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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
6B_1360/2016  
   
   
 
 
 
Arrêt du 10 novembre 2017  
 
Cour de droit pénal  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Denys, Président, 
Oberholzer et Boinay, Juge suppléant. 
Greffier : M. Graa. 
 
Participants à la procédure 
A.________ SA, 
représentée par Maître Olivier Francioli et Maître Nicolas Rouiller, avocats, 
recourante, 
 
contre  
 
Ministère public de la République et canton de Genève, 
intimé. 
 
Objet 
Indemnité (art. 434 CCP); droit d'être entendu, 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre pénale de recours, du 2 novembre 2016 (ACPR/700/2016 (P/10759/2014)). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. Par ordonnance du 22 juillet 2014, le Ministère public de la République et canton de Genève a ordonné le séquestre, dans le cadre d'une procédure pénale à laquelle étaient parties diverses personnes et sociétés, des avoirs de la société tierce A.________ SA, société panaméenne (ci-après : A.________), auprès de la Banque B.________ à Bâle (ci-après : B.________).  
 
Par arrêt du 8 octobre 2014, la Chambre pénale de recours de la Cour de justice de la République et canton de Genève a partiellement admis le recours de A.________ à l'encontre de cette décision. Par courrier du 14 octobre 2014, le ministère public a informé B.________ que le séquestre était limité à xxx GBP et yyy euros. 
 
A.b. Le 5 décembre 2014, l'ayant droit économique de A.________ a été entendu en qualité de personne appelée à donner des renseignements par le ministère public.  
 
Le 31 décembre 2014, A.________ a requis la levée du séquestre. Elle a complété sa requête les 4 et 24 février 2015. 
 
Par ordonnance du 13 mars 2015, le ministère public a levé le séquestre. 
 
A.c. Par ordonnance du 8 mai 2015, il a prononcé le classement de la poursuite pénale à l'encontre des personnes et sociétés précitées.  
 
A.d. Le 11 mai 2015, A.________, à qui le classement précité n'apparaît pas avoir été communiqué, a avisé le ministère public qu'elle entendait réclamer une indemnité au sens de l'art. 434 CPP et lui a demandé un délai pour la chiffrer et la motiver.  
 
Par décision du 12 mai 2015, le ministère public a rejeté la demande d'indemnisation de A.________, estimant que cette société était un tiers saisi au sens de l'art. 105 al. 1 let. f CPP, qu'elle avait obtenu la libération de ses avoirs et n'avait donc pas subi de dommage. 
 
Par arrêt du 26 août 2015, la Chambre pénale de recours a partiellement admis le recours formé par A.________ contre cette décision, a annulé celle-ci et a renvoyé la cause au ministère public pour nouvelle décision au sens des considérants. En substance, la Chambre pénale de recours a admis que le coût de l'intervention des avocats de A.________ lié à la requête de levée de séquestre du 31 octobre 2014 représentait un dommage pour cette société, qui devait être indemnisée en vertu de l'art. 434 CPP. Elle a précisé que A.________ n'aurait pas droit à l'indemnisation intégrale de ses frais de défense, mais uniquement à une juste compensation au sens de l'art. 434 al. 1 CPP. Elle a en revanche refusé l'indemnisation de tout autre frais, notamment l'activité de défense liée au dépôt du recours contre l'ordonnance de séquestre du 22 juillet 2014, les frais de gestion "supplémentaires" pour la période du séquestre, l'intervention des avocats de A.________ en vue de l'audition de l'ayant droit économique de cette société et l'activité de défense pour la procédure de recours ayant abouti à l'arrêt du 26 août 2015. 
 
Par arrêt du 14 juin 2016 (6B_1007/2015), le Tribunal fédéral a déclaré irrecevable un recours en matière pénale formé par A.________ contre le jugement du 26 août 2015, dès lors que celui-ci ne constituait pas une décision susceptible de recours, faute d'être une décision finale. 
 
A.e. Statuant à nouveau, le ministère public a, le 26 août 2016, rendu une décision par laquelle il a alloué à A.________ un montant de 11'664 fr., TVA comprise, à titre d'indemnisation selon l'art. 434 CPP.  
 
B.   
Par arrêt du 2 novembre 2016, la Chambre pénale de recours a rejeté le recours interjeté par A.________ contre cette décision et a condamné celle-ci aux frais de la procédure de recours. 
 
La cour cantonale n'est pas entrée en matière sur les griefs soulevés par A.________ contre les points déjà tranchés dans son arrêt du 26 août 2015, estimant qu'en cas de désaccord, cette société pouvait s'en prendre à celui-ci directement dans le recours dirigé contre l'arrêt à rendre (arrêt ch. 2.2). Pour le surplus, elle a retenu que A.________ n'avait pas droit à une indemnisation intégrale, mais bien à la "juste compensation" du dommage comme le prévoit l'art. 434 al. 1 CPP. Elle a considéré que, même calculé au tarif horaire des avocats genevois, les 181.4 heures d'activité d'avocats réclamées conduisaient à une indemnité excessive, qui n'était pas non plus justifiée par le volume de travail et la complexité du cas. Concernant les frais de traduction, respectivement d'étude des documents, par des juristes russophones, la cour cantonale a confirmé l'appréciation du ministère public selon laquelle 6 heures de travail à 150 fr. l'heure correspondaient au travail effectué et représentaient une indemnité suffisante. 
 
C.   
A.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral en concluant, avec suite de frais et dépens, principalement à la réforme de l'arrêt du 2 novembre 2016, à celle de l'arrêt incident rendu le 26 août 2015 et à celle de l'arrêt du 8 octobre 2014 - statuant sur un recours contre le prononcé du séquestre -, toutes ces décisions émanant de la même cour cantonale. Elle demande qu'une indemnité globale, pas inférieure à 161'551 fr. 14, TVA incluse, lui soit allouée. Subsidiairement, elle conclut à l'annulation des trois arrêts précités et au renvoi de la cause à l'autorité précédente, respectivement au ministère public. 
 
D.   
Invités à se déterminer, le ministère public a conclu au rejet du recours en se référant aux arrêts des 26 août 2015 et 2 novembre 2016 ainsi qu'à sa décision du 26 août 2016, tandis que la cour cantonale a indiqué se référer aux considérants de son arrêt. Ces déterminations ont été communiquées à la recourante, qui a présenté des observations à cet égard. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 142 IV 196 consid. 1 p. 197). 
 
1.1. Les recours au Tribunal fédéral sont recevables contre les décisions finales (art. 90 LTF), les décisions partielles au sens de l'art. 91 LTF et les décisions préjudicielles ou incidentes aux conditions prévues par les art. 92 et 93 LTF. La jurisprudence (ATF 128 I 129 consid. 1 p. 131) a précisé que le maintien du séquestre constituait une décision incidente susceptible de recours, car elle pouvait causer un préjudice irréparable.  
 
1.2. La recourante conteste l'arrêt du 8 octobre 2014 "en tant que besoin" dans la mesure où la cour cantonale n'avait pas statué sur la question des dépens alors que l'intéressée avait obtenu partiellement gain de cause.  
 
La question de la prise en compte des frais relatifs à cette procédure dans le cadre de l'indemnisation fondée sur l'art. 434 CPP sera examinée ci-après (cf. consid. 3 infra). 
 
1.3. Par arrêt du 26 août 2015, la cour cantonale a considéré que seul le coût de l'intervention liée à la requête de levée de séquestre représentait, pour la recourante, un dommage justifiant une indemnisation. Pour le surplus, elle a écarté les autres chefs de réclamation et a refusé une indemnisation des dépens pour la procédure de recours. Elle a renvoyé la cause au ministère public pour fixation de l'indemnité. Saisi d'un recours, le Tribunal fédéral a, par arrêt du 14 juin 2016 (6B_1007/2015), constaté que cette décision n'avait pas un caractère final, car elle n'était pas de nature à causer à la recourante un préjudice irréparable.  
 
Statuant après renvoi, le ministère public n'a pas alloué les indemnités refusées par la cour cantonale dans son arrêt du 26 août 2015 et a fixé l'indemnité qu'il estimait être due. Saisie à nouveau, l'autorité précédente a rendu l'arrêt du 2 novembre 2016, dans lequel elle a refusé de réexaminer les postes du dommage et les indemnités de dépens ayant fait l'objet d'un refus dans l'arrêt du 26 août 2015. Elle a uniquement statué sur l'indemnité octroyée par le ministère public dans sa décision du 26 août 2016. 
 
La recourante peut donc faire valoir ses arguments contre les deux arrêts cantonaux précités. Le recours est dès lors recevable contre lesdites décisions. 
 
2.   
L'art. 434 CPP prévoit que les tiers qui, par le fait de procédure ou du fait de l'aide apportée aux autorités pénales, subissent un dommage ont droit à une juste compensation si le dommage n'est pas couvert d'une autre manière, ainsi qu'à une réparation du tort moral. 
 
La notion de juste compensation du dommage se réfère aux principes généraux du droit de la responsabilité civile, à l'instar de ce qui prévaut pour l'indemnisation du prévenu (art. 429 ss CPP). Il s'agit en principe d'une pleine indemnité pour les inconvénients subis. Le dommage susceptible d'être compensé consiste dans une diminution du patrimoine du tiers lésé, qui pourra être matérielle, économique ou encore provoquée par les frais de défense et de procédure engagés pour faire valoir ses droits (WEHRENBERG/FRANK, in Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung/Jugendstrafprozessordnung, 2e éd., 2014, n° 10 ad art. 434 CPP; MIZEL/RÉTORNAZ, in Commentaire romand, Code de procédure pénale, 2011, nos 8 ss ad art. 434 CPP). 
 
Selon le message du Conseil fédéral concernant l'indemnité due au prévenu, l'Etat ne prend en charge les frais de défense que si l'assistance d'un avocat était nécessaire compte tenu de la complexité de l'affaire en fait ou en droit et que le volume de travail et donc les honoraires étaient ainsi justifiés (FF 2006 1313 ch. 2.10.3.1; cf. ATF 142 IV 45 consid. 2.1 p. 47). L'indemnisation des dépenses du prévenu pour un avocat couvre les honoraires, à la condition que le recours à celui-ci procède d'un exercice raisonnable des droits de procédure. Ces principes sont applicables par analogie à la fixation de l'indemnité au tiers lésé. 
 
A l'instar de ce qui a été jugé en application de l'art. 429 al. 1 let. a CPP, le fait de savoir si le recours à un avocat procède d'un exercice raisonnable des droits de procédure et si, par conséquent, une indemnité pour les frais de défense peut être allouée, est une question de droit fédéral que le Tribunal fédéral revoit librement. Il s'impose toutefois une certaine retenue lors de l'examen de l'évaluation faite par l'autorité précédente, particulièrement de la détermination, dans le cas concret, des dépenses qui apparaissent raisonnables (ATF 142 IV 163 consid. 3.2.1 p. 169; 138 IV 197 consid. 2.3.6 p. 204). 
 
3.   
La cour cantonale a refusé de prendre en compte, pour l'indemnisation de l'art. 434 CPP, les honoraires liés à l'activité déployée par les mandataires de la recourante dans la procédure de recours ayant conduit à la levée partielle du séquestre, estimant qu'il s'agissait d'une procédure séparée, dans laquelle la recourante n'avait pas obtenu de dépens bien qu'elle en eût demandés. La cour cantonale a considéré que la recourante aurait dû recourir contre cette décision si elle avait voulu contester l'absence d'octroi de dépens. 
 
3.1. La recourante conteste cette appréciation. Elle soutient que la loi n'exigerait pas impérativement que l'indemnité pour une procédure de recours incidente soit fixée par l'autorité de recours, mais autoriserait au contraire celle-ci à renvoyer cette question pour être tranchée dans la décision finale. De ce fait, son recours contre l'ordonnance de séquestre n'ayant été que partiellement admis, l'autorité de recours pouvait ne pas se prononcer et attendre de fixer ces frais dans une décision finale après qu'il ait été constaté que l'ensemble du séquestre était infondé. De plus, l'autorité de recours ne s'étant pas du tout exprimée sur la question des frais, la recourante n'aurait pu qu'en déduire que celle-ci renvoyait l'indemnisation des frais de dépens à être tranchée dans la décision finale. A tout le moins, la recourante aurait pu de bonne foi interpréter l'arrêt du 8 octobre 2014 dans ce sens, puisqu'elle avait pris des conclusions tendant à l'octroi de dépens et que celles-ci n'avaient pas été traitées. Enfin, dans la mesure où cet arrêt devait être interprété en ce sens, il ne constituait pas, faute de préjudice irréparable, une décision susceptible de recours.  
 
3.2. Aux termes de l'art. 436 al. 1 CPP, les prétentions en indemnités et en réparation du tort moral dans la procédure de recours sont régies par les art. 429 à 434 CPP. Si l'autorité de recours annule une décision conformément à l'art. 409 CPP, les parties ont droit à une juste indemnité pour les dépenses occasionnées par la procédure de recours et par la partie annulée de la procédure de première instance (art. 436 al. 3 CPP). L'art. 436 CPP règle les prétentions en indemnités et en réparation du tort moral pour la procédure de recours. Elle vise la procédure de recours en général, à savoir les procédures d'appel et de recours (au sens des art. 393 ss CPP). Le renvoi de l'art. 436 al. 1 CPP aux art. 429 à 434 CPP ne signifie pas que les indemnités doivent se déterminer par rapport à l'issue de la procédure de première instance. Au contraire, elles doivent être fixées séparément pour chaque phase de la procédure, indépendamment de la procédure de première instance. Le résultat de la procédure de recours est déterminant (ATF 142 IV 163 consid. 3.2.2 p. 169 s.).  
 
L'autorité de recours a la possibilité, mais non l'obligation de statuer sur l'indemnité visée par l'art. 436 CPP, à l'issue de la procédure de recours (cf. art. 421 al. 2 CPP). Y renoncer conduit toutefois à un résultat peu adéquat, à savoir celui de laisser l'autorité de première instance au fond décider du principe et de la quotité d'une indemnité fondée uniquement sur le résultat de la procédure de recours (arrêt 6B_1324/2015 du 23 novembre 2015 consid. 2.3). 
 
3.3. En l'espèce, dès lors que la recourante avait obtenu partiellement gain de cause dans la procédure de recours en question - seul un tiers des frais ayant été mis à sa charge -, il se justifiait de lui allouer une indemnité. La cour cantonale a ainsi violé l'art. 436 al. 3 CPP en lui refusant toute indemnité. Le recours doit être admis sur ce point et la cause renvoyée à l'autorité précédente afin qu'elle statue sur le montant de l'indemnité due à la recourante.  
 
4.   
La cour cantonale a refusé l'indemnisation des honoraires liés à la préparation de l'audition de l'ayant droit économique de la recourante par le ministère public, estimant que celle-ci n'avait jamais été mise en cause par les plaignants et que l'ayant droit économique n'avait été auditionné qu'à titre de personne appelée à donner des renseignements, ce qui ne nécessitait pas l'intervention d'un avocat. 
 
4.1. La recourante conteste cette appréciation. Elle estime qu'au vu de sa qualité de société de domicile, son ayant droit économique devrait être considéré comme un organe de fait, puisque c'est lui qui détermine les décisions revenant à la direction et qui connaît le mieux ses opérations. Elle constate que cette situation n'a pas échappé au ministère public, qui l'a citée à comparaître à l'audience du 5 décembre 2014, en qualité de tiers saisi. De plus, elle conteste le fait que le concours d'un avocat pour préparer l'audition et l'assister lors de celle-ci n'ait pas été nécessaire. Selon la recourante, le plaignant, C.________, aurait informé le ministère public de sa volonté de compléter sa plainte et de l'étendre à l'ayant droit économique, raison pour laquelle la présence d'un avocat aurait été nécessaire.  
 
4.2. En l'espèce, il ressort clairement du procès-verbal de l'audience du 5 décembre 2014 tenue devant le ministère public que l'ayant droit économique de la recourante a été auditionné en tant que tiers saisi et personne appelée à donner des renseignements. L'essentiel de l'audition a d'ailleurs porté sur les relations entretenues par l'ayant droit économique avec le prévenu et le plaignant, en rapport avec la procédure au fond. Il résulte de ce qui précède que ce n'est pas en sa qualité d'"organe" de la recourante que son ayant droit économique a été entendu comme personne appelée à donner des renseignements.  
 
4.3. L'audition d'une personne en qualité de tiers saisi doit pouvoir faire l'objet d'une indemnisation au sens de l'art. 434 CPP, si les conditions d'application en sont données. S'agissant de l'audition en qualité de personne appelée à donner des renseignements, si tant est que l'individu entendu puisse prétendre à une indemnisation, celle-ci ne peut être réclamée que par la personne concernée. Dans le présent cas, l'ayant droit économique de la recourante n'a fait aucune demande d'indemnisation pour lui-même. La recourante ne peut donc pas faire valoir l'indemnité à laquelle aurait pu prétendre son ayant droit économique personnellement. La demande sur ce point a donc été rejetée à juste titre.  
 
4.4. Reste donc à examiner si l'intervention d'un avocat était nécessaire pour préparer l'audition de l'ayant droit économique de la recourante en qualité de tiers saisi et pour l'assister lors de celle-ci.  
 
A la suite de l'arrêt de l'autorité de recours du 8 octobre 2014, la recourante n'était plus concernée, en sa qualité de tiers saisi, que par deux comptes comprenant respectivement xxx GBP et yyy euros. De plus, le séquestre résultait du fait que ces montants pouvaient provenir d'infractions et avoir été blanchis par l'intermédiaire de la recourante. 
 
Dans cette mesure, l'intervention d'un mandataire pouvait s'avérer nécessaire, compte tenu des sommes en jeu et des problèmes juridiques liés à l'implication de la recourante dans une procédure pénale à caractère international concernant des faits peu clairs. 
 
Le recours doit donc être admis sur ce point et l'affaire renvoyée à la cour cantonale pour qu'elle évalue le travail raisonnablement admissible à ce stade de la procédure pour sauvegarder les droits de la recourante en sa qualité de tiers saisi. 
 
5.   
Par arrêt du 26 août 2015, la cour cantonale a partiellement admis le recours de la recourante, mais a refusé de lui allouer des dépens pour cette procédure. Elle a tout d'abord considéré que celui qui revêt la qualité de partie en instance de recours, mais pas dans la procédure pénale elle-même, ne peut pas bénéficier d'une indemnité pour ses dépenses en procédure de recours, faute de base légale, sauf à considérer cette indemnité comme faisant partie du dommage au sens de l'art. 434 CPP ou dans le cadre de l'art. 436 al. 3 CPP. La cour cantonale n'a pas examiné ces deux éventualités, estimant qu'en tout état de cause la recourante n'avait ni chiffré ni justifié sa prétention comme elle en avait l'obligation en application de l'art. 433 al. 2 CPP, par renvoi de l'art. 434 al. 1 in fine CPP. 
 
5.1. La recourante conteste cette appréciation. Elle estime avoir eu la qualité de partie dans la procédure, dans la mesure nécessaire pour faire valoir ses droits. Concernant le fait de ne pas avoir chiffré et justifié sa prétention, la recourante considère que la cour cantonale avait l'obligation de la rendre attentive au fait qu'un jugement serait rendu et qu'elle devait présenter et justifier ses prétentions en matière de dépens.  
 
 
5.2.  
 
5.2.1. L'art. 105 al. 1 let. f CPP dispose que les tiers touchés par des actes de procédure participent également à la procédure. L'al. 2 de cette disposition précise pour sa part que, lorsque des participants à la procédure visés à l'al. 1 sont directement touchés dans leurs droits, la qualité de partie leur est reconnue dans la mesure nécessaire à la sauvegarde de leurs intérêts.  
 
En sa qualité de tiers saisi, la recourante était un participant à la procédure au sens de l'art. 105 al. 1 let. f CPP et devait donc être considérée comme partie pour pouvoir sauvegarder ses intérêts, ce qu'elle a fait, en l'espèce, en réclamant une indemnité au sens de l'art. 434 CPP
 
5.2.2. Aux termes de l'art. 436 al. 1 CPP, les prétentions en indemnités et en réparation du tort moral dans la procédure de recours sont régies par les art. 429 à 434 CPP.  
 
L'art. 433 al. 2 CPP, applicable par renvoi de l'art. 434 al. 1 in fine CPP, impose à la partie plaignante de chiffrer et de justifier ses prétentions. Cette règle s'explique par le fait que la maxime d'instruction ne s'applique pas, la partie plaignante devant demeurer active et demander elle-même une indemnisation, sous peine de péremption; nonobstant l'absence de maxime d'instruction, le juge doit néanmoins rendre attentive la partie plaignante à son droit d'obtenir le cas échéant une indemnité, comme à son devoir de chiffrer et documenter celle-ci (arrêts 6B_233/2016 du 30 décembre 2016 consid. 2.1; 6B_965/2013 du 3 décembre 2013 consid. 3.1.2 et les références citées). 
 
En l'espèce, la recourante a conclu, dans son mémoire de recours du 26 mai 2015, au versement d'une indemnité de dépens pour la procédure devant la cour cantonale. Celle-ci a refusé d'allouer des dépens, sans avoir attiré l'attention de la recourante sur son obligation de chiffrer et de justifier l'indemnité qu'elle réclamait. Agissant de la sorte, la cour cantonale a violé l'art. 433 al. 2 CPP
 
La recourante ayant la qualité de partie à la procédure, le recours doit donc être admis sur ce point et l'affaire renvoyée à l'autorité précédente afin qu'elle se prononce sur l'indemnité de dépens à allouer à l'intéressée en rapport avec la décision du 26 août 2015. 
 
 
6.   
Statuant sur la demande d'indemnisation des honoraires d'avocat relatifs à la procédure de levée du séquestre, la cour cantonale a contesté le droit à une indemnisation intégrale du dommage, en se référant à l'art. 434 CPP qui évoque une "juste indemnisation". Après avoir retenu que le dommage de l'art. 434 CPP était le même que celui de l'art. 429 al. 1 let. a CPP, elle a constaté que le montant de 90'700 fr. réclamé à titre d'honoraires d'avocat ne pouvait pas apparaître comme raisonnable, ni en raison de la complexité du cas ni eu égard au volume de travail. Partant de ce constat, elle a confirmé l'appréciation du ministère public, selon laquelle 30 heures de travail d'avocats et de traducteurs avaient été nécessaires pour préparer les écritures - soit 45 pages - faites dans le cadre de cette procédure. 
 
6.1. La recourante se plaint d'une violation de son droit d'être entendue (art. 29 al. 2 Cst. et 6 CEDH), en raison du manque de motivation tant de la décision du ministère public que de celle de la cour cantonale. Selon la recourante, il n'aurait pas été possible de savoir quelles opérations avaient été considérées comme inutiles ou superflues et donc non rémunérées, ce qui aurait rendu impossible la motivation de sa contestation. Elle a confirmé sa liste d'opérations faisant état d'un total de 447.9 heures, dont 319.3 heures pour les seules opérations en lien avec "la requête de séquestre" (181.4 heures de travail d'avocat et 137.9 heures de travail de juriste).  
 
6.2. En matière de dépens, la garantie du droit d'être entendu implique que lorsque le juge statue sur la base d'une liste de frais, celui-ci doit, s'il entend s'en écarter, au moins indiquer brièvement les raisons pour lesquelles il tient certaines prétentions pour injustifiées, afin que son destinataire puisse attaquer la décision en connaissance de cause (cf. arrêts 6B_1251/2016 du 19 juillet 2017 consid. 3.1; 6B_796/2016 du 15 mai 2017 consid. 1 et les références citées). Cette jurisprudence vaut pour la fixation d'une indemnité selon l'art. 434 CPP lorsqu'une liste d'opérations détaillée est présentée.  
 
En l'espèce, il y a lieu de constater que la détermination des frais raisonnables de défense faite par la cour cantonale, sur la base des heures supposées nécessaires pour rédiger les pièces de procédure liées à la requête de levée du séquestre, ne constitue pas une motivation suffisante en présence d'une liste d'opérations détaillée. En effet, la cour cantonale n'a pas précisé sur quelle base elle avait évalué le temps de travail. La référence à la durée de la procédure pénale elle-même n'est pas un élément adéquat pour déterminer le nombre d'heures passé par un avocat sur un dossier. Il peut très bien s'agir d'une activité intense sur une courte période. Quant à l'existence de ramifications internationales, elle ne peut pas être niée. La procédure concernait des fonds placés en Suisse par une société domiciliée au Panama, propriété d'une citoyenne russe. Celle-ci était suspectée de blanchiment d'argent, par l'intermédiaire de la recourante dont elle est l'ayant droit économique. Dans la procédure en levée du séquestre, la recourante, dont les fonds avaient été bloqués sur la base d'un soupçon de blanchiment, devait établir non seulement la provenance de l'argent se trouvant sur les comptes séquestrés, mais aussi le fait que cet argent ne provenait pas du blanchiment. 
 
L'affaire doit être renvoyée à la cour cantonale qui devra évaluer, sur la base de la liste des opérations produite et en fonction des éléments évoqués ci-dessus, combien d'heures travail, effectuées par l'avocat chef d'étude et par l'avocat collaborateur, étaient raisonnables pour assurer la défense des droits de la recourante dans la procédure en levée du séquestre. 
 
6.3. La cour cantonale a fixé les tarifs horaires à 450 fr. pour l'avocat chef d'étude et à 350 fr. pour l'avocat collaborateur. Pour ce faire, elle a fait application du tarif usuellement admis à Genève.  
 
La recourante estime que ses avocats auraient dû être rémunérés au tarif horaire de 500 fr., au vu de la complexité du dossier, de l'importance des enjeux, de l'urgence dans laquelle il a fallu agir, de la situation du client et du résultat obtenu rapidement. 
 
A défaut d'une réglementation adoptant un tarif spécifique pour le canton de Genève, il y a lieu de prendre en compte le taux horaire usuel. Le Tribunal fédéral ne revoit cet aspect que sous l'angle restreint de l'arbitraire (cf. arrêt 6B_875/2013 du 7 avril 2014 consid. 6.2). 
 
La recourante ne prétend pas que les taux horaires retenus par la cour cantonale ne seraient pas ceux usuellement appliqués. Elle invoque des éléments qui sont, selon elle, de nature à augmenter ces taux usuels, sans préciser en quoi les taux appliqués seraient arbitraires. Faute de motivation topique, ce grief n'est pas recevable. 
 
6.4. La cour cantonale a estimé que seuls les documents en rapport avec les trois versements reçus de D.________ pouvaient être pertinents pour se déterminer sur la levée du séquestre. Dans ce cadre, elle a constaté que la recourante n'avait produit qu'une expertise immobilière, écrite en russe, et qu'elle avait offert de la traduire, cette traduction n'ayant toutefois jamais été produite. Elle a considéré que les autres documents traduits étaient sans lien avec la justification des trois versements et avaient donc été produits de manière superflue. Compte tenu de ces éléments, la cour cantonale a admis, à l'instar du ministère public, la rétribution des juristes russophones à raison de 6 heures à 150 fr. l'heure pour le temps consacré à des analyses et des entretiens.  
 
La recourante conteste que la cour cantonale puisse limiter l'indemnisation aux opérations ayant exclusivement trait à la justification de ces trois versements. Elle affirme que les pièces traduites auraient permis de montrer qu'E.________ n'avait commis aucune infraction et que c'est sur cette base que le ministère public aurait décidé de lever le séquestre. 
 
Cette argumentation ne saurait être suivie. En effet, il n'appartenait pas à la recourante, en sa qualité de tiers saisi, de contribuer à prouver l'absence de charges contre E.________. La recourante était uniquement concernée par le blanchiment, ce qu'elle avait d'ailleurs admis en écrivant dans son mémoire de recours du 4 août 2014, concernant l'ordonnance de séquestre du 22 juillet 2014, qu'elle était en mesure "de prouver que le transfert litigieux [était] parfaitement licite, tant du point de vue de sa cause que de l'origine des fonds" (art. 105 al. 2 LTF; recours du 4 août 2014, ch. 36 p. 9). Il apparaît donc que l'indemnisation de la recourante doit couvrir les dépenses relatives à cette partie de la procédure, qui était la seule à la toucher directement. 
 
La recourante ne prétend ni ne démontre que d'autres traductions auraient été faites en rapport avec cette partie de la procédure. Elle n'a donc pas établi que la cour cantonale aurait fixé de façon arbitraire l'indemnisation des juristes russophones. Ce grief doit être rejeté. 
 
7.   
Dans la mesure où le dossier de la cause doit être retourné à la cour cantonale pour nouvelle décision (cf. consid. 3.3, 4.4, 5.2.2 et 6.2 supra), il n'y a pas lieu de se prononcer sur les frais et dépens de l'arrêt attaqué. Cette question sera réexaminée par la cour cantonale en fonction du résultat auquel elle parviendra. 
 
 
8.   
Le recours doit être partiellement admis dans la mesure où il est recevable. La recourante, qui n'obtient que partiellement gain de cause, doit supporter une partie des frais de la cause (art. 66 al. 1 LTF). Elle peut prétendre à des dépens réduits à la charge de la République et canton de Genève (art. 68 al. 1 LTF), laquelle est dispensée de tout frais (art. 66 al. 4 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est partiellement admis dans la mesure où il est recevable. L'arrêt attaqué est annulé et la cause est renvoyée à l'autorité cantonale pour nouvelle décision. 
 
2.   
Une partie des frais judiciaires, arrêtée à 1'000 fr., est mise à la charge de la recourante. 
 
3.   
La République et canton de Genève versera à la recourante une indemnité de 2'000 fr. à titre de dépens pour la procédure devant le Tribunal fédéral. 
 
4.   
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre pénale de recours. 
 
 
Lausanne, le 10 novembre 2017 
 
Au nom de la Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Denys 
 
Le Greffier : Graa