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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
1P.788/2005 /col 
 
Arrêt du 19 décembre 2005 
Ire Cour de droit public 
 
Composition 
MM. les Juges Féraud, Président, 
Aeschlimann et Reeb. 
Greffier: M. Kurz. 
 
Parties 
A.________, 
recourant, représenté par Me Marino Montini, avocat, 
 
contre 
 
Juge d'instruction de La Chaux-de-Fonds, 
passage de la Bonne-Fontaine 36, case postale 4060, 2304 La Chaux-de-Fonds, 
Ministère public du canton de Neuchâtel, 
rue du Pommier 3, case postale 2672, 2001 Neuchâtel 1, 
Chambre d'accusation du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel, rue du Pommier 1, 
case postale 3174, 2001 Neuchâtel 1. 
 
Objet 
détention préventive, 
 
recours de droit public contre l'arrêt de la Chambre d'accusation du Tribunal cantonal neuchâtelois du 28 octobre 2005. 
 
Faits: 
A. 
A.________, ressortissant portugais né en 1973, a été extradé par la France et placé en détention préventive le 28 juin 2004, sur l'ordre du Juge d'instruction de La Chaux-de-Fonds. Il est prévenu notamment de brigandage avec séquestration et enlèvement pour avoir, le 15 janvier 2002, participé à l'attaque d'une camionnette transportant des pièces détachées en or, pour une valeur de 486'675 fr., au cours de laquelle le chauffeur du véhicule avait été séquestré; il est également prévenu de recel et de vol de montres de valeur. 
La détention préventive de A.________ a été prolongée par la Chambre d'accusation du canton de Neuchâtel par arrêts des 23 décembre 2004, 14 février 2005, 29 avril 2005 et 28 juillet 2005. Les présomptions de culpabilité étaient suffisantes s'agissant du brigandage avec séquestration et du vol. Le risque de fuite était évident pour un ressortissant étranger n'ayant ni travail ni domicile en Suisse, dont la femme et les enfants vivaient en Italie. La volonté de travailler en Suisse n'était pas démontrée. Des mesures de substitution, telle que la fourniture de sûretés par la famille, étaient toutefois envisageables. 
B. 
Le 30 septembre 2005, le Juge d'instruction a requis une nouvelle prolongation de la détention préventive au 20 novembre 2005. Il exposait que si la clôture de l'instruction avait été prévue au 31 octobre 2005, l'extradition de B.________, survenue le 28 juillet 2005, avait nécessité des auditions et des rapports complémentaires. De nouvelles récapitulations ne pourraient intervenir avant fin octobre 2005. Le 21 octobre 2005, le Juge d'instruction a étendu sa demande de prolongation au 28 janvier 2006, correspondant à l'échéance des six mois de détention préventive de B.________. 
Par arrêt du 28 octobre 2005, la Chambre d'accusation a autorisé la prolongation de la détention de A.________ jusqu'au 28 janvier 2006. Des documents attestaient la volonté de l'intimé de travailler en Suisse dans l'entreprise d'un parent, mais cela ne suffisait pas pour prévenir une fuite. Seules pouvaient être envisagées des sûretés fournies par la famille ou un tiers, obligés de surveiller le prévenu, mais rien de tel n'était proposé. L'instruction était menée avec célérité, et la durée de la détention, de 21 mois, ne se rapprochait pas de la durée de la peine encourue. La question se poserait plus sérieusement si la détention devait se prolonger après le 28 janvier 2006. 
C. 
A.________ forme un recours de droit public contre ce dernier arrêt. Il en demande l'annulation, ainsi que sa mise en liberté immédiate, et requiert l'assistance judiciaire. La Chambre d'accusation se réfère à son arrêt. Le Juge d'instruction et le Ministère public ont renoncé à se déterminer. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
1. 
Le recours de droit public est formé en temps utile contre un arrêt rendu en dernière instance cantonale (art. 86 al. 1 OJ). Le recourant, personnellement touché par l'arrêt attaqué qui prolonge sa détention préventive, a qualité pour recourir selon l'art. 88 OJ. Par exception à la nature cassatoire du recours de droit public, le recourant peut conclure non seulement à l'annulation de l'arrêt cantonal, mais aussi à sa mise en liberté immédiate (ATF 124 I 327 consid. 4b/aa p. 333). 
2. 
Le recourant se plaint d'une violation de son droit d'être entendu. Il reproche à la Chambre d'accusation de ne pas avoir fixé de délai maximal de détention, alors que le recourant avait conclu dans ce sens. 
2.1 Le droit d'être entendu garanti par l'art. 29 al. 2 Cst. confère à toute personne le droit d'exiger, en principe, qu'un jugement ou une décision défavorable à sa cause soit motivé. Cette garantie tend à donner à la personne touchée les moyens d'apprécier la portée du prononcé et de le contester efficacement, s'il y a lieu, devant une instance supérieure. Elle tend aussi à éviter que l'autorité ne se laisse guider par des considérations subjectives ou dépourvues de pertinence; elle contribue, par là, à prévenir une décision arbitraire. En règle générale, il suffit que l'autorité mentionne au moins brièvement les motifs qui l'ont guidée, sans qu'elle soit tenue de répondre à tous les arguments présentés (ATF 112 Ia 107 consid. 2b p. 109; voir aussi ATF 126 I 97 consid. 2b p. 102, 125 II 369 consid. 2c p. 372, 124 II 146 consid. 2a p. 149). Cela concerne notamment les décisions consécutives à une demande de prolongation de la détention, sur laquelle l'autorité doit statuer à bref délai; il est d'ailleurs admis que celle-ci peut se borner à adhérer aux motifs de la demande ou à ceux d'une décision antérieure (ATF 123 I 31 consid. 2 p. 33). 
2.2 En l'occurrence, la Chambre d'accusation s'est exprimée sur le respect du principe de la proportionnalité en retenant d'une part que l'enquête était menée avec une célérité suffisante, et d'autre part que la durée de la détention préventive ne se rapprochait pas encore de celle de la peine susceptible d'être prononcée. Or, la fixation d'un délai maximum de détention ne doit être envisagée que lorsque le respect de la proportionnalité n'est plus assuré. Ayant estimé que tel n'était pas le cas, la Chambre d'accusation n'avait pas à statuer de manière distincte sur les conclusions du recourant. Il n'y a pas, partant, de violation de l'obligation de motiver. 
3. 
Sur le fond, le recourant se plaint d'un abus du pouvoir d'appréciation et d'arbitraire. Devant la cour cantonale, il avait produit un engagement formel à demeurer en Suisse, ainsi qu'une lettre de son futur employeur garantissant son engagement en tant qu'aide-monteur dès sa sortie de prison. Il avait également proposé le dépôt de ses papiers d'identité. Le versement d'une caution n'était pas envisageable dès lors qu'il était sans ressources et que ses parents ne disposaient que de revenus modestes. Le Juge d'instruction avait d'ailleurs refusé de fixer le montant de la caution. Le recourant estime avoir favorisé son extradition. Il aurait ainsi présenté des garanties suffisantes pour prévenir tout risque de fuite, ce que la Chambre d'accusation aurait méconnu. 
3.1 Selon la jurisprudence, le risque de fuite ne peut s'apprécier sur la seule base de la gravité de l'infraction même si, compte tenu de l'ensemble des circonstances, la perspective d'une longue peine privative de liberté permet souvent d'en présumer l'existence; il doit s'analyser en fonction d'un ensemble de critères tels que le caractère de l'intéressé, sa moralité, ses ressources, ses liens avec l'Etat qui le poursuit ainsi que ses contacts à l'étranger (ATF 125 I 60 consid. 3a p. 62 et les arrêts cités). S'agissant d'une restriction grave à la liberté personnelle, le Tribunal fédéral examine librement cette question, sous réserve de l'appréciation des preuves, revue sous l'angle restreint de l'arbitraire (ATF 123 I 268 consid. 2d p. 271). 
3.2 Le recourant est de nationalité portugaise. Selon ses déclarations du 10 septembre 2005, il est né en France où il a effectué toute sa scolarité. Il a séjourné en Suisse où il s'est trouvé sans emploi depuis le 1er janvier 2000, puis à la charge des services sociaux dès le 1er janvier 2002. Le 31 janvier 2003, il a rejoint son épouse, dont il est séparé et qui vit en Italie avec ses trois enfants. En mai 2003, il s'est rendu chez ses parents dans les Yvelines et a travaillé dans un garage jusqu'à son arrestation en février 2004. L'arrêt attaqué mentionne encore que le recourant a séjourné durant quelques mois auprès d'une soeur en Angleterre, et qu'il aurait encore des attaches au Portugal. 
Le recourant ne conteste aucun de ces éléments de fait. Il en ressort clairement qu'il possède toutes ses attaches familiales à l'étranger. A l'inverse, le recourant ne prétend pas qu'il avait, avant son arrestation, le moindre lien, personnel ou professionnel avec la Suisse. Dans ces conditions, un engagement solennel et la volonté de travailler en Suisse dès sa sortie de prison ne permettent pas de réduire le risque de fuite dans une mesure acceptable. Le recourant relève qu'il ne dispose pas d'avoirs suffisants qu'il pourrait, lui ou sa famille, déposer en garantie. Le risque de fuite ne peut, par conséquent, être nié. 
4. 
Invoquant les principes de célérité et de proportionnalité, le recourant relève qu'il n'a été entendu, en 2005, qu'à deux reprises par la police, et qu'il a participé à une confrontation le 18 octobre 2005. A part cela, il n'y aurait plus aucun acte d'instruction le concernant. La clôture de l'instruction ayant été reportée à plusieurs reprises, la prolongation de la détention après 22 mois ne se justifierait pas. 
4.1 Selon la jurisprudence, le principe de la proportionnalité confère au prévenu le droit d'être libéré lorsque la durée de son incarcération se rapproche de la peine privative de liberté susceptible d'être prononcée (ATF 126 I 172 consid. 5a p. 176; 124 I 208 consid. 6 p. 215). Celle-ci doit être évaluée avec la plus grande prudence, car il faut éviter que le juge de l'action pénale ne soit incité à prononcer une peine excessive pour la faire coïncider avec la détention préventive à imputer. L'incarcération est aussi disproportionnée en cas de retard injustifié dans le cours de la procédure pénale (ATF 128 I 149 consid. 2.2 p. 151, 125 I 60 consid. 3d p. 64, 124 I 208 consid. 6 p. 215 et les arrêts cités). Toutefois, n'importe quel retard n'est pas suffisant pour justifier l'élargissement du prévenu. Il doit s'agir d'un manquement particulièrement grave, faisant au surplus apparaître que l'autorité de poursuite n'est plus en mesure de conduire la procédure à chef dans un délai raisonnable (ATF 128 I 149 consid. 2.2 p. 151/152). 
4.2 Il est vrai que le juge d'instruction a annoncé à plusieurs reprises la fin de son enquête. Dans la mesure où ces différents reports étaient justifiés par des actes d'instruction à effectuer ou par la survenance de circonstances nouvelles, telle par exemple l'extradition de B.________, ils ne constituent pas des retards injustifiés. Comme le relève la Chambre d'accusation, l'instruction liée à des comparses est également utile à l'élucidation des faits reprochés au recourant. Par ailleurs, une interruption passagère des actes d'enquête à l'égard de l'un ou l'autre des inculpés apparaît inhérente à une procédure mettant en cause de nombreux prévenus; il ne saurait s'agir d'un manquement grave. Pour le surplus, le recourant ne prétend pas que la durée de la détention préventive se rapprocherait de celle de la peine concrètement encourue. Au demeurant, le Juge d'instruction a, par avis du 5 décembre 2005, invité les parties à consulter le dossier et à présenter leurs demandes éventuelles de compléments d'instruction, jusqu'au 20 décembre 2005. Cela semble signifier qu'une clôture prochaine de l'instruction est sérieusement envisageable. 
5. 
Sur le vu de ce qui précède, le recours de droit public doit être rejeté. L'assistance judiciaire est accordée au recourant; Me Montini est désigné comme avocat d'office du recourant, rétribué par la caisse du Tribunal fédéral. Il n'est pas perçu d'émolument judiciaire. 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
1. 
Le recours est rejeté. 
2. 
La demande d'assistance judiciaire est admise; Me Marino Montini est désigné comme avocat d'office du recourant et une indemnité de 1000 fr. lui est allouée à titre d'honoraires, à verser par la caisse du Tribunal fédéral. 
3. 
Il n'est pas perçu d'émolument judiciaire. 
4. 
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant, au Juge d'instruction de La Chaux-de-Fonds, au Ministère public et à la Chambre d'accusation du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel. 
Lausanne, le 19 décembre 2005 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
Le président: Le greffier: