Wichtiger Hinweis:
Diese Website wird in älteren Versionen von Netscape ohne graphische Elemente dargestellt. Die Funktionalität der Website ist aber trotzdem gewährleistet. Wenn Sie diese Website regelmässig benutzen, empfehlen wir Ihnen, auf Ihrem Computer einen aktuellen Browser zu installieren.
Zurück zur Einstiegsseite Drucken
Grössere Schrift
 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
1A.254/2006 /col 
 
Arrêt du 4 avril 2007 
Ire Cour de droit public 
 
Composition 
MM. les Juges Féraud, Président, 
Reeb et Fonjallaz. 
Greffier: M. Kurz. 
 
Parties 
A.________, 
recourant, représenté par Me Rossano Pinna, avocat, 
 
contre 
 
Office fédéral de la justice, Division de l'entraide judiciaire internationale, Section extraditions, Bundesrain 20, 3003 Berne. 
 
Objet 
extension de l'extradition et transmission de documentation au Royaume de Norvège; 
 
recours de droit administratif contre la décision de l'Office fédéral de la justice du 25 septembre 2006. 
 
Faits: 
A. 
Le 29 août, puis le 20 septembre 2005, un Procureur du Service de répression de la criminalité économique et écologique du Royaume de Norvège (Økokrim) a adressé à la Suisse une demande d'extradition du citoyen norvégien A.________, soupçonné de fraude aggravée et de subornation de témoin. De juin à octobre 2003, il aurait détourné 10 millions d'USD investis par un citoyen américain auquel il aurait promis un rendement minimum de 300%; il l'aurait par ailleurs incité, moyennant paiement, à ne pas se présenter à une audition de témoin. La demande tendait également à l'exécution en Suisse de certains actes d'entraide judiciaire. 
Arrêté le 10 octobre 2005 au Tessin, A.________ a consenti à son extradition simplifiée, sans renoncer au principe de la spécialité. L'extradition a eu lieu le 20 octobre 2005. Une partie des documents et objets saisis en Suisse a été remise à la Norvège le 15 mars 2006. 
B. 
Le 30 mars 2006, le Ministère norvégien de la justice a transmis à la Suisse une demande d'extension de l'extradition, sur la base d'un acte d'accusation du 24 février 2006, pour des escroqueries, abus de confiance et faux dans les titres commis entre 1990 et 2005. L'autorité requérante demandait également la remise de tout le matériel se trouvant encore en Suisse. A la requête de l'Office fédéral de la justice (OFJ), l'autorité requérante a apporté des précisions sur le mode de commission des infractions. A.________ promettait aux investisseurs des gains de l'ordre de 300 à 700%, et avait produit de faux relevés de banque afin de faire croire qu'il disposait de moyens financiers importants. Il avait aussi détourné des sommes investies par un couple dans une société. La demande a été complétée à plusieurs reprises, notamment par la production d'un nouvel acte d'accusation daté du 20 juin 2006, et de nouvelles précisions sur le modus operandi. 
Par décision du 25 septembre 2006, l'OFJ a accordé l'extension requise pour les faits exposés, à l'exception de ceux qui étaient déjà visés par la décision d'extradition. Les faits reprochés à A.________ étaient constitutifs en droit suisse d'abus de confiance, d'escroqueries et de faux dans les titres. Entendu en Norvège le 5 juillet 2006, l'intéressé s'était opposé à l'extension en contestant les faits mis à sa charge et en demandant des investigations sur les cas de faux dans les titres. Les arguments relatifs à la culpabilité n'avait pas à être pris en considération. La nationalité de l'intéressé, le fait qu'il se trouve en Norvège et qu'il n'y ait pas de procédure ouverte contre lui en Suisse justifiaient que la poursuite ait lieu dans l'Etat requérant. Les pièces saisies les 13 et 19 octobre 2005 (soit notamment des documents contractuels, comptables et bancaires) étaient en relation avec la procédure étrangère, et l'intéressé n'avait guère motivé son opposition à cet égard. Leur remise a été ordonnée. 
C. 
Par acte du 22 novembre 2006, A.________ forme un recours de droit administratif par lequel il demande principalement l'annulation de la décision d'extension; subsidiairement, il demande l'accès au dossier, un délai supplémentaire pour compléter son recours, et le renvoi de la cause à l'OFJ afin qu'il procède au tri des pièces à transmettre, en présence des parties. 
Les avocats du recourant en Norvège ont eux aussi présenté un recours, traduit en français, daté du 17 novembre 2006 et remis le 22 novembre 2006 à la poste suisse; ils prennent en substance les mêmes conclusions. 
L'OFJ conclut au rejet du recours. Le recourant a répliqué, après avoir consulté le dossier, en produisant une prise de position de son avocat en Norvège. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
1. 
Conformément à l'art. 132 al. 1 LTF, les procédures de recours contre des décisions rendues, comme la présente décision d'extension de l'extradition, avant l'entrée en vigueur de la nouvelle réglementation, sont soumises à l'ancien droit. 
1.1 La décision attaquée ayant été rendue en français, il en va de même du présent arrêt (art. 37 al. 3 OJ). 
1.2 La décision par laquelle l'OFJ accorde l'extradition ou son extension (art. 55 al. 1 et 39 de la loi fédérale sur l'entraide internationale en matière pénale - EIMP, RS 351.1) peut faire l'objet d'un recours de droit administratif (art. 25 al. 1 EIMP). La personne extradée a qualité, au sens de l'art. 103 let. a OJ, pour recourir contre l'extension accordée par l'OFJ (art. 21 al. 3 EIMP). 
1.3 L'extradition entre la Norvège et la Suisse est régie par la Convention européenne d'extradition (CEExtr., RS 0.353. 1) et ses deux protocoles additionnels (RS 0.353.11 et 0.353.12). Le droit interne, soit l'EIMP et son ordonnance d'exécution (OEIMP, RS 351.11), s'applique aux questions qui ne sont pas réglées par le droit conventionnel, et lorsqu'il permet la collaboration internationale à des conditions plus favorables (ATF 122 II 373 consid. 1a p. 375). 
2. 
Dans un grief d'ordre formel, à examiner en premier lieu, le recourant se plaint de n'avoir pu consulter ni la demande et ses compléments, ni la correspondance entre l'OFJ et les autorités tessinoises, ni les documents destinés à être remis à l'autorité requérante. Le recourant demande à titre préalable l'accès à ces documents, puis la possibilité de participer à un tri des pièces. 
2.1 Le droit d'être entendu, garanti par l'art. 29 al. 2 Cst., comprend notamment le droit d'accès au dossier. En matière d'extradition, l'art. 52 EIMP permet à la personne poursuivie de prendre connaissance de la demande et des pièces à l'appui (al. 1), d'être entendue et de présenter ses objections à l'extradition (al. 2). Dans le cadre d'une procédure de réextradition, le droit d'être entendu ne peut être exercé dans les mêmes conditions puisque l'intéressé se trouve déjà en main de l'Etat requérant. L'OFJ doit ainsi exiger l'audition de l'intéressé par une autorité de justice de l'Etat requérant, et se faire remettre un procès-verbal de cette audition (art. 52 al. 3 EIMP). 
2.2 Il n'est pas contesté que cette formalité a été effectuée: le recourant a été entendu le 5 juillet 2006 en Norvège; il s'est opposé à l'extension de l'extradition. Il est vrai que les documents à l'appui de la demande ne lui ont apparemment pas été présentés à cette occasion et que, quelles qu'en soient les raisons, ni son avocat en Suisse, ni son défenseur en Norvège n'ont pu consulter le dossier avant le prononcé de la décision attaquée. Cela n'est pas déterminant car, dans le cadre de la procédure de recours, l'avocat du recourant a obtenu l'accès au dossier: les pièces pertinentes lui ont été communiquées le 9 janvier 2007. Le recourant a ensuite eu l'occasion de s'exprimer en réplique. Une éventuelle violation de son droit d'être entendu a donc pu être réparée en instance de recours. 
2.3 Selon l'art. 59 al. 1 EIMP, si les conditions d'extradition sont remplies, doivent également être remis les objets ou valeurs trouvés en possession de la personne poursuivie et qui peuvent servir de moyens de preuve (let. a) ou qui sont le produit de l'infraction (let. b). L'autorité suisse qui statue sur une remise d'objet doit ainsi s'interroger sur leur utilité en tant que moyens de preuve, ou sur leur provenance en tant que produit de l'infraction. Elle doit aussi donner à l'intéressé une occasion de se prononcer sur la remise envisagée. 
On peut se demander en l'occurrence si le recourant, qui a été entendu en Norvège le 5 juillet 2006 en présence de son avocat à propos de la décision d'extension, et qui a reçu notification de la décision attaquée (laquelle contient une liste détaillée des pièces concernées par la remise), a entrepris toutes les démarches utiles afin de faire valoir ses objections quant aux pièces à remettre. Quoiqu'il en soit, dans le cadre de la procédure de recours, l'avocat du recourant en Suisse s'est vu remettre le dossier de la procédure, ainsi que l'intégralité des pièces visées par la décision attaquée. Il a ensuite eu l'occasion de se déterminer à ce propos par voie de réplique. Par conséquent, une éventuelle violation du droit d'être entendu a pu sur ce point également être réparée en instance de recours. Le recourant invoque aussi à ce propos - par le biais de ses avocats en Norvège - l'art. 6 CEDH. Outre que cette disposition n'est pas applicable à la procédure d'entraide judiciaire et ne confère notamment pas de droit plus étendu que celui qui découle de l'art. 29 al. 2 Cst., le grief devrait être rejeté dans la même mesure puisque l'avocat du recourant en Suisse a pu accéder au dossier et présenter ses observations. 
Cela étant, alors qu'une occasion concrète lui a été donnée de s'opposer à la transmission de pièces déterminées au motif qu'elles seraient sans rapport avec l'objet de la demande d'extension, le recourant n'a pas fourni la moindre indication de ce genre dans sa réplique. A défaut de toute argumentation contraire du recourant, rien ne permet de douter que le tri préalable effectué, selon l'OFJ, par les autorités tessinoises, ait permis d'écarter les documents sans pertinence pour la procédure étrangère. Le grief doit par conséquent également être écarté sur le fond. 
3. 
Le recourant estime que la demande d'extension et ses compléments, de même que la décision de l'OFJ, ne comporteraient pas d'indications suffisantes pour admettre la qualification d'escroquerie en droit suisse. La promesse d'un rendement compris entre 300 et 700% devait nécessairement susciter des doutes de la part des victimes avec lesquelles le recourant n'avait pas de rapport de confiance particulier. La qualification d'abus de confiance ne pourrait pas non plus être retenue, s'agissant d'investissements à haut risque dans un contexte purement civil. Dans le mémoire de ses avocats norvégiens, le recourant estime qu'un mandat d'arrêt n'aurait pas été produit par l'autorité requérante et que la procédure suivie en Norvège serait irrégulière. 
3.1 Selon l'art. 14 al. 1 let. a CEExtr., la demande d'extension de l'extradition doit être accompagnée notamment des pièces prévues à l'art. 12 CEExtr., soit en particulier le mandat d'arrêt, un exposé des faits indiquant le temps et le lieu de commission de l'infraction, ainsi que les dispositions légales applicables. Ces exigences, qui sont reprises aux art. 28 al. 3 et 41 EIMP, sont destinées à permettre à l'Etat requis d'examiner si les conditions de fond posées par la Convention sont réalisées (double incrimination - art. 2 -, nature du délit - art. 3-5 -, lieu de perpétration - art. 7 -, respect des principes ne bis in idem - art. 8 et 9 - et de la spécialité - art. 14 -, etc.). 
3.2 En l'espèce, l'autorité requérante a fourni un exposé complet sur l'objet de la demande, les faits reprochés et leur qualification juridique. Elle a également produit un acte d'accusation complémentaire établi le 20 juin 2006 par le Parquet d'Økokrim. Ce document mentionne quatre chefs d'accusation. Le premier concerne des escroqueries au préjudice d'investisseurs aux Etats-Unis, en Norvège, en Suisse et en Italie, auxquels il promettait des rendements de l'ordre de 300 à 700% par an, sachant que cela n'était pas réalisable. Le chef d'accusation I a) est l'infraction pour laquelle l'extradition a été initialement accordée. Il en va de même du chef d'accusation II, qui concerne la demande faite à un témoin de ne pas se présenter. Le chef d'accusation III concerne des abus de confiance commis sur une période de quinze ans pour un total de 3 millions de couronnes norvégiennes, au préjudice d'un couple lui ayant prêté de l'argent. Le chef d'accusation IV concerne l'usage de faux documents, utilisés en rapport avec les escroqueries afin de faire croire notamment aux investisseurs que des banques avaient opérés de gros virements en faveur de A.________, et que celui-ci disposait de fonds et de créances importants. L'autorité requérante a enfin produit un mandat d'arrêt rendu le 18 août 2006 à l'encontre du recourant, en raison du risque de fuite et de destruction de preuves. 
Outre que ce dernier document constitue un titre d'arrestation suffisant, les actes produits par l'autorité requérante comportent l'indication précise des faits reprochés et des dispositions légales applicables. Le grief tombe donc à faux, de même que l'argumentation à décharge fourni par les avocats norvégiens du recourant. Selon la pratique constante, une telle argumentation n'a pas sa place dans la procédure d'extradition (ATF 132 II 81 consid. 2.1 p. 85 et les arrêts cités). Quant à la régularité, mise en doute par les avocats norvégiens du recourant, de la procédure ayant conduit à la demande d'extension de l'extradition, elle n'a pas non plus à être examinée dans le cadre de la procédure menée en Suisse. La question devra être soumise, le cas échéant, aux autorités norvégiennes. 
3.3 Le recourant conteste également en vain la réalisation de la condition de double incrimination. Cette question doit en effet être examinée sur le vu des faits exposés par l'autorité requérante. Or, celle-ci affirme qu'en dépit du caractère manifestement exagéré des bénéfices promis aux investisseurs, le recourant avait su créer un rapport de confiance, donnant en outre l'impression qu'il était capable d'obtenir de tels profits sur les marchés mobiliers. Dans certains cas, il avait présenté de faux documents propres à démontrer sa capacité financière importante et à rassurer sur ses compétences dans le domaine des investissements. Or, selon la jurisprudence, la condition de l'astuce propre à l'escroquerie est réalisée lorsque l'auteur fait usage de titres falsifiés ou obtenus sans droit ou de documents mensongers, ou lorsqu'il prévoit que la victime renoncera à des vérifications en raison d'un rapport de confiance particulier (ATF 128 IV 18 consid. 3a p. 20; 122 II 422 consid. 3a p. 426 s.; 122 IV 246 consid. 3a p. 247 s. et les références citées). Tel est bien le cas en l'espèce. La qualification d'abus de confiance peut elle aussi être retenue, indépendamment des risques que présentaient les investissements et du caractère prétendument civil du litige. Enfin, l'existence et l'usage de faux documents sont exposés de manière suffisante par l'autorité requérante: le recourant se serait notamment servi de faux documents bancaires pour attester de sa capacité financière. La punissabilité de ces faits en droit suisse ne fait dès lors pas de doute. 
3.4 Pour le surplus, le recourant se prévaut en vain du principe de la spécialité (art. 14 CEExtr.), puisque la procédure prévue à l'art. 39 EIMP a précisément pour objet d'y déroger, comme le prévoit l'art. 14 al. 1 let. a CEExtr
4. 
A titre subsidiaire, le recourant conteste l'existence d'un intérêt actuel à l'extension de l'extradition: la demande d'extension avait été formée dans la perspective de débats fixés au 2 octobre 2006. Elle n'aurait donc plus d'objet après cette date. Si, en revanche, une nouvelle instruction devait avoir été ouverte, le recourant renouvelle sa demande d'être jugé en Suisse, lieu où il résidait au moment des faits et où auraient été commises les infractions. 
4.1 L'autorité requérante a été interpellée par l'OFJ le 29 novembre 2006. Dans sa réponse, du 1er décembre 2006, elle indique que sa demande d'extension est toujours d'actualité: les débats du 2 octobre 2006 n'avaient porté que sur les faits pour lesquels l'extradition avait déjà été accordée, le droit de procédure permettant de statuer en plusieurs débats. Les autorités norvégiennes restent donc dans l'attente de la décision de la Suisse afin de pouvoir poursuivre le recourant pour les autres chefs d'accusation figurant dans l'acte du 20 juin 2006. La demande d'extension conserve donc tout son objet. 
4.2 Par ailleurs, le recourant ne conteste pas que les autorités norvégiennes sont bien compétentes - notamment au regard de sa propre nationalité norvégienne - pour connaître des infractions qui lui sont reprochées. Les autorités répressives tessinoises ayant fait savoir à l'OFJ qu'elles renonçaient à toute poursuite contre le recourant, il n'existe aucun motif, de droit conventionnel ou de droit fédéral, pour refuser l'extension requise, ce d'autant qu'il est maintenant hautement improbable que le recourant, de nationalité norvégienne, puisse être remis à la Suisse pour y être jugé. 
5. 
Sur le vu de ce qui précède, le recours de droit administratif doit être rejeté. Conformément à l'art. 156 al. 1 OJ, un émolument judiciaire est mis à la charge du recourant qui succombe. 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
1. 
Le recours est rejeté. 
2. 
Un émolument judiciaire de 3000 fr. est mis à la charge recourant. 
3. 
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire en Suisse du recourant et à l'Office fédéral de la justice (B 162 748). 
Lausanne, le 4 avril 2007 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
Le président: Le greffier: