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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
6B_286/2022, 6B_327/2022  
 
 
Arrêt du 15 juin 2023  
 
Cour de droit pénal  
 
Composition 
Mmes et M. les Juges fédéraux 
Jacquemoud-Rossari, Présidente, Denys et Koch. 
Greffière : Mme Meriboute. 
 
Participants à la procédure 
6B_286/2022 
Ministère public central du canton de Vaud, 
avenue de Longemalle 1, 1020 Renens VD, 
recourant, 
 
contre  
 
1. A._________, 
représenté par Me Jean-Emmanuel Rossel, avocat, 
2. B.B._________, 
agissant par C._________, 
et D.B._________, 
eux-mêmes représentés par Me Aba Neeman, avocat, 
intimés, 
 
et 
 
6B_327/2022 
B.B._________, 
agissant par C._________, et 
D.B._________, 
eux-mêmes représentés par Me Aba Neeman, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
1. A._________, 
représenté par Me Jean-Emmanuel Rossel, avocat, 
2. Ministère public central du canton de Vaud, 
avenue de Longemalle 1, 1020 Renens VD, 
intimés. 
 
Objet 
Lésions corporelles graves par négligence, 
 
recours contre le jugement de la Cour d'appel 
pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud, du 1er décembre 2021 (n° 442 PE19.011595-EBJ/NMO). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Par jugement du 10 juin 2021, le Tribunal de police de l'arrondissement de l'Est vaudois a libéré A._________ de l'accusation de contravention à la Loi fédérale sur les stupéfiants (I); l'a condamné pour lésions corporelles graves par négligence, conduite en présence d'un taux d'alcool qualifié dans le sang ou dans l'haleine et défaut de port du permis de conduire à une peine pécuniaire de 120 jours-amende à 60 fr. le jour, avec sursis durant 2 ans, ainsi qu'à une amende de 1'200 fr., la peine privative de liberté de substitution en cas de non-paiement fautif étant de 20 jours (II); a dit que A._________ était le débiteur de B.B._________ de la somme de 30'000 fr., avec intérêts à 5 % l'an dès le 18 juin 2021, à titre d'indemnité pour tort moral; de D.B._________ de la somme de 5'000 fr., avec intérêts à 5 % l'an dès le 18 juin 2021, à titre d'indemnité pour tort moral; de C._________ de la somme de 5'000 fr., avec intérêts à 5 % l'an dès le 18 juin 2021, à titre d'indemnité pour tort moral; de B.B._________, D.B._________ et C._________, solidairement entre eux, de la somme de 5'769 fr. 82 à titre d'indemnité au sens de l'art. 433 CPP (Ill); a donné acte pour le surplus à B.B._________, D.B._________ et C._________ de leurs réserves civiles à l'encontre de A._________ (IV); a ordonné le maintien au dossier à titre de pièce à conviction du CD inventorié sous fiche n° 10'650 (V); a mis les frais de la cause, par 13'031 fr., à la charge de A._________ (VI). 
 
B.  
Par jugement du 1er décembre 2021, la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal vaudois a admis l'appel formé par A._________. Elle a modifié le dispositif du jugement du 10 juin 2021 aux chiffres I, II, III, VI. Ainsi, elle a libéré A._________ de l'accusation de contravention à la LStup et de lésions corporelles graves par négligence (I); l'a condamné pour conduite en présence d'un taux d'alcool qualifié dans le sang ou dans l'haleine et défaut de port du permis de conduire à une peine pécuniaire de 20 jours-amende à 60 fr. le jour, avec sursis durant 2 ans, ainsi qu'à une amende de 800 fr., la peine privative de liberté de substitution en cas de non-paiement fautif étant de 8 jours; a supprimé le chiffre III relatif au tort moral alloué aux plaignants et à l'indemnité au sens de l'art. 433 CPP; a mis le cinquième des frais de la cause, par 2'606 fr. 20, à la charge de A._________, le solde, par 10'424 fr. 80, étant laissé à la charge de l'État (VI). Les frais d'appel ont été laissés à la charge de l'État. 
En substance, il ressort les éléments suivants. 
 
B.a. A._________ est né en 1980. Après avoir obtenu son CFC de mécanicien sur automobiles, il a fondé son entreprise en 2015 dans le domaine de la modernisation d'ascenseurs. Il a occupé quatre employés avant de diminuer le nombre de ceux-ci. Il envisage de réorienter son entreprise dans le domaine du démontage d'ascenseurs. Divorcé, il est père d'une fille de 7 ans. Son salaire net se monte à 5'917 fr., ses charges de logement à 1'025 fr., la pension alimentaire en faveur des siens à 1'200 fr., les frais de scolarité de sa fille à 600 fr.; les autres dépenses liées à son logement se montent à environ 400 fr., auxquelles s'ajoute une charge d'impôt de 990 francs. Il n'a ni dettes ni économies.  
Le casier judiciaire de A._________ est vierge. 
Le fichier SIAC mentionne la mesure suivante: retrait du permis de conduire du 13 juin au 12 septembre 2019 pour ébriété, consécutif à la présente affaire. 
 
B.b. Il ressort des faits établis par la cour cantonale que l'acte d'accusation du 10 mars 2021 reprochait à A._________ les éléments suivants.  
 
B.b.a. À U._________, le jeudi 13 juin 2019, vers 20h45, alors qu'il avait consommé quatre bières de 5 dl depuis 17h00 et qu'il se trouvait donc sous l'influence de l'alcool (0.97 g/kg taux le plus favorable), A._________ a quitté son lieu de travail au volant de son véhicule X._________ immatriculé VD xxx xxx pour rejoindre son domicile, par le trajet qu'il avait l'habitude d'emprunter. Il n'était en outre pas en possession de son permis de conduite.  
 
B.b.b. Alors qu'il circulait sur la rue de V._________ en direction de U1._________, A._________ a remarqué la présence d'enfants aux abords de la chaussée: en effet, certains cheminaient sur le trottoir, sur sa gauche, tandis que d'autres jouaient au ballon et en trottinette sur la droite de la route, près de la cour de l'école de V._________. Toutefois, et malgré ces observations, il a poursuivi sa route à une vitesse de 45 à 50 km/h sans adapter sa vitesse aux circonstances et donc sans ralentir. A l'approche du passage piétons se trouvant directement devant l'école, dont la zone d'attente, à droite, est masquée par un mur longeant la chaussée, A._________ s'est déporté au centre de la chaussée, au lieu de ralentir. Il a par ailleurs détourné son regard de la route pour observer ce qu'il se passait derrière lui, dès lors que son attention avait été distraite par les phares d'un véhicule qui le suivait et qui se reflétaient dans son rétroviseur central. De cette façon, A._________ n'a pas vu l'enfant B.B._________, né en 2013 et alors âgé de 5 ans, qui s'était élancé au guidon de sa trottinette à une vitesse de 9 à 11 km/h sur le passage pour piétons, de droite à gauche selon son sens de circulation. A._________ a ainsi heurté de plein de fouet le flanc gauche de l'enfant avec l'avant gauche de son véhicule, le projetant à environ 25 mètres du point d'impact. Il a ensuite entrepris un freinage d'urgence, avant d'immobiliser sa voiture et d'aller lui prêter assistance.  
 
B.b.c. B.B._________, dont le pronostic vital était alors engagé (NACA 5), a été acheminé en ambulance sur le site de W._________ de l'Hôpital E._________, avant d'être héliporté à Y._________. Il a souffert d'un traumatisme crânio-cérébral sévère avec lésions axonales diffuses, pétéchies hémorragiques intraparenchymateuses et hématome sous-dural gauche, de contusions pulmonaires étendues, d'une fracture splénique de grade IV (sévère) avec pseudo-anévrisme, d'une fracture comminutive diaphysaire proximale du fémur gauche, d'une fracture de la branche ilio-pubienne gauche et d'une fracture de l'arc postérieur de la 1ère côte gauche.  
L'enfant a été hospitalisé du 13 juin 2019 à fin novembre de la même année. Les lésions cérébrales, spléniques et pulmonaires précitées ont gravement mis sa vie en danger. 
Ensuite du traumatisme cranio-cérébral sévère qu'il a subi, B.B._________ présentait, le 11 décembre 2020, lors d'une consultation auprès de l'Unité de neurorhéabilitation pédiatrique de Y._________, un léger syndrome cérébelleux, une légère hémiparésie spastique gauche, des signes pyramidaux légers au MID et un léger trouble du langage expressif. A cette occasion, les spécialistes ont qualifié l'évolution de B.B._________ de satisfaisante, avec une bonne compensation de l'hémisyndrome gauche et du léger syndrome cérébelleux. Un port de tête dévié sur la gauche a toutefois été constaté; un trouble visuel latent compensé par cette position de la tête n'est pas exclu et doit faire l'objet d'un contrôle ultérieur. L'enfant est scolarisé dans une classe ordinaire et bénéficie de 12 périodes d'assistance hebdomadaire, notamment pour la motricité fine, la lecture et la mémorisation. 
L'enfant fait par ailleurs l'objet d'un suivi ergothérapeutique à raison d'une séance hebdomadaire. Depuis le mois de janvier 2021, il consulte également un logothérapeute à la même fréquence. Enfin, une intervention chirurgicale en vue de l'ablation du matériel ostéosynthétique, avec reprise de la cicatrice, est envisagée sans qu'une date ne soit encore fixée. 
 
B.c. Les parents de l'enfant ont déposé plainte le 12 septembre 2019 et se sont constitués parties plaignantes demandeurs au civil, chiffrant leurs prétentions à au moins 6'000 francs.  
 
B.d. En cours d'enquête, une expertise a été confiée au bureau G._________, à Z._________, qui a rendu son rapport le 26 octobre 2020. Il en ressort en substance que le choc a dû se produire sur une zone d'environ 0,5 m de long, entre environ 1 m et 1,5 m après le début des bandes du passage pour piétons, et à environ 2.6 à 2.7 m du bord droit de la route (zone d'impact du guidon contre le pare-chocs). Au point de choc, les experts retiennent une vitesse de déplacement du jeune garçon sur sa trottinette comprise entre 9 km/h et 11 km/h. Celle du véhicule de A._________ était comprise entre 45 km/h et 47 km/h. S'agissant de la visibilité, les experts relèvent que le mur d'enceinte de l'école, d'une hauteur de 1.3 m, masquait le jeune garçon jusqu'à environ 1.5 - 1.6 s avant le choc. A partir de 1.35 s, le garçon était toutefois totalement visible, le mur ne le masquant plus du tout. Enfin, s'agissant de l'évitement, les experts indiquent que pour pouvoir s'immobiliser avant le choc, en voyant le garçon dès qu'il n'était plus caché par le mur, la vitesse du véhicule n'aurait pas dû dépasser 35 km/h dans le meilleur des cas, à savoir avec un freinage important et une réaction rapide. Les experts retiennent que l'ébriété au volant n'a apparemment pas eu d'incidence sur le temps de réaction de A._________.  
Les parties n'ont pas contesté les conclusions de l'expertise. 
 
C.  
 
C.a.  
Le Ministère public du canton de Vaud (ci-après le recourant 1) forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre le jugement du 1er décembre 2021 (dossier 6B_286/2022). Il conclut, principalement, à la réforme du jugement en ce sens que l'appel de A._________ est rejeté, le jugement rendu le 10 juin 2021 par le Tribunal de police de l'Est vaudois est confirmé et les frais de la procédure d'appel sont mis à la charge de A._________. Subsidiairement, il conclut au renvoi de la cause à l'autorité inférieure pour nouvelle décision dans le sens des considérants. 
 
C.b. B.B._________ (ci-après le recourant 2 ou la partie plaignante) forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre le jugement du 1er décembre 2021 (dossier 6B_327/2022). Principalement, il conclut à la réforme de ce jugement en ce sens que le jugement rendu le 10 juin 2021 par le Tribunal de police de l'arrondissement de l'Est vaudois est confirmé. Subsidiairement, il conclut à l'annulation du jugement du 1er décembre 2021 et au renvoi de la cause à l'autorité inférieure pour nouvelle décision dans le sens des considérants.  
Il sollicite, en outre, l'octroi de l'assistance judiciaire. En tout état de cause, les frais d'appel sont mis à la charge de A._________ et une juste indemnité est allouée à titre de dépens à B.B._________. 
 
D.  
Invités à se déterminer sur les recours, la cour cantonale a renoncé à se déterminer, se référant aux considérants de sa décision, tandis que A._________ a formulé des observations. A._________ conclut, avec suite de frais et dépens, au rejet des recours du ministère public et de B.B._________ et à la confirmation du jugement attaqué. Invité à se déterminer sur le recours du ministère public, B.B._________ a renoncé à se déterminer. Ces écritures ont été communiquées aux recourants à titre de renseignement. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Les deux recours, dirigés contre le même jugement, concernent le même complexe de faits et portent dans une large mesure sur les mêmes questions de droit. Il se justifie de les joindre et de statuer par une seule décision (art. 71 LTF et 24 PCF). 
 
2.  
En application de l'art. 81 al. 1 let. b ch. 3 LTF, l'accusateur public a qualité pour former un recours en matière pénale. 
Savoir quelle autorité au sein d'un canton constitue l'accusateur public est une question qui doit se résoudre à l'aune de la LTF. Lorsqu'il existe un ministère public compétent pour la poursuite de toutes les infractions sur l'ensemble du territoire, seule cette autorité aura la qualité pour recourir au Tribunal fédéral. En revanche, savoir qui, au sein de ce ministère public, a la compétence de le représenter est une question d'organisation judiciaire, soit une question qui relève du droit cantonal (ATF 142 IV 196 consid. 1.5.2). 
Dans le canton de Vaud, l'art. 27 al. 2 de la loi du 19 mai 2009 sur le Ministère public (LMPu/VD; RS/VD 173.21) dispose que le procureur général ou ses adjoints sont seuls compétents pour saisir le Tribunal fédéral. 
En l'espèce, le mémoire de recours est signé par le Procureur général du canton de Vaud. Le recours est donc recevable. 
 
3.  
Selon l'art. 81 al. 1 let. a et b ch. 5 LTF, la partie plaignante qui a participé à la procédure de dernière instance cantonale est habilitée à recourir au Tribunal fédéral si la décision attaquée peut avoir des effets sur le jugement de ses prétentions civiles. Constituent de telles prétentions celles qui sont fondées sur le droit civil et doivent en conséquence être déduites ordinairement devant les tribunaux civils. Il s'agit principalement des prétentions en réparation du dommage et du tort moral au sens des art. 41 ss CO (ATF 141 IV 1 consid. 1.1). 
En l'espèce, le recourant 2 était partie à la procédure de dernière instance cantonale. Il a fait valoir des prétentions en indemnisation du tort moral résultant de l'infraction retenue contre l'intimé. Le montant alloué au recourant 2 en première instance, a été supprimé en appel. 
Il a, partant, qualité pour recourir à l'encontre du jugement entrepris. 
 
I. Lésions corporelles graves par négligence  
 
4.  
Les recourants 1 et 2 reprochent à la cour cantonale d'avoir violé l'art. 125 al. 2 CP en acquittant l'intimé du chef de lésions corporelles graves par négligence. 
 
4.1.  
 
4.1.1. Celui qui, par négligence, aura fait subir à une personne une atteinte à l'intégrité corporelle ou à la santé sera, sur plainte, puni d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire (art. 125 al. 1 CP). Si la lésion est grave, le délinquant sera poursuivi d'office (art. 125 al. 2 CP). Cette infraction suppose la réalisation de trois conditions, à savoir une négligence, une atteinte à l'intégrité physique et un lien de causalité naturelle et adéquate entre ces deux éléments (arrêts 6B_375/2022 du 28 novembre 2022 consid. 3.1.1; 6B_33/2021 du 12 juillet 2021 consid. 3.1; 6B_1420/2016 du 3 octobre 2017 consid. 1.1.1).  
Selon l'art. 12 al. 3 CP, il y a négligence si, par une imprévoyance coupable, l'auteur a agi sans se rendre compte ou sans tenir compte des conséquences de son acte. Il faut que l'auteur ait, d'une part, violé les règles de prudence que les circonstances lui imposaient pour ne pas excéder les limites du risque admissible et que, d'autre part, il n'ait pas déployé l'attention et les efforts que l'on pouvait attendre de lui pour se conformer à son devoir (ATF 143 IV 138 consid. 2.1; 135 IV 56 consid. 2.1 et les références citées). Pour déterminer plus précisément les devoirs imposés par la prudence, on peut se référer à des normes édictées par l'ordre juridique pour assurer la sécurité et éviter des accidents (ATF 143 IV 138 consid. 2.1). S'agissant d'un accident de la route, il convient de se référer aux règles de la circulation routière (ATF 122 IV 133 consid. 2a; arrêts 6B_1081/2020 du 17 novembre 2021 consid. 1.2; 6B_33/2021 précité consid. 3.1). 
Il faut en outre qu'il existe un rapport de causalité entre la violation fautive du devoir de prudence et les lésions de la victime. Le rapport de causalité est qualifié d'adéquat lorsque, d'après le cours ordinaire des choses et l'expérience de la vie, le comportement était propre à entraîner un résultat du genre de celui qui s'est produit (ATF 138 IV 57 consid. 4.1.3). La causalité adéquate sera admise même si le comportement de l'auteur n'est pas la cause directe ou unique du résultat. Peu importe que le résultat soit dû à d'autres causes, notamment à l'état de la victime, à son comportement ou à celui de tiers (ATF 131 IV 145 consid. 5.2). 
La causalité adéquate peut être exclue si une autre cause concomitante, par exemple une force naturelle, le comportement de la victime ou d'un tiers, constitue une circonstance tout à fait exceptionnelle ou apparaît si extraordinaire que l'on ne pouvait s'y attendre. L'imprévisibilité d'un acte concurrent ne suffit pas en soi à interrompre le rapport de causalité adéquate. Il faut encore que cet acte ait une importance telle qu'il s'impose comme la cause la plus probable et la plus immédiate de l'événement considéré, reléguant à l'arrière-plan tous les autres facteurs qui ont contribué à l'amener et notamment le comportement de l'auteur (ATF 143 III 242 consid. 3.7; 134 IV 255 consid. 4.4.2; 133 IV 158 consid. 6.1; 131 IV 145 consid. 5.2). La question de la causalité adéquate constitue une question de droit que le Tribunal fédéral revoit librement (ATF 142 IV 237 consid. 1.5.1 et 1.5.2; 139 V 176 consid 8.4.1 à 8.4.3; 138 IV 57 consid. 4.1.3). 
 
4.2.  
 
4.2.1. L'art. 26 LCR prescrit que chacun doit se comporter, dans la circulation, de manière à ne pas gêner ni mettre en danger ceux qui utilisent la route conformément aux règles établies (al. 1). La jurisprudence a déduit de cette règle le principe de la confiance, qui permet à l'usager qui se comporte réglementairement d'attendre des autres usagers, aussi longtemps que des circonstances particulières ne doivent pas l'en dissuader, qu'ils se comportent également de manière conforme aux règles de la circulation, c'est-à-dire ne le gênent ni ne le mettent en danger (ATF 143 IV 138 consid. 2.1; 125 IV 83 consid. 2b et les références citées). Selon l'art. 26 al. 2 LCR, une prudence particulière s'impose à l'égard des enfants, des infirmes et des personnes âgées, de même s'il apparaît qu'un usager de la route va se comporter de manière incorrecte. Le principe de la confiance ne s'applique donc pas à l'égard de ces personnes (ATF 129 IV 282 consid. 2.2.1; 115 IV 239 consid. 2). Celui qui n'agit pas de manière conforme aux règles de la circulation routière ne peut se prévaloir du principe de la confiance (ATF 125 IV 83 consid. 2b).  
 
4.2.2. L'art. 31 al. 1 LCR dispose que le conducteur devra rester constamment maître de son véhicule de façon à pouvoir se conformer aux devoirs de la prudence.  
 
4.2.3. Aux termes de l'art. 32 al. 1 LCR, la vitesse doit toujours être adaptée aux circonstances, notamment aux particularités du véhicule et du chargement, ainsi qu'aux conditions de la route, de la circulation et de la visibilité. Cette règle implique notamment qu'on ne peut circuler à la vitesse maximale autorisée que si les conditions de la route, du trafic et de visibilité sont favorables (ATF 121 IV 286 consid. 4b; 121 II 127 consid. 4a; cf. art. 4a OCR).  
 
4.2.4. D'après l'art. 33 al. 2 LCR, le conducteur circulera avec une prudence particulière avant les passages pour piétons. Il réduira sa vitesse et s'arrêtera, au besoin, pour laisser la priorité aux piétons qui se trouvent déjà sur le passage ou s'y engagent (cf. également art. 6 al. 1 OCR). L'art. 49 al. 2 LCR prescrit pour sa part que les piétons, s'ils bénéficient de la priorité sur les passages pour piétons, ne doivent pas s'y lancer à l'improviste.  
La "prudence particulière" que doit adopter le conducteur selon l'art. 33 al. 2 LCR signifie qu'il doit porter une attention accrue aux passages pour piétons et à leurs abords (ATF 121 IV 296 consid. 4b; arrêts 6B_343/2019 du 11 avril 2019 consid. 1.3.1; 6B_929/2017 du 19 mars 2018 consid. 1.2.1). Le conducteur doit ainsi être prêt à s'arrêter à temps si un piéton traverse la chaussée ou en manifeste la volonté (arrêts 6B_1172/2017 du 14 février 2018 consid. 2.3; 6B_262/2016 du 6 janvier 2017 consid. 3.2.2). 
D'une manière générale, le degré d'attention exigé du conducteur s'apprécie au regard de toutes les circonstances, telles que la densité du trafic, la configuration des lieux, l'heure, la visibilité et les sources de danger prévisibles (ATF 129 IV 282 consid. 2.2.1). Ainsi en particulier, lorsque le passage pour piétons est coupé en deux tronçons par un refuge, le conducteur doit également examiner ce qui se passe sur la partie du passage qui se trouve sur la voie de circulation opposée ainsi que sur le trottoir de gauche, pour savoir si des piétons s'y trouvent, qui pourraient, ce qui n'est pas rare, traverser la route sans s'arrêter, en violation de leur devoir d'observation et d'attente (ATF 129 IV 39 consid. 2.2). Il est en effet admis que le devoir de prudence du conducteur ne disparaît pas à l'égard d'un piéton qui s'élance sur un passage pour piétons de manière contraire aux règles (arrêts 6B_343/2019 précité consid. 1.3.1; 6B_262/2016 précité consid. 3.2.2). 
 
4.3.  
La cour cantonale a libéré l'intimé du chef de prévention de lésions corporelles graves par négligence. 
La cour cantonale a retenu que les lésions dont avait souffert et souffrait toujours le recourant 2 devaient être qualifiées de graves au sens de l'art. 122 CP. Ses blessures avaient en effet mis sa vie en danger. En outre, des séquelles neurologiques importantes perdurent à ce jour, près de deux ans après les faits, et l'enfant risque d'en souffrir sa vie durant. De surcroît, il a été hospitalisé durant près de six mois après l'accident et il a subi et devra encore subir des interventions chirurgicales. 
La cour cantonale a estimé que l'intimé n'avait pas fait preuve de négligence coupable au sens de l'art. 12 al. 3 CP. Elle a retenu qu'il ressortait des pièces du dossier, en particulier du rapport d'expertise, qu'au point de choc, l'enfant circulait sur sa trottinette à une vitesse comprise entre 9 km/h et 11 km/h et que l'intimé roulait à une vitesse de 45 km/h à 47 km/h. Le mur d'enceinte de l'école, d'une hauteur de 1.3 m, masquait le jeune garçon jusqu'à environ 1.5 - 1.6 s avant que le choc ne se produise. La consommation d'alcool n'avait en outre pas altéré les capacités de réaction de l'intimé. Le visionnage des images de la caméra de vidéosurveillance, permettait de voir l'enfant sur sa trottinette, prendre de l'élan le long du bâtiment, se faufiler entre les barrières censées retenir les piétons à l'approche du passage et traverser, sans freiner, la chaussée immédiatement devant le véhicule de l'intimé. Ces constatations étaient reprises dans les rapports de police des 14 juin et 3 septembre 2021. La cour cantonale a également retenu qu'aux débats de première instance, le témoin, F._________, avait déclaré que quelques mois avant l'accident, elle avait participé à une soirée sportive organisée dans l'établissement scolaire jouxtant le passage piétons où s'est produit l'accident. Ce soir-là, elle avait vu le recourant 2 seul de 15h30 à 22h. A un moment, elle avait vu l'enfant circuler sur sa trottinette à une vitesse qui ne lui aurait pas permis de s'arrêter à temps et avait constaté qu'il allait passer sous la barrière sans s'arrêter. Elle avait alors hurlé et l'enfant s'était arrêté sur le passage piétons. Elle a déclaré que s'il y avait eu une voiture ce soir-là, un accident serait arrivé même avec un conducteur prudent. 
La cour cantonale a également retenu que l'intimé avait expliqué qu'il connaissait bien les lieux, notamment la présence d'un mur longeant la chaussée, masquant d'éventuels piétons ainsi que l'existence de barrières sur le chemin d'accès au dit passage piétons, placées là pour forcer les personnes venant du chemin à ralentir avant de s'engager sur la route. A l'approche du passage piétons, il s'était déporté au centre de la chaussée afin de s'éloigner de la partie non visible et parer à l'éventualité d'un piéton qui s'engagerait sur la route sans s'arrêter. Il avait expliqué qu'à cette heure, soit 20h45, il était peu probable qu'un jeune enfant soit présent sur les lieux. Il avait ajouté avoir vu des enfants et des adolescents à proximité de la zone sportive près de l'école, mais personne sur le passage piétons. Il a indiqué que ce passage piétons était précédé par un dos d'âne au niveau de l'intersection située à quelques mètres, obligeant les automobilistes à ralentir. 
La cour cantonale a considéré qu'au vu de ces circonstances, en particulier du fait que l'enfant avait surgi du muret qui le dissimulait à une vitesse largement supérieure à celle d'un piéton au pas, la soudaineté de la présence de l'enfant sur le passage piétons constituait une circonstance tout à fait exceptionnelle que l'intimé ne pouvait envisager, d'autant qu'il ne devait pas s'attendre à ce que l'enfant parvienne à slalomer entre les barrières à une vitesse aussi élevée. Ainsi, elle a estimé que le lien de causalité adéquate était rompu entre le comportement de l'intimé et la survenance de l'accident, compte tenu du comportement imprévisible de l'enfant qui relarguait à l'arrière-plan celui de l'intimé. Pour la cour cantonale, au vu du déroulement des faits, force était d'admettre que l'accident était inéluctable, sauf à exiger des automobilistes empruntant ce tronçon de rouler à une vitesse maximale de 35 km/h ou même de s'arrêter systématiquement avant le passage piétons en cause, nonobstant l'autorisation de rouler à 50 km /h dans cette zone et l'absence d'un feu de signalisation à cet endroit. 
 
4.4.  
 
4.4.1. En l'espèce, il ne fait pas de doute que le recourant 2 a subi des lésions corporelles graves.  
 
4.4.2. Il convient de déterminer si l'intimé a fait preuve de négligence coupable. A l'approche d'un passage pour piétons, le conducteur se doit de circuler avec une prudence particulière (cf. art. 33 al. 2 LCR). La vitesse dépend des circonstances, notamment de la visibilité. En tout état, la vitesse doit être adaptée de telle manière à pouvoir accorder la priorité à un piéton. Ce n'est que si personne ne se trouve à proximité du passage pour piétons, si le conducteur peut admettre qu'aucun piéton ne surgira à l'improviste ou encore si on lui fait clairement comprendre qu'il a la priorité, que le conducteur n'est pas obligé de réduire sa vitesse à l'approche du passage piétons. Si le conducteur ne bénéficie pas d'une bonne visibilité de toute la chaussée et du trottoir à proximité du passage, celui-ci doit modérer sa vitesse de sorte à pouvoir accorder la priorité aux piétons masqués derrière l'obstacle (cf. arrêts 6B_407/2022 du 23 mai 2022 consid. 4.2; 6B_262/2016 précité consid. 3.2.2; 6B_493/2011 du 12 décembre 2011 consid. 4.2.2; BUSSY ET AL., Code suisse de la circulation routière commenté, 4e éd. 2015, n° 2.5 ad art. 33 LCR). L'intimé avait une bonne connaissance des lieux, il a expliqué qu'il savait que le muret d'enceinte de l'école longeant la chaussée masquait d'éventuels piétons. Certes ce n'était pas une heure de sortie des classes, mais l'intimé a expliqué avoir vu des enfants et adolescents à proximité de la zone sportive près de l'école, de sorte que la présence d'un enfant ne pouvait être exclue. L'intimé s'est d'ailleurs déporté au centre de la chaussée afin de s'éloigner de la partie non visible. Cette manoeuvre montre bien qu'il avait perçu l'éventualité qu'un piéton puisse s'engager sur la route sans s'arrêter. Or, sachant qu'un piéton à proximité du passage pouvait être dissimulé derrière le muret, l'intimé se devait d'adapter sa vitesse, de sorte à pouvoir lui accorder la priorité. La vitesse de l'intimé de 45 à 47 km/h, bien que proche de la vitesse prescrite sur ce tronçon, était dans de telles circonstances excessive (cf. ATF 121 IV 286 consid. 4b). A cet égard, les experts ont indiqué que pour pouvoir s'immobiliser avant le choc, en voyant l'enfant dès qu'il n'était plus caché par le muret, la vitesse du véhicule n'aurait pas dû dépasser 35 km/h. Compte tenu de l'absence de visibilité en raison du muret et de la bonne connaissance de la configuration des lieux par l'intimé, celui-ci a fait preuve d'imprévoyance coupable en n'adaptant pas sa vitesse à l'approche du passage pour piétons jouxtant l'école.  
 
4.4.3. Les recourants 1 et 2 reprochent à la cour cantonale d'avoir considéré que le comportement de l'enfant avait eu pour effet d'interrompre le lien de causalité adéquate.  
On peut suivre le recourant 1 lorsqu'il souligne qu'il n'était pas extraordinaire, dans une petite ville, un soir du mois de juin, que des enfants et adolescents jouent à l'extérieur, qui plus est dans une zone scolaire et sportive. L'intimé a d'ailleurs admis avoir croisé des enfants et adolescents à proximité de la zone sportive près de l'école. Il n'était pas d'avantage surprenant que certains d'entre eux puissent se trouver au guidon de trottinettes ou d'autres engins à roues, avec une vitesse supérieure à celle d'un piéton au pas. Au demeurant, il est notoire que la notion de prudence vis-à-vis de la circulation est particulièrement ténue chez les enfants. 
Le fait qu'un enfant surgisse de derrière un obstacle, à une vitesse supérieure à celle du pas, sur un passage pour piétons jouxtant une école, ne saurait être considéré comme une circonstance exceptionnelle et ce, quand bien même, l'existence de barrières censées retenir les piétons. Partant, le comportement de l'enfant n'était pas imprévisible au point de reléguer à l'arrière-plan la faute du conducteur, de telle sorte que le lien de causalité adéquate n'a pas été rompu. 
 
4.5. Partant, le grief des recourants 1 et 2 est admis. La cour cantonale a violé le droit fédéral en libérant l'intimé du chef d'accusation de lésions corporelles graves par négligence.  
 
II. Frais  
 
5.  
Les recours doivent êtres admis, le jugement attaqué annulé et la cause renvoyée à l'autorité cantonale pour nouvelle décision. 
Une partie des frais judiciaires est mise à la charge de A._________, qui succombe, le canton de Vaud n'ayant pas à en supporter (art. 66 al. 1 et 4 LTF). 
Le recourant 2 peut prétendre à de pleins dépens, à la charge, pour moitié chacun, d'une part, du canton de Vaud et, d'autre part, de A._________ (art. 68 al. 1 et 2 LTF). Sa demande d'assistance judiciaire devient ainsi sans objet (art. 64 al. 2 LTF). 
Il n'y a pas lieu d'allouer une indemnité à l'accusateur public qui agit dans l'exercice de ses attributions officielles (art. 68 al. 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Les causes 6B_286/2022 et 6B_327/2022 sont jointes. 
 
2.  
Les recours sont admis, le jugement attaqué est annulé et la cause est renvoyée à la cour cantonale pour nouveau jugement. 
 
3.  
Une partie des frais judiciaires, arrêtée à 1'500 fr., est mise à la charge de A._________. 
 
4.  
Le canton de Vaud et A._________ verseront chacun au conseil du recourant 2 une indemnité de 1'500 fr. à titre de dépens pour la procédure devant le Tribunal fédéral. 
 
5.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
 
 
Lausanne, le 15 juin 2023 
 
Au nom de la Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Jacquemoud-Rossari 
 
La Greffière : Meriboute