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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
1B_400/2012 
 
Arrêt du 7 août 2012 
Ire Cour de droit public 
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Fonjallaz, 
Président, Merkli et Chaix. 
Greffière: Mme Mabillard. 
 
Participants à la procédure 
A.________, représenté par Me Laurent Schuler, avocat, 
recourant, 
 
contre 
 
Ministère public central du canton de Vaud, avenue de Longemalle 1, 1020 Renens. 
 
Objet 
Procédure pénale; désignation d'un conseil juridique gratuit, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Chambre des recours pénale, du 4 mai 2012. 
 
Faits: 
 
A. 
Le 30 novembre 2011, la banque X.________ a déposé plainte pénale contre inconnu pour faux dans les titres, escroquerie et abus de confiance, et a pris des conclusions civiles à hauteur de 720'000 fr. à l'encontre de toute personne qui aurait participé auxdites infractions. 
Dans le cadre de cette procédure, A.________ a été entendu en qualité de personne appelée à donner des renseignements. Il a requis, le 6 janvier 2012, la désignation de son avocat comme conseil d'office, au motif qu'il ne disposait plus des ressources suffisantes pour s'acquitter des honoraires de ce dernier. 
Par ordonnance du 13 février 2012, le procureur a rejeté la requête de désignation d'un défenseur d'office à A.________, constatant que son indigence n'était pas établie. 
 
B. 
A.________ a porté sa cause devant la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal vaudois (ci-après: la Chambre des recours) qui, par arrêt du 4 mai 2012, a rejeté son recours et confirmé l'ordonnance attaquée. La Chambre des recours a considéré pour l'essentiel que les pièces produites par l'intéressé ne permettaient pas d'établir sa situation financière et que, malgré les occasions qui lui avaient été offertes, celui-ci avait échoué à démontrer sa réelle indigence. 
 
C. 
Agissant par la voie du recours en matière pénale, A.________ demande au Tribunal fédéral de réformer l'arrêt de la Chambre des recours du 4 mai 2012 en ce sens que l'assistance judiciaire lui est accordée avec effet au 6 janvier 2012, son avocat étant désigné comme conseil juridique gratuit dès cette date. Subsidiairement, il conclut à l'annulation de la décision attaquée, le dossier de la cause étant renvoyé à la Chambre des recours pour nouvelle instruction et décision dans le sens des considérants. Il requiert en outre l'assistance judiciaire devant le Tribunal fédéral. Le recourant se plaint d'une constatation inexacte des faits, d'une violation du droit d'être entendu ainsi que du droit à l'assistance judiciaire gratuite. 
La Chambre des recours et le procureur renoncent à se déterminer et se réfèrent aux considérants de l'arrêt attaqué. 
 
Considérant en droit: 
 
1. 
Le recours en matière pénale au Tribunal fédéral est immédiatement ouvert contre une décision prise en dernière instance cantonale par laquelle l'assistance judiciaire est refusée à une partie à la procédure pénale nonobstant son caractère incident (ATF 133 IV 335 consid. 2 et 4 p. 337 ss). Le recourant réunit les conditions posées à l'art. 89 al. 1 LTF pour lui reconnaître la qualité pour agir. Au surplus, le recours ayant été déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) et dans les formes prescrites par la loi (art. 42 LTF), il y a lieu d'entrer en matière. 
 
2. 
Le recourant se plaint tout d'abord d'une constatation inexacte des faits. Il reproche à la Chambre des recours d'avoir passé totalement sous silence sa demande de désignation d'un conseil juridique dans le dossier PE11.018016. Il requiert par conséquent la production de ce dossier par le ministère public ainsi que celle du dossier PE10.022653, lequel devrait renseigner complètement le Tribunal fédéral sur l'étendue des affaires pénales en cours, dans lesquelles il sollicite l'assistance judiciaire. 
 
2.1 Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Le recourant ne peut critiquer ceux-ci que s'ils ont été établis de façon manifestement inexacte - notion qui correspond à celle d'arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 134 V 53 consid. 4.3 p. 62) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 97 al. 1 LTF), ce qu'il lui appartient d'exposer et de démontrer de manière claire et circonstanciée. La correction du vice soulevé doit en outre être susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF). 
 
2.2 En l'espèce, l'objet du litige consiste à déterminer si le recourant est parvenu ou non à démontrer son indigence. Le fait qu'il ait également demandé la désignation d'un conseil juridique dans les dossiers PE11.018016 et PE10.022653 n'a aucune incidence sur l'issue de la contestation. En omettant d'évoquer ces procédures, la Chambre des recours n'a dès lors pas procédé à une constatation inexacte des faits. Mal fondé, le grief doit être rejeté et le Tribunal fédéral est lié par les faits retenus dans l'arrêt attaqué conformément à l'art. 105 al. 1 LTF. Il n'y a ainsi pas lieu de requérir l'édition des dossiers précités, comme le demande le recourant, le Tribunal fédéral s'estimant par ailleurs suffisamment renseigné pour statuer en l'état du dossier. 
 
3. 
Le recourant voit ensuite une violation de son droit d'être entendu dans le fait que la Chambre des recours ne l'a pas invité à se déterminer, alors qu'elle s'apprêtait à procéder à une substitution de motifs pour rejeter son recours. Le procureur n'ayant par ailleurs pas constaté que sa demande d'assistance judiciaire était incomplète, il ne pouvait pas s'attendre à devoir donner des explications complémentaires sur l'évolution de sa situation financière. 
 
3.1 Le droit d'être entendu, tel qu'il est garanti à l'art. 29 al. 2 Cst., comprend notamment le droit pour l'intéressé de s'exprimer sur les éléments pertinents avant qu'une décision ne soit prise touchant sa situation juridique, de produire des preuves pertinentes, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuve pertinentes, de participer à l'administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s'exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 135 II 286 consid. 5.1 p. 293; 129 II 497 consid. 2.2 p. 504 s.; 127 I 54 consid. 2b p. 56 et les arrêts cités). Le droit d'être entendu porte avant tout sur les questions de fait. Les parties doivent éventuellement aussi être entendues sur les questions de droit lorsque l'autorité concernée entend se fonder sur des normes légales dont la prise en compte ne pouvait pas être raisonnablement prévue par les parties, lorsque la situation juridique a changé ou lorsqu'il existe un pouvoir d'appréciation particulièrement large (ATF 129 II 497 consid. 2.2 p. 504 s.; 127 V 431 consid. 2b; 126 I 19 consid. 2c/aa p. 22; 124 I 49 consid. 3c p. 52; 115 Ia 94 consid. 1b p. 96 s. et les références). 
Par ailleurs, la procédure administrative est régie essentiellement par la maxime inquisitoire, selon laquelle l'autorité définit les faits pertinents et les preuves nécessaires, qu'elle ordonne et apprécie d'office. Cette maxime doit cependant être relativisée par son corollaire, soit le devoir des parties de collaborer à l'établissement des faits (ATF 128 II 139 consid. 2b p. 142; 120 V 357 consid. 1a p. 360). Conformément au principe général de procédure consacré à l'art. 8 CC, il incombe en effet à l'administré d'établir les faits qui sont de nature à lui procurer un avantage, spécialement lorsqu'il s'agit d'élucider des faits qu'il est le mieux à même de connaître, telle sa situation patrimoniale (arrêt 1B_152/2008 du 30 juin 2008 consid. 3.2; voir aussi ATF 125 IV 161 consid. 4 p. 164; 120 Ia 179 consid. 3a p. 181). 
 
3.2 En l'espèce, le procureur, se basant sur un revenu fictif, a considéré que le recourant n'était pas indigent. La Chambre des recours, pour sa part, a estimé qu'il y avait lieu de prendre en compte les ressources et les charges effectives du requérant; or, les pièces produites ne permettaient pas d'établir la situation financière de l'intéressé, qui avait échoué à démontrer sa réelle indigence. Les juges cantonaux sont arrivés à la même solution que le procureur, certes par le biais d'une motivation différente, mais en se fondant toutefois sur la même norme légale. Dans ces conditions, ils n'étaient pas tenus d'informer le recourant qu'ils allaient apprécier différemment les faits ressortant du dossier, dans la mesure où il s'agissait toujours de l'examen de son indigence sur la base de l'art. 29 al. 3 Cst. 
Par ailleurs, le recourant se plaint en vain de n'avoir pu s'exprimer sur l'évolution de sa situation patrimoniale; s'agissant de faits qu'il connaissait mieux que quiconque, il lui appartenait en effet de renseigner spontanément les autorités et de transmettre toutes les informations utiles pour que celles-ci puissent estimer le plus exactement possible l'état de ses finances. Quant aux documents manquants, en particulier les six dernières fiches de salaire ainsi que les relevés de tous ses comptes bancaires et/ou postaux des six derniers mois, leur production était expressément requise sous le chiffre 3, "pièces à joindre", du formulaire d'assistance judiciaire qu'il a rempli et signé le 29 mars 2012. Cette rubrique mentionnait au surplus que le requérant devait fournir tous documents permettant de vérifier les montants indiqués à l'appui de sa requête; à défaut de pièces justificatives, ces montants ne seraient pas pris en considération et la demande pouvait être refusée. Le recourant ne peut dès lors être suivi lorsqu'il soutient que la Chambre des recours aurait dû l'interpeller pour qu'il produise ces documents et lui offrir la possibilité de fournir des renseignements complémentaires. Il apparaît au contraire que l'intéressé avait un devoir de collaboration spécialement élevé pour tout ce qui avait trait à sa situation patrimoniale et que, dans ces conditions, la maxime inquisitoire n'imposait pas aux juges cantonaux d'ordonner des mesures d'instruction supplémentaires. A cet égard, la référence à l'arrêt 1B_288/2010 consid. 3.4 ne lui est d'aucun secours; dans cette affaire, il avait été jugé qu'un manque de collaboration ne pouvait être reproché au recourant, dans la mesure où celui-ci n'avait pas été invité à fournir des renseignements précis sur la situation financière de son épouse. 
 
3.3 Mal fondé, le grief tiré d'une prétendue violation du droit d'être entendu doit par conséquent être rejeté. 
 
4. 
Au fond, le recourant estime que l'assistance judiciaire doit lui être accordée dès le 6 janvier 2012, dans la mesure où son indigence est réalisée et a été suffisamment documentée. 
 
4.1 Aux termes de l'art. 29 al. 3 Cst., toute personne qui ne dispose pas des ressources suffisantes a droit à l'assistance judiciaire gratuite, à moins que sa cause ne paraisse dépourvue de toute chance de succès. Une partie est indigente lorsqu'elle ne peut assumer les frais liés à la défense de ses intérêts sans porter atteinte au minimum nécessaire à son entretien et à celui de sa famille. Pour déterminer l'indigence, il convient de prendre en considération l'ensemble de la situation financière du requérant au moment où la demande est présentée, celui-ci devant indiquer de manière complète et établir autant que faire se peut ses revenus, sa situation de fortune et ses charges. La part des ressources excédant ce qui est nécessaire à la couverture des besoins personnels doit être comparée, dans chaque cas, aux frais prévisibles de la procédure pour laquelle l'assistance judiciaire est demandée. Le soutien de la collectivité publique n'est en principe pas dû, au regard de l'art. 29 al. 3 Cst., lorsque cette part disponible permet d'amortir les frais judiciaires et d'avocat en une année au plus, pour les procès relativement simples, et en deux ans pour les autres (ATF 135 I 221 consid. 5.1 p. 223 et les arrêts cités). 
 
4.2 En l'espèce, la Chambre des recours a relevé que le recourant n'avait pas apporté la preuve qu'il s'acquittait réellement de la pension alimentaire à laquelle il était astreint et de ses acomptes d'impôts. Ces charges n'étaient par conséquent pas susceptibles d'entrer dans le calcul du minimum vital. Le recourant se plaint de formalisme excessif et rappelle qu'il a produit le prononcé des mesures protectrices de l'union conjugale du 21 janvier 2011 ainsi que sa dernière déclaration d'impôts, pièces qui devaient permettre à l'autorité de vérifier les montants indiqués. Il est vrai que, en principe, seules les charges réellement acquittées sont susceptibles d'entrer dans le calcul du minimum vital. L'autorité compétente doit toutefois éviter de procéder de façon trop schématique afin de pouvoir prendre en considération tous les éléments importants du dossier (cf. ATF 120 Ia 179 consid. 3a p. 181). La question de savoir si la Chambre des recours a fait preuve de formalisme excessif en l'occurrence peut rester indécise puisqu'elle a malgré tout tenu compte des montants en cause (1'500 fr. pour les pensions alimentaires dues et 391 fr. pour les impôts) dans l'estimation du total des charges alléguées par le recourant, à savoir 6'280 fr. 
 
4.3 Les juges cantonaux ont par ailleurs estimé que l'étude du dossier relevait des contradictions que les pièces produites par le recourant n'expliquaient pas. En effet, si l'on se tenait aux valeurs annoncées par l'intéressé dans sa demande d'assistance judiciaire, on ne comprenait pas comment celui-ci comblait chaque mois les 2'000 fr. de différence entre ses revenus (4'280 fr.) et ses charges (6'280 fr.), étant précisé qu'il prétendait ne disposer d'aucune fortune, ni économies. Au surplus, selon les juges, son loyer démesuré (3'400 fr.) ne pouvait être justifié par l'exercice d'un droit de visite élargi; en effet, si le recourant devait réellement faire face à une situation financière obérée depuis son licenciement en 2010, il aurait assurément mis à contribution les dix-huit mois pour trouver un nouvel appartement avec un loyer mieux adapté à son nouveau revenu. Il aurait aussi certainement demandé à être mis au bénéfice d'un subside pour son assurance maladie. Dans son recours, l'intéressé allègue qu'il a besoin d'un grand appartement pour recevoir ses enfants et que, au vu de la pénurie en région lausannoise, il est difficile de trouver un autre logement, moins cher, à proximité. S'agissant de l'octroi de subsides pour l'assurance maladie, il doit admettre qu'il ne s'est pas enquis de cette possibilité. Ce faisant, pas plus que devant les autorités cantonales, le recourant ne donne d'explications sur la manière dont il parvient, chaque mois, à s'acquitter de ses dépenses fixes. Comme l'a pertinemment relevé la Chambre des recours, l'inaction du recourant dans cette situation fait naître une forte suspicion sur le fait qu'il disposerait d'éléments de fortune ou d'autres revenus que ceux annoncés. 
 
4.4 Enfin, l'arrêt attaqué souligne, par surabondance, la disparition d'importantes liquidités entre les déclarations d'impôts de 2008 et 2009 et celle de 2010. Le recourant et son épouse disposaient en 2008 d'une fortune imposable de 830'000 fr., d'un capital action de 100'000 fr. - passé à 161'200 fr. en 2009 - ainsi que d'un compte désigné "Cab. Rumine SA - compte courant" de 401'531 fr. En 2010, ces actifs auraient totalement disparu, puisque le recourant ne déclare que des dettes. Celui-ci indique qu'il a dû s'acquitter de frais importants depuis sa séparation, notamment pour louer une chambre meublée pendant quelques mois, payer la garantie loyer de son appartement, acquérir une nouvelle voiture adaptée au transport des enfants, acheter des meubles et payer d'importants honoraires d'avocat. S'il est indéniable que le recourant a dû faire face à de nombreuses dépenses en 2010 au vu de sa situation familiale, celles-ci n'expliquent toutefois pas de façon convaincante la disparition totale des liquidités dont il disposait en 2008-2009. Avec les juges cantonaux, on peut dès lors observer que cet élément renforce le doute qui existe sur la réalité d'absence d'actifs invoquée par le recourant. 
 
4.5 Sur le vu de ce qui précède, la Chambre des recours n'a pas violé l'art. 29 al. 3 Cst. en considérant que les pièces produites par le recourant ne permettaient pas d'établir sa situation financière et que l'intéressé avait échoué à démontrer sa réelle indigence. L'assistance judiciaire gratuite devant être refusée pour ce motif, il n'est pas nécessaire d'examiner si, au surplus, la cause n'était pas dépourvue de chances de succès et si l'intervention d'un conseil était nécessaire au vu des enjeux de la procédure, comme le soutient le recourant. 
 
5. 
Il s'ensuit que le recours doit être rejeté. La requête d'assistance judiciaire devant le Tribunal fédéral doit également être rejetée, le recourant n'ayant pas suffisamment établi son indigence (art. 64 al. 1 LTF). Le recourant, qui succombe, doit par conséquent supporter les frais de la présente procédure (art. 66 al. 1 LTF). 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
 
1. 
Le recours est rejeté. 
 
2. 
La requête d'assistance judiciaire est rejetée. 
 
3. 
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
4. 
Le présent arrêt est communiqué au mandataire du recourant, au Ministère public central et au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Chambre des recours pénale. 
 
Lausanne, le 7 août 2012 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président: Fonjallaz 
 
La Greffière: Mabillard