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Eidgenössisches Versicherungsgericht 
Tribunale federale delle assicurazioni 
Tribunal federal d'assicuranzas 
 
Cour des assurances sociales 
du Tribunal fédéral 
 
Cause 
{T 7} 
I 661/02 
 
Arrêt du 9 décembre 2003 
IVe Chambre 
 
Composition 
Mme et MM. les Juges Leuzinger, Présidente, Rüedi et Ferrari. Greffière : Mme Moser-Szeless 
 
Parties 
S.________, recourant, représenté par Me Olivier Carré, avocat, place St-François 8, 1002 Lausanne, 
 
contre 
 
Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud, avenue Général-Guisan 8, 1800 Vevey, intimé 
 
Instance précédente 
Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne 
 
(Jugement du 23 mai 2002) 
 
Faits : 
A. 
S.________, né en 1958, originaire du Kosovo, a travaillé dès le 1er juin 1987 en qualité de manoeuvre au service de la société X.________ SA. Il a cessé son activité le 3 novembre 1993 en raison de lombalgies provoquées par un faux mouvement; après avoir subi en alternance des périodes d'incapacité de travail de 50 %, respectivement de 100 %, il a été totalement incapable de travailler depuis le 15 mai 1995. 
 
Le 13 février 1996, il a déposé une demande de prestations de l'assurance-invalidité. Il a été examiné par divers médecins, dont les docteurs A.________ et B.________ du Centre Y.________, qui ont posé le diagnostic de douleurs lombaires chroniques avec une composante anxio-dépressive chez une personnalité narcissique (rapport du 18 janvier 1996). Son médecin traitant, le docteur C.________ estime que des mesures professionnelles sont indiquées dès que possible et que toute activité sans charge physique serait exigible de l'assuré (rapport du 13 mars 1996). Ce dernier a également effectué un stage du 20 octobre au 12 décembre 1997 auprès du Centre d'intégration professionnelle de Genève (ci-après: OSER) au terme duquel un rapport d'évaluation a été rendu le 20 janvier 1998. Selon les conclusions de ce rapport, S.________ manque de détermination suffisante face à une réadaptation professionnelle (manque d'engagement, de réaction aux stimulations, aucune proposition concrète d'orientation); l'avis d'un psychiatre devrait être requis. 
 
L'Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud (ci-après: l'office AI) a chargé le docteur D.________, psychiatre et psychothérapeute du Centre médical Z.________, d'une expertise. Se fondant sur les conclusions de ce praticien (rapport du 22 février 2001), selon lesquelles l'assuré n'est atteint, du point de vue psychiatrique, d'aucun trouble significatif justifiant une diminution de sa capacité de travail et expliquant les difficultés rencontrées lors de la tentative de réadaptation professionnelle, l'office AI a rendu, le 11 octobre 2001, une décision par laquelle il a rejeté la demande de prestations, considérant que S.________ ne présentait pas d'atteinte à la santé invalidante. 
B. 
Saisi d'un recours de l'assuré, le Tribunal des assurances du canton de Vaud l'a rejeté par jugement du 23 mai 2002. 
C. 
S.________ interjette recours de droit administratif contre ce jugement dont il demande l'annulation. Il conclut, sous suite de frais et dépens, principalement à l'octroi d'une rente entière d'invalidité et, subsidiairement, au renvoi de la cause à l'administration pour instruction complémentaire sous forme d'une «nouvelle expertise multidisciplinaire axée principalement sur les aspects psychiatriques». A l'appui de son recours, il produit un «courrier des lecteurs» paru dans le quotidien «24 heures» du 17 juillet 2002, ainsi que des articles de ce journal des 6, 9 et 17 juillet 2002, relatifs au fonctionnement de l'office AI du canton de Vaud et à la remise en cause des compétences professionnelles du docteur D.________. 
 
L'office AI conclut au rejet du recours, tandis que l'Office fédéral des assurances sociales a renoncé à se déterminer. 
 
Considérant en droit : 
1. 
Le jugement entrepris expose correctement les dispositions légales et les principes jurisprudentiels applicables au cas, notamment en ce qui concerne la notion d'invalidité et l'appréciation des preuves, de sorte qu'il suffit d'y renvoyer. 
2. 
Le recourant conteste toute valeur probante à l'expertise ordonnée par l'office intimé et soulève en particulier le grief de prévention à l'encontre de l'expert, motif pris «de la notoriété de la partialité» du docteur D.________. Selon lui, les critiques émises à l'égard du psychiatre par des personnes qu'il a expertisées, ainsi que les accusations portées par certains de ses confrères et des membres du personnel soignant, relatées dans le quotidien «24 heures», constitueraient des éléments permettant de douter sérieusement de l'impartialité de l'expert. 
 
Il fait valoir, en outre, que l'avis du docteur E.________, Professeur associé au Département de psychiatrie W.________ et du docteur F.________, médecin-assistant, (des 6 juillet et 30 octobre 2001) ainsi que celui de son médecin traitant, le docteur C.________, (du 7 novembre 2001) seraient de nature à remettre en cause les conclusions auxquelles est parvenu le docteur D.________, puisque ces médecins reconnaissent l'existence de problèmes psychiques majeurs et préconisent une nouvelle expertise psychiatrique. 
3. 
3.1 Un expert passe pour prévenu lorsqu'il existe des circonstances propres à faire naître un doute sur son impartialité. Dans ce domaine, il s'agit toutefois d'un état intérieur dont la preuve est difficile à rapporter. C'est pourquoi il n'est pas nécessaire de prouver que la prévention est effective pour récuser un expert. Il suffit que les circonstances donnent l'apparence de la prévention et fassent redouter une activité partiale de l'expert. L'appréciation des circonstances ne peut pas reposer sur les seules impressions de l'expertisé, la méfiance à l'égard de l'expert devant au contraire apparaître comme fondée sur des éléments objectifs (ATF 125 V 353 sv. consid. 3b/ee, 123 V 176 consid. 3d et l'arrêt cité; VSI 2001 p. 109 sv. consid. 3b/ee; RAMA 1999 n° U 332 p. 193 consid. 2a/bb et les références). 
3.2 Les extraits du quotidien «24 heures» produits par le recourant portent en première ligne sur le fonctionnement de l'office AI vaudois, critiqué par certains membres du corps médical et du personnel soignant. Les auteurs du courrier des lecteurs du 17 juillet 2002 accusent également cet office de confier un grand nombre d'expertises au docteur D.________, dont ils discutent les compétences professionnelles. En tant qu'elle porte sur ce point, cette «polémique publique», comme l'exprime le recourant, ne permet pas d'étayer le grief de prévention soulevé par ce dernier. La critique porte sur les qualités professionnelles du praticien mis en cause et non sur son impartialité (voir infra consid. 4.1). 
 
Dût-on, au demeurant, déduire des lignes publiées que leurs auteurs reprochent au docteur D.________ la sévérité de ses appréciations médicales, que cela ne permettrait pas encore de mettre en évidence les éléments objectifs requis par la jurisprudence précitée. Il en va de même des plaintes exprimées par une assurée à l'égard du déroulement des entretiens qu'elle a eus avec le docteur D.________ au cours d'une expertise et qui ont fait l'objet d'un article dans l'édition du «24 heures» du 9 juillet 2002. On ne saurait tirer des circonstances d'une expertise concernant une tierce personne que les investigations menées par l'expert avec le recourant n'auraient pas été effectuées conformément aux règles de l'art. A cet égard, on relèvera que le recourant s'est rendu à deux reprises à la consultation du docteur D.________ pour l'établissement du rapport sans soulever d'objection à l'égard du médecin. Ce n'est qu'en procédure fédérale qu'il en conteste l'objectivité, sans toutefois se référer à des circonstances particulières relatives au déroulement de ses rencontres avec l'expert ou au contenu du rapport de ce dernier. En l'absence d'éléments concrets permettant de douter de la probité du docteur D.________ lors de l'expertise dont le recourant a fait l'objet, le moyen tiré de l'apparence de prévention n'est donc pas fondé. 
 
Au demeurant, de telles circonstances auraient dû être alléguées par le recourant dès que possible, à savoir dès qu'il en aurait eu connaissance, par exemple à l'issue des entretiens d'expertise dont il n'aurait pas été satisfait. En effet, selon la jurisprudence rendue en matière de récusation d'un juge, applicable par analogie à la récusation d'experts judiciaires (ATF 120 V 364 consid. 3a), ainsi qu'aux expertises ordonnées par l'administration (cf. VSI 2001 p. 111 consid. 4a/aa; voir aussi Meyer-Blaser, Rechtliche Vorgaben an die medizinische Begutachtung, in: Schaffhauser/Schlauri, Rechtsfragen der medizinischen Begutachtung in der Sozialversicherung, St-Gall 1997, p. 45 sv.), il est contraire à la bonne foi d'attendre l'issue d'une procédure pour tirer ensuite argument, à l'occasion d'un recours, du motif de récusation, alors que celui-ci était déjà connu auparavant (consid. 1b non publié de l'ATF 126 V 303, mais dans SVR 2001 BVG 7 p. 28 et les arrêts cités). 
4. 
4.1 En réalité, ce que le recourant tente de remettre en cause, c'est l'appréciation des preuves à laquelle la juridiction cantonale a procédé lorsqu'elle a été appelée à examiner le rapport d'expertise rédigé par le docteur D.________ à son sujet; ce qu'il conteste en se référant aux informations de la presse, ce sont les compétences professionnelles de ce médecin et, sous cet angle, la valeur probante des conclusions de son expertise. Il n'appartient toutefois pas au Tribunal fédéral des assurances de se prononcer sur l'aptitude professionnelle de ce médecin (cf. arrêt L. du 19 mars 2003, I 702/02). Ce dernier, membre de la Fédération des médecins suisses (FMH) était, et est toujours, titulaire du titre de spécialiste FMH en psychiatrie et en psychothérapie; le recourant n'allègue, par ailleurs, pas que le médecin aurait fait l'objet d'une procédure de retrait de l'autorisation de pratiquer (cf. art. 79 de la loi vaudoise du 29 mai 1985 sur la santé publique [RSVD 5.01 A; LSP] et Règlement vaudois du 26 août 1987 sur la procédure en matière de retrait d'autorisation de pratiquer et de mesures disciplinaires prévues par la LSP [RSVD 5.01 O]). Il dispose partant des qualifications nécessaires pour pratiquer son art et effectuer des expertises médicales (art. 11 de la loi fédérale concernant l'exercice des professions de médecin, de pharmacien et de vétérinaire dans la Confédération suisse [RS 811.11]; art. 91 let. a et 94 LSP). 
4.2 En ce qui concerne la valeur probante du rapport d'expertise en cause, on relèvera que le psychiatre a posé son diagnostic au regard des critères du Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux DSM IV édité par l'Association des psychiatres américains (American Psychiatric Association), qui préconise l'évaluation multiaxiale. Il mentionne, sur l'axe I, un trouble douloureux associé à la fois à des facteurs psychologiques et à une affection médicale générale chronique léger avec phénomène d'amplification volontaire, ainsi qu'une dysthymie et non-observance thérapeutique. Sur l'axe II, aucun diagnostic n'est retenu, alors que sur l'axe III le médecin a diagnostiqué des douleurs lombaires et, sur l'axe IV, des difficultés psychosociales. Tout en relevant par ailleurs l'existence de traits narcissiques qu'il estime peu significatifs, le psychiatre est d'avis qu'il n'existe aucun trouble significatif qui puisse justifier une quelconque diminution de la capacité de travail du recourant et expliquer les difficultés rencontrées lors de la tentative de réadaptation professionnelle; la dysthymie est certes susceptible de diminuer la qualité de vie de l'assuré, mais ne saurait être considérée comme invalidante au niveau de la capacité de travail. Ces conclusions sont fondées sur deux entretiens personnels, des tests psychométriques et examens paracliniques, l'étude du dossier et une anamnèse approfondie du patient. Par ailleurs, les considérations médicales sont clairement exprimées et bien motivées. Dès lors, à l'instar des premiers juges, on doit retenir que ce rapport répond à toutes les exigences posées par la jurisprudence en la matière (cf. ATF 125 V 352 consid. 3a, 122 V 160 consid. 1c et les références), si bien que l'on peut lui reconnaître pleine valeur probante. 
 
On précisera en outre que, contrairement à ce que semble avoir compris le recourant (cf. courrier de son conseil au Tribunal fédéral des assurances du 27 décembre 2002), le médecin n'a jamais affirmé que l'assuré aurait effectué des transports en camion de meubles ou d'autres objets au Kosovo; il indique que ce dernier, parmi ses autres activités quotidiennes, s'occupe de temps en temps d'organiser des transports dans son pays d'origine. Il n'y a dès lors pas lieu d'entrer en matière sur la requête du recourant qui demandait un second échange d'écriture sur ce point. Quant à la mention d'une marche de 70 km effectuée par le recourant avec sa famille au Kosovo dans des conditions difficiles en 1999, il n'est effectivement pas possible, comme il le fait valoir, d'en tirer des conclusions sur le plan médical, étant donné les circonstances exceptionnelles qui prévalaient à ce moment-là dans cette région d'ex-Yougoslavie. Cela étant, ce fait n'est pas déterminant, du point de vue psychiatrique, dans l'analyse effectuée par l'expert, de sorte que les affirmations y relatives ne sont pas suffisantes pour infirmer les conclusions du rapport du 22 février 2001. 
 
Par ailleurs, contrairement à ce qu'allègue le recourant, les pièces médicales produites en procédure cantonale ne permettent pas non plus d'écarter les conclusions du docteur D.________. Les diagnostics posés par le Professeur E.________ et le docteur F.________ dans leur certificat médical du 6 juillet 2001 (état anxio-dépressif, trouble douloureux somatoforme persistant et trouble non spécifique de la personnalité [trouble narcissique]) concordent en partie avec ceux discutés par l'expert dans son rapport du 22 février 2002. Ce dernier exclut toutefois, à la suite des examens qu'il a effectués, l'existence d'un trouble de somatisation, soit un trouble somatoforme indifférencié. En fait, les docteurs E.________ et F.________, ainsi que le docteur C.________ (courrier du 7 novembre 2001) se limitent, pour les premiers, à manifester leur incompréhension face à la décision de l'office intimé et, pour le second, à se montrer «surpris du résultat de l'expertise du psychiatre de l'Assurance-invalidité» sans toutefois étayer leurs critiques, ni dire en quoi, concrètement, l'expertise de leur confrère serait erronée. En particulier, le docteur C.________, spécialiste FMH en médecine interne, relève que l'avis de l'expert en cause est «contrairement opposé» à son expérience (cf. avis médical du 7 novembre 2001) sans chercher à infirmer les conclusions du rapport du docteur D.________, ni affirmer qu'il contiendrait des contradictions. Par ailleurs, si les trois médecins considèrent la capacité de travail du recourant comme nulle, ils ne motivent pas davantage leur appréciation. Le Professeur E.________ mentionne notamment qu'une nouvelle expertise psychiatrique pourrait «amener de nouveaux éléments pour juger l'état de santé et la capacité de travail du recourant», sans toutefois expliquer pourquoi le rapport du docteur D.________ serait lacunaire sur ce point, ni dire concrètement en quoi consisteraient ces nouveaux éléments. Par conséquent, dans la mesure où l'opinion des médecins de W.________ et du docteur C.________ ne repose sur aucune motivation substantielle, elle n'est pas apte à mettre sérieusement en doute la pertinence des déductions du docteur D.________. La mise en oeuvre d'une expertise judiciaire ne s'avère donc pas nécessaire. 
5. 
Compte tenu du diagnostic et des conclusions du docteur D.________, il y a lieu de retenir que le recourant ne présente pas, sur le plan psychiatrique, de trouble significatif qui justifierait une diminution de sa capacité de travail. Sur le plan somatique, il ressort du dossier que S.________ souffre de douleurs lombaires chroniques qui l'empêchent d'effectuer toute activité impliquant des travaux lourds ou le port de charges de plus de dix kilos. En revanche, toute activité légère, permettant un changement de position fréquent, est envisageable (cf. rapport médical du docteur C.________ du 13 mars 1996, rapport OSER du 20 janvier 1998). Selon le recourant, une nouvelle appréciation médicale de la situation s'imposerait dès lors que le rapport OSER a été rendu en 1998 et ne permettrait pas une estimation actuelle des circonstances. Il n'allègue toutefois aucune modification de son état de santé sur le plan somatique, laquelle ne découle du reste pas des pièces médicales plus récentes, telles le rapport des docteur D.________ (du 22 novembre 2001), l'avis du Professeur E.________ (du 30 octobre 2001) ou encore celui du docteur C.________ (du 7 novembre 2001). On rappellera en outre que seul est déterminant en l'occurrence l'état de fait au moment où la décision litigieuse a été rendue, à savoir le 11 octobre 2001 (cf. ATF 121 V 366 consid. 1b et la référence). Au vu des constatations médicales relatives à l'état de santé physique du recourant, on peut donc raisonnablement exiger de lui qu'il mette à profit sa capacité de travail dans une activité adaptée. 
 
Dans ces circonstances, c'est à bon droit que les premiers juges ont considéré que le recourant ne souffre pas d'une atteinte à la santé au sens de l'art. 4 LAI (dans sa version en vigueur jusqu'au 31 décembre 2002). Partant, le recours est mal fondé. 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce : 
1. 
Le recours est rejeté. 
2. 
Il n'est pas perçu de frais de justice. 
3. 
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal des assurances du canton de Vaud et à l'Office fédéral des assurances sociales. 
Lucerne, le 9 décembre 2003 
Au nom du Tribunal fédéral des assurances 
La Présidente de la IVe Chambre: La Greffière: