 271 al. 1 CO en ne retenant pas que la résiliation ordinaire du bail était invalide (cf. infra consid. 4-6) et les art. 272 et 272b CO en fixant la durée de la prolongation du bail (cf. infra consid. 7).  
 
4.  
Il y a lieu d'examiner tout d'abord la question de la validité du congé ordinaire donné par la bailleresse pour pouvoir occuper elle-même les locaux après changement de leur affectation et travaux de transformation. 
 
4.1. Chaque partie est en principe libre de résilier un bail de durée indéterminée (ce qu'il est lorsqu'il contient une clause de reconduction tacite) pour la prochaine échéance convenue en respectant le délai de congé prévu (résiliation ordinaire; art. 266a al. 1 CO; arrêt 4A_247/2021 du 4 mai 2022 consid. 3.1.1 et les arrêts cités, destiné à la publication; ATF 145 III 143 consid. 3.1; 140 III 496 consid. 4.1; 138 III 59 consid. 2.1). Le bail est en effet un contrat qui n'oblige les parties que jusqu'à l'expiration de la période convenue; au terme du contrat, la liberté contractuelle renaît et chacune des parties a la faculté de conclure ou non un nouveau contrat et de choisir son cocontractant (arrêt 4A_247/2021 précité consid. 3.1.1 et les arrêts cités, destiné à la publication).  
 
4.2. La seule limite à la liberté contractuelle des parties découle des règles de la bonne foi: lorsque le bail porte sur une habitation ou un local commercial, le congé est annulable lorsqu'il contrevient auxdites règles (art. 271 al. 1 CO; cf. également art. 271a CO) (arrêt 4A_247/2021 précité consid. 3.1.2 et les arrêts cités, destiné à la publication; ATF 140 III 496 consid. 4.1; 138 III 59 consid. 2.1).  
Un congé ordinaire donné par le bailleur pour pouvoir occuper lui-même les locaux n'est pas contraire à la bonne foi, à moins qu'il ne soit pas réel et ne constitue qu'un prétexte. 
Lorsque les locaux doivent subir un changement d'affectation et nécessitent des travaux de transformation, il y a lieu d'admettre, comme pour les résiliations ordinaires données pour effectuer des travaux de rénovation, d'assainissement ou de transformation, que la résiliation est contraire à la bonne foi si le projet du bailleur est manifestement incompatible avec les règles du droit public (ou objectivement impossible; objektiv unmöglich), au point qu'il est certain qu'il ne sera pas autorisé (ATF 140 III 496 consid. 4.1 et 4.2.1).  
Il n'est cependant pas nécessaire que le bailleur ait déjà obtenu une autorisation, ni même qu'il ait déposé les documents dont elle dépend (ATF 142 III 91 consid. 3.2.1; 140 III 496 consid. 4.1). Il s'agit de pronostiquer si, au moment où le congé a été donné, l'autorisation des travaux envisagés paraissait de toute évidence exclue, une probabilité non négligeable de refus n'étant pas suffisante. Autrement dit, il faut que le projet soit déjà, à ce moment-là, manifestement incompatible avec les règles du droit public. Des événements survenus postérieurement, tel le refus d'octroi du permis de construire, ne sont pas susceptibles d'influer sur cette qualification, car un congé valable ne peut pas devenir invalide par la suite. Ces événements peuvent tout au plus permettre d'apprécier le degré d'impossibilité du projet tel qu'il existait à la date de la notification du congé. Un congé n'est pas déjà contraire à la bonne foi si le projet initial doit être modifié pour pouvoir être approuvé par les autorités administratives. 
La preuve de l'impossibilité objective incombe au locataire (ATF 140 III 496 consid. 4.1). 
 
5.  
Dans un premier moyen, la recourante reproche à la cour cantonale d'avoir retenu que la bailleresse disposait, au moment du congé, d'un projet et que le congé était donc valable. 
 
