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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
{T 0/2} 
 
8C_442/2013  
   
   
 
 
 
Arrêt du 4 juillet 2014  
 
Ire Cour de droit social  
 
Composition 
Mme et MM. les Juges fédéraux Leuzinger, Présidente, Frésard et Maillard. 
Greffière : Mme von Zwehl. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me François Berger, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents, Fluhmattstrasse 1, 6004 Lucerne,  
intimée. 
 
Objet 
Assurance-accidents (rente d'invalidité; indemnité pour atteinte à l'intégrité), 
 
recours contre le jugement de la Cour de droit public du Tribunal cantonal de la République et canton de Neuchâtel du 8 mai 2013. 
 
 
Faits :  
 
A.   
A.________ était employé par la société B.________ & Cie SA en qualité de tourneur-mécanicien et, à ce titre, assuré obligatoirement contre le risque d'accidents auprès de la Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (CNA). 
Le 9 mai 2008, un burin (de 1 kg) s'est détaché de la machine sur laquelle travaillait A.________ et est tombé sur la base du nez de celui-ci d'une hauteur de 2,5 mètres, entraînant une fracture. La plaie nasale a été traitée conservativement à l'Hôpital U.________. 
Le 26 mai 2008, l'assuré a dû être hospitalisé d'urgence en raison de l'apparition brusque de sensations vertigineuses associées à des troubles de l'équilibre ainsi que d'acouphènes. Les médecins de l'Hôpital V.________ où il a séjourné jusqu'au 29 mai suivant, ont posé le diagnostic de déficit vestibulaire gauche aigu. Dans un rapport médical intermédiaire du 5 août 2008, le docteur C.________, spécialiste en oto-rhino-laryngologie (ORL), a informé la CNA qu'il était difficile de dire si la symptomatologie vertigineuse était consécutive à une problématique virale ou secondaire à l'accident du 9 mai 2008. La CNA a accepté de prendre en charge le cas et l'assuré a été mis au bénéfice d'une thérapie vestibulaire. Une IRM cérébrale et des rochers du 20 août 2008 n'a rien montré de particulier, notamment pas de lésion rétro-cochléaire. 
Le 7 septembre 2008, l'assuré a présenté un hémisyndrome gauche partiellement régressif dans le cadre d'un probable accident ischémique vasculaire cérébral transitoire. L'assuré n'a jamais repris son travail et l'employeur a résilié le contrat de travail au 30 juin 2010. Entre-temps, A.________ a déposé une demande de prestations à l'assurance-invalidité. 
Compte tenu de la persistance des vertiges, le docteur C.________ a adressé l'assuré au docteur D.________, du service ORL du Centre hospitalier W.________. Celui-ci a constaté une bonne récupération de la fonction canalaire mais la persistance d'un déficit otolithique avec un trouble de la verticalité. Cet état était à l'origine d'un trouble chronique de la représentation spatiale et expliquait la symptomatologie d'inconfort du mouvement et de l'espace présentée par l'assuré. Des troubles anxieux, voire une dépression larvée, aggravaient actuellement les symptômes. Un soutien psychologique et quelques séances de rééducation supplémentaires étaient indiquées (rapport du 24 avril 2009). 
Afin de faire le point sur la situation médicale de l'assuré, la CNA a demandé, au printemps 2010, aux docteurs E.________, neurologue, et D.________, du Centre W.________, de se prononcer sur le cas (rapports des 15 juin et 19 juillet 2010). Appelé à donner son appréciation sur la base de ces rapports, le docteur F.________, spécialiste ORL de la CNA, a conclu que le déficit otolithique constaté empêchait l'assuré de reprendre son ancien travail mais ne constituait pas un obstacle à l'exercice d'une activité alternant les positions assise et debout, sans port de charge de plus de 5 kg, à la condition d'éviter le travail sur des machines en rotation rapide ou les travaux exigeant de se pencher en avant; ce médecin a évalué l'atteinte à l'intégrité à 5 % retenant que l'assuré présente tout au plus un trouble léger de la fonction d'équilibration (appréciation médicale du 16 septembre 2010). 
Par décision du 16 décembre 2010, la CNA a alloué à A.________ une rente LAA fondée sur un degré d'invalidité de 27 % dès le 1er janvier 2011, ainsi qu'une indemnité pour atteinte à l'intégrité d'un taux de 5 %. Pour déterminer le revenu d'invalide de l'assuré, la CNA s'est basée sur cinq descriptions de postes de travail (DPT); elle a, par ailleurs, refusé de prendre en charge les troubles psychiques évoqués par les experts. Saisie d'une opposition, elle l'a écartée dans une nouvelle décision du 1er juin 2011. 
 
B.   
Après avoir ordonné l'apport du dossier de l'assurance-invalidité, la Cour de droit public du Tribunal cantonal de la République et canton de Neuchâtel a partiellement admis le recours de l'assuré contre la décision sur opposition de la CNA, et réformé cette décision en ce sens qu'une rente de 29 % lui est allouée dès le 1er janvier 2011 (jugement du 8 mai 2013). 
 
C.   
A.________ interjette un recours en matière de droit public contre ce jugement, dont il requiert l'annulation. Il conclut à la reconnaissance d'une incapacité de travail de 100 % pour les suites accidentelles dont il a été victime et, par conséquent, à l'allocation d'une rente d'invalidité entière, ainsi qu'à l'octroi d'une indemnité pour atteinte à l'intégrité de 50 % compte tenu de ses séquelles physiques et psychiques. 
La CNA conclut au rejet du recours. L'Office fédéral de la santé publique a renoncé à se déterminer. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
 
1.1. Le litige porte sur le taux de la rente d'invalidité allouée au recourant depuis le 1er janvier 2011, ainsi que sur celui de l'indemnité pour atteinte à l'intégrité.  
 
1.2. Dans une procédure de recours concernant des prestations en espèces de l'assurance-accidents, le Tribunal fédéral n'est pas lié par l'état de fait constaté par la juridiction précédente (cf. art. 97 al. 2 et 105 al. 3 LTF).  
 
2.   
Les premiers juges ont correctement exposé les règles légales et les principes jurisprudentiels relatifs aux notions de causalité naturelle et adéquate ainsi que d'invalidité et d'évaluation de l'invalidité. Il en va de même des règles régissant l'allocation d'une indemnité pour atteinte à l'intégrité. Il suffit de renvoyer à leurs considérants. 
On rappellera que pour pouvoir calculer le degré d'invalidité, l'administration (ou le juge, s'il y a eu un recours) a besoin de documents que le médecin, éventuellement aussi d'autres spécialistes, doivent lui fournir. La tâche du médecin consiste à porter un jugement sur l'état de santé et à indiquer dans quelle mesure et pour quelles activités l'assuré est incapable de travailler. En outre, les données médicales constituent un élément utile pour déterminer quels travaux on peut encore, raisonnablement, exiger de l'assuré (ATF 125 V 256 consid. 4 p. 261 s; 115 V 133 consid. 2; 114 V 310 consid. 3c p. 314 s; 105 V 156 consid. 1 p. 158 s). 
Quant à l'indemnité pour atteinte à l'intégrité (art. 24 al. 1 LAA), elle dépend de la gravité de l'atteinte et se détermine d'après les constatations médicales. L'évaluation incombe donc avant tout aux médecins, qui doivent, d'une part, constater objectivement quelles limitations subit l'assuré et, d'autre part, estimer l'atteinte à l'intégrité en résultant ( JEAN-MAURICE FRÉSARD/MARGIT MOSER-SZELESS, L'assurance-accidents obligatoire in: Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht [SBVR], 2 ème éd., 2007, n o 229).  
 
3.   
En substance, les premiers juges ont retenu que les conclusions du docteur F.________, de la CNA, au sujet des conséquences des séquelles ORL étaient convaincantes. Elles se fondaient sur le résultat des examens spécialisés pratiqués par les docteurs E.________ et D.________, qui avaient tous les deux mis en évidence une surcharge fonctionnelle importante chez l'assuré. L'avis du médecin traitant généraliste, le docteur G.________, selon lequel une reconversion professionnelle était probablement vouée à l'échec, n'était pas de nature à remettre en cause cette appréciation dès lors que celui-ci justifiait sa position essentiellement par l'âge de son patient et le pronostic réservé exprimé par le docteur D.________. Par ailleurs, il n'était pas nécessaire de compléter l'instruction médicale même si le dossier ne contenait pas d'expertise psychiatrique ni de rapport émanant d'un médecin psychiatre. En effet, à supposer que l'assuré souffrît effectivement d'une atteinte d'ordre psychique, la causalité adéquate entre celle-ci et l'accident du 9 mai 2008 devait de toute manière être niée à l'aune des critères applicables en cas de troubles psychiques consécutifs à un accident de gravité moyenne (cf. ATF 115 V 133 consid. 6 p. 138 ss et 403 consid. 5 p. 407 ss) tel que celui dont avait été victime l'assuré. Pour la comparaison des revenus, les premiers juges ont retenu un revenu sans invalidité plus élevé que celui fixé par la CNA (qui avait omis de prendre en considération le 13e salaire), soit 77'155 fr. mais sans majoration pour des heures supplémentaires vu que l'entreprise n'en réalisait plus, et ont confirmé le revenu d'invalide de 55'061 fr. fondé sur les DPT. En effet, ce montant ne s'en trouvait pas sensiblement modifié si l'on recourait aux données salariales statistiques avec un abattement de 10 %. Ils sont parvenus à un degré d'invalidité arrondi de 29 %. Enfin, les premiers juges ont repris à leur compte le taux de 5 % d'atteinte à l'intégrité établi par l'assureur-accidents sur la base de l'évaluation du docteur F.________. 
Le recourant conteste le jugement entrepris. S'appuyant notamment sur l'avis de son médecin traitant, il fait valoir qu'il subit une incapacité de travail totale en raison des déficits physiques de l'accident, et que c'est à tort qu'un lien de causalité adéquate entre ses atteintes psychiques et l'accident a été nié. Il critique également le calcul de son évaluation de l'invalidité, en particulier l'omission d'un montant au titre des heures supplémentaires dans la fixation de son revenu sans invalidité. 
 
4.  
 
4.1. En l'espèce, il y a une unanimité sur la nature des séquelles physiques présentées par le recourant consécutivement à son accident. Il est constant que la fracture nasale a guéri. De l'examen neurologique réalisé par le docteur E.________, il ressort que hormis les troubles du système vestibulaire - sur lesquels ce médecin n'avait pas à prononcer -, l'assuré ne présente pas d'autre problème neurologique susceptible d'être rattaché à l'accident du 9 mai 2008. Cet avis rejoint l'évaluation antérieure du docteur H.________, également neurologue (rapport du 22 septembre 2008). Le docteur D.________, de son côté, a posé les diagnostics suivants: status après déficit vestibulaire périphérique gauche en mai 2008 avec déficit otolithique séquellaire; trouble de l'équilibre chronique séquellaire stable sur désorganisation motrice du système d'équilibration et facteur émotionnel. Il a précisé que la symptomatologie était sans doute aggravée par une surcharge fonctionnelle (rapport du 19 juillet 2010). Le docteur F.________, de la CNA, a repris le diagnostic de dysfonctionnement otolithique dans son appréciation médicale. Quant au document établi par le docteur G.________ à la demande de l'avocat de l'assuré (du 10 janvier 2011), il n'apporte à cet égard aucun élément supplémentaire puisqu'il se réfère largement aux constatations faites par le docteur D.________.  
 
4.2. Cela étant, on doit constater que le docteur F.________ ne s'est pas entièrement rallié aux conclusions du médecin ORL s'agissant des conséquences du diagnostic reconnu sur la capacité de travail de l'assuré. Alors que le docteur D.________ a retenu que l'ancienne activité n'était plus possible et que le pronostic d'une réinsertion professionnelle mieux adaptée aux troubles de l'équilibre lui apparaissait "très réservé", le médecin de la CNA s'est écarté de la seconde partie des conclusions de son confrère, estimant pour sa part que le recourant était apte à exercer une activité adaptée à 100 % moyennant certaines limitations. On se trouve donc en présence d'un consilium médical externe à la CNA - sur lequel s'appuie d'ailleurs le médecin traitant de l'assuré - qui est mis en doute par l'avis du service médical interne de l'assureur. Dans ces circonstances, la CNA pouvait certes considérer que l'appréciation de son médecin-conseil était de nature à éveiller des doutes sur la fiabilité et la validité des considérations émises par le médecin externe (ce qui aurait justifié une demande d'explication supplémentaire à ce médecin ou la tenue d'une expertise). Elle n'était en revanche pas fondée à rendre sa décision sur la seule base de l'avis contraire de son médecin-conseil, faisant fi du consilium externe qu'elle avait demandé (cf. arrêt 8C_756/2008 du 4 juin 2009 consid. 5.3). Les premiers juges auraient dû mettre en évidence cette divergence de vue au sujet de la capacité de travail résiduelle de l'assuré, et requérir le complément d'instruction qui fait défaut.  
 
4.3. En ce qui concerne le taux de l'atteinte à l'intégrité, on notera que le docteur D.________ ne s'est pas prononcé à ce sujet. Apparemment, la CNA ne lui a pas demandé de procéder à une telle estimation, aucune indication dans ce sens ne figurant dans son rapport du 19 juillet 2010. On ne peut toutefois s'appuyer sur celle du médecin de la CNA qui l'a fixée à 5 %. En effet, celui-ci s'est contenté de justifier son évaluation par "l'ensemble de l'évolution avec deux ou trois résultats d'examen pathologiques objectivables s'accompagnant de troubles subjectifs importants". Une telle appréciation est trop lacunaire pour que le juge puisse examiner le bien-fondé du taux retenu (qui correspond à la limite inférieure de la catégorie des troubles légers d'après la table d'indemnisation 14 relative aux troubles de l'équilibre). Non seulement on ignore à quels "résultats d'examen pathologiques" ce médecin fait référence, mais encore on ne voit pas qu'il suive les critères d'évaluation précis et détaillés préconisés par la table d'indemnisation 14.  
 
4.4. En conséquence, un complément d'instruction est nécessaire tant sur le degré de la capacité de travail (résiduelle) du recourant que sur le taux de son atteinte à l'intégrité. Dans ces conditions, il est prématuré de se prononcer sur le rapport de causalité adéquate entre l'accident et d'éventuels troubles psychiques.  
 
5.   
Par contre, il n'y a pas lieu d'entrer en matière sur le grief du recourant relatif au revenu annuel sans invalidité retenu par les premiers juges. Sur ce point précis, la motivation du recours n'apparaît pas suffisante (ATF 140 V 86 consid. 2) et repose de surcroît sur novum inadmissible en procédure fédérale (cf. art. 99 al. 1 LTF; ATF 139 III 120 consid. 3.1.2 p. 123). Le recourant se réfère en effet à une attestation du 11 juin 2013 de son ancien employeur, soit à un moyen de preuve postérieur au prononcé du jugement entrepris. 
 
6.   
Au vu de ce qui précède, la cause sera renvoyée à la juridiction cantonale pour qu'elle procède à une instruction complémentaire. Dans la mesure où les séquelles ORL sont vraisemblablement amplifiés par une composante psychique, cette instruction comprendra un volet oto-neurologique et psychiatrique. Après quoi, la juridiction cantonale rendra un nouveau jugement sur le droit de l'assuré aux prestations de l'assurance-accidents (rente d'invalidité et indemnité pour atteinte à l'intégrité). 
En ce sens le recours se révèle bien fondé. 
 
7.   
Compte tenu de l'issue du litige, le recourant peut prétendre une indemnité de dépens à la charge de l'intimée (art. 68 al. 1 LTF). Celle-ci supportera par ailleurs les frais de justice (art. 66 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est partiellement admis. La décision du 8 mai 2013 de la Cour de droit public du Tribunal cantonal de la République et canton de Neuchâtel est annulée. La cause est renvoyée au tribunal cantonal pour instruction complémentaire et nouveau jugement au sens des considérants. Le recours est rejeté pour le surplus. 
 
2.   
Les frais judiciaires, arrêtés à 800 fr., sont mis à la charge de l'intimée. 
 
3.   
L'intimée versera au recourant la somme de 2'800 fr. à titre de dépens pour l'instance fédérale. 
 
4.   
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal cantonal de la République et canton de Neuchâtel, Cour de droit public, et à l'Office fédéral de la santé publique. 
 
 
Lucerne, le 4 juillet 2014 
Au nom de la Ire Cour de droit social 
du Tribunal fédéral suisse 
La Présidente :       La Greffière : 
 
Leuzinger       von Zwehl