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[AZA] 
I 694/99 Mh 
 
IIIe Chambre  
 
composée des Juges fédéraux Schön, Spira et Widmer; 
Berthoud, Greffier 
 
Arrêt du 23 mai 2000  
 
dans la cause 
 
P.________, Portugal, recourant, représenté par M.________, 
avocat, 
 
contre 
 
Office AI pour les assurés résidant à l'étranger, avenue 
Edmond-Vaucher 18, Genève, intimé, 
 
et 
 
Commission fédérale de recours en matière d'AVS/AI pour les 
personnes résidant à l'étranger, Lausanne 
 
    A.- Par décision du 29 septembre 1998, l'Office AI 
pour les assurés résidant à l'étranger (l'office) a sup- 
primé par voie de révision, avec effet au 30 novembre 1998, 
la rente entière d'invalidité dont P.________ bénéficiait à 
teneur d'une décision de la Caisse de compensation de la 
Société suisse des entrepreneurs du 1er juillet 1993. 
Toutefois, dans son prononcé du 5 juin 1998, puis dans 
l'avant-projet de décision du 8 juin suivant, l'office 
avait utilisé le terme de reconsidération au lieu de révi- 
sion. 
 
    B.- L'assuré a déféré cette décision à la Commission 
fédérale de recours en matière d'AVS/AI pour les personnes 
résidant à l'étranger. 
    Cette juridiction l'a débouté par jugement du 30 sep- 
tembre 1999, tout en fixant la date de la suppression de la 
rente au 1er décembre 1998. 
 
    C.- P.________ interjette recours de droit adminis- 
tratif contre ce jugement. Il en demande, avec suite de 
dépens, l'annulation, ainsi que celle de la décision du 
29 septembre 1998, en concluant au maintien du versement de 
la rente entière. 
    L'intimé conclut au rejet du recours. L'Office fédéral 
des assurances sociales ne s'est pas déterminé. 
    Par ordonnance du 17 février 2000, le Président de la 
IIIe Chambre du Tribunal fédéral des assurances a rejeté la 
requête du recourant tendant à la restitution de l'effet 
suspensif au recours de droit administratif. 
 
Considérant en droit  
:  
 
    1.- a) Bien que la suppression de la rente ait eu lieu 
formellement par voie de révision au sens de l'art. 41 LAI 
(cf. la décision du 29 septembre 1998), l'intimé a procédé 
en réalité à une reconsidération de la décision de rente du 
1er juillet 1993 qui était entrée en force (cf. le prononcé 
du 5 juin 1998 et l'avant-projet de décision du 8 juin 
suivant). 
    b) Selon un principe général du droit des assurances 
sociales, l'administration peut reconsidérer une décision 
formellement passée en force de chose jugée et sur laquelle 
une autorité judiciaire ne s'est pas prononcée quant au 
fond, à condition qu'elle soit sans nul doute erronée et 
que sa rectification revête une importance notable (ATF 
122 V 21 consid. 3a, 173 consid. 4a, 271 consid. 2, 
368 consid. 3, 121 V 4 consid. 6 et les arrêts cités). 
    En outre, par analogie avec la révision des décisions 
rendues par les autorités judiciaires, l'administration est 
tenue de procéder à la révision d'une décision entrée en 
force formelle lorsque sont découverts des faits nouveaux 
ou de nouveaux moyens de preuve, susceptibles de conduire à 
une appréciation juridique différente (ATF 122 V 21 con- 
sid. 3a, 138 consid. 2c, 173 consid. 4a, 272 consid. 2, 
121 V 4 consid. 6 et les références). 
 
    c) Par ailleurs, le juge peut entériner une décision 
de révision rendue à tort pour le motif substitué que la 
décision de rente initiale était sans nul doute erronée, 
pour autant que sa rectification revête une importance 
notable (ATF 125 V 369-370 consid. 2 et 3). 
 
    2.- La décision initiale de rente avait été rendue en 
1993 par la Caisse de compensation de la Société suisse des 
entrepreneurs, alors compétente pour statuer sur l'octroi 
d'une rente, en vertu des anciens art. 60 al. 1 LAI, 75, 76 
et 91 RAI. Désormais, cette compétence ressortit aux of- 
fices AI, conformément à l'art. 57 al. 1 let. e LAI, en 
vigueur depuis le 1er janvier 1992, ainsi qu'aux art. 75 et 
76 RAI, en vigueur dès le 1er juillet 1992. 
    A contrario, la caisse de compensation prénommée n'est 
aujourd'hui plus habilitée à reconsidérer une décision 
qu'elle avait prise en 1993, dès lors qu'elle a perdu son 
pouvoir de décision en la matière. De la sorte, l'office AI 
intimé était compétent pour statuer, le 29 septembre 1998, 
en sa qualité de successeur de la caisse de compensation, 
ce que la jurisprudence a du reste déjà implicitement admis 
à plusieurs reprises, notamment dans l'arrêt 125 V 368 pré- 
cité (reconsidération par un office AI, en 1996, d'une dé- 
cision de rente qu'il avait certes confirmée en 1995, mais 
qui avait été rendue initialement par une caisse de compen- 
sation en 1994). 
 
    3.- Il s'agit de déterminer si l'octroi au recourant 
d'une rente entière d'invalidité, en 1993, était manifes- 
tement erroné, comme le soutient l'intimé et comme l'a 
confirmé l'autorité inférieure de recours. 
 
    a) Dans son rapport du 14 janvier 1993 à l'attention 
de la Commission de l'assurance-invalidité du canton de 
Genève (ci-après : CAI), l'Office régional AI de Genève 
avait constaté, en se référant aux avis des docteurs 
R.________ et O.________, tous deux spécialistes en 
chirurgie orthopédique, que l'assuré devait éviter de 
travailler en position agenouillée, qu'il ne devait pas non 
plus être exposé aux contusions des membres inférieurs, ni 
faire de marches prolongées, surtout en montée et en 
descente, qu'il ne pouvait plus monter et descendre des 
échelles, s'accroupir ou s'agenouiller fréquemment, porter 
des charges ou être en station debout statique. En consé- 
quence, poursuivait l'office régional, tout poste de 
travail où ces sollicitations ne seraient pas requises, où 
le patient pourrait être 2/3 du temps debout, 1/3 du temps 
assis, mais avec des changements de positions fréquents, 
pourrait lui convenir, ce à plein temps. L'office régional 
constatait par ailleurs que l'assuré avait une formation 
pratique de maçon et qu'il avait travaillé en qualité de 
coffreur, mais qu'il était analphabète et ne parlait que le 
portugais. 
    L'office régional concluait son rapport en indiquant 
qu'il ne voyait pas quelle activité pourrait être exercée 
par l'assuré en raison de sa désinsertion sociale et de 
l'atteinte à la santé, si bien qu'il n'était pas en mesure 
de proposer une solution professionnelle. Cela étant, il 
recommandait à la CAI de lui reconnaître une incapacité de 
gain totale. 
    Dans un prononcé du 17 février 1993, la CAI a fixé le 
degré d'invalidité du recourant à 70 %, sans indiquer les 
motifs qui l'ont conduite à retenir ce taux plutôt qu'un 
autre. Se fondant sur ce prononcé, la Caisse de compen- 
sation de la Société suisse des entrepreneurs a alloué une 
rente entière d'invalidité au recourant, à partir du 
1er juillet 1992, par décision du 1er juillet 1993. 
 
    b) En l'espèce, lorsqu'elle a rendu sa décision de 
rente, le 1er juillet 1993, l'AI était suffisamment infor- 
mée de la nature des troubles subis par le recourant, ainsi 
que de leurs conséquences sur sa capacité de gain, aussi 
bien dans l'activité de maçon que dans un emploi adapté à 
son handicap. En effet, l'office régional avait mentionné, 
dans son rapport du 14 janvier 1993, les genres d'activités 
que le docteur R.________, médecin d'arrondissement de la 
Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents 
(CNA), tenait pour encore exigibles dans son appréciation 
du 2 décembre 1992. Par ailleurs, la CNA avait communiqué à 
l'AI une copie de sa décision du 24 mai 1993, par laquelle 
elle avait alloué au recourant une rente d'invalidité de 
25 %. 
    La CAI semble ne pas avoir suffisamment tenu compte, à 
l'époque, du fait que la notion d'invalidité est, en prin- 
cipe, identique en matière d'assurance-accidents, d'as- 
surance militaire et d'assurance-invalidité. Dans ces trois 
domaines, elle représente la diminution permanente ou de 
longue durée, résultant d'une atteinte à la santé assurée, 
des possibilités de gain sur le marché du travail équilibré 
qui entre en ligne de compte pour l'assuré (ATF 119 V 470 
consid. 2b, 116 V 249 consid. 1b et les arrêts cités). En 
outre, contrairement à ce que le recourant allègue, il 
n'est pas établi qu'elle a retenu des facteurs qui sont 
étrangers à l'invalidité, tels que le manque d'instruction 
ou la méconnaissance de la langue française, dès lors 
qu'elle ne s'était pas prononcée sur ce point et n'avait 
pas non plus déterminé les revenus que le recourant aurait 
pu tirer d'une activité adaptée à son handicap (cf. art. 28 
al. 2 LAI). Enfin, la CAI n'avait pas davantage examiné, en 
1993, si la capacité de gain du recourant était réduite en 
raison d'affections préexistantes à l'accident du 26 juil- 
let 1991, ce qui aurait pu conduire à une appréciation de 
l'invalidité différente de celle de la CNA. 
    En tout état de cause, la méthode d'évaluation de 
l'invalidité du recourant, telle qu'elle a été appliquée en 
1993, n'était manifestement pas conforme à la loi. Quant au 
taux d'invalidité supérieur à 66 2/3 % (en l'occurrence de 
70 %), il apparaît largement excessif, compte tenu des re- 
venus que l'assuré aurait pu réaliser dans une activité 
légère, dans différents secteurs de l'industrie, selon 
l'évaluation de la CNA du 24 mai 1993. 
    Dès lors, on doit admettre que la décision de rente du 
1er juillet 1993 était sans nul doute erronée au sens de la 
jurisprudence (cf. consid. 1b ci-dessus), ce qui justifie 
sa révocation par voie de reconsidération. 
 
    4.- Si la prise en compte d'un taux d'invalidité 
supérieur à 66 2/3 % était sans nul doute erronée en 1993, 
on ne saurait en revanche affirmer que le degré de l'in- 
validité du recourant était, à cette époque-là, certaine- 
ment inférieur à 40 %, voire à 50 %, si bien que l'octroi 
d'une rente ne pouvait être exclu au moment déterminant 
(art. 28 al. 1 LAI; cf. RCC 1989 p. 235). 
    Les premiers juges ont toutefois omis d'examiner ce 
point. En effet, ils se sont bornés à nier le droit du 
recourant à une rente entière, en constatant que le dossier 
ne contenait pas d'éléments permettant de retenir une inca- 
pacité de gain supérieure à 66 2/3 %. Par ailleurs, ils ne 
se sont pas exprimés au sujet de la comparaison des revenus 
sur laquelle l'intimé s'est fondé pour supprimer la rente. 
Cet examen est pourtant essentiel, car le recourant n'est 
actuellement plus assuré par l'AI et pourrait ainsi, en 
raison des carences de l'instruction de sa cause en 1993, 
se voir privé d'une rente à laquelle il aurait pu prétendre 
à cette époque et qu'il pourrait éventuellement conserver 
aujourd'hui, s'il s'agissait d'une demi-rente (art. 28 
al. 1 ter LAI  a contrario).  
    Il s'ensuit que la cause doit être renvoyée à la com- 
mission de recours afin qu'elle complète son instruction 
sur ce point et statue à nouveau. 
 
    Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances 
 
p r o n o n c e  
:  
 
I. Le recours est admis en ce sens que le jugement de la  
    Commission fédérale de recours en matière d'AVS/AI 
    pour les personnes résidant à l'étranger du 30 sep- 
    tembre 1999 est annulé, la cause étant renvoyée à 
    cette juridiction pour instruction complémentaire au 
    sens des considérants et nouveau jugement. 
 
II. Il n'est pas perçu de frais de justice.  
 
III. L'intimé versera au recourant la somme de 1000 fr. à  
    titre de dépens partiels pour l'instance fédérale. 
 
IV. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, à la  
    Commission fédérale de recours en matière d'assurance- 
    vieillesse, survivants et invalidité pour les person- 
    nes résidant à l'étranger, ainsi qu'à l'Office fédéral 
    des assurances sociales. 
 
 
Lucerne, le 23 mai 2000 
 
Au nom du 
Tribunal fédéral des assurances 
Le Président de la IIIe Chambre : 
 
Le Greffier :