5.1. La cour cantonale a retenu qu'il ressortait des déclarations de la conseillère en construction auprès de la coopérative faîtière de la bailleresse et d'un account manager de celle-ci que la bailleresse souhaitait reprendre les locaux litigieux pour les exploiter elle-même en y implantant une agence bancaire selon un concept nouveau. Selon les déclarations du président de la direction de la bailleresse, d'un membre de la direction de la bailleresse en charge du secteur bâtiment et de la conseillère en construction, le projet pour lesdits locaux remontait à 2018 déjà, soit à une date antérieure au congé. Aucun élément ne permettait de douter de la véracité de ces déclarations. La bailleresse avait notamment produit devant le tribunal une présentation dudit projet exposant ses motivations et sa nature, ce qui attestait de sa volonté de développer un projet dans les locaux litigieux lors de la résiliation du bail, même si des plans détaillés n'existaient pas à cette époque. N'était par ailleurs pas déterminant le fait que l'élaboration du projet particulier n'était pas encore complètement aboutie et que les demandes d'autorisation nécessaires n'avaient pas encore été requises.  
La cour cantonale a dès lors jugé que le motif invoqué à l'appui du congé par la bailleresse, qui n'a pas varié, devait être considéré comme réel et qu'il ne constituait pas qu'un prétexte. 
 
5.2. La recourante considère que la cour cantonale aurait dû porter un oeil bien plus critique sur une version des faits émanant uniquement d'employés du groupe dont l'intimée fait partie et qu'on ne saurait exclure, au vu de l'importance des intérêts en jeu, que les personnes auditionnées se soient entendues sur une version des faits.  
Selon elle, il est inconcevable que le projet ait débuté en été 2018, au vu du fait que l'intimée n'est devenue propriétaire de l'immeuble qu'en décembre 2018. La recourante s'interroge par ailleurs sur le fait que la bailleresse n'a pas produit de documents attestant de la matérialité du projet au moment du congé. Elle considère que savoir si le congé contrevient aux règles de la bonne foi est une question de droit qui est revue librement par le Tribunal fédéral et argue que l'intimée n'a pas sollicité d'autorisation quand bien même celle-ci est nécessaire. 
 
5.3. La critique de la recourante confond la situation dans laquelle la résiliation n'est qu'un simple prétexte et la question de savoir si le bailleur dispose d'un projet suffisamment mûr et élaboré permettant de constater concrètement qu'il est nécessaire que le locataire quitte les locaux (cf. arrêt 4A_247/2021 précité consid. 3.2.2 et les arrêts cités, destiné à la publication).  
La cour cantonale a constaté que le motif invoqué par la bailleresse à l'appui de son congé n'était pas un prétexte. Comme le relève l'intimée, la recourante se contente de critiquer de manière appellatoire cette constatation et n'invoque ni ne démontre qu'elle serait arbitraire. 
La recourante n'invoque par ailleurs pas que le projet de la bailleresse ne permettrait pas de constater qu'il est nécessaire qu'elle quitte les locaux ou que la cour cantonale aurait violé son droit d'être entendue (art. 29 al. 2 Cst.) en ne tranchant pas cette question. Cette question ne saurait dès lors être examinée. 
Le grief de la recourante est donc irrecevable. 
 
6.  
Dans un deuxième moyen, la recourante fait grief à la cour cantonale de ne pas avoir considéré que le projet de la bailleresse était manifestement incompatible avec les règles de droit public et d'avoir à nouveau violé l'art. 271 al. 1 CO. Elle soutient par ailleurs que serait recevable un document daté du 9 novembre 2020, intitulé " Avis de droit sur l'application du RPUS " et établi par Frédérique Perler, Conseillère administrative en charge du Département de l'aménagement, des constructions et de la mobilité de la Ville de Genève (ci-après: le document litigieux). 
 
6.1. Selon les art. 247 al. 2 let. a et 243 al. 2 let. c CPC, le tribunal établit les faits d'office dans les litiges portant sur la protection contre les congés ou la prolongation du bail à loyer. Conformément à l'art. 229 al. 3 CPC, le tribunal admet alors les faits et moyens de preuve nouveaux jusqu'aux délibérations. Doivent ainsi être admis les faits et moyens de preuve nouveaux - qu'il s'agisse de faux faits nouveaux ou de vrais faits nouveaux - en tout temps et sans condition jusqu'au début des délibérations de première instance (ATF 138 III 788 consid. 4.2; arrêt 4A_165/2021 du 18 janvier 2022 consid. 3.2.3).  
Devant le tribunal de première instance, le début des délibérations suit en principe immédiatement les plaidoiries finales. Toutefois, lorsqu'après celles-ci le tribunal fixe encore aux parties un délai au terme duquel la cause sera gardée à juger, les délibérations ne débutent qu'à l'échéance de ce délai (cf. arrêt 4A_467/2019 du 23 mars 2022 consid. 7.3.1.2). 
 
6.2. La cour cantonale a retenu que le document litigieux, en tant que simple avis de droit, ne tombe pas sous le coup de l'interdiction des novas et qu'il est donc recevable, étant toutefois précisé qu'il ne constitue qu'une allégation de partie et qu'il n'a dès lors pas de force probante particulière. Si, comme semblait vouloir le faire la locataire, une portée plus large devait lui être donnée telle qu'une prise de position de la Ville de Genève sur le projet de la bailleresse, il constituerait en revanche une pièce nouvelle irrecevable en vertu des art. 229 al. 3 et 317 al. 1 CPC, dans la mesure où elle aurait pu être produite avant les délibérations du tribunal.  
Elle a relevé que, suite au projet de la bailleresse, les locaux changeraient certes d'affectation mais qu'ils resteraient néanmoins ouverts au public et offriraient différentes possibilités d'utilisation. Plus particulièrement, les locaux ne seraient pas transformés en une agence bancaire classique mais proposeraient des espaces à même d'assurer une certaine animation dans le quartier, ce qui constitue une circonstance plutôt favorable dans le contexte de l'examen d'un changement d'affectation d'un restaurant. Dit changement ne peut dès lors être d'emblée considéré comme exclu. 
La cour cantonale a précisé que, si l' " avis de droit " de la Ville de Genève devait être considéré comme une prise de position recevable de l'autorité administrative, il ne permettrait pas de retenir que la demande de la bailleresse serait rejetée, dans la mesure où les éléments précis dont l'autorité disposait pour rendre son " avis de droit " ne sont pas connus et que, pour prendre position, elle n'a pas recueilli les observations de la bailleresse, qui n'a pas pu apporter d'explications concrètes sur son concept. Par ailleurs, l'autorité administrative dispose d'un large pouvoir d'appréciation, ce qui ne permet pas de préjuger de manière certaine du rejet de la demande effectuée par la bailleresse. 
La cour cantonale a ainsi considéré qu'il ne pouvait pas être retenu que, au moment où le congé avait été donné, l'autorisation des travaux envisagés paraissait de toute évidence exclue. 
 
6.3. La recourante soutient tout d'abord que le document litigieux est recevable. Elle invoque que le litige est soumis à la maxime inquisitoire, que les faits et moyens de preuve peuvent donc être introduits jusqu'aux délibérations, que le tribunal a adressé aux parties un courrier le 27 octobre 2020 dans lequel il informait celles-ci que la cause serait retenue à juger à l'issue d'un délai de 15 jours, et qu'elle a produit le document litigieux dans ce délai. Elle invoque une violation des art. 152 et 229 al. 3 CPC, 8 CC et 29 al. 2 Cst.  
La recourante relève que l'arrêt entrepris a constaté que le projet de l'intimée changerait l'affectation des locaux. Selon elle, ce changement d'affectation nécessite l'obtention d'une autorisation du Département du territoire du canton de Genève conformément à l'art. 9 al. 6 du règlement de la Ville de Genève du 20 février 2007 relatif aux plans d'utilisation du sol de la Ville de Genève (RPUS; RS/VdG LC 21 211). Elle reproche à la cour cantonale d'avoir considéré qu'avec le projet de l'intimée, les locaux litigieux resteraient ouverts au public et d'avoir ainsi semblé appliquer la règle générale prévue à l'art. 9 al. 1 RPUS tandis que l'art. 9 al. 3 RPUS prévoit une protection spécifique pour les établissements tels que les cafés et les restaurants. Selon elle, il est évident que cette protection spécifique s'applique au bar-restaurant qu'elle exploite. Dès lors, elle invoque que celui-ci ne pourra en règle générale être remplacé que par un restaurant, tandis que l'intimée n'entend pas maintenir une telle activité dans les locaux. Elle ajoute que le régime de dérogation de l'art. 9 al. 5 RPUS est restrictif et qu'une dérogation ne sera pas accordée, dans la mesure où il n'est pas impossible de poursuivre l'activité de restauration dans l'arcade litigieuse, où il n'existe donc aucune circonstance exceptionnelle qui exige de modifier la destination des locaux, où le préavis de la Ville de Genève est obligatoire et lie le Département du territoire du canton de Genève et où la Ville de Genève a indiqué dans son " avis de droit ", qui indique que le " projet n'est pas conforme à l'art. 9 al. 3 RPUS et ne peut se réaliser sans l'obtention d'une dérogation du Conseil administratif au sens des art. 9 al. 5 et 14 RPUS ", qu'" il appert que le Conseil administratif n'accordera pas de dérogation au changement d'affectation du restaurant en une agence bancaire " et que " [l]e projet de [l'intimée] [...] appert [à la Conseillère administrative] dès lors très compromis ". 
 
6.4. Il convient tout d'abord d'examiner la recevabilité du document litigieux. Il n'est pas contesté que la maxime inquisitoire sociale est applicable (cf. supra consid. 6.1) et que, par courrier daté du 27 octobre 2020, le tribunal a informé les parties que la cause serait retenue à juger à l'issue d'un délai de 15 jours à dater de la notification dudit courrier. Le 12 novembre 2020, soit dans le délai fixé et avant que la cause ne soit gardée à juger, la locataire lui a fait parvenir diverses pièces, dont le document litigieux. Conformément à l'art. 229 al. 3 CPC et contrairement à ce qu'ont retenu le tribunal et la cour cantonale et à ce que soutient l'intimée, cette pièce a été déposée avant le début des délibérations et est ainsi recevable.  
Le Tribunal fédéral peut toutefois renoncer à renvoyer la cause à la cour cantonale, dans la mesure où celle-ci a quand même tenu compte du document litigieux et jugé qu'il n'est pas déterminant. On peut en effet s'interroger sur la nature de ce document, qui est intitulé " avis de droit " mais qui provient d'un membre de l'autorité compétente en matière de dérogation qui se prononce au nom de dite autorité, annonce que cette autorité n'accordera pas de dérogation mais n'a, pour ce faire, pris connaissance que des documents que la locataire a bien voulu lui soumettre et n'a pas entendu la bailleresse. La question peut toutefois demeure indécise, dans la mesure où la conclusion à laquelle est parvenue la cour cantonale, soit qu'il ne pouvait pas être considéré que, au moment où le congé a été donné, l'autorisation des travaux envisagés paraissait de toute évidence exclue, repose sur une interprétation du droit communal et où la recourante ne se plaint pas de la violation de ses droits constitutionnels en lien avec cette interprétation (cf. supra consid. 2.2).  
Le grief est dès lors irrecevable. 
 
7.  
Il reste à examiner la question de la prolongation du bail. 
 
7.1. Selon les art. 272 al. 1 et 272b al. 1 CO, le locataire peut demander la prolongation d'un bail de locaux commerciaux pour une durée de six ans au maximum, lorsque la fin du contrat aurait pour lui ou sa famille des conséquences pénibles sans que les intérêts du bailleur ne le justifient; dans cette limite de temps, le juge peut accorder une ou deux prolongations.  
Le juge apprécie librement, selon les règles du droit et de l'équité (art. 4 CC), s'il y a lieu de prolonger le bail et, dans l'affirmative, pour quelle durée. Il doit procéder à la pesée des intérêts en présence et tenir compte du but d'une prolongation, consistant à donner du temps au locataire pour trouver des locaux de remplacement ou à tout le moins pour adoucir les conséquences pénibles résultant d'une extinction du contrat (ATF 142 III 336 consid. 5.3.1 et les arrêts cités). Il lui incombe de prendre en considération tous les éléments du cas particulier, tels que la durée du bail, la situation personnelle et financière de chaque partie, leur comportement, de même que la situation sur le marché locatif local (art. 272 al. 2 CO; ATF 142 III 336 consid. 5.3.2; 136 III 190 consid. 6). Il peut tenir compte du délai qui s'est écoulé entre le moment de la résiliation et celui où elle devait prendre effet, ainsi que du fait que le locataire n'a pas entrepris de démarches sérieuses pour trouver une solution de remplacement (ATF 125 III 226 consid. 4c; arrêt 4A_143/2021 du 31 août 2021 consid. 12.1 et l'arrêt cité). Le juge tient compte de la situation présente au moment de son prononcé, telle qu'elle ressort des faits allégués et prouvés conformément aux règles du procès civil (arrêt 4A_143/2021 précité consid. 12.1 et les arrêts cités). 
Le Tribunal fédéral ne revoit qu'avec réserve la décision d'équité prise en dernière instance cantonale. Il intervient lorsque celle-ci s'écarte sans raison des règles établies par la doctrine et la jurisprudence en matière de libre appréciation, ou lorsqu'elle s'appuie sur des faits qui, dans le cas particulier, ne devaient jouer aucun rôle, ou encore lorsqu'elle ignore des éléments qui auraient absolument dû être pris en considération. En outre, le Tribunal fédéral redresse les décisions rendues en vertu d'un pouvoir d'appréciation lorsqu'elles aboutissent à un résultat manifestement injuste ou à une iniquité choquante (ATF 142 III 336 consid. 5.3.2; 138 III 252 consid. 2.1; 137 III 303 consid. 2.1.1; 135 III 121 consid. 2). 
 
7.2. La cour cantonale a retenu que la bailleresse avait établi vouloir utiliser les locaux pour ses propres besoins, qu'elle disposait donc d'un intérêt à les récupérer dès qu'elle serait en mesure de réaliser son projet, qu'elle ne disposait toutefois d'aucune autorisation et n'en avait pas sollicitée, ce qui tendait à démontrer que ce projet n'était pas prioritaire ou urgent, qu'il n'était pas établi que la locataire avait présenté du retard dans le paiement du loyer, que la bailleresse ne disposait dès lors d'aucun intérêt à récupérer immédiatement les locaux litigieux, et qu'une prolongation ne saurait donc être refusée. Elle a par ailleurs relevé que la locataire avait certes disposé de temps depuis la résiliation du bail pour trouver des locaux de remplacement mais qu'il pouvait être compliqué pour elle de retrouver des locaux adéquats à Genève.  
Elle a jugé que la prolongation de quatre ans, décidée par le tribunal, serait excessive si la bailleresse devait obtenir une autorisation et que, dans la mesure où la date de délivrance de l'autorisation requise ne pouvait être déterminée, une première prolongation d'une durée de trois ans devait être octroyée. 
 
7.3. La recourante fait grief à la cour cantonale de ne pas avoir tenu compte d'éléments qui auraient dû l'être et, notamment, du fait que le bail avait été conclu " sur la base de principes [...] qui garantissaient au locataire [sic] une durée initiale de 10 ans s'il [sic] optait pour un renouvellement après 5 ans " et que la bailleresse n'avait pas laissé entendre durant les négociations que l'immeuble allait changer de propriétaire. Elle soutient que l'arrêt attaqué n'a pas fait état des travaux avoisinant 800'000 fr. et qu'elle ne peut amortir cet investissement d'ici au 31 décembre 2024.  
 
7.4. La critique de la recourante ne tient pas compte du fait que la prolongation accordée par la cour cantonale est une première prolongation et non, comme le tribunal en avait décidé, une unique prolongation. Peu circonstanciée, elle n'indique pas précisément, références à l'appui, quels " principes " lui auraient garanti une durée de bail initiale de dix ans, le contrat de bail ayant été conclu pour une durée de cinq ans renouvelable de cinq ans en cinq ans sauf résiliation signifiée douze mois avant l'échéance. L'arrêt entrepris ne constate par ailleurs pas que l'ancienne bailleresse aurait eu conscience du changement ultérieur de propriétaire. Enfin, contrairement à ce que la recourante avance, la cour cantonale a fait état des travaux effectués, mais la recourante n'a pas invoqué et démontré qu'elle ne pourrait amortir les investissements qu'elle a effectués et que ce fait serait opposable à la nouvelle propriétaire.  
Le grief doit donc être rejeté. 
 
8.  
Au vu de ce qui précède, le recours doit être rejeté, dans la mesure de sa recevabilité. La requête d'effet suspensif formée par la recourante devient dès lors sans objet. 
Les frais judiciaires et les dépens seront mis à la charge de la recourante, qui succombe (art. 66 al. 1 et art. 68 al. 1 et 2 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté, dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 7'500 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.  
La recourante versera à l'intimée une indemnité de 8'500 fr. à titre de dépens. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties et à la Chambre des baux et loyers de la Cour de justice du canton de Genève. 
 
 
Lausanne, le 5 juillet 2022 
 
Au nom de la Ire Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Hohl 
 
Le Greffier : Douzals