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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
4C.368/2005 
4C.370/2005/ech 
 
Séance du 26 septembre 2006 
Ire Cour civile 
 
Composition 
MM. et Mmes les Juges Corboz, président, Klett, Rottenberg Liatowitsch, Kiss et Chaix, juge suppléant. 
Greffier: M. Carruzzo. 
 
Parties 
Cause 4C.368/2005 
 
X.________, défendeur et recourant, représenté par Me Christophe Piguet, 
 
contre 
 
Y.________ SA, appelée en cause et intimée, représentée par Me Baptiste Rusconi. 
 
Cause 4C.370/2005 
 
Y.________ SA, appelée en cause, recourante et 
intimée au recours joint, représentée par Me Baptiste 
Rusconi. 
 
contre 
 
X.________, défendeur et intimé, représenté par Me Christophe Piguet, 
 
et 
 
Z.________ SA, défenderesse, intimée et recourante par voie de jonction, représentée par Me Jean-Christophe Diserens, 
 
Objet 
responsabilité civile; action récursoire; prescription, 
 
recours en réforme contre le jugement de la Cour civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 9 mai 2005. 
 
Faits : 
 
A. 
 
A.a La Fondation A.________ (ci-après: la Fondation ou la demanderesse) gère plusieurs établissements médico-sociaux (ci-après EMS) dans le canton de Vaud. Depuis 1986, elle est propriétaire de l'immeuble "...", à W.________. 
 
Cet immeuble a d'abord été affecté à l'exploitation d'un hôtel, puis d'une maison de vacances. Le bâtiment était alors alimenté en gaz naturel; le gaz était acheminé au moyen d'une conduite de branchement provenant de la conduite générale de réseau située dans la rue U.________; la conduite de branchement - constituée d'un tuyau en acier - traversait un mur de soutènement jouxtant la rue U.________ en limite de parcelle, puis rejoignait le bâtiment à travers une ancienne terrasse pour déboucher dans les cuisines de l'hôtel; sur la face intérieure du mur de ces cuisines, se trouvait un robinet d'arrêt d'immeuble, destiné à maîtriser l'interface entre le réseau et l'installation intérieure. A une époque indéterminée, mais très ancienne, a été construite, sur la terrasse, une annexe au bâtiment d'origine, utilisée comme garage. Cette nouvelle construction n'a pas modifié la conduite d'amenée de gaz, qui a été noyée, à quelques centimètres de profondeur, dans la dalle formant le sol de l'annexe; quant au robinet d'arrêt de l'immeuble, il s'est retrouvé situé à l'intérieur du bâtiment, à plus de quatre mètres par rapport au (nouveau) mur extérieur de l'annexe. En 1964, le propriétaire a renoncé à ce que l'immeuble soit desservi en gaz et les cuisines ont été converties en buanderie. Le robinet d'arrêt de l'immeuble ainsi que le compteur qui devait avoir existé au même endroit ont été démontés pour être remplacés par un bouchon; ces travaux ont été exécutés par Y.________ SA (ci-après: Y.________ ou l'appelée en cause). Cette société s'est vu concéder par plusieurs communes vaudoises, en particulier celle de W.________, un monopole d'intervention sur les conduites d'amenée de gaz jusqu'au compteur intérieur des immeubles. Après la fin des travaux précités, la conduite de branchement est restée sous pression, ce qui est une pratique usuelle de Y.________ lorsque le client ne renonce pas définitivement au gaz. 
 
Dès 1965, la Fondation est devenue locataire de l'immeuble pour y abriter un EMS. En 1982, Y.________ a effectué une réfection de la conduite de réseau dans la rue U.________, notamment au droit de l'immeuble "...". A l'occasion de ces travaux, elle a profité de la fouille pour poser, à ses frais et sans en aviser le propriétaire, une vanne de prise (ou vanne de branchement) sur le branchement de l'EMS. Une telle vanne permet de mettre hors gaz des branchements d'immeuble, notamment pour effectuer sans risque des travaux d'entretien de la conduite de branchement jusqu'au robinet d'arrêt de l'immeuble; la manipulation de cette vanne suppose - après ouverture du couvercle de regard au moyen d'un outillage approprié - l'utilisation d'une clef particulière en forme de "T". Après la pose de cette vanne, Y.________ a fait combler la fouille et poser un revêtement bitumeux provisoire. En juin 1982, la Commune de W.________ a fait procéder aux travaux de surfaçage définitif qu'elle a ensuite facturés à Y.________. Au cours de l'exécution de ceux-ci, la vanne de branchement a été recouverte de bitume, de sorte qu'elle n'était plus accessible, en violation des règles de l'art. Pour retrouver son emplacement exact, il aurait fallu se munir d'un plan, puis creuser dans le tapis bitumeux de la chaussée. 
A.b En 1987, la Fondation a confié à l'architecte X.________ (ci-après: l'architecte ou le défendeur) la conception et la direction de travaux de rénovation et de transformation de l'intérieur de son immeuble, travaux devisés à 1'230'000 fr. En février de ladite année, l'architecte a adjugé les travaux de maçonnerie à Z.________ SA (ci-après: l'entreprise ou la défenderesse). Les transformations prévues comportaient notamment l'installation d'un office dans l'ancienne buanderie: cela impliquait l'ouverture d'une tranchée dans la dalle pour y enterrer des canalisations ainsi que la démolition partielle de cette dalle dans l'angle de la pièce opposé à l'endroit où se trouvait le tuyau de gaz. 
 
Les travaux de maçonnerie ont débuté en mai 1988. Lors d'une reconnaissance des lieux effectuée en été 1988, l'architecte et l'un de ses collaborateurs ainsi que les responsables de l'entreprise ont remarqué la présence du tuyau de gaz dans l'ancienne buanderie. Le collaborateur de l'architecte a relevé qu'il faudrait faire attention à ne pas endommager cette installation, mais il n'a pas donné d'instructions plus précises, les travaux dans cette pièce ne devant commencer qu'en octobre 1988. Interpellée par l'architecte, la Fondation l'a informé du fait que le gaz n'était plus utilisé dans le bâtiment depuis une vingtaine d'années. En revanche, il n'a pas été établi que l'architecte se serait renseigné, au moment des travaux, auprès de Y.________ au sujet des conduites de gaz, ni que celle-ci lui aurait répondu qu'elle ne disposait pas de plans des canalisations pour l'immeuble "...". 
Le 4 octobre 1988, les employés de l'entreprise ont commencé à creuser au marteau-piqueur la dalle de l'ancienne buanderie. Lors du rendez-vous de chantier du lendemain, auquel participaient l'architecte et les employés de l'entreprise, il a à nouveau été question du tuyau de gaz, qui a été identifié comme tel par toutes les personnes présentes. L'architecte et le chef de chantier ignoraient le tracé exact de ce tuyau et étaient convaincus que ce dernier traversait la dalle verticalement, pour continuer son chemin à travers le mur le long duquel il sortait ou en tout cas à une profondeur supérieure à l'épaisseur de la dalle. Personne ne s'est préoccupé d'identifier le tracé exact du tuyau; or, cela aurait pu être fait facilement par un sondage exécuté au burin au pied du tuyau, voire en recourant à un appareil de sondage par son. De plus, tout le monde est parti de l'idée - également erronée - que le tuyau était désaffecté et vide: visuellement, il n'était pas possible de discerner si l'installation de gaz obturée et bouchonnée contenait du gaz ou non et personne n'a pensé à se renseigner pour savoir si la conduite était sous pression. En particulier, aucun des responsables du chantier n'a demandé ce qu'il en était à Y.________ ou au propriétaire, alors que celui-ci connaissait ou aurait dû connaître la pratique de celle-là de laisser sous pression des conduites non utilisées; les installateurs sanitaires présents sur place n'ont pas non plus été requis d'effectuer un essai de desserrement du bouchon; enfin, personne n'a eu recours à des instruments de mesure tels qu'un manomètre ou un détecteur de gaz. 
 
Le 5 octobre 1988, le manoeuvre de l'entreprise a effectué la démolition complète de la dalle. Il a suivi les instructions de son chef de chantier, d'après lesquelles il devait utiliser le marteau-piqueur et réserver une zone de quelques dizaines de centimètres au pied du tuyau: dans cette zone, il devait laisser la dalle en enlevant juste la chape au burin et à la massette. Vers 13 h 30, le manoeuvre avait pratiquement terminé son ouvrage: il travaillait au marteau-piqueur à une soixantaine de centimètres de la sortie du tuyau, lorsqu'il a percé avec son appareil la conduite de branchement, causant à celle-ci un trou de 30 x 35 mm. L'ouvrier est immédiatement monté à la réception de l'EMS pour informer du danger, tandis qu'un autre ouvrier cherchait - en vain - un robinet d'arrêt du gaz dans la pièce où étaient effectués les travaux de démolition ou dans l'annexe adjacente. Ces ouvriers se sont ensuite précipités dehors pour chercher une vanne de prise dans la rue, mais n'en ont trouvé aucune au droit du bâtiment. Ils ont alors essayé de fermer une autre vanne située quelques dizaines de mètres plus haut. Après avoir réussi cette opération au moyen d'outils pourtant non adaptés, ils ont constaté que la fuite de gaz n'était pas arrêtée. Quelques secondes plus tard, une très violente explosion s'est produite. 
A.c L'explosion a ravagé l'immeuble sur plusieurs étages et causé des dégâts aux immeubles voisins. La réceptionniste de l'EMS, B.________, a été brûlée à 40%, un ouvrier, C.________, a été brûlé moins grièvement et une autre personne a été profondément coupée au genou droit. Les pensionnaires présents dans l'immeuble n'ont pas subi de lésions corporelles car ils venaient de regagner les étages après avoir achevé leur repas. 
 
En octobre 1995, B.________ a été indemnisée par l'assurance de l'architecte à concurrence de 140'000 fr. Cette même assurance a versé, en octobre 1995 également, 13'797 fr. 50 à la Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (CNA) pour les frais de traitement et les indemnités journalières dues à C.________. Le 7 septembre 1999, l'assurance de l'architecte a cédé à l'assuré la créance qu'elle était en droit de faire valoir contre des tiers, notamment contre Y.________. 
 
Le dommage subi par la Fondation du fait de l'explosion consiste en une perte effective de 1'659'954 fr. 20 et un manque à gagner de 28'800 fr. 
 
B. 
B.a Une instruction pénale a été ouverte à la suite de l'explosion du 5 octobre 1988. Elle visait l'architecte X.________, son collaborateur chargé du chantier, le manoeuvre et le chef de chantier employés par Z.________ SA ainsi que deux employés de Y.________. En cours d'instruction, un rapport d'expertise judiciaire a été déposé le 25 mars 1992. 
 
Par jugement du 28 février 1994, le Tribunal correctionnel du district de ... a reconnu l'architecte et le chef de chantier coupables de lésions corporelles graves par négligence et d'explosion par négligence et les a condamnés, respectivement, à une amende de 5'000 fr. et de 1'000 fr. Les employés de Y.________, reconnus coupables de suppression d'appareils protecteurs par négligence, ont été condamnés chacun à 1'500 fr. d'amende. Ils ont cependant été acquittés par jugement de la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal vaudois du 31 octobre 1994, au motif que la vanne de branchement située au droit de l'immeuble "..." - qui avait été rendue inaccessible par le goudronnage de la rue U.________ - n'avait pas pour fonction de prévenir les accidents, mais d'assurer une exploitation rationnelle et pratique du réseau de gaz dans une localité. 
B.b Depuis les 21 et 22 septembre 1989, l'architecte et l'entreprise ont valablement renoncé à se prévaloir de la prescription à l'égard de la Fondation pour toutes les prétentions que celle-ci pourrait élever contre eux en rapport avec l'explosion du 5 octobre 1988. Y.________ n'a pas effectué de déclaration de ce genre et ne s'est vu signifier aucun commandement de payer par la Fondation en rapport avec cette explosion. Elle n'a pas non plus été recherchée en responsabilité par l'assurance de l'architecte, laquelle n'a pas participé à la procédure civile. 
B.c Par demande du 2 juillet 1996, la Fondation a assigné l'architecte et l'entreprise, en qualité de débiteurs solidaires, afin d'obtenir réparation de son dommage. 
 
L'architecte a conclu au rejet de la demande. Le 14 août 1996, il a appelé en cause Y.________ pour que celle-ci le relève de tout montant qui pourrait être mis à sa charge en rapport avec le dommage subi par la Fondation et pour qu'elle lui verse l'équivalent des indemnités payées aux deux personnes physiques lésées. 
 
Répondant le 4 mai 1998, l'entreprise, qui n'a pas formé d'appel en cause, a conclu, principalement, au rejet de la demande et, reconventionnellement, au paiement du solde de ses factures, soit de la somme de 64'500 fr. avec intérêts à 5% dès le 1er juin 1990. A titre subsidiaire, elle a demandé que l'appelée en cause et l'architecte soient tenus de la relever de tout montant qui pourrait être mis à sa charge. 
 
Dans leurs dernières écritures, les parties défenderesses ont conclu au rejet de la demande; subsidiairement, chacune d'elles a demandé que l'appelée en cause et l'autre partie coresponsable la relèvent de tout montant qui pourrait être mis à sa charge. 
 
De son côté, l'appelée en cause a conclu au rejet des conclusions prises contre elle et a soulevé l'exception de prescription des prétentions des défendeurs. 
 
La procédure probatoire a donné lieu au dépôt de deux expertises techniques, le 11 août 2000 et le 19 mai 2003, complétées, respectivement, le 28 juin 2001 et le 29 avril 2004. Il en ressort, en particulier, les éléments suivants. 
Les directives de la Société suisse de l'industrie du gaz et des eaux (ci-après: SSIGE) constituent en Suisse les seules règles de l'art publiées dans le domaine de la distribution du gaz de réseau. A teneur de ces directives, il est recommandé de couper du réseau de gaz l'installation mise hors service. La décision de laisser sous pression cette conduite s'explique cependant par des impératifs techniques et commerciaux: en effet, une conduite qui n'est plus alimentée est plus rapidement sujette à la corrosion qu'une conduite encore sous pression; cela entraîne le risque que la conduite ne soit plus utilisable quelques années plus tard; les chances de regagner un abonné à cet endroit s'en trouvent compromises puisque l'intéressé devra alors engager des frais pour rendre à nouveau la conduite utilisable. L'un des experts judiciaires a d'ailleurs confirmé qu'un branchement mis hors service provisoirement - comme en l'espèce - est maintenu en gaz de façon à permettre le contrôle périodique de l'installation. Les directives de la SSIGE prescrivent également que les conduites de branchement doivent être enterrées à une profondeur en principe supérieure à 80 cm. En outre, le robinet d'arrêt de l'immeuble doit être placé immédiatement après l'entrée de la conduite dans le bâtiment dans un local accessible en tout temps; exceptionnellement, il peut être placé à l'extérieur juste avant l'entrée de la conduite dans le bâtiment. Enfin, si l'on constate que des installations existantes sont non conformes aux directives et de nature à compromettre la sécurité, il convient d'y apporter les modifications qui s'imposent dans un délai raisonnable. 
B.d Par jugement du 9 mai 2005, la Cour civile du Tribunal cantonal vaudois a condamné les défendeurs X.________ et Z.________ SA à verser à la demanderesse Fondation A.________ les montants de 1'526'072 fr. 60 - après compensation avec la créance de 64'500 fr. de la défenderesse et des intérêts y afférents par 40'581 fr. 60 - avec intérêts à 5% dès le 1er avril 2005 et de 28'800 fr. avec intérêts à 5% dès le 26 juillet 1996 (ch. I du dispositif). Le défendeur a été condamné à relever la défenderesse à concurrence des montants payés par celle-ci au-delà du quart des montants alloués à la demanderesse, mais au maximum à concurrence de la moitié de ceux-ci (ch. II du dispositif). L'appelée en cause Y.________ a été condamnée à relever la défenderesse et le défendeur à concurrence des montants payés par ces derniers au-delà du quart, respectivement de la moitié, des montants alloués à la demanderesse, mais au maximum à concurrence du quart de ceux-ci (ch. III et IV du dispositif). En outre, elle a été condamnée à verser au défendeur 38'362 fr. 30 avec intérêts à 5% dès le 21 août 1996, somme correspondant à 25% des indemnités versées à B.________ et à la CNA pour C.________ (ch. V du dispositif). Enfin, les frais et dépens ont été répartis entre les parties selon les règles de procédure cantonale (ch. VI à IX du dispositif), toutes autres ou plus amples conclusions étant par ailleurs rejetées (ch. X du dispositif). 
 
En résumé, la cour cantonale a retenu que la responsabilité de l'architecte était engagée tant sur le plan délictuel que contractuel. Il en allait de même de celle de l'entreprise, pour le fait de ses employés (art. 55 CO) et de ses auxiliaires (art. 101 CO). En ce qui concerne Y.________, la Cour civile a jugé que l'appelée en cause avait créé un état de fait dangereux en maintenant sous pression une conduite de gaz, enterrée à quelques centimètres de profondeur et passant à l'intérieur d'un bâtiment sur une distance d'un peu plus de quatre mètres, alors qu'il n'était pas improbable que des travaux soient entrepris dans l'immeuble et alors qu'il n'existait pas de robinet d'arrêt accessible en tout temps, placé immédiatement après l'entrée de la conduite dans le bâtiment. Considérant que l'action récursoire des défendeurs contre l'appelée en cause n'était pas prescrite, les premiers juges ont appliqué les règles de la solidarité imparfaite et partagé les responsabilités entre les auteurs du dommage à raison de 50% pour l'architecte, 25% pour l'entreprise et 25% pour Y.________. 
 
C. 
L'appelée en cause et le défendeur interjettent un recours en réforme au Tribunal fédéral contre le jugement précité. Sans critiquer le calcul du dommage, la première soutient qu'il y a eu interruption du lien de causalité adéquate entre la création de l'état de fait dangereux et l'explosion en raison de l'accumulation des comportements gravement fautifs de l'architecte et de l'entreprise; à tout le moins, sa part de responsabilité devrait être réduite à 10%. Quoi qu'il en soit, à son avis, les prétentions récursoires dirigées contre elle seraient prescrites. Dans son recours en réforme, l'architecte ne conteste pas non plus le calcul du dommage; en revanche, il s'en prend à la pondération des fautes des trois responsables de celui-ci et conclut à ce que, dans les rapports internes, la responsabilité de l'appelée en cause soit augmentée à 50% et la sienne réduite à 25%, celle de l'entreprise demeurant inchangée. 
 
A l'occasion du recours exercé par l'appelée en cause, la défenderesse a formé un recours joint en vue de faire exclure toute responsabilité de sa part, au motif qu'il y aurait interruption de la causalité adéquate en raison des graves négligences de Y.________; à tout le moins, l'entreprise requiert que sa part de responsabilité soit fixée à 10% de l'entier du dommage. 
 
Hormis la demanderesse, qui n'est pas concernée par les rapports internes entre coresponsables, toutes les parties ont pu s'exprimer au sujet des recours de leurs parties adverses. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
 
1. 
Les causes 4C.368/2005 et 4C.370/2005 sont étroitement liées, qu'il s'agisse des parties intéressées ou des problèmes soulevés. L'économie de la procédure commande dès lors de les joindre, conformément à l'art. 24 PCF applicable en vertu du renvoi de l'art. 40 OJ (cf. ATF 113 Ia 390 consid. 1), et de les traiter dans un seul et même arrêt (ATF 111 II 270 consid. 1). 
 
2. 
2.1 Interjetés par les parties qui ont succombé dans leurs conclusions libératoires prises dans le cadre des recours internes entre coresponsables et dirigés contre un jugement final rendu en dernière instance cantonale par un tribunal supérieur (art. 48 al. 1 OJ) sur une contestation civile dont la valeur litigieuse atteint le seuil de 8'000 fr. (art. 46 OJ), les recours en réforme sont en principe recevables, puisqu'ils ont été déposés en temps utile (art. 54 al. 1 OJ) et dans le respect des règles fixées par l'art. 55 al. 1 OJ. Il en va de même du recours joint (art. 59 al. 2 et 3 OJ). 
 
2.2 Le recours en réforme est ouvert pour violation du droit fédéral, mais non pour violation directe d'un droit de rang constitutionnel (art. 43 al. 1 OJ) ou pour violation du droit cantonal (art. 55 al. 1 let. c in fine OJ; ATF 127 III 248 consid. 2c p. 252 et les arrêts cités). 
 
Saisi d'un recours en réforme, le Tribunal fédéral doit conduire son raisonnement juridique sur la base des faits contenus dans la décision attaquée, à moins que des dispositions fédérales en matière de preuve n'aient été violées, qu'il y ait lieu à rectification de constatations reposant sur une inadvertance manifeste (art. 63 al. 2 OJ) ou qu'il faille compléter les constatations de l'autorité cantonale parce que celle-ci n'a pas tenu compte de faits pertinents et régulièrement allégués (art. 64 OJ; ATF 130 III 102 consid. 2.2 p. 106). Dans la mesure où un recourant présente un état de fait qui s'écarte de celui contenu dans la décision attaquée sans se prévaloir avec précision de l'une des exceptions qui viennent d'être rappelées, il n'est pas possible d'en tenir compte. L'appréciation des preuves à laquelle s'est livrée l'autorité cantonale ne peut être remise en cause (ATF 130 III 136 consid. 1.4). Il ne peut être présenté de griefs contre les constatations de fait, ni de faits ou de moyens de preuve nouveaux (art. 55 al. 1 let. c OJ). 
 
2.3 Le Tribunal fédéral ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties, mais il n'est pas lié par les motifs qu'elles invoquent (art. 63 al. 1 OJ) ni par l'argumentation juridique retenue par la cour cantonale (art. 63 al. 3 OJ). Le Tribunal fédéral peut ainsi admettre un recours pour d'autres motifs que ceux invoqués par le recourant; il peut également rejeter un recours en adoptant une autre argumentation juridique que celle retenue par la cour cantonale (ATF 130 III 297 consid. 3.1; 127 III 248 consid. 2c in fine). 
 
3. 
L'appelée en cause, dans son recours principal, et la défenderesse, dans son recours joint, invoquent toutes deux les règles sur la rupture du lien de causalité adéquate pour échapper à leur responsabilité. Cette question doit être tranchée au préalable, car elle peut avoir une incidence sur la pondération des fautes respectives des coresponsables. 
 
3.1 Selon la jurisprudence, le rapport de causalité est adéquat lorsque l'acte incriminé est propre, d'après le cours ordinaire des choses et l'expérience générale de la vie, à entraîner un résultat du genre de celui qui s'est produit (ATF 129 II 312 consid. 3.3 p. 318). Pour savoir si un fait est la cause adéquate d'un préjudice, le juge procède à un pronostic rétrospectif objectif: se plaçant au terme de la chaîne des causes, il remonte du dommage dont la réparation est demandée au chef de responsabilité invoqué et détermine si, dans le cours normal des choses et selon l'expérience de la vie, une telle conséquence demeure dans le champ raisonnable des possibilités. A cet égard, ce n'est pas la prévisibilité subjective mais la prévisibilité objective du résultat qui compte (ATF 119 lb 334 consid. 5b p. 345). 
 
La causalité adéquate peut être exclue, l'enchaînement des faits perdant alors sa portée juridique, si une autre cause concomitante, par exemple le comportement de la victime, le fait d'un tiers ou la force majeure, constitue une circonstance tout à fait exceptionnelle ou apparaît si extraordinaire que l'on ne pouvait pas s'y attendre; l'imprévisibilité d'un acte concurrent ne suffit pas en soi à interrompre le rapport de causalité adéquate; encore faut-il que cet acte ait une importance telle qu'il s'impose comme la cause la plus probable et la plus immédiate de l'événement considéré, reléguant à l'arrière-plan tous les autres facteurs qui ont contribué à l'amener, et notamment le comportement de l'auteur (ATF 131 IV 145 consid. 5.2; cf. également ATF 130 III 182 consid. 5.4 p. 188). En d'autres termes, ce n'est que s'il est hautement improbable, d'après le cours ordinaire des choses et l'expérience de la vie, que le second événement qui a concouru à la survenance du résultat se produise par suite du fait dont répond l'auteur et de ses conséquences que le rapport de causalité adéquate pourrait être nié (arrêt 5C.125/2003 du 31 octobre 2003, consid. 4.3, publié in SJ 2004 I p. 407; Roland Brehm, Commentaire bernois, 3e éd., n. 136 ad art. 41 CO). 
 
3.2 L'appelée en cause ne conteste plus, devant le Tribunal fédéral, être à l'origine de la création d'un état de fait dangereux. Comme l'ont à juste titre retenu les juges cantonaux, celui-ci consistait dans le fait d'avoir maintenu sous pression une conduite de gaz, enterrée à quelques centimètres de profondeur et passant à l'intérieur d'un bâtiment sur une distance d'un peu plus de quatre mètres. A cela s'ajoutaient, toujours selon les premiers juges, les deux circonstances suivantes. D'une part, il n'existait pas de robinet d'arrêt placé immédiatement après l'entrée de la conduite dans le bâtiment et accessible en tout temps; sur ce point, si la cour cantonale a établi que l'annexe à la construction d'origine, en raison de son ancienneté, faisait partie intégrante de l'immeuble, cela ne permet pas - comme le prétend l'appelée en cause - d'en déduire que l'existence de l'état de fait dangereux est due exclusivement à la présence "très particulière" de cette annexe: en effet, cette constatation de fait doit être uniquement mise en relation avec l'absence d'un robinet d'arrêt conforme, mais n'influence pas les autres manquements de l'appelée en cause. D'autre part, celle-ci, pourtant au bénéfice d'un monopole dans ce domaine, n'a pas procédé au fil du temps aux vérifications de l'installation, en particulier en ce qui concernait les exigences de sécurité et de prudence s'agissant du tracé de la conduite sous l'annexe; malgré une intervention importante sur la conduite en 1982, elle n'a pas pris les mesures nécessaires pour rendre l'installation conforme aux exigences en la matière. 
Selon l'appelée en cause, le lien de causalité adéquate entre la création de cet état de fait dangereux et l'explosion aurait été interrompu par une conjonction extraordinaire d'omissions, de négligences et d'actions brutales, lesquelles seraient révélatrices d'une témérité ou d'une inconscience culminant dans le percement au marteau-piqueur de la dalle de l'annexe à quelque 60 centimètres à peine de l'endroit où émergeait du sol une conduite de gaz parfaitement visible. A la suivre, toutes ces circonstances, qu'elles soient imputables à l'architecte ou à l'entreprise, présenteraient un caractère tellement exceptionnel que l'on doit considérer comme hautement improbable que, d'après le cours ordinaire des choses et l'expérience de la vie, elles se produisent jamais. Cette opinion n'est pas convaincante. 
 
Comme l'a retenu à juste titre l'instance précédente, il n'était pas improbable que des travaux soient entrepris dans l'immeuble, et plus particulièrement dans l'annexe menacée par l'état de fait dangereux créé par l'appelée en cause. La question à laquelle la cour cantonale n'a cependant pas répondu est celle de savoir si les manquements imputables à l'architecte et à l'entreprise dans le déroulement de ces travaux revêtaient, en eux-mêmes, un caractère à ce point exceptionnel qu'ils rejetaient complètement à l'arrière-plan la faute de l'appelée en cause. Pour trancher cette question, il convient de déterminer si le dommage peut encore être équitablement imputé à l'appelée en cause, ce qui implique le recours aux règles du droit et de l'équité, conformément à l'art. 4 CC. Par ailleurs, il faut rappeler que la jurisprudence n'admet l'interruption du lien de causalité que de manière restrictive (Franz Werro, La responsabilité civile, n. 223). Ainsi, une telle interruption a-t-elle été écartée en cas de complication opératoire, que celle-ci soit qualifiée par les médecins de "pas totalement exceptionnelle" (ATF 131 IV 145 consid. 5.3. p. 148 et les références) ou même de "rare" (arrêt 5C.125/2003, précité, consid. 4.4). Le fait qu'une personne victime d'un accident de la circulation fasse ensuite l'objet, dans une clinique, de soins médicaux inadaptés ne constitue pas non plus une circonstance à ce point extraordinaire que cela rejette complètement à l'arrière-plan le comportement de l'automobiliste fautif (arrêt 6S.155/2003 du 19 août 2003, consid. 3.3.2, cité par Brehm, op. cit., n. 140 ad art. 41 CO). Dans cet ordre d'idées, les négligences avérées de l'architecte et de l'entreprise, confrontés à la présence d'un tuyau de gaz apparemment désaffecté dans un bâtiment ancien, ne sont certainement pas habituelles dans le monde de la construction; à l'instar de ce que l'on constate dans le domaine médical, l'expérience enseigne cependant qu'il faut également compter dans ce domaine-là avec des erreurs humaines, même isolées. Celles-ci doivent en l'espèce être relativisées, étant donné, d'une part, que la conduite litigieuse aurait dû, selon les règles de l'art, être enterrée à une profondeur supérieure à 80 cm et, d'autre part, qu'un robinet d'arrêt aurait dû être immédiatement accessible, ce qui aurait empêché la survenance du sinistre. Dès lors, les circonstances imputables aux tiers n'apparaissent pas à ce point exceptionnelles et d'une portée si intense qu'elles relégueraient complètement à l'arrière-plan la faute de l'appelée en cause. Par conséquent, sur ce point, le recours de cette dernière n'est pas fondé. 
 
3.3 Selon les juges précédents, la responsabilité de la défenderesse était engagée en raison de l'acte illicite commis par son employé (art. 55 CO) et de la violation par son auxiliaire des règles de prudence imposées par le contrat d'entreprise la liant au maître de l'ouvrage (art. 364 et 101 CO). L'intéressée ne remet en cause ces développements juridiques que sous l'angle de l'interruption du lien de causalité, question qui va être traitée immédiatement, et sous celui de la pondération des fautes, problème qui sera abordé plus loin (cf. consid. 4). En revanche, elle ne critique pas le reproche qui lui est fait de ne pas s'être préoccupée d'identifier le tracé exact de la conduite litigieuse, alors qu'elle l'ignorait et qu'un sondage du sol aurait été facile et rapide. 
 
La défenderesse est d'avis que le lien de causalité adéquate entre ses propres négligences et l'explosion a été interrompu par le comportement de l'appelée en cause. Elle reproche à celle-ci, en particulier, d'avoir créé et maintenu consciemment un état de fait dangereux et d'avoir communiqué des renseignements erronés peu avant l'accident. Ce second reproche est contraire aux faits constatés par les juges cantonaux, lesquels ont retenu, de manière à lier la juridiction fédérale de réforme (art. 63 al. 2 OJ), que personne sur le chantier ne s'était renseigné auprès de l'appelée en cause pour savoir si la conduite litigieuse était encore sous pression au moment de l'intervention sur la chape. Dès lors, cet argument est irrecevable. Aussi convient-il uniquement de se demander si la présence d'une conduite de gaz, sous pression et enfouie à quelques centimètres de profondeur dans le local fermé d'un immeuble n'utilisant plus le gaz depuis une vingtaine d'années, était à ce point exceptionnelle que l'on ne pouvait s'y attendre d'après le cours ordinaire des choses et l'expérience de la vie. 
 
Toujours de manière à lier le Tribunal fédéral, la cour cantonale a retenu que le fait de laisser sous pression une conduite de gaz alors qu'un immeuble n'est plus alimenté avec cette énergie constituait une pratique usuelle, à tout le moins dans le canton de Vaud; de plus, au moment de l'accident, les règles de l'art n'interdisaient pas une telle pratique. On peut donc en déduire que la présence, à l'endroit concerné, d'une conduite de gaz sous pression n'était pas hautement improbable. Cette conclusion s'impose d'autant plus que tous les participants au chantier avaient identifié comme tel le tuyau de gaz sortant verticalement de la chape. Le fait que ce tuyau était coulé à quelques centimètres de profondeur dans le sol de l'annexe - au lieu d'être enfoui à plus de 80 cm de profondeur comme l'imposent les règles de l'art en la matière - peut être considéré comme une circonstance insolite. Cela étant, il ne faut pas perdre de vue que le chantier sur lequel intervenait l'entreprise concernait un bâtiment ancien. Or, l'expérience enseigne que de telles constructions sont susceptibles de connaître, au fil des ans, des modifications architecturales dont peuvent résulter des situations inattendues. Conscient de cela, l'architecte a d'ailleurs fait part à l'entreprise, dès les premiers rendez-vous sur place, de la nécessité de ne pas endommager l'installation de gaz visible dans l'annexe. Eu égard à ces éléments de fait, la présence de la conduite à quelques centimètres de profondeur n'apparaît donc pas non plus comme une circonstance hautement improbable. Quant à la question du robinet d'arrêt accessible en tout temps, l'entreprise a nécessairement dû se rendre compte de l'absence d'un tel dispositif et, malgré cela, elle a procédé à la démolition de la dalle de l'annexe sans chercher à identifier le tracé exact de la conduite. 
 
En admettant que la faute de l'appelée en cause n'avait pas atteint un degré de gravité suffisamment élevé pour reléguer à l'arrière-plan les fautes de l'architecte et de l'entreprise, la Cour civile n'a donc pas violé le droit fédéral. Sur ce point, le recours de la défenderesse n'est pas fondé. 
 
4. 
Les trois coresponsables que sont le défendeur, la défenderesse et l'appelée en cause critiquent la pondération de leurs fautes respectives à laquelle les juges cantonaux ont procédé pour fixer l'étendue des droits de recours internes. 
 
4.1 La Cour civile a d'abord jugé que la faute de l'architecte était plus importante que celle de l'entreprise: du fait de sa formation supérieure de niveau universitaire et de son mandat dont l'objet était précisément d'organiser et de surveiller le chantier de manière à éviter les accidents, l'homme de l'art avait fait preuve d'une légèreté inadmissible en se bornant à admettre, sans vérification, qu'il n'y avait pas de gaz dans la conduite. En tant qu'il allègue devant le Tribunal fédéral qu'il aurait obtenu une information erronée de la part de l'appelée en cause sur la mise hors gaz de la conduite litigieuse, l'architecte s'écarte des faits souverainement établis et son argumentation est irrecevable. Pour le surplus, il ne critique pas l'existence des carences telles qu'elles ont été relevées par les juges cantonaux, mais reproche à ceux-ci de ne pas avoir tenu compte du fait que l'accident aurait également pu se produire dans le cadre de travaux légers: à le suivre, l'explosion aurait aussi pu survenir à l'occasion de travaux entrepris sans l'aide d'un architecte, par exemple lors d'un simple carrelage, ce qui démontrerait la responsabilité principale et originelle de l'appelée en cause dans l'accident. Là encore, en tant qu'il procède à des suppositions, le défendeur s'écarte des seuls faits constatés dans le jugement attaqué, ce qui rend son argumentation irrecevable. 
 
S'agissant de la faute commise par l'employé de la défenderesse, la cour cantonale a estimé qu'elle était moins lourde que celle de l'architecte en raison du moindre degré de formation de l'ouvrier et de sa position en quelque sorte subordonnée dans l'organisation du chantier; il n'en demeurait pas moins que, même si l'architecte occupait une position dominante par rapport à celle de l'entreprise, l'employé de celle-ci était tenu de prendre toutes les précautions utiles en attaquant au marteau-piqueur une zone où il savait que passait une conduite de gaz dont il ignorait le tracé exact. Ces considérations ne sont pas remises en question par la défenderesse dans son recours. Celui-ci porte, en effet, sur les informations prétendument erronées qu'aurait dispensées l'appelée en cause avant le début des travaux - argument irrecevable pour les motifs évoqués plus haut (cf. consid. 3.3) - ainsi que sur la gravité des propres négligences imputables à cette partie. 
 
Pour apprécier la faute de l'appelée en cause, les juges cantonaux ont tenu compte du fait que cette dernière jouissait d'un monopole en matière de distribution de gaz et de son obligation de veiller au respect des normes de sécurité, en particulier pour éviter des explosions. Ils ont considéré que la faute de cette partie, qui avait créé un état de fait dangereux, était moins lourde que celle de l'architecte et à peu près égale à celle de l'entreprise. L'appelée en cause critique cette appréciation au motif que les fautes des intervenants sur le chantier avaient, selon elle, un caractère prépondérant par rapport à la sienne. 
 
4.2 A juste titre, les recourants ne remettent pas en cause le fait que la cour cantonale pouvait procéder à une pondération de leurs fautes respectives. Lorsqu'il fixe l'étendue des recours entre coresponsables, le juge doit se garder de tout schématisme; dans certains cas, il peut même s'écarter de la directive de l'art. 51 al. 2 CO et répartir les responsabilités en fonction de l'importance que revêtent, par rapport à l'accident qui s'est produit, les facteurs dont répondent les responsables en présence (ATF 116 II 645 consid. 3b p. 649 et les références). En d'autres termes, le juge doit faire application de son pouvoir d'appréciation en tenant compte de l'ensemble des circonstances de chaque cas particulier (Karl Oftinger/Emil W. Stark, Schweizerisches Haftpflichtrecht, vol. I, 5e éd., p. 512 n. 66; Vito Roberto, Schweizerisches Haftpflichtrecht, n. 555; Werro, op. cit., n. 1602), comme le lui impose l'art. 50 al. 2 CO auquel renvoie l'art. 51 al. 1 CO (Hubert Bugnon, L'action récursoire en matière de concours de responsabilités civiles, thèse Fribourg 1982, p. 63; Brehm, op. cit., n. 46 et 101 ad art. 51 CO). 
 
Les décisions fondées sur le pouvoir d'appréciation du juge (art. 4 CC) peuvent en principe être revues librement dans le cadre d'un recours en réforme. Toutefois, le Tribunal fédéral ne substitue qu'avec retenue sa propre appréciation à celle de la juridiction cantonale. Il n'intervient que si la décision s'écarte sans raison des règles établies par la doctrine et la jurisprudence en matière de libre appréciation, ou lorsqu'elle repose sur des faits qui, dans le cas particulier, ne devaient jouer aucune rôle, ou encore lorsqu'elle n'a pas tenu compte d'éléments qui auraient dû absolument être pris en considération; il sanctionnera en outre les décisions rendues en vertu d'un pouvoir d'appréciation lorsqu'elles aboutissent à un résultat manifestement injuste ou à une iniquité choquante (ATF 130 III 28 consid. 4.1 p. 32, 213 consid. 3.1 p. 220; 129 III 380 consid. 2 p. 382). 
 
4.3 Sur la question des recours internes entre coresponsables, aucune des parties ne prétend que la cour cantonale se serait écartée sans raison des principes relatifs à l'appréciation des fautes de chaque responsable. Les critiques adressées à ce sujet aux premiers juges apparaissent, en définitive, de nature essentiellement appellatoire, puisqu'elles visent à donner davantage d'importance à certaines circonstances de fait plutôt qu'à d'autres auxquelles s'est pourtant référée la cour cantonale. Les recourants n'allèguent notamment pas que cette autorité aurait omis de prendre en considération des éléments déterminants pour l'issue du litige. La décision querellée énumère au contraire, de manière circonstanciée, les carences imputables à chaque coresponsable et procède à une pondération des fautes qui ne conduit pas un résultat manifestement injuste. En fixant à 50% la responsabilité du défendeur, à 25% celle de la défenderesse et à 25% celle de l'appelée en cause, la cour cantonale n'a en tout cas pas consacré une iniquité choquante. Sur ce point, le fait d'opposer à la solution retenue par les premiers juges une autre répartition des fautes ne suffit pas à démontrer une violation du droit fédéral. 
 
Par conséquent, les recours doivent être rejetés sur cette question. 
 
5. 
L'appelée en cause reproche aux juges précédents d'avoir violé les règles sur la solidarité imparfaite en écartant l'exception de prescription soulevée par elle à l'encontre des prétentions récursoires de l'architecte et de l'entreprise. Elle leur fait grief d'avoir opté pour une solution qui revient à étendre à une situation de solidarité imparfaite le mécanisme d'interruption de la prescription applicable exclusivement à la solidarité parfaite. 
 
5.1 La responsabilité civile de l'appelée en cause à l'égard de la demanderesse est engagée, sur la base de l'art. 41 CO, en raison de la création d'un état de fait dangereux (violation du principe neminem laedere; cf. consid. 3.2). L'action en dommages-intérêts, fondée sur ce chef de responsabilité, se prescrivait par un an à compter du jour où la partie lésée avait eu connaissance du dommage ainsi que de la personne qui en était l'auteur et, dans tous les cas, par dix ans dès le jour où le fait dommageable s'était produit (art. 60 al. 1 CO). L'explosion litigieuse est survenue le 5 octobre 1988. Il n'est pas contesté, ni contestable du reste, que la prescription absolue de la créance de la Fondation à l'égard de l'appelée en cause est survenue pendente lite (le 5 octobre 1998), soit avant le prononcé du jugement cantonal faisant droit aux prétentions récursoires élevées contre cette partie, et ce sans qu'elle ait jamais été interrompue. Encore qu'il soit plus difficile de déterminer l'échéance du délai de prescription annal, faute de constatations claires à ce propos, il est probable que ce délai ait expiré avant l'introduction de la procédure close par le jugement déféré, bien que la défenderesse soutienne le contraire (voir, à ce sujet, le consid. 6.2.2.2). Au demeurant, la prescription de plus longue durée du droit pénal, réservée par l'art. 60 al. 2 CO, n'entre pas en ligne de compte dans le cas particulier. Supposé, en effet, que des actes objectivement punissables aient été commis en l'espèce, ils ont été le fait de deux employés de l'appelée en cause n'ayant pas la qualité d'organes de celle-ci. Or, selon la jurisprudence, la prescription de plus longue durée du droit pénal ne trouve aucune application dans la responsabilité de l'employeur pour ses auxiliaires (ATF 122 III 225 consid. 5, auquel un obiter dictum d'un arrêt publié ultérieurement in ATF 125 III 339 consid. 3b in fine donne, à tort, un sens contraire à celui qui y est exprimé). Par ailleurs, si la prescription de la créance de la lésée a certes été interrompue contre les autres responsables du dommage par le fait que ceux-ci ont renoncé expressément à l'invoquer (ATF 112 II 231 consid. 3e/bb p. 233), cette circonstance n'influe pas sur la prescription de la créance de cette partie envers l'appelée en cause. Aussi bien, l'interruption de la prescription contre l'un des débiteurs n'est valable contre tous les autres, en vertu de l'art. 136 al. 1 CO, qu'en cas de solidarité parfaite. Dans l'hypothèse, qui se vérifie en l'espèce, où il n'existe qu'une solidarité imparfaite entre les divers responsables du dommage, le lésé doit bien plutôt interrompre la prescription contre chacun des responsables (ATF 127 III 257 consid. 6a p. 264 et les arrêts cités). 
 
Les droits de la personne morale lésée envers l'un des coresponsables du dommage étaient ainsi prescrits, à tout le moins au moment de l'admission des prétentions récursoires élevées par deux autres responsables contre ce responsable-là. Aussi convient-il d'examiner l'incidence de cet état de choses sur ces prétentions récursoires. En d'autres termes, le responsable qui n'a pas été recherché par le lésé peut-il opposer la prescription des droits de celui-ci à son égard à l'un des coresponsables qui lui intente une action récursoire? La réponse à cette question nécessite le rappel préalable de l'état de la jurisprudence (consid. 5.2.1) et des opinions doctrinales (consid. 5.2.2) en la matière, de même qu'un survol des solutions qui ont été adoptées dans d'autres ordres juridiques (consid. 5.2.3) et de celles qui sont proposées en Suisse de lege ferenda (consid. 5.2.4). Il y aura lieu, ensuite, de régler le problème litigieux en prenant en considération ses divers aspects (consid. 5.3), puis, cela fait, d'appliquer aux circonstances du cas concret les principes que cette analyse aura permis de poser (consid. 6). 
5.2 
La question de la relation entre l'action principale du lésé dirigée contre les coresponsables du dommage (rapports externes) et l'action récursoire de l'un de ceux-ci contre l'un ou plusieurs d'entre eux (rapports internes) est multiforme. Elle fait appel à des notions cardinales du droit de la responsabilité civile, telles la solidarité - parfaite ou imparfaite - et la prescription, et touche au fondement juridique de la prétention récursoire, de même qu'au point de départ et à la durée du délai de prescription de l'action en dérivant. La diversité des avis exprimés sur ces différentes questions, aussi bien dans la jurisprudence que dans la doctrine, en Suisse comme à l'étranger, et des propositions faites en droit désirable révèle assurément la complexité du problème. 
5.2.1 Dans un ancien arrêt (ATF 55 II 118 consid. 3), le Tribunal fédéral a fait coïncider le dies a quo du délai de prescription de l'action récursoire avec celui de l'action directe du lésé en réparation de son dommage; il a fixé ce délai à un an, conformément à l'art. 60 CO, s'agissant d'un recours exercé par celui qui répondait du dommage en vertu d'un contrat à l'encontre de celui qui en répondait en raison d'un acte illicite. Pareille opinion, sans rapport avec une éventuelle subrogation du demandeur dans les droits du lésé contre l'auteur du dommage, repose sur l'idée que le droit de recours n'est que la conséquence de la responsabilité pour acte illicite du défendeur à l'action récursoire; il s'ensuit que ce recours ne peut pas être plus rigoureux pour le défendeur que la responsabilité elle-même. 
 
Sans le dire expressément, le Tribunal fédéral, dans un obiter dictum d'un arrêt ultérieur, met en doute cette opinion lorsqu'il indique, à propos de l'action récursoire, en faisant référence à l'art. 130 al. 1 CO, qu'il "conviendrait d'examiner sérieusement si le délai ne court pas dès le paiement de l'indemnité seulement" (ATF 89 II 118 consid. 5b p. 123). 
 
Un arrêt rendu en 1989 apporte de nouveaux éléments au débat (ATF 115 II 42 consid. 2). Le Tribunal fédéral y souligne que la prétention récursoire ne prend naissance qu'à partir du moment où le responsable a indemnisé le lésé, tout en précisant que le délai de prescription relatif commence à courir dès que le responsable connaît son droit de recours. Cette solution implique donc une dissociation entre le moment de la naissance de la créance récursoire et le moment où la prescription de l'action y relative commence à courir. Il en résulte que la prescription pourrait intervenir avant même que la créance soit née. D'autre part, l'arrêt examiné subordonne l'admissibilité de l'action récursoire à la condition que les prétentions concurrentes du lésé contre un autre responsable ne soient pas déjà prescrites ou périmées. Quant au délai de prescription de cette action, il est d'un an, selon cet arrêt, que l'on applique l'art. 60 al. 1 CO ou que l'on recherche le fondement juridique de la prétention récursoire dans les dispositions sur l'enrichissement illégitime ou celles sur la gestion d'affaires sans mandat, justifiant l'application directe ou par analogie de l'art. 67 al. 1 CO. Le Tribunal fédéral précise encore que l'action récursoire est soumise à la prescription absolue de dix ans courant dès le jour où le fait dommageable s'est produit (art. 60 al. 1 in fine CO). 
 
En 1989 toujours, dans un arrêt concernant la prescription des droits du maître en raison des défauts d'une construction immobilière (ATF 115 II 456 consid. 2), le Tribunal fédéral a indiqué que la ratio legis de l'art. 371 al. 2 CO, qui fixe le même délai (quinquennal) au maître de l'ouvrage pour faire valoir ses prétentions de ce chef contre l'entrepreneur, l'architecte ou l'ingénieur, était d'éviter que l'architecte ou l'ingénieur, à supposer qu'il ait pu être recherché par le maître dans le délai de prescription ordinaire de dix ans (art. 127 CO), n'eût plus été en mesure de se retourner contre l'entrepreneur répondant du défaut, les droits du maître à l'égard de ce dernier étant déjà prescrits. Selon Peter Gauch (Le contrat d'entreprise, n. 2297 et 2757), dans la conception du législateur suisse, consacrée à l'art. 371 al. 2 CO tel qu'interprété par la jurisprudence fédérale, l'entrepreneur dont la dette du chef de la garantie pour les défauts est prescrite à l'égard du maître peut également opposer cette prescription à l'architecte ou à l'ingénieur. En effet, s'il ne le pouvait pas, la règle de l'art. 371 al. 2 CO ne serait pas nécessaire pour garantir le droit de recours de ceux-ci contre lui. 
 
L'arrêt publié aux ATF 116 II 645 consid. 7b/bb p. 650 confirme la jurisprudence établie par les deux arrêts de 1989 précités. Référence y est faite à l'art. 83 al. 3 LCR, aux termes duquel les recours que peuvent exercer entre elles les personnes civilement responsables d'un accident de véhicules automobiles ou de cycles, ainsi que les autres droits de recours prévus par la présente loi, se prescrivent par deux ans à partir du jour où la prestation a été complètement effectuée et le responsable connu. D'après le Tribunal fédéral, "il s'agit là d'une disposition spéciale qui déroge à la règle jurisprudentielle, selon laquelle l'action récursoire en cas de solidarité imparfaite prend certes naissance quand l'ayant droit paie son dû, mais ne peut plus être exercée si les prétentions concurrentes du lésé contre un codébiteur sont déjà prescrites ou périmées (ATF 115 II 48 ss consid. 2)". 
 
Appliquant de manière stricte les principes posés dans le dernier arrêt cité, le Tribunal fédéral a jugé, en 1996, que l'inaction du demandeur à l'action récursoire, après qu'il avait eu connaissance de son droit de recours, interdisait à l'intéressé de se prévaloir du fait que les droits du lésé envers le défendeur à cette action n'étaient eux-mêmes pas encore prescrits (arrêt 2A.24/1994 du 31 janvier 1996, consid. 2c). 
A l'inverse, que de tels droits soient prescrits n'exclut pas nécessairement la possibilité d'intenter une action récursoire, lors même que le défendeur à cette action pourrait exciper de la prescription de la prétention du lésé à son encontre. Ainsi en allait-il dans une cause jugée en 1997 où un entrepreneur avait opposé sans succès l'exception de prescription à l'action récursoire du maître qui entendait se faire rembourser les sommes qu'il avait dû verser à des voisins ayant subi des dommages en raison de la mauvaise exécution des travaux confiés à cet entrepreneur (hypothèse dite de la Drittschadensliquidation). Le Tribunal fédéral, soulignant que l'action récursoire trouvait son fondement juridique dans la violation par l'entrepreneur de ses obligations contractuelles, a écarté cette exception sans attacher d'importance à l'argument tiré de la prescription des droits des voisins lésés à l'égard de l'entrepreneur fautif (arrêt 4C.3/1995 du 27 mai 1997, consid. 4c). 
 
Dans un arrêt de 2001, publié aux ATF 127 III 257 et traduit in SJ 2002 I p. 113 ss, le Tribunal fédéral a jugé à tout le moins discutable la conclusion, tirée par la cour cantonale de l'ATF 115 II 42 consid. 2, voulant que l'extinction par prescription des prétentions concurrentes du lésé exclue dans tous les cas l'exercice de l'action récursoire contre les codébiteurs (consid. 6a p. 265). Il a certes confirmé, en faisant appel à l'art. 2 al. 2 CC, que, si le titulaire du droit de recours affaiblit sans raison la position d'un coresponsable, notamment en ne lui dénonçant pas le litige qui l'oppose au lésé, il ne mérite aucune protection, si bien qu'il y a lieu de lui refuser le droit de faire valoir en justice sa créance récursoire sans égard au fait qu'elle n'est pas encore prescrite. Cependant, l'arrêt ajoute, de manière tout à fait claire, que la jurisprudence n'a pas encore tranché la question de savoir comment il convient de traiter les cas où le titulaire du droit de recours n'a pas eu de raison, avant la prescription des créances concurrentes du lésé contre d'autres coresponsables, de faire valoir sa créance récursoire ou n'a pas pu le faire du tout parce qu'il n'a pas pris connaissance à temps de la possibilité du recours. Et le Tribunal fédéral de souligner, tout en s'abstenant de prendre position de manière définitive sur la question soulevée: "Es kann ihm [i.e. au titulaire du droit de recours] dann unter solchen Umständen kein treuwidriges Verhalten vorgehalten werden, wenn er erst nach Verjährung der anderen Ersatzforderungen seinen Ausgleichsanspruch anmeldet" (consid. 6c p. 267). Un auteur s'est demandé, sur le vu de cette affirmation, si l'on pouvait vraiment en déduire que le Tribunal fédéral écarterait, en pareille hypothèse, l'exception de prescription soulevée par le défendeur à l'action récursoire (Alexander Müller, Regress im Schadensausgleichsrecht unter besonderer Berücksichtigung des Privatversicherers, thèse St-Gall 2006, p. 151). Pourtant, la plupart des auteurs qui se sont penchés sur la question n'ont pas hésité à franchir le pas (Isabelle Romy, in Commentaire romand, n. 17 ad art. 148 CO; Werro, op. cit., n. 1628; Frédéric Krauskopf, Zivilrechtliche Verjährung und Strassenverkehrsunfall: Darstellung des geltenden Rechts und ausgewählte Fragen, in Strassenverkehrsrechtstagung 16.-17. März 2006, Hubert Stöckli/Franz Werro [éd.], p. 119 ss, 136 note 103; Walter Fellmann, Solidarische Haftung und Verjährung des Ausgleichsanspruches bei unechter Solidarität, in Responsabilité et assurance [REAS] 2002 p. 113 ss, 119 in fine). Dans l'arrêt considéré, le Tribunal fédéral souligne, en outre, que la créance récursoire prend naissance quand le coresponsable indemnise le lésé, raison pour laquelle c'est aussi ce moment-là qui marque le début du délai de prescription de l'action récursoire, car une créance ne saurait se prescrire avant d'exister (consid. 6c p. 267). 
 
A l'occasion d'un arrêt rendu en 2003 sur un recours de droit public, le Tribunal fédéral a rappelé que la règle selon laquelle la créance récursoire de l'art. 148 al. 2 CO ne naît en principe qu'avec le paiement effectif par le débiteur de son dû n'est remise en question ni dans la jurisprudence ni dans la doctrine (arrêt 4P.155/2003 du 19 décembre 2003, consid. 8 et les références). 
Le 23 février 2004 enfin, le Tribunal fédéral a rendu un arrêt important sur des questions ayant un lien avec le problème présentement envisagé (ATF 130 III 362). On y trouve, clairement exprimés, des principes directeurs qui contribueront à la solution de celui-ci. Il en est ainsi de l'idée, déjà émise quelques mois plus tôt (arrêt 4C.27/2003 du 26 mai 2003, consid. 3.4, publié in SJ 2003 I p. 597 ss), voulant que l'art. 51 CO, consacré aux seuls rapports internes entre les différents responsables, institue un recours fondé ex jure proprio, c'est-à-dire qui naît dans la personne de celui qui a indemnisé le lésé. L'arrêt rappelle aussi que la solidarité imparfaite n'entraîne pas de subrogation du responsable dans les droits du créancier, au sens de l'art. 149 al. 1 CO, mais lui confère le droit de faire valoir, contre les autres débiteurs, une prétention récursoire qui prend naissance au moment du paiement fait au lésé. Il ajoute - précision utile - que le droit de faire valoir cette prétention est subordonné à la condition qu'un autre coresponsable existe. En effet, celui qui ne répond pas d'un dommage ne saurait en répondre solidairement. Par conséquent, si les droits du lésé envers la personne qu'un autre responsable du dommage entendait assigner en justice étaient déjà périmés au moment de la naissance de la prétention récursoire, comme c'était le cas dans l'affaire ayant donné lieu au prononcé de cet arrêt, la possibilité d'ouvrir action pour faire valoir cette prétention n'entrait plus en ligne de compte, faute de coresponsable (consid. 5.2). Le Tribunal fédéral a cependant tenu à préciser que cette hypothèse se distinguait des situations plus délicates dans lesquelles les conditions permettant d'engager la responsabilité du défendeur à l'action récursoire envers le lésé auraient pu être réalisées à un moment donné, mais ne le sont plus lorsque la prétention récursoire prend naissance. Il en va notamment ainsi, a-t-il ajouté, lorsque les prétentions du lésé envers le coresponsable sont prescrites (consid. 5.3, p. 370, où sont évoqués d'autres cas de figure comparables, tels que la remise de dette ou la conclusion d'une convention exclusive de responsabilité). 
 
Cet aperçu de la jurisprudence fédérale touchant le problème controversé démontre que celui-ci demeure entier. Il n'empêche que les arrêts rapportés ci-dessus contiennent un certain nombre d'éléments intéressants sur lesquels il sera possible de faire fond pour donner à ce problème une solution qui réponde, autant que faire se peut, aux attentes difficilement conciliables des parties concernées. 
5.2.2 C'est peu dire que la question de la prescription de l'action récursoire est controversée dans la doctrine, qu'il s'agisse du point de départ ou de la durée du délai. Comme le soulignent les auteurs de l'avant-projet de loi fédérale sur la révision et l'unification du droit de la responsabilité civile (ci-après: l'Avant-projet ou AP), les opinions émises à ce sujet "expriment une diversité déroutante" (Pierre Widmer/Pierre Wessner, Révision et unification du droit de la responsabilité civile, Rapport explicatif, p. 223, n. 2.8.7). On renoncera donc à les recenser ici, d'autant plus que ce travail a déjà été fait consciencieusement par des juristes familiarisés avec les problèmes touchant la responsabilité civile (voir notamment: Widmer/Wessner, op. cit., p. 224; Franz Werro, op. cit., n. 1575 ss et 1623 ss; le même, in Commentaire romand [ci-après cité: Werro, CR], n. 9 à 16 ad art. 50 CO et n. 33 à 37 ad art. 51 CO; Hubert Bugnon, op. cit., p. 137 ss). Seules seront dès lors exposées brièvement ci-après, sans que l'on puisse prétendre à l'exhaustivité d'ailleurs, les réponses qu'ont apportées les auteurs qui s'y sont intéressés à la question de savoir si la prescription de la créance du lésé contre l'un des coresponsables du dommage est opposable ou non au responsable qui a indemnisé le lésé et qui entend faire valoir une prétention récursoire contre ce coresponsable-là. 
Une partie de la doctrine considère, pour des motifs divers, que le codébiteur défendeur à l'action récursoire peut s'opposer à celle-ci en soutenant que sa propre dette envers le créancier commun est prescrite. Tel est, en particulier, l'avis exprimé par Karl Spiro (Die Begrenzung privater Rechte durch Verjährungs-, Verwirkungs- und Fatalfristen, vol. I, p. 492 ss). Selon cet auteur, la prétention du demandeur à l'action récursoire découlerait de la responsabilité du défendeur à cette action à l'égard du lésé; dès lors, le sort de cette prétention serait lié à celui de la créance principale du lésé envers ce défendeur, l'extinction de celle-ci excluant la possibilité de faire valoir celle-là. Au demeurant, pour Spiro, ne pas admettre la solution qu'il propose conduirait à des résultats inéquitables car l'art. 146 CO, en vertu duquel l'un des débiteurs solidaires ne peut aggraver par son fait personnel la position des autres, ne serait pas respecté suivant les circonstances (pour une tentative de réfutation de cette argumentation, cf. Bugnon, op. cit., p. 149 s.). D'autres auteurs pensent pouvoir tirer la même conclusion de l'arrêt publié aux ATF 115 II 42 consid. 2 (Heinz Rey, Ausservertragliches Haftpflichtrecht, 3e éd., n. 1724; Peter Gauch/Walter R. Schluep/Jörg Schmid/Heinz Rey, Schweizerisches Obligationenrecht, Allgemeiner Teil, vol. II, 8e éd., n. 3960; Anton K. Schnyder, Commentaire bâlois, Obligationenrecht I, 3e éd., n. 10 ad art. 51 CO). Peter Gauch, on l'a déjà vu, en fait de même en fondant son opinion sur la ratio legis de l'art. 371 al. 2 CO (op. cit., n. 2297; cf. consid. 5.2.1 ci-dessus). Quant à Bernard Corboz (La responsabilité des organes en droit des sociétés, n. 32 s. ad art. 759 CO), il qualifie d'intéressante l'opinion, professée par un courant doctrinal, selon laquelle le droit de recours trouverait sa justification dans une sorte de gestion d'affaires sans mandat, l'action y relative s'apparentant à l'action pour enrichissement illégitime (cf. Henri Deschenaux/Pierre Tercier, La responsabilité civile, 2e éd., § 36, n. 56). Comme le droit de recours naît au moment où le responsable qui entend l'exercer (i.e. le gérant) donne satisfaction au lésé, cette opinion impliquerait, selon l'auteur, que la coresponsabilité du défendeur potentiel à l'action récursoire (i.e. le maître) envers le lésé existât encore à ce moment-là pour que se produise l'effet extinctif du paiement sur la dette de ce coresponsable à l'égard du lésé, autrement dit pour que le sujet du recours se trouve d'une certaine manière enrichi illégitimement du fait que la part de la dette externe qu'il aurait dû payer lui-même a été éteinte par le paiement du gérant. La jurisprudence, ajoute l'auteur précité, n'a cependant pas adopté cette théorie, en ce sens qu'elle n'exclut pas qu'un recours soit possible dès que la coresponsabilité a existé, même si elle n'existe plus au moment du paiement, notamment parce que l'autre dette externe est déjà prescrite. 
Pour une autre partie de la doctrine, en revanche, la prescription de la créance du lésé contre l'un des coresponsables n'est pas opposable au titulaire du droit de recours. Ainsi, selon Bugnon (op. cit., p. 149 s.), s'il est vrai que la responsabilité du sujet au recours est une condition du droit de recours, la créance récursoire, en tant qu'elle relève des rapports internes gouvernés par des règles spécifiques, n'en est pas moins indépendante et distincte de la créance du lésé, ce qui est conforme à la notion de concours d'actions existant en cas de pluralité de responsables. Il ne se justifie donc pas, sous l'angle de la prescription notamment, de lier le sort du droit de recours du coresponsable à celui du droit d'action du lésé, ces droits ne s'exerçant pas sur le même plan. L'auteur considère, au demeurant, que le défendeur à l'action récursoire est suffisamment protégé par le délai subsidiaire de dix ans de l'art. 60 al. 1 CO, courant dès l'événement dommageable, auquel il propose de soumettre cette action. D'autres auteurs arrivent à la même conclusion que Bugnon, certains en fondant leur opinion sur l'interprétation a contrario de l'arrêt publié aux ATF 127 III 257 consid. 6c (Brehm, op. cit., n. 142 in fine ad art. 51 CO; Romy, ibid.; Werro, ibid.; Fellmann, ibid.; Krauskopf, ibid.). 
5.2.3 En droit allemand, la jurisprudence et la doctrine apparemment majoritaire considèrent que la prescription intervenue dans les rapports externes ne doit pas pouvoir interférer dans les rapports internes, de sorte que le défendeur à l'action récursoire ne saurait en exciper (voir, p. ex., les arrêts rendus le 21 novembre 1953 et le 9 mars 1972 par le Bundesgerichtshof, publiés in Entscheidungen des Bundesgerichtshofes in Zivilsachen [BGHZ], vol. 11, n. 20, p. 170 ss, consid. 3 et vol. 58, n. 34, p. 216 ss, consid. 2; cf., parmi d'autres: MünchKommBGB/Peter Bydlinski, vol. 2a, 4e éd., n. 9 ad § 426 BGB et Staudinger/Noack [2005], n. 9 ad § 426 BGB, chacun avec des références). Selon Spiro, ce serait aussi la solution retenue par les droits autrichien et italien, alors que le droit français aurait opté pour la solution inverse en faisant de la prescription une exception valable erga omnes (op. cit., § 208, p. 489 et les références). 
5.2.4 La révision du droit de la responsabilité civile a été mise en chantier en 1988. Elle en est actuellement au stade de l'Avant-projet (pour plus de détails, voir le site internet du Département fédéral de justice et police, www.ejpd.admin.ch, sous la rubrique "Thèmes" ainsi que les sous-rubriques en cascade "Economie", "Législation" et "Responsabilité civile"). 
Les auteurs de l'Avant-projet ont mis en évidence l'absence, dans le droit actuel, d'une réglementation spécifique du problème de la prescription de l'action récursoire, le manque de fermeté de la jurisprudence en la matière et la diversité peu commune des opinions doctrinales émises à ce sujet. Partant de ce constat et se rangeant à l'opinion de la Commission d'étude, ils ont acquis la conviction de la nécessité d'une réglementation spécifique en ce domaine. Selon eux, cette réglementation devrait se fonder sur le principe que le titulaire de la prétention récursoire agit en vertu d'un droit propre, de sorte que le régime de la prescription de l'action récursoire devrait obéir à des règles spéciales. Aussi, de lege ferenda, proposent-ils de généraliser la règle posée à l'art. 83 al. 3 LCR, déjà cité (cf. consid. 5.2.1), et reprise à l'art. 39 al. 3 de la loi fédérale du 4 octobre 1963 sur les installations de transport par conduites (LITC; RS 746.1), car il s'agit là d'une règle claire et éprouvée. Toutefois, pour tenir compte des intérêts des personnes susceptibles d'être l'objet d'un recours, ils suggèrent, d'une part, de soumettre l'action récursoire à la prescription absolue, qui devrait courir comme celle de la créance du lésé, et, d'autre part, d'obliger la personne recherchée par celui-ci à aviser celles qu'elle tient pour coresponsables (Widmer/Wessner, op. cit., p. 225 ss; voir aussi: Pierre Wessner, La prescription des actions réparatoires et récursoires au regard de la révision totale du droit de la responsabilité, in Haftpflicht- und Versicherungsrechtstagung 1997, St-Gall, p. 143 ss, 154 à 156). Forts de ces considérations, les auteurs de l'Avant-projet ont rédigé un art. 55c dont la teneur est la suivante: 
 
"IV. Action récursoire 
1. L'action récursoire (...) se prescrit par trois ans à compter du jour où la réparation a été complètement exécutée et où la personne coresponsable est connue; elle se prescrit dans tous les cas par 20 ans à compter du jour où le fait dommageable s'est produit ou a cessé de se produire. 
2. Lorsqu'une personne est recherchée en réparation, elle en avisera les personnes qu'elle tient pour coresponsables; à défaut, la prescription court à compter du jour où elle aurait dû donner cet avis conformément aux règles de la bonne foi." 
 
Sans doute les auteurs de l'Avant-projet n'évoquent-ils pas expressément la question de l'incidence de la prescription de la créance du lésé sur le sort de l'action récursoire. Il ressort toutefois clairement de leur argumentation, fût-ce de manière implicite, qu'ils excluent la possibilité pour le défendeur à cette action d'invoquer la prescription de sa propre créance (recte: dette) à l'égard du lésé. Semblable conclusion s'inscrit d'ailleurs dans la logique du système qu'ils ont élaboré, lequel prévoit la suppression de la distinction entre la solidarité parfaite et la solidarité imparfaite, accompagnée du maintien de l'art. 136 al. 1 CO (Widmer/Wessner, op. cit., p. 166 s.). 
5.3 
5.3.1 L'exposé des solutions esquissées par la jurisprudence et la doctrine pour résoudre la question litigieuse, ainsi que des propositions faites de lege ferenda dans le même but, suffit à démontrer la complexité du problème. Cette complexité tient à la nature même du concours de responsabilités et au caractère tripartite des rapports obligationnels qui en découlent du point de vue de la personne sujette au recours. En effet, considérée sous cet angle, la prétention récursoire associe deux créances visant la même personne, quoiqu'à des niveaux différents: sur le plan des rapports externes, celle du lésé contre la personne en question, laquelle créance coexiste avec une autre créance du lésé contre un coresponsable au moins, à défaut de quoi il n'y aurait pas de concours d'actions ni, partant, de solidarité passive; sur le plan des rapports internes, la créance dont est titulaire à l'endroit de ladite personne le responsable qui a indemnisé le lésé au-delà de sa part. La difficulté consiste à déterminer l'incidence des rapports externes sur les rapports internes pour savoir si et, le cas échéant, dans quelle mesure les modalités de la créance issue de ceux-là interfèrent sur la prétention découlant de ceux-ci. 
 
Par ailleurs, il serait illusoire d'espérer trouver une solution qui, tout en ne s'écartant pas de l'orthodoxie juridique, répondît aux attentes difficilement conciliables des sujets actif et passif de la prétention récursoire. Exclure toute possibilité de faire valoir une telle prétention, motif pris de la prescription de la créance du lésé contre le coresponsable défendeur à l'action récursoire, reviendrait à faire supporter au demandeur à cette action une part du dommage qu'il incomberait normalement à un autre responsable d'assumer. Dans l'hypothèse d'un dommage résultant à la fois de la violation d'un contrat et de la commission d'un acte illicite, le responsable aquilien serait généralement avantagé par rapport au responsable contractuel, en dérogation à la règle de l'art. 51 al. 2 CO, étant donné que le lésé, pour bénéficier du délai de prescription décennal (art. 127 CO) et du renversement du fardeau de la preuve (art. 97 al. 1 CO), serait le plus souvent enclin à actionner le second et qu'il pourrait le faire bien après l'expiration du délai de prescription annal applicable à la prétention concurrente (art. 60 al. 1 CO), sans être tenu du reste à entreprendre quoi que ce soit pour interrompre le cours de ce délai. A l'inverse, admettre la recevabilité de l'action récursoire, en dépit de la prescription des droits du lésé à l'égard de la personne recherchée, irait à l'encontre des intérêts du défendeur à cette action. Dans ce cas, en effet, une circonstance purement fortuite - la présence, à ses côtés, d'un responsable contractuel - priverait celui-ci du bénéfice du court délai de prescription valable dans ses rapports avec le lésé et ferait qu'il pourrait être actionné par un coresponsable des années plus tard, alors qu'il ne s'y attendait pas et qu'il n'avait, de ce fait, pas conservé les preuves lui permettant de se défendre correctement. 
 
Force est, dès lors, de trancher la question délicate qui se pose ici en accordant la préférence à l'un des deux sujets de la prétention récursoire, tout en essayant de sauvegarder au mieux les intérêts de l'autre. On le fera en ayant égard au but de la solidarité passive, à la nature de la créance récursoire, de même qu'à l'effet de la prescription extinctive et à la finalité de cette institution. 
5.3.2 La solidarité passive vient en aide au lésé qui demande réparation de son préjudice imputable à une pluralité de responsables. Elle lui permet d'agir contre chacun de ceux-ci pour la totalité du dommage aussi longtemps qu'il n'a pas été entièrement désintéressé (ATF 114 II 342 consid. 2b p. 344; 112 II 138 consid. 4a p. 143), à la seule condition que le comportement de la personne recherchée soit en relation de causalité adéquate avec l'intégralité du dommage (ATF 127 III 257 consid. 5a). Le rapport interne entre les coresponsables ne le concernant pas, le lésé peut choisir la partie adverse à son gré; il lui est donc loisible de n'actionner qu'un seul des débiteurs responsables (voir les deux arrêts précités, ibid.). Dans la conception classique de la solidarité passive - cette conception, objet de critiques (voir les auteurs et la jurisprudence mentionnés par Widmer/Wessner, op. cit., p. 169 s., note 835), a déjà été remplacée dans le droit de la société anonyme (art. 759 al. 1 CO) et pourrait l'être de manière générale de lege ferenda (art. 53b al. 2 AP) par une solidarité dite différenciée (sur cette notion, cf. ATF 127 III 453 consid. 5d; 122 III 324 consid. 7b) -, les exceptions personnelles ne doivent être prises en considération qu'au moment du partage interne; à ce défaut, la notion de solidarité serait vidée de son contenu s'il fallait apprécier, de manière individualisée, dans chaque cas, la responsabilité de la personne recherchée. 
 
Comme le lésé ne peut, en principe, obtenir qu'une fois la réparation de son dommage, le paiement effectué par l'un des obligés libère les autres dans les rapports externes (ATF 89 II 118 consid. 5a p. 122). A ne considérer que l'intérêt du lésé, l'effet qu'emporte la solidarité passive apparaît nécessaire et suffisant. Tout autre est la situation, si l'on se met à la place de celui qui a dédommagé le lésé. Il se peut fort bien que ce codébiteur ait été amené, ce faisant, à consentir un sacrifice financier qui est hors de proportion avec la mesure dans laquelle il a contribué à la survenance du dommage. Que l'équité ne puisse s'en accommoder, cela va sans dire. Il se justifie, au contraire, de faire en sorte que l'équilibre, volontairement sacrifié sur le plan externe au profit du lésé, soit rétabli sur le plan interne afin que chacun des coresponsables supporte, au final, le poids de la dette en fonction de sa part de responsabilité. La loi y pourvoit en disposant que celui qui paie au-delà de sa part a, pour l'excédent, un recours contre les autres (art. 148 al. 2 CO). Pour ce qui est du concours entre responsabilités de natures différentes, elle instaure elle-même, à l'art. 51 al. 2 CO, une hiérarchie entre trois groupes de responsables, qui privilégie le responsable contractuel par rapport au responsable aquilien, mais dont il est possible de s'écarter suivant les circonstances (cf. ATF 116 II 645 consid. 3b). 
 
En vertu de l'art. 50 al. 2 CO, applicable par analogie au concours de diverses causes du dommage (art. 51 al. 1 CO), c'est au juge qu'il appartient de faire usage de son pouvoir d'appréciation pour déterminer qui doit, en définitive, supporter le poids de la réparation dans les rapports internes. Conformément à la jurisprudence et à la doctrine, le lésé ne peut pas s'immiscer dans ce processus, notamment en dérogeant, par le biais d'une cession de ses droits à un responsable, à l'ordre des recours prévu par l'art. 51 al. 2 CO (ATF 115 II 24 consid. 2b p. 27; cf., parmi d'autres: Brehm, op. cit., n. 16 et 45 ad art. 51 CO). En d'autres termes, comme le souligne un auteur, le choix arbitraire du créancier ne saurait déterminer qui supportera le fardeau de la prestation (Bernard Corboz, La distinction entre solidarité parfaite et solidarité imparfaite, thèse Genève 1974, p. 68). C'est pourtant à ce résultat que l'on aboutirait en excluant la possibilité d'une action récursoire du seul fait que le lésé n'a pas interrompu la prescription de sa créance à l'égard du coresponsable contre lequel celui qui estime avoir payé au-delà de sa part entend ouvrir une telle action. Ce résultat serait d'autant plus choquant que la personne recherchée par le lésé n'a pas les moyens d'interrompre elle-même la prescription de ladite créance (voir toutefois Spiro, op. cit., § 210, p. 495, pour qui la personne recherchée par le lésé pourrait demander à celui-ci d'interrompre la prescription contre les autres responsables afin de sauvegarder ses futurs droits de recours). Dans ce cas, la directive de l'art. 51 al. 2 CO resterait souvent lettre morte dès lors que, pour les motifs sus-indiqués (durée du délai de prescription et fardeau de la preuve), tout porte le lésé à s'en prendre en premier lieu à la personne qui répond en vertu d'une obligation contractuelle. Même si cette directive n'a pas un caractère absolu, il serait néanmoins contraire à son esprit que le fardeau de la réparation pesât en fin de compte sur les épaules du responsable contractuel, en particulier dans l'hypothèse où celui-ci n'aurait commis qu'une faute bénigne en lien de causalité avec la totalité du dommage, pour le seul motif que le lésé n'a pas interrompu la prescription de sa créance envers la personne dont l'acte illicite est la cause principale de ce même dommage. Sauf à rendre illusoire le rétablissement, voulu par le législateur, d'un certain équilibre, sur le plan interne, entre la part de responsabilité et le fardeau de la réparation, corollaire du choix laissé au lésé, sur le plan externe, quant au débiteur qui devra l'indemniser, il convient donc de bien dissocier ces deux plans sous le rapport de la prescription également. 
 
Sans doute cette solution a-t-elle pour conséquence que la personne répondant d'un acte illicite pourra être recherchée par un coresponsable bien après la prescription des droits du lésé à son égard. Il faut pourtant s'en accommoder. D'abord, il n'y a rien d'inéquitable à maintenir en principe la responsabilité plus avancée de celui qui a commis une faute délictuelle (arrêt 4C.27/2003 du 25 mai 2003, consid. 3.6, publié in SJ 2003 I p. 597 ss). De ce point de vue, dans la mise en balance des intérêts respectifs des codébiteurs, celui du responsable contractuel à ne pas devoir supporter, au final, une part du dommage qui ne corresponde pas à sa part de responsabilité pèse plus lourd que celui du responsable aquilien à pouvoir échapper, du fait de la prescription des droits du lésé envers lui, à l'obligation d'assumer une part du dommage correspondant à sa part de responsabilité. Il faut ensuite relativiser la portée de l'objection voulant qu'il n'y ait pas de raison de désavantager le responsable aquilien parce qu'il a la malchance d'avoir, à ses côtés, un responsable contractuel soumis à une prescription plus longue. On imagine mal, en effet, que, si ce responsable aquilien était seul à répondre du dommage, le lésé ne l'actionnerait pas en temps utile ni n'interromprait la prescription de ses droits contre lui avant l'expiration du délai annal. La jurisprudence, enfin, a pris en compte les intérêts de la personne sujette au recours, d'une part, en obligeant celui qui est recherché en réparation à informer cette personne qu'il pourrait se retourner contre elle, ce qui permet à cette dernière d'agir en temps utile pour la défense de ses droits (conservation des preuves, consultation d'un homme de loi, annonce du cas à l'assureur, participation à une transaction, voire au procès principal, etc.), d'autre part en soumettant l'action récursoire à une prescription relative de courte durée et à la prescription absolue de dix ans courant dès le jour où le fait dommageable s'est produit. 
5.3.3 Le principal objectif de la solidarité passive, en tant qu'elle s'applique au domaine de la responsabilité civile, est d'assurer au lésé la réparation du préjudice qu'il a subi. Le second est de faire en sorte que chaque responsable supporte, en définitive, la part de responsabilité correspondant à l'intensité de l'adéquation qui le relie au préjudice (Bugnon, op. cit., p. 88). Concrétisant ce second objectif, la loi dispose, d'une manière générale, que celui qui paie au-delà de sa part a, pour l'excédent, un recours contre les autres (art. 148 al. 2 CO). La répartition interne de la dette solidaire peut être fixée par des règles conventionnelles préalables, par des dispositions légales régissant le rapport contractuel qui unit les codébiteurs, voire, en l'absence d'un tel rapport, par des normes légales spéciales ou, à ce défaut, par la mise en oeuvre des dispositions relatives à l'enrichissement illégitime et à la gestion d'affaires sans mandat (sur ces questions, cf., parmi d'autres: Romy, op. cit., n. 2 ss ad art. 148 CO). 
 
L'art. 51 CO, applicable au concours entre responsabilités de natures différentes, est l'une de ces dispositions spéciales. Selon le dernier état de la jurisprudence, il institue un recours fondé ex jure proprio, c'est-à-dire qui naît dans la personne de celui qui paie l'indemnité. Ainsi, la solidarité imparfaite n'entraîne pas de subrogation du responsable dans les droits du créancier, au sens de l'art. 149 al. 1 CO, mais seulement une action récursoire de ce responsable contre les autres coresponsables, action qui prend naissance au moment du paiement au lésé (ATF 130 III 362 consid. 5.2). C'est aussi ce moment qui marque le point de départ du délai de prescription relatif de cette action, fixé par voie prétorienne à un an (ATF 115 II 42 consid. 2a p. 49), car le délai de prescription ne peut pas commencer à courir avant même que la créance ne soit devenue exigible (art. 130 al. 1 CO), ce qui présuppose l'existence de celle-ci (ATF 127 III 257 consid. 6c). 
 
Il est conforme au caractère autonome de la prétention récursoire, ainsi reconnu, que le sort de cette dernière ne soit pas lié à celui de la créance dont le lésé est titulaire envers le sujet passif de ladite prétention. Par conséquent, la prescription des droits du lésé à l'égard de l'un des responsables du préjudice ne doit pas pouvoir empêcher le coresponsable qui a dédommagé le lésé de faire valoir sa créance récursoire contre ce responsable-là. 
5.3.4 Le droit de recours est subordonné à la condition qu'un coresponsable existe. En l'absence de responsabilité plurale, il ne saurait y avoir d'action récursoire. Celui qui ne répond pas d'un dommage ne peut pas en répondre solidairement. C'est la raison pour laquelle le droit de recours découlant de la solidarité imparfaite ne permet pas de rechercher une personne qui ne pouvait en aucune façon être tenue pour responsable à l'égard du lésé parce que les droits de celui-ci envers elle étaient périmés (ATF 130 III 362 consid. 5.2 p. 370). 
 
Ce cas de figure se distingue d'autres hypothèses, en particulier de celle où la créance du lésé envers le coresponsable, défendeur potentiel à l'action récursoire, est prescrite (même arrêt, consid. 5.3 p. 370). D'un point de vue théorique, pareille distinction est conforme au droit fédéral. En effet, contrairement à la péremption (Verwirkung, perenzione), qui entraîne l'extinction totale du droit subjectif suite à l'expiration du délai dans lequel le titulaire devait l'exercer ou accomplir un acte nécessaire à son exercice (Pascal Pichonnaz, Commentaire romand, n. 7 ad art. 127 CO), la prescription extinctive ou libératoire (Verjährung, prescrizione), une fois acquise, ne fait que paralyser le droit d'action lié à la créance qu'elle atteint, laquelle n'en subsiste pas moins en tant qu'obligation naturelle ou imparfaite (ATF 99 II 185 consid. 2b p. 189 et les références). Autrement dit, la prescription libératoire n'éteint pas le droit d'une manière radicale (Pierre Engel, Traité des obligations en droit suisse, 2e éd., p. 798 let. D). Il peut y être renoncé (art. 141 al. 1 CO; ATF 132 III 226 consid. 3.3) et le juge ne peut suppléer d'office le moyen en résultant (art. 142 CO). La prescription n'empêche pas le créancier de faire valoir le gage mobilier constitué pour garantir la créance (art. 140 CO). Il est possible d'invoquer la compensation d'une créance prescrite, si la condition posée à l'art. 120 al. 3 CO est réalisée. Au demeurant, la dette prescrite reste ce qu'elle est, c'est-à-dire une obligation, fût-elle affaiblie (Engel, ibid.); d'où il suit que ce qui a été payé pour acquitter une dette prescrite ne peut être répété, parce qu'il ne s'agit pas du paiement d'un indu (art. 63 al. 2 CO). Cela étant, force est d'admettre que l'effet libératoire qu'emporte l'exécution de l'obligation par l'un des débiteurs solidaires (art. 147 al. 1 CO) se produit aussi à l'égard du codébiteur dont la dette est prescrite. Du fait de l'extinction de sa dette, qui entraîne une diminution de son passif, l'intéressé se trouve enrichi aux dépens du coresponsable qui a éteint cette dette, tel un gérant d'affaires sans mandat. Aussi n'y a-t-il aucune raison d'exclure ce codébiteur du processus de répartition interne de la dette solidaire, ni, partant, de le soustraire à l'action récursoire de celui qui a payé au-delà de sa part. 
Un autre argument vient étayer cette conclusion. A cet égard, il convient de rappeler, au préalable, que, selon une jurisprudence bien établie et la doctrine moderne, si l'on excepte les art. 136 et 149 al. 1 CO, les règles régissant la solidarité passive parfaite, et singulièrement l'art. 147 CO, sont applicables par analogie à la solidarité imparfaite (arrêt 4C.27/2003, précité, consid. 3.4 avec de nombreuses références). Or, le principe posé par l'art. 147 al. 2 CO veut que la libération de l'un des débiteurs envers le créancier sans que la dette ait été payée, notamment lorsque celle-ci a été remise par le créancier (pour d'autres cas, cf. Romy, op. cit., n. 3 ad art. 147 CO), soit personnelle, de sorte qu'elle n'éteint pas les obligations des autres débiteurs solidaires si ce n'est dans la mesure indiquée par les circonstances ou la nature de l'obligation (pour une exception au principe, cf., p. ex., le dernier arrêt cité, consid. 3.5.4.2). Ce caractère personnel a aussi pour conséquence que le débiteur libéré par le créancier reste tenu, dans les rapports avec ses codébiteurs, du montant de sa quote-part, sauf accord interne contraire. A plus forte raison doit-il en aller de même lorsque la dette de l'un des codébiteurs est prescrite, du moment que la prescription n'éteint pas la dette mais paralyse l'action, qu'elle ne profite qu'au débiteur qui s'en prévaut et qu'elle est indépendante pour chaque débiteur, qui doit l'invoquer lui-même (Romy, op. cit., n. 3 à 6 ad art. 147 CO, n. 17 ad art. 148 CO et note 27, p. 818). Ces considérations démontrent, a contrario, qu'il n'est pas nécessaire que la coresponsabilité existe encore au moment où la créance récursoire prend naissance - à savoir, lorsque le débiteur recherché désintéresse le créancier - pour que le titulaire de cette créance puisse la faire valoir en justice, ni, a majore minus, que la créance du lésé découlant de cette coresponsabilité ne soit point encore prescrite à ce moment-là. Il suffit que la coresponsabilité ait existé, même si elle n'existe plus au moment du paiement, parce que la personne sujette au recours a vu sa dette remise par le lésé, ou qu'elle ne puisse plus donner lieu à une action judiciaire, parce que ce dernier a laissé prescrire ses droits contre cette personne. A l'inverse et par identité de motifs, le fait que la créance du lésé envers le responsable sujet au recours existe toujours et ne soit pas prescrite au moment où le lésé est désintéressé par un autre responsable - ce qui sera généralement le cas en matière de solidarité parfaite, puisque l'interruption de la prescription contre l'un des débiteurs déploie ses effets contre tous (art. 136 al. 1 CO) - ne saurait profiter au titulaire du droit de recours et n'empêchera pas la créance récursoire de se prescrire, étant donné qu'elle obéit à ses propres règles. 
En définitive, la prescription, resp. l'absence de prescription, de la créance du lésé contre le responsable sujet au recours ne doit pas pouvoir être opposée au titulaire de la prétention récursoire, resp. bénéficier à celui-ci. 
5.3.5 La prescription est une institution qui vise avant tout à protéger efficacement les intérêts privés du débiteur (Pichonnaz, op. cit., n. 2 ad art. 127 CO): au terme d'une période facilement déterminable, la personne impliquée dans la survenance d'un événement dommageable ou ses héritiers doivent pouvoir se sentir à l'abri de prétentions juridiques (Widmer/Wessner, op. cit., p. 226). S'agissant de l'action récursoire, ladite période débute à partir du moment où le demandeur à cette action a indemnisé le lésé. On peut d'ailleurs ajouter - précision utile, qui figure notamment à l'art. 83 al. 3 LCR et à l'art. 55c al. 1 AP - que la partie demanderesse à l'action récursoire doit avoir connaissance de la partie défenderesse, cette condition cumulative signifiant que le dies a quo peut être différent s'il y a plusieurs coresponsables impliqués (Widmer/Wessner, ibid.). On a toutefois affaire à un délai relatif, lequel, étant donné ce caractère, ne permet pas de satisfaire totalement le besoin de sécurité juridique du défendeur potentiel à l'action récursoire (Werro, CR, n. 21 ad art. 60 CO). Tel est, en particulier, le cas lorsque le désintéressement du lésé a lieu tardivement parce que le codébiteur qui a payé avait renoncé à se prévaloir de la prescription, pour une raison valable (p. ex. pour éviter la notification d'un commandement de payer ou l'ouverture d'une action judiciaire), ou l'avait interrompue, conformément à l'art. 135 ch. 1 CO, en reconnaissant - à juste titre - sa dette (cf. Bugnon, op. cit., p. 150). Aussi, pour protéger convenablement le codébiteur sujet au recours, la jurisprudence applique-t-elle à l'action récursoire un délai absolu courant à compter d'une date certaine. Ce délai, qui part du jour où le fait dommageable s'est produit (ou a cessé de se produire), a été fixé à dix ans, par analogie avec celui que prévoit l'art. 60 al. 1 CO, dans l'idée d'harmoniser les régimes de prescription des créances principale et récursoire dans le domaine de la responsabilité civile. Il reste dans des limites raisonnables et est inférieur de moitié à celui que prévoit l'Avant-projet (20 ans, selon l'art. 55c al. 1; Benoît Chappuis, Quelques réflexions d'un praticien sur l'avant-projet de loi fédérale sur la révision et l'unification du droit de la responsabilité civile, in La réforme du droit de la responsabilité civile, éd. par Bénédict Foëx et Franz Werro, 2004, p. 123 ss, 138, se demande s'il est vraiment opportun de prévoir un délai de prescription qui soit le double de celui durant lequel les livres, les pièces comptables et la correspondance doivent être conservés, en vertu de l'art. 962 al. 1 CO). 
L'institution de la prescription ne suffit cependant pas toujours à protéger la personne sujette au recours. En effet, lorsque celle-ci apprend tardivement, mais avant l'expiration du délai de prescription de l'action récursoire, qu'elle devra résister à une telle action, elle peut être placée dans une situation difficile en ce qui concerne la sauvegarde de ses droits: non seulement, elle n'aura pas pu intervenir dans le procès principal pour y faire valoir son point de vue, si la loi de procédure civile applicable lui permettait de le faire, mais encore se pourrait-il qu'elle ait perdu entre-temps des moyens de preuve propres à l'exonérer, soit qu'elle n'ait pas jugé utile de conserver des pièces probantes, parce qu'elle se croyait à l'abri d'une poursuite judiciaire, soit qu'elle doive déplorer la disparition de témoins capitaux. Pour parer à ces inconvénients, la jurisprudence, partant de la prémisse selon laquelle le créancier récursoire qui entend s'en prendre à un coresponsable déjà libéré à l'égard du lésé par la prescription doit lui donner un avis dès qu'on peut l'exiger de lui en appliquant les règles de la bonne foi, fait appel au correctif de l'art. 2 al. 2 CC et refuse au titulaire de la créance récursoire non prescrite l'exercice de son droit s'il a omis de procéder en temps utile à un tel avis (ATF 127 III 257 consid. 6c). L'Avant-projet prend, lui aussi, en considération les intérêts légitimes du sujet au recours, mais il attache une sanction moins drastique que la déchéance des droits du créancier récursoire à l'inobservation du devoir d'avis imposé à cette partie, puisque le non-respect de cette "incombance" ne devrait avoir pour conséquence que de faire courir le délai de prescription de l'action récursoire à compter du jour où cet avis aurait dû être donné conformément aux règles de la bonne foi (art. 55c al. 2 AP). La solution jurisprudentielle paraît un peu floue à certains auteurs (voir, parmi d'autres: Corboz, premier op. cit., n. 33 ad art. 759 CO) et les auteurs de l'Avant-projet concèdent que la disposition proposée par eux peut le paraître aussi (Widmer/Wessner, op. cit., p. 227). Il n'en demeure pas moins, comme le souligne un autre auteur, que c'est là le prix à payer pour la prise en compte des intérêts légitimes des coresponsables (Chappuis, ibid.). 
 
La loi offre, enfin, de quoi remédier aux résultats inéquitables qu'entraînerait, selon Spiro (op. cit., § 209, p. 492 s.), l'inopposabilité dans les rapports internes de la prescription acquise face au lésé. L'auteur cite l'hypothèse dans laquelle, les prétentions de celui-ci envers deux codébiteurs étant prescrites, l'un d'entre eux désintéresserait néanmoins le lésé pour intenter ensuite une action récursoire à l'autre. A son avis, le caractère personnel de l'exception de prescription, combiné avec la théorie de l'indépendance de la prétention récursoire, permettrait, dans ce cas, au demandeur à l'action récursoire de faire supporter par le défendeur à cette action tout ou partie de la dette externe qu'il a lui-même éteinte volontairement, bien qu'elle fût prescrite, ce qui serait choquant (dans ce sens aussi: Bugnon, op. cit., p. 151). Il est vrai que, dans une telle hypothèse, on ne saurait reprocher au responsable qui a payé de ne pas avoir invoqué la prescription, puisqu'il n'était pas tenu de le faire en raison du caractère personnel de l'exception y relative (cf. art. 145 al. 2 CO a contrario). En revanche, l'intéressé devrait être sanctionné par la perte de son droit de recours pour avoir aggravé, par son fait personnel (i.e. la renonciation, par acte concluant, à la prescription acquise), la position de l'autre codébiteur, contrairement à l'interdiction faite à tout codébiteur par l'art. 146 CO. Qu'il y ait aggravation de cette position et qu'elle lui soit imputable n'est pas contestable: en éteignant volontairement la dette externe qu'il sait être prescrite, le débiteur du lésé fait naître sa créance récursoire à l'égard du codébiteur, à concurrence du montant qui excède sa propre part de responsabilité, laquelle créance n'existerait pas à ce défaut. Par son paiement, il éteint certes, dans cette mesure, la créance prescrite du lésé envers le codébiteur, tel un gérant d'affaires; mais il ne le fait pas dans l'intérêt de ce codébiteur, c'est-à-dire le maître, car il sait qu'il ne pourrait pas recourir contre ce dernier s'il ne désintéressait pas lui-même le lésé en acquittant volontairement la dette externe prescrite. Sans doute ne s'est-il pas enrichi, ce faisant, puisqu'il a désintéressé le lésé de ses propres deniers. Il n'en demeure pas moins qu'il a entrepris une gestion qui n'était pas dans l'intérêt du maître (cf. art. 423 CO). Celui-ci (i.e. le codébiteur sujet au recours) est, dès lors, titulaire d'une créance en réparation du dommage causé par cette ingérence (cf. art. 420 CO), laquelle créance correspond au montant que le gérant a payé pour lui en indemnisant le lésé, et il peut opposer cette créance en compensation à la créance récursoire du gérant, d'un montant équivalent, qui a pris naissance avec ce paiement (art. 120 al. 1 CO). Pour le surplus, on ne voit pas en quoi - autre hypothèse évoquée par Spiro (ibid.) - l'un des débiteurs solidaires aggraverait la position du codébiteur dont la dette externe est prescrite par le seul fait d'interrompre la prescription de sa propre dette à l'égard du lésé en reconnaissant celle-ci, fût-ce de manière injustifiée. Contrairement à ce qu'écrit cet auteur (op. cit., p. 493, n. 10), ce n'est pas, en effet, la reconnaissance de dette, interruptive de prescription, qui constitue, dans ce cas, le fondement juridique de la prétention récursoire du débiteur ayant reconnu sa dette, mais le désintéressement subséquent du lésé par ce même débiteur. Et l'on retombe alors dans l'hypothèse envisagée plus haut, à savoir celle où le titulaire du droit de recours acquitte la dette externe alors qu'il aurait pu s'en dispenser (ici en n'interrompant pas la prescription). Au demeurant, si le demandeur à l'action récursoire a désintéressé le lésé après avoir reconnu une dette qui n'existait pas, le défendeur à cette action pourra s'en prévaloir pour s'opposer à l'admission de la demande. C'est le lieu d'observer, à ce propos, qu'un éventuel jugement condamnatoire fondé sur cette reconnaissance de dette ne lierait pas le juge appelé à connaître ultérieurement de l'action récursoire (cf. Brehm, op. cit., n. 10 ad art. 51 CO; Bugnon, op. cit., p. 127). 
 
5.4 Cela étant, les explications qui précèdent permettent de répondre à la question laissée ouverte par la jurisprudence fédérale en posant les principes suivants: la prescription de la créance du lésé contre l'un des coresponsables n'empêche pas le responsable qui a désintéressé le lésé de faire valoir sa créance récursoire contre ce coresponsable, pour autant qu'il l'ait avisé qu'il le tenait pour coresponsable dès qu'il était en mesure de le faire. A moins qu'une autre solution ne découle de la relation contractuelle pouvant exister entre les responsables solidaires concernés par l'action récursoire, cette action se prescrit par un an à compter du jour où le lésé a été désintéressé et le coresponsable connu, conformément au régime ordinaire applicable en matière de responsabilité extracontractuelle; elle se prescrit dans tous les cas par dix ans à partir du jour où le fait dommageable s'est produit ou a cessé de se produire. 
 
La solution retenue s'inscrit dans le droit fil de la jurisprudence récente; prenant en considération, dans la mesure du possible, les intérêts opposés des sujets actif et passif de la prétention récursoire, elle correspond à l'opinion de la doctrine majoritaire, rejoint celle adoptée par d'autres ordres juridiques proches du droit suisse et préfigure, à peu de choses près, la manière dont la question litigieuse pourrait être réglementée à l'occasion de la révision du droit de la responsabilité civile. 
 
Il reste à appliquer les principes juridiques ainsi posés aux faits constatés dans le jugement déféré pour savoir si la cour cantonale a violé ou non le droit fédéral. 
 
6. 
6.1 Pour rejeter l'exception de prescription soulevée par l'appelée en cause, la cour cantonale a tenu le raisonnement suivant. 
L'architecte a appelé en cause Y.________ par une requête déposée le 14 août 1996. A cette date, le délai de prescription absolu de dix ans n'était pas échu puisque l'explosion dommageable s'était produite le 5 octobre 1988. Par cette démarche procédurale, l'intéressé a donc interrompu le délai en question. Quant au délai de prescription relatif, qui était d'un an dès le désintéressement des lésés, il a également été respecté dans la présente espèce. En effet, l'assurance de l'architecte a indemnisé B.________ et C.________, les victimes de l'explosion, en versant, en octobre 1995, 140'000 fr. à la première et 13'797 fr. 50 à la CNA pour le second. Or, l'appel en cause est intervenu moins d'une année après ces paiements. S'agissant des autres prétentions élevées par la demanderesse, elles n'ont pas encore donné lieu à des paiements de la part de l'architecte et de l'entreprise, si bien que la prescription n'a pas commencé à courir à leur égard. Au demeurant, on ne saurait reprocher aux défendeurs d'avoir tardé à faire valoir leurs droits à l'encontre de l'appelée en cause, car ils devaient d'abord savoir, d'une part, qu'une demande allait être introduite contre eux et, d'autre part, que l'appelée en cause n'en ferait pas l'objet avant d'envisager de se retourner contre celle-ci; comme ces éléments n'ont été connus que le 2 juillet 1996, date d'introduction de la demande principale, l'appel en cause, déposé le mois suivant, n'était pas tardif. 
6.2 
6.2.1 L'appelée en cause prétend que le résultat auquel est parvenue la cour cantonale contrevient aux art. 136 et 146 CO. A la suivre, en permettant aux défendeurs de se retourner contre elle, bien que la prescription la mît à l'abri d'une demande de la Fondation lésée, les premiers juges auraient étendu à une situation de solidarité imparfaite le mécanisme institué spécialement par l'art. 136 CO pour la solidarité parfaite. Ils auraient, en outre, méconnu l'art. 146 CO en ne sanctionnant pas le comportement des défendeurs, lesquels auraient aggravé sa position en interrompant la prescription de la créance de la demanderesse à leur égard par la délivrance de déclarations de renonciation à la prescription. 
 
Pareille argumentation tombe à faux. En effet, pour les motifs sus-indiqués, le fait que la demanderesse n'a pas recherché l'appelée en cause avant l'échéance du délai de prescription de sa créance n'empêchait nullement les défendeurs de faire valoir leurs prétentions récursoires à l'encontre de l'appelée en cause. La référence faite par celle-ci à l'art. 136 CO n'a donc rien de topique. D'ailleurs, la cour cantonale, à juste titre, n'a pas appliqué cette disposition. 
De la même manière, si l'application des principes énoncés plus haut entraîne de facto une aggravation de la situation de l'appelée en cause, puisque cette dernière doit résister à une action récursoire alors qu'elle ne peut plus être recherchée par la lésée, il ne s'ensuit pas pour autant que la Cour civile ait méconnu l'art. 146 CO. De fait, semblable aggravation est sans rapport avec un comportement qui pourrait être reproché aux défendeurs. Ceux-ci n'ont pas renoncé à se prévaloir d'une prescription des droits de la demanderesse à leur égard, qui aurait déjà été acquise. Comme le constate la cour cantonale, ils ont, au contraire, subordonné leurs renonciations successives à se prévaloir de la prescription à la condition que les droits de cette partie ne fussent point déjà prescrits. Ce n'était du reste pas le cas, non seulement lors de la délivrance des déclarations de renonciation, mais encore au moment de l'ouverture de l'action principale, attendu que les créances de la Fondation à l'endroit de l'architecte et de l'entreprise découlaient de la violation d'obligations contractuelles commise par ceux-ci avant la livraison de l'ouvrage et qu'elles se prescrivaient, en conséquence, par dix ans (art. 127 CO; cf. ATF 111 II 170 consid. 2 p. 172; Gauch, op. cit., n. 2301; Pierre Tercier, Les contrats spéciaux, 3e éd., n. 4737). 
6.2.2 L'appelée en cause soutient, par ailleurs, que l'entreprise défenderesse a tardé à lui dénoncer le litige, de sorte que la prétention récursoire de cette partie serait aujourd'hui périmée. 
6.2.2.1 La cour cantonale a admis avec raison que l'architecte - pour avoir formé sa requête d'appel en cause le mois suivant l'introduction de la demande en paiement par la Fondation - avait agi conformément à la jurisprudence relative à l'abus de droit. 
6.2.2.2 Pour des motifs qui ne ressortent pas de la décision attaquée, les juges cantonaux n'ont pas procédé au même examen en ce qui concerne l'entreprise. Or, celle-ci n'a pas dénoncé à Y.________ le procès que la Fondation lui avait intenté et elle a attendu le 4 mai 1998 pour inviter le juge, au moyen d'une conclusion subsidiaire prise dans son mémoire de réponse à la demande de la Fondation, à ordonner à Y.________ de la relever de tout montant qui pourrait être mis à sa charge. En d'autres termes, la défenderesse a laissé s'écouler 22 mois sans rien entreprendre contre Y.________. Dans sa réponse au recours de l'appelée en cause, l'entreprise conteste que l'on puisse lui en faire grief: d'une part, parce que la Fondation ignorait alors que Y.________ était en partie responsable de son dommage, ne l'ayant appris qu'à la lecture des expertises ordonnées en cours d'instruction; d'autre part, parce qu'elle-même avait présenté ses conclusions visant Y.________ avant le 5 octobre 1998, respectant ainsi le délai de prescription absolu de sa créance récursoire. 
 
Il ressort de la décision attaquée qu'une instruction pénale a été ouverte immédiatement après les faits, notamment à l'encontre de deux employés de l'appelée en cause. Cette circonstance était connue de l'entreprise, puisqu'elle était également partie à la procédure pénale. Pour la même raison, la défenderesse a également eu connaissance de la condamnation pénale de ces deux employés par le Tribunal correctionnel, le 28 février 1994. Certes, ceux-ci ont ensuite été acquittés par l'instance supérieure, le 31 octobre 1994. Il n'empêche que l'entreprise ne pouvait qu'avoir conscience de l'éventuelle implication de Y.________ dans l'explosion et de la possibilité que cette société soit amenée ultérieurement à rendre des comptes sur le plan civil. La cour cantonale a d'ailleurs implicitement admis la chose en faisant partir le délai dans lequel l'architecte et l'entreprise devaient informer Y.________ de leur intention de se retourner contre elle de la connaissance par eux du fait que cet autre coresponsable (Y.________) n'était pas recherché par la Fondation lésée. A ce propos, la jurisprudence exige uniquement que le titulaire du droit de recours ait pris connaissance de la possibilité (Möglichkeit) de se retourner contre un autre responsable (ATF 127 III 257 consid. 6 p. 266 in fine). Comme l'a retenu à juste titre la cour cantonale, mais sans en tirer les conséquences qui s'imposaient pour l'entreprise, cette dernière a donc eu connaissance de la possibilité de dénoncer le litige à Y.________ dès le dépôt de l'action en paiement dirigée contre elle et contre l'architecte. On ne discerne d'ailleurs pas pour quel motif l'entreprise aurait dû attendre 22 mois pour le faire, alors que l'architecte avait été en mesure d'appeler en cause Y.________ moins de deux mois après avoir été assigné en justice par la demanderesse. De surcroît, et contrairement à ce que soutient la défenderesse, le moment où la Fondation a eu connaissance du fait que la responsabilité civile de Y.________ pourrait être engagée n'est pas déterminant pour fixer celui où elle-même a acquis une telle connaissance et à partir duquel elle aurait dû donner l'avis prescrit à l'appelée en cause. L'entreprise ne fait du reste que soutenir, sans plus ample démonstration, que la connaissance du fait en question par la Fondation aurait été postérieure à la sienne. Enfin, étant donné l'absence de solidarité dans les rapports internes et l'indépendance des prétentions récursoires, la dénonciation du litige à l'appelée en cause effectuée par l'architecte ne pouvait pas profiter à l'entreprise (cf. Brehm, op. cit., n. 89 ad art. 51 CO). 
 
Par conséquent, pour avoir attendu 22 mois avant de demander au juge d'ordonner à Y.________ de la relever d'une éventuelle condamnation pécuniaire qui pourrait être prononcée à la requête de la demanderesse, la défenderesse est déchue de ses droits de recours envers l'appelée en cause. En admettant la conclusion récursoire prise par elle contre cette partie, les juges précédents ont donc violé le droit fédéral. 
6.2.3 L'appelée en cause se plaint encore de ce que l'action récursoire de l'architecte dirigée contre elle ait été admise par la cour cantonale en rapport avec les indemnités versées en octobre 1995 à une employée de la Fondation et, via la CNA, à un ouvrier, blessés tous deux lors de l'explosion. A son avis, la prétention récursoire y relative serait prescrite au motif que la dénonciation du litige à son égard n'aurait pas concerné ces indemnités. De plus, lorsqu'il a dénoncé le litige, l'architecte n'aurait pas été titulaire de la créance récursoire en rapport avec les indemnités en question et son assurance responsabilité civile n'aurait rien entrepris pour interrompre la prescription à l'égard de Y.________. 
 
Contrairement aux situations qui viennent d'être examinées, l'action récursoire du défendeur contre l'appelée en cause n'a pas ici pour origine le dommage encouru par la Fondation à la suite de l'explosion, mais le préjudice subi, à raison du même événement, par deux personnes physiques qui n'ont jamais participé à la procédure civile et que l'architecte - par le biais de son assurance - a décidé d'indemniser directement. Selon les principes énoncés précédemment, l'action récursoire de celui qui a indemnisé le lésé et qui n'est pas en relation contractuelle avec le coresponsable recherché se prescrit par un an à compter du moment où le lésé a été désintéressé. Ainsi, l'action récursoire de l'architecte contre Y.________ en rapport avec le dédommagement de l'employée de la Fondation et de l'ouvrier du chantier se prescrivait à la fin du mois d'octobre 1996. Or, dans son appel en cause du 14 août 1996, soit avant l'expiration du délai de prescription, le défendeur avait dénoncé le litige à Y.________ tant en ce qui concerne le dommage subi par la Fondation que pour celui encouru par les particuliers. Le moyen tiré de la prescription n'est donc pas fondé, mais pour autant - second grief articulé par l'appelée en cause et qui reste à examiner - que l'architecte ait été titulaire en août 1996 d'une prétention récursoire contre Y.________ relativement aux indemnités litigieuses. 
Il ressort du jugement attaqué que ces indemnités ont été payées en octobre 1995 par l'assurance responsabilité civile de l'architecte. Ce faisant, celle-ci a été subrogée aux droits de son assuré en vertu de l'art. 72 LCA appliqué par analogie (ATF 130 III 362 consid. 5.1) et s'est ainsi substituée au défendeur (Roland Brehm, Le contrat d'assurance RC, Bâle 1997, n. 686). Depuis ce moment, il lui appartenait d'exercer l'action récursoire contre Y.________. Or, l'assurance n'a rien entrepris elle-même à l'égard de l'appelée en cause et n'a en particulier pas interrompu la prescription de la créance récursoire. Quant à la dénonciation du litige par l'architecte en août 1996, elle n'a eu aucun effet sur la créance récursoire de l'assurance qui en était alors la seule titulaire. Sur ce point, la cession de créance opérée le 7 septembre 1999 par l'assurance en faveur de l'architecte est restée sans effet, car la créance cédée était prescrite depuis octobre 1996 déjà. 
 
Par conséquent, en admettant l'action récursoire du défendeur contre l'appelée en cause du chef des indemnités versées en rapport avec le préjudice subi par l'employée de la Fondation et l'ouvrier blessés dans l'explosion, la cour cantonale a violé le droit fédéral. 
 
6.3 Les considérations qui précèdent imposent de réformer le jugement entrepris sur les deux points suivants: d'abord, l'action récursoire de la défenderesse contre l'appelée en cause doit être entièrement rejetée, ce qui entraîne la modification du chiffre III du dispositif de ce jugement; ensuite, l'action récursoire du défendeur contre l'appelée en cause doit être rejetée dans la mesure où elle concerne les indemnités versées à l'une des deux personnes physiques blessées lors de l'explosion et à la CNA pour l'autre, ce qui entraîne la modification du chiffre V de ce dispositif. 
 
7. 
Y.________ a obtenu très partiellement gain de cause dans son recours principal: elle n'a plus à subir d'action récursoire de la part de l'entreprise, mais peut toujours être recherchée à concurrence du quart du dommage de la Fondation par l'architecte; économiquement parlant, la présente décision ne modifie donc pas fondamentalement sa situation. Ce qui, en revanche, est définitivement acquis est sa libération du paiement de la somme de 38'362 fr. 30 à l'architecte, montant très faible par rapport à celui qu'elle pourrait devoir payer à l'intéressé (388'718 fr. 15). De leur côté, le défendeur et la défenderesse ont entièrement succombé dans leurs recours, respectivement principal et joint. A considérer le résultat de la procédure, il se justifie de répartir l'émolument judiciaire global, fixé à 21'000 fr., à raison de 6'000 fr. à charge de l'appelée en cause et de 7'500 fr. chacun à charge du défendeur et de la défenderesse, lesquels ont tous deux succombé dans leurs conclusions prises contre l'appelée en cause. 
 
Après compensation partielle des dépens (art. 159 al. 3 OJ), les défendeurs seront condamnés solidairement à verser à l'appelée en cause une indemnité de 6'000 fr., à titre de dépens réduits, qui sera supportée entre eux à parts égales (art. 156 al. 7 OJ applicable par analogie en vertu de l'art. 159 al. 5 OJ). 
 
Enfin, vu l'issue du litige, il appartiendra à la Cour civile de statuer à nouveau sur le sort des frais et dépens de la procédure cantonale. 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
 
1. 
Les causes 4C.368/2005 et 4C.370/2005 sont jointes. 
 
2. 
Le recours principal de Y.________ SA est partiellement admis. Le recours principal de X.________ et le recours joint de Z.________ SA sont rejetés dans la mesure de leur recevabilité. 
 
Les chiffres III et V du dispositif du jugement attaqué sont réformés dans le sens qui suit: 
 
III. L'action récursoire de Z.________ SA contre la 
Y.________ SA est 
entièrement rejetée. 
V. L'action récursoire de X.________ contre la 
Y.________ SA est 
entièrement rejetée en tant qu'elle concerne le 
paiement de la somme de 38'362 fr. 30 avec intérêts à 5% 
l'an dès le 21 août 1996. 
Les chiffres VI à IX dudit dispositif sont annulés. 
 
3. 
La cause est renvoyée à la cour cantonale pour nouvelle décision sur les frais et dépens de la procédure cantonale. 
 
4. 
Un émolument judiciaire de 6'000 fr. est mis à la charge de Y.________ SA. 
 
5. 
Un émolument judiciaire de 7'500 fr. est mis à la charge de X.________. 
 
6. 
Un émolument judiciaire de 7'500 fr. est mis à la charge de Z.________ SA. 
 
7. 
X.________ et Z.________ SA sont condamnés solidairement à verser à Y.________ SA une indemnité de 6'000 fr. à titre de dépens réduits. 
 
8. 
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et à la Cour civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
 
Lausanne, le 26 septembre 2006 
Au nom de la Ire Cour civile 
du Tribunal fédéral suisse 
Le président: Le greffier: