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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
4P.38/2005 /ech 
 
Arrêt du 3 mai 2005 
Ire Cour civile 
 
Composition 
MM. et Mme les Juges Corboz, président, Favre et Kiss. 
Greffier: M. Carruzzo. 
 
Parties 
A.Z.________, 
B.Z.________, 
C.Z.________, 
recourants, 
tous trois représentés par Me Nicolas Jeandin, 
contre 
 
la Banque X.________ SA, 
intimée, représentée par Me Laurent Strawson, 
Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève, case postale 3108, 1211 Genève 3. 
 
Objet 
art. 9 et 29 al. 2 Cst.; appréciation des preuves; procédure civile genevoise; droit d'être entendu, 
 
recours de droit public contre l'arrêt de la Chambre 
civile de la Cour de justice du canton de Genève du 
17 décembre 2004. 
 
Faits: 
A. 
A.a Dès 1985, les frères A.Z.________, B.Z.________ et C.Z.________, ont bénéficié de lignes de crédit de la part du X.________ (ci-après: la Banque). Ils se sont vu octroyer, en qualité de codébiteurs solidaires, un prêt de 4'400'000 fr., dénommé "V.________", et un second prêt de 4'750'000 fr., dénommé "W.________", garantis par le nantissement de cédules hypothécaires grevant des parcelles sises sur les communes éponymes. A.Z.________ a, par ailleurs, obtenu de la Banque divers prêts hypothécaires à titre individuel, notamment dans le cadre d'une opération immobilière à .... 
 
A partir de 1992, les intérêts des prêts "V.________" et "W.________" n'ont plus été versés régulièrement. La Banque a invité les frères Z.________ à remédier à cette situation. Au début de l'année 1994, elle a entamé des négociations avec eux, refusant toutefois, de manière constante, de réduire et de bloquer pendant quelques années les taux d'intérêts appliqués aux deux prêts hypothécaires. Ce refus a suscité le mécontentement de B.Z.________, qui l'a manifesté dans plusieurs courriers adressés à la Banque. A.Z.________ a, quant à lui, stigmatisé la réaction intempestive de son frère, la qualifiant d'attitude de blocage. 
 
Le 10 juillet 1996, la Banque a dénoncé les lignes de crédit "V.________" et "W.________". Par lettre du 19 novembre 1997, elle a fixé aux frères Z.________ un délai au 28 février 1998 pour se désengager. 
A.b Par contrat du 22 juin 1999, la Banque a cédé à un tiers, pour le prix de 4'400'000 fr., sa créance de 5'325'508 fr. 85 relative au prêt "V.________". L'art. 6 du contrat prévoyait la libération totale des frères Z.________ du chef de ce prêt moyennant paiement du prix de la cession et versement par eux de 50'000 fr. en espèces. Ladite somme a été versée par les codébiteurs à une date indéterminée. 
 
Au début de l'année 2000, la Banque et les frères Z.________ ont négocié les conditions de la cession à un tiers de la créance de 4'981'881 fr. 10 dont celle-là était titulaire envers ceux-ci au titre du prêt "W.________". La Banque a consenti à céder cette créance contre paiement de 3'700'000 fr. par le cessionnaire et signature par les débiteurs cédés d'une reconnaissance de dette à hauteur de 300'000 fr. Le 30 avril 2000, les frères Z.________ ont signé un écrit dans lequel ils reconnaissaient devoir solidairement ladite somme à la Banque et s'engageaient à la lui verser, sans intérêts, en trois tranches égales, au 31 décembre des trois années suivantes, faute de quoi l'entier de la dette serait immédiatement exigible. Le 30 juin 2000, la Banque et le tiers ont signé le contrat de cession de créance aux conditions susmentionnées. Selon l'art. 6 du contrat, une fois versé le prix stipulé pour la cession, la Banque n'aurait plus aucune prétention à élever contre les frères Z.________ au titre du prêt "W.________". Ce prix ayant été versé, la Banque a confirmé, par plis adressés le 6 juillet 2000 à chacun de ceux-ci, leur libération de ce chef à son égard, sous réserve, notamment, de la reconnaissance de dette de 300'000 fr. 
 
Par convention du 20 décembre 2001 conclue entre Y.________ SA, la Banque et A.Z.________, la société précitée, qui souhaitait acquérir le bien immobilier de ce dernier à ..., a racheté, pour le prix de 1'370'000 fr., les créances de la Banque se rapportant aux prêts hypothécaires alloués à l'intimé à titre personnel. Ce dernier s'engageait à verser immédiatement la somme de 100'000 fr. à la Banque. En vertu de l'art. 6 de la convention, celle-ci n'aurait plus aucune prétention à faire valoir à l'encontre de Y.________ SA et de A.Z.________ à réception de la totalité des fonds. 
A.c La première tranche de 100'000 fr. de la reconnaissance de dette du 30 avril 2000, échue le 31 décembre 2001, n'ayant pas été versée, la Banque, par courrier du 28 janvier 2002, a invité les frères Z.________ à s'exécuter. 
 
Par lettre du 1er février 2002 adressée à la Banque, B.Z.________, indiquant agir pour lui-même et comme cessionnaire des droits de ses deux frères, a déclaré invalider la reconnaissance de dette au motif que la signature de ce document aurait été imposée aux codébiteurs. Enumérant par ailleurs huit postes du dommage que ses frères et lui-même auraient subi en raison de l'absence de consolidation des crédits "V.________" et "W.________", pourtant promise par la Banque, il a estimé à 2'745'802 fr. 60 le total du préjudice subi par les consorts Z.________, créance qu'il a opposée en compensation à la demande de versement des 100'000 fr. fondée sur la reconnaissance de dette. 
 
Le 30 mai 2002, la Banque a fait notifier à chacun des trois frères Z.________ un commandement de payer, portant sur la somme de 300'000 fr., intérêts en sus. Les oppositions faites à ces poursuites ont été levées par jugements du 15 novembre 2002. 
B. 
Le 18 décembre 2002, A.Z.________, B.Z.________ et C.Z.________, agissant conjointement, ont introduit chacun une action en libération de dette. La Banque a conclu au déboutement des demandeurs. 
 
Par jugement du 25 mars 2004, le Tribunal de première instance du canton de Genève a rejeté les actions en libération de dette. 
 
Saisie d'un appel des demandeurs, la Cour de justice du canton de Genève, statuant le 17 décembre 2004, a confirmé le jugement de première instance, mis les dépens d'appel à la charge des appelants et condamné solidairement ceux-ci à une amende de procédure de 3'000 fr. 
 
Selon la cour cantonale, il appartenait aux signataires de la reconnaissance de dette du 30 avril 2000 d'établir que la cause de l'obligation n'était pas valable. Or, ils ne sont pas parvenus à le faire. La thèse, soutenue par eux, d'après laquelle la défenderesse leur aurait donné quittance pour solde de tout compte en signant la convention de cession de créance du 30 juin 2000, se heurte déjà au texte même de cet écrit et elle est infirmée par le comportement aussi bien antérieur que postérieur des parties. Quant à la remise de dette alléguée par les demandeurs, le dossier ne révèle aucun comportement univoque de la défenderesse susceptible d'en attester l'existence. Rien ne permet, au demeurant, de retenir que les demandeurs auraient signé la reconnaissance de dette sous l'empire d'une crainte fondée. A titre subsidiaire, les appelants entendent compenser la dette qu'ils ont reconnue avec une créance en dommages-intérêts dont ils seraient titulaires à l'égard de la défenderesse. Ils ne fournissent toutefois aucun élément concret au sujet de cette prétendue créance, se contentant d'alléguer que le dommage découlerait du non-respect d'assurances données par la défenderesse et de soutenir, non sans témérité, que cette dernière aurait admis l'existence de la créance compensante. Il n'y a pas lieu de donner suite à la requête des demandeurs, formulée dans ce contexte, qui tend à l'édition des notes personnelles de D.________, employé de la défenderesse jusqu'à sa retraite en 1996. En effet, de telles notes ne sauraient à elles seules engager la Banque, vu leur nature personnelle et leur objet. Cela étant, les appelants, qui s'évertuent à soulever des arguments clairement contredits par le dossier et qui ont manifesté tout au long de la procédure une volonté délibérée de retarder l'issue du litige, seront condamnés solidairement à verser le montant de 3'000 fr. à titre d'amende. 
C. 
Parallèlement à un recours en réforme, les demandeurs exercent un recours de droit public dans lequel ils invitent le Tribunal fédéral à annuler l'arrêt cantonal. Les recourants reprochent à la Cour de justice d'avoir violé l'art. 9 Cst. dans la constatation des faits et l'application du droit procédural genevois. Ils se plaignent, en outre, de ce que leur droit d'être entendus, garanti par l'art. 6 CEDH et l'art. 29 al. 2 Cst., aurait été méconnu par les juges d'appel. 
 
La défenderesse et intimée propose le rejet du recours. La cour cantonale se réfère, pour sa part, aux motifs énoncés dans son arrêt. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
1. 
Exercé en temps utile (art. 89 al. 1 OJ en liaison avec l'art. 34 al. 1 let. c OJ), dans la forme prévue par la loi (art. 90 al. 1 OJ), pour violation de droits constitutionnels des citoyens (art. 84 al. 1 let. a OJ), le recours de droit public soumis à l'examen du Tribunal fédéral est recevable sous cet angle. Il ne le serait pas, en revanche, au cas où ses auteurs y feraient valoir des violations du droit fédéral, au sens de l'art. 43 al. 1 OJ, la valeur litigieuse de la présente contestation leur permettant de faire sanctionner de telles violations par la voie du recours en réforme (art. 46 OJ). 
 
Les recourants, qui ont été déboutés de leurs conclusions libératoires, ont un intérêt personnel, actuel et juridiquement protégé à ce que la décision attaquée n'ait pas été prise en violation de leurs droits constitutionnels. En conséquence, la qualité pour recourir doit leur être reconnue (art. 88 OJ). 
 
Il y a lieu, partant, d'entrer en matière. 
2. 
Saisi d'un recours de droit public, le Tribunal fédéral n'examine que les griefs d'ordre constitutionnel invoqués et suffisamment motivés dans l'acte de recours (art. 90 al. 1 let. b OJ; ATF 130 I 26 consid. 2.1 p. 31; 129 I 113 consid. 2.1 p. 120 et les arrêts cités). Aussi ne tiendra-t-il pas compte, en l'espèce, des remarques formulées par les recourants, sur un mode appellatoire, dans un "préambule", ni des circonstances, à leurs yeux pertinentes, qu'ils présentent, sur le même mode, sous le titre "En fait". Il se bornera, bien plutôt, à rechercher si les seuls griefs articulés aux pages 10 ss de l'acte de recours sont recevables et, dans l'affirmative, s'ils sont fondés. 
3. 
Dans un premier groupe de moyens, les recourants s'emploient à démontrer que la Cour de justice aurait rendu une décision arbitraire tant en ce qui concerne la constatation des faits que dans l'application du droit de procédure genevois. 
3.1 Selon la jurisprudence, une décision est arbitraire lorsqu'elle est manifestement insoutenable, qu'elle méconnaît gravement une norme ou un principe juridique clair et indiscuté, ou encore qu'elle heurte de manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité. Il ne suffit pas que sa motivation soit insoutenable; encore faut-il que son résultat le soit. Le Tribunal fédéral ne s'écarte de la solution retenue que si celle-ci est insoutenable, en contradiction manifeste avec la situation effective, adoptée sans motif objectif et en violation d'un droit certain. Il n'y a pas arbitraire du seul fait qu'une autre solution paraît également concevable, voire préférable (ATF 129 I 8 consid. 2.1; 128 I 81 consid. 2 p. 86, 177 consid. 2.1 p. 182, 273 consid. 2.1 p. 275; 128 II 259 consid. 5 p. 280). 
 
En matière d'appréciation des preuves, il y a arbitraire lorsque l'autorité ne prend pas en compte, sans raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision ou lorsqu'elle tire des constatations insoutenables des éléments recueillis (ATF 127 I 38 consid. 2a). 
3.2 
3.2.1 Les recourants reprochent à la cour cantonale de n'avoir arbitrairement pas interprété l'art. 6 des conventions de cession de créances conclues le 30 juin 2000 et le 20 décembre 2001 en ce sens que l'intimée y donnait quittance pour solde de compte, à eux trois dans la première convention, à A.Z.________ dans la seconde. 
 
L'interprétation d'une clause contractuelle relève de l'application du droit fédéral (art. 1 et 18 al. 1 CO). Comme telle, elle peut être revue par la juridiction fédérale de réforme. Il s'ensuit l'irrecevabilité du premier grief en vertu de la subsidiarité absolue du recours de droit public (art. 84 al. 2 OJ). 
Dans ce contexte, les recourants déplorent que la cour cantonale n'ait arbitrairement pas pris en considération un élément de preuve décisif, à savoir le décompte que l'intimée avait adressé le 6 août 2001 à A.Z.________ et dans lequel ne figurait pas le montant de 300'000 fr. formant l'objet de la reconnaissance de dette du 30 avril 2000 (pièce 51 demandeurs). Le moyen est dénué de fondement. Il ressort, en effet, de ce document que la position communiquée par la Banque à son débiteur ne concernait que des crédits alloués à titre personnel à ce dernier, lesquels n'avaient rien à voir avec le prêt "W.________" octroyé aux trois recourants en qualité de codébiteurs solidaires, ni, partant, avec la reconnaissance de dette et la convention de cession de créance afférentes à ce prêt. Il n'y avait, dès lors, rien d'insoutenable à ne pas attacher de l'importance au document en question. 
3.2.2 Selon la Cour de justice, les recourants "ont finalement bénéficié d'abandons de créances de plus de 1'800'000 fr. pour les crédits «V.________» et «W.________»". Les intéressés taxent cette constatation d'arbitraire au motif qu'ils resteraient débiteurs du tiers cessionnaire à concurrence de l'intégralité des créances cédées. 
 
Si les juges cantonaux ont voulu dire par là que les deux cessions de créances concernant ces deux crédits avaient entraîné une diminution de la dette des recourants à hauteur de la somme précitée, semblable affirmation serait insoutenable. En effet, la cession desdites créances à un prix inférieur à leur valeur nominale n'a profité directement qu'au cessionnaire de celles-ci, tandis que les débiteurs demeuraient tenus pour le tout envers le nouveau titulaire des créances. En revanche, s'il fallait comprendre la phrase susmentionnée en ce sens que les abandons de créances consentis par l'intimée ont rendu possible le changement de créancier, apparemment souhaité par les débiteurs, la constatation incriminée résisterait au grief d'arbitraire. 
 
En tout état de cause, à la supposer arbitraire, ladite constatation ne modifierait pas l'issue du litige. Il ressort, en effet, du considérant 4 de l'arrêt attaqué que la cour cantonale a écarté le moyen pris de la crainte fondée pour une série de motifs, plus ou moins indépendants, qui suffisent à justifier sa décision sur ce point, même si l'on fait abstraction de la constatation entreprise. Or, dans leur recours en réforme connexe, les recourants ne soulèvent pas de moyen recevable sur la question du vice de la volonté dont serait entachée la reconnaissance de dette litigieuse, ignorant ainsi les exigences posées par la jurisprudence en la matière (ATF 115 II 300 consid. 2a p. 302; 111 II 397 consid. 2b, 398 consid. 2b). 
3.3 
3.3.1 Les recourants reprochent, par ailleurs, à la cour cantonale d'avoir arbitrairement refusé d'appliquer l'art. 186 al. 2 de la loi de procédure civile genevoise (LPC gen.) en n'ordonnant pas à l'intimée de produire les notes tenues par D.________, son ancien employé. Selon eux, les notes en question établiraient la justesse de leurs allégations - destinées à fonder la prétention en dommages-intérêts qu'ils opposent en compensation, à titre subsidiaire, à la créance contestée de l'intimée - concernant les promesses que la Banque leur aurait faites à l'époque par le truchement de cette personne et qu'elle n'aurait pas respectées. Aussi, devant le refus de l'intimée de les produire, la cour cantonale aurait-elle dû tenir pour avéré que ces pièces contenaient à coup sûr des "enseignements compromettants" pour la Banque. 
 
Aux termes de l'art. 186 al. 2 LPC gen., le juge peut ordonner à la partie qui détient une pièce utile à la solution du litige de la produire, même si le fardeau de la preuve ne lui incombe pas. En cas de refus sans motif légitime, le fait allégué par la partie adverse peut être tenu pour avéré. Selon les commentateurs de ladite loi, l'admissibilité d'un tel ordre est soumise à diverses conditions cumulatives: la pièce doit être utile à la solution du litige; la partie qui assume le fardeau de la preuve ne dispose d'aucun moyen raisonnable pour se la procurer; la partie interpellée possède effectivement la pièce en cause ou est seule à même de se la procurer; enfin, cette partie ne peut invoquer aucun motif légitime pour refuser la production qui lui est réclamée (Bernard Bertossa/Louis Gaillard/Jacques Guyet/André Schmidt, Commentaire de la loi de procédure civile genevoise, vol. II, n. 5 ad art. 186). 
 
Il n'est pas exclu, prima facie, que les conditions d'application de la disposition citée aient pu être réalisées en l'espèce. Paraît discutable, à cet égard, l'argument de la cour cantonale selon lequel les notes de D.________ ne pouvaient à elles seules engager la Banque en raison de leur nature personnelle et de leur objet. En effet, sous l'angle de la bonne foi dans les pourparlers contractuels, on ne saurait dénier d'emblée tout caractère probant aux promesses qu'aurait pu y faire l'employé de la Banque qui s'était occupé des crédits octroyés aux recourants, que ces promesses aient eu ou non un caractère juridiquement contraignant à l'égard de l'intimée. Lesdites notes constitueraient, au demeurant, le seul moyen de preuve adéquat pour établir l'existence de telles promesses et l'intimée, qui les détient, ne peut pas se prévaloir du secret bancaire pour refuser de les porter à la connaissance des juges et de ses anciens clients. 
 
Les considérations qui précèdent n'épuisent toutefois pas le sujet. C'est le lieu de rappeler que, selon la jurisprudence relative à l'art. 8 CC, si le juge est tenu d'administrer les preuves adéquates sur les faits pertinents, encore faut-il que des allégations aient été suffisamment formulées à propos de ces faits (Substanzierungspflicht; ATF 112 II 172 consid. I/2c; 109 II 231 consid. 3c/bb p. 234; 108 II 337 consid. 2c et d). Ainsi, pour que soit satisfaite l'exigence de la motivation suffisante en fait, le contenu de l'allégation doit permettre au juge de statuer sur une prétention juridique et d'administrer les preuves nécessaires pour élucider les faits. Le droit fédéral n'oblige pas les cantons à tenir pour suffisamment motivés des allégués dont les lacunes ne devraient être comblées qu'au cours de la procédure probatoire (ATF 108 II 337 consid. 3). Or, dans la présente espèce, la Cour de justice retient notamment, sans être contredite sur ce point, que les recourants n'ont aucunement cherché, en appel, à expliciter le fondement de leur prétendue créance en dommages-intérêts, mais qu'ils se sont bornés à soutenir que l'intimée, en ne contestant pas ladite créance, avait admis son existence. La cour cantonale constate, en d'autres termes, que les recourants, chargés du fardeau de la preuve, n'ont pas formulé d'allégations suffisantes pour lui permettre de statuer sur la prétention litigieuse. Dès lors, on ne saurait lui faire grief de n'avoir arbitrairement pas administré un moyen de preuve - la production des notes de D.________ - invoqué à l'appui d'une prétention insuffisamment motivée en fait. Peu importe, à cet égard, que les conditions d'application de l'art. 186 al. 2 LPC gen. aient pu être remplies en l'occurrence. La Cour de justice n'a de toute façon pas versé dans l'arbitraire en refusant d'appliquer cette disposition. 
3.3.2 Les recourants s'en prennent, en outre, à leur condamnation solidaire à une amende de procédure de 3'000 fr. qu'ils jugent arbitraire tant dans son principe que dans ses modalités. 
 
Est condamnée à l'amende, en vertu de l'art. 40 let. c LPC gen., la partie qui fait un emploi abusif des procédures prévues par la loi, notamment en agissant ou en défendant de manière téméraire. Pour les commentateurs de cette disposition, la prudence s'impose dans l'appréciation du caractère abusif ou téméraire d'une action ou d'une défense, sans quoi l'on risque d'entraver de manière excessive le recours aux tribunaux. Il n'en demeure pas moins que celui qui multiplie les procédures inutiles ou qui s'obstine à soutenir des moyens infondés mérite sanction (Bertossa/Gaillard/Guillet/Schmidt, op. cit., vol. I, n. 4 ad art. 40). 
 
En l'espèce, la Cour de justice est d'avis que les recourants s'évertuent à plaider des arguments clairement contredits par le dossier. De plus, à l'en croire, le déroulement de la procédure jusqu'à ce jour laisserait apparaître une volonté délibérée de la part des intéressés de retarder l'issue du litige. Semblable opinion n'est pas défendable. Dans une affaire qui n'est pas aussi simple qu'il n'y paraît de prime abord, et dont la valeur litigieuse n'est pas insignifiante, les recourants n'ont fait qu'invoquer un certain nombre d'arguments, aux mérites inégaux, en vue de s'opposer au paiement du montant réclamé par l'intimée. On ne voit pas qu'il faille taxer cette attitude de téméraire. Au surplus, même si les recourants avaient simplement voulu retarder le moment de l'exécution du paiement en ouvrant leurs actions en libération de dette, ils auraient adopté un comportement commun à bon nombre de justiciables qui ne justifierait pas à lui seul le prononcé d'une amende. A cet égard, la cour cantonale ne précise pas, et l'on ne perçoit pas non plus, par quelles démarches ou abstentions les recourants auraient abusé des moyens de procédure à leur disposition en vue de faire obstacle à l'avancement du procès. Sur ce point, la décision attaquée n'échappe donc pas au grief d'arbitraire. 
 
Il n'était pas non plus soutenable de condamner solidairement les recourants à verser le montant de l'amende. En effet, selon un principe général formulé à l'art. 143 al. 2 CO, la solidarité n'existe que lorsqu'elle a été convenue (hypothèse n'entrant pas en ligne de compte in casu) ou qu'elle est prévue par la loi (ATF 119 IV 17 consid. 2b p. 21 et les références). Or, l'art. 40 LPC gen. ne prévoit rien de tel. Les contraventions de procédure ont, du reste, un caractère pénal, de sorte que, sauf disposition contraire du droit cantonal, les règles générales et particulières du code pénal s'appliquent en cette matière (Bertossa/Gaillard/Guillet/Schmidt, dernier op. cit., n. 1 ad art. 40). C'est dire que la solidarité est étrangère au principe de l'individualisation de la peine qui gouverne toute sanction pénale (cf. l'art. 63 CP) et, singulièrement, l'amende (cf. l'art. 48 ch. 2 CP en liaison avec l'art. 102 CP). 
Il y a lieu, partant, d'admettre le grief formulé par les recourants au sujet du prononcé de l'amende. 
4. 
Dans un dernier moyen, les recourants se plaignent de la violation de leur droit d'être entendus en rapport avec le refus de la cour cantonale d'ordonner la production des notes de D.________. Ils le font en vain pour les motifs déjà exposés plus haut qui s'appliquent également ici, mutatis mutandis (cf. consid. 3.3.1, dernier §). 
5. 
Cela étant, le présent recours doit être admis partiellement dans le sens sus-indiqué. Par conséquent, le chef du dispositif de l'arrêt attaqué, par lequel la Cour de justice "condamne, solidairement, B.Z.________, A.Z.________ et C.Z.________ à une amende de procédure de 3'000 fr." sera annulé. Pour le surplus, le recours de droit public sera rejeté dans la mesure où il est recevable. Eu égard à l'objet de cette annulation, il ne s'impose pas de modifier la répartition des frais cantonaux (cf. art. 157 OJ). 
 
Les recourants n'obtiennent gain de cause que pour une infime partie du montant total litigieux, amende incluse (3'000 fr. sur 303'000 fr.). Dans ces conditions, ils supporteront seuls, avec solidarité entre eux, les frais et dépens afférents à la présente procédure (art. 156 al. 1 et 7 OJ; art. 159 al. 1 et 5 OJ). 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
1. 
Le recours est partiellement admis, dans la mesure où il est recevable, et le chef du dispositif de l'arrêt attaqué, par lequel la cour cantonale "condamne, solidairement, B.Z.________, A.Z.________ et C.Z.________ à une amende de procédure de 3'000 fr." est annulé. 
 
2. 
Un émolument judiciaire de 6'500 fr. est mis à la charge des recourants, solidairement entre eux. 
3. 
Les recourants sont condamnés solidairement à verser à l'intimée une indemnité de 7'500 fr. à titre de dépens. 
4. 
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et à la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève. 
Lausanne, le 3 mai 2005 
Au nom de la Ire Cour civile 
du Tribunal fédéral suisse 
Le président: Le greffier